Et que vive la parole des auteurs
Pour célébrer les 30 ans du Festival national de théâtre amateur de Narbonne, l’équipe organisatrice,
le Théâtre des Quatre Saisons (TQS), a initié une rencontre, le 3 juillet 2012, avec des auteurs de
théâtre de renommée nationale et internationale. Pour honorer la parole des auteurs, une lecture de
rue a également permis aux habitants de la ville de Narbonne d’entendre des textes de théâtre
contemporain. Des dizaines de comédiens, venus des quatre coins de la France, ont investi des lieux
de la cité, symboles d’une histoire mais aussi d’une urbanité contemporaine. Les auteurs ont joué la
solidarité et la fraternité en restant disponible tout au long de la journée sur les lieux de lecture. Cour
de la Madeleine, une rencontre-discussion avec les 7 auteurs, animée par Guy-Michel Carbou,
metteur en scène et comédien du TQS, et Patrick Schoenstein, président de la FNCTA, a permis de
prolonger la réflexion sur l’état du théâtre aujourd’hui.
Les 7 auteurs invités se sont prêtés au jeu d’une interview.
Lecture dans la Cour Saint-Eutrope,
Aujourd’hui Martine de Emmanuel Darley
Emmanuel Darley
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
La première fois qu’une compagnie mettait en scène un de mes textes, Pas bouger, éditée chez Actes
Sud en 2000. Je suis allé les voir à Grenoble. C’était superbe.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
C’est un endroit de vrais curiosités où les gens vont le plus chercher des textes. C’est pas parce qu’on
est pro qu’on fait de bonnes choses et inversément qu’on est amateur qu’on fait de mauvaises
choses. On trouve de belles surprises dans le théâtre amateur.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
Lire des textes, beaucoup, en langue étrangère aussi, de toutes les époques. Et de la curiosité, c’est le
sel du théâtre. Cela vaut pour les pros et les amateurs.
Lecture au Jardin du Musée,
La patiente de Anca Visdei
Anca Visdei
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
Je ne m’en souviens jamais, il y en a eu beaucoup. C’est avec la compagnie La boîte à sardines de
Saint Nazaire, pour ElviraAtroce fin d’un séducteur. Je viens de les retrouver après 20 ans et 2
pièces. Nous sommes restés amis.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
Il est un espace de liberté pour les auteurs. On peut travailler avec une plus grande ditribution, il
laisse place à plus de réflexion. Il est aussi un banc d’essai.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
Etre audacieux et choisir des textes de qualité dans leur intérêt et celui des auteurs.
Lecture sur la Via Domitia – Place de l’Hôtel de ville,
Le mental de la reine de Victor Haïm
Victor Haïm
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
En 1961, je venais d’écrire une pièce. Le théâtre de la Chimère de Clichy m’a appelé pour me dire
qu’il venait de tomber sur mon texte au Ministère de la Culture.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
La définition n’a pas changé. Des personnes qui ont un métier, du temps et l’amour des textes. Qui
ont besoin de s’exprimer, de dépasser une timidité, ou une envie de se montrer . C’est un théâtre un
peu marginal. Sur 5 amateurs, on repère toujours un comédien moyen, un pas mal, un bien, un
médiocre et un très bien. C’est la différence avec les comédiens professionnels.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
Surtout qu’ils ne pratiquent pas l’autosatisfaction, l’à peu près. Du travail !
Lecture dans le Jardin de l’Horreum,
Vilmouth – Loin de Vitry de Serge Valletti
Serge Valletti
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
Tout de suite, quand j’étais à Marseille. J’avais écrit une pièce et loué une première fois un théâtre
puis une autre salle. Puis j’ai entendu parlé du festival de théâtre non professionnel créé par Antoine
Bourseiller. Je lui ai demandé si je pouvais y jouer. J’ai été programmé dans la semaine. On a
sympathisé avec les amateurs. C’était dans les années 70 et le festival était la seule manifestation de
théâtre existante sur la ville.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
Hétéroclite. Du bon et du mauvais. Un théâtre divers et en nombre. Les compagnies sont trop
compartimentées : ceci est dû aux meneurs des troupes qui ont une lubie et se collent des oeillères,
ont une méconnaissance du théâtre. Mais c’est aussi un théâtre en évolution !
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
Aller voir plein de pièces même si c’est un hobbie. Parfois, il vaut mieux aller voir les autres plutôt
que répéter.
Lecture dans le Hall de la Médiathèque,
Mise à mots de Gérald Gruhn
Gérald Gruhn
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
Au collège avec La guerre de Troie n’aura pas lieu. On a eu un grand succès, j’étais amoureux d’une
des comédiennes. C’était génial ! Après un grand trou jusqu’à mon expérience dans un atelier de
théâtre en Lozère. Quand je suis arrivé dans la région, j’ai hésité entre m’inscrire dans une activité de
dessin (bof !) et le théâtre...
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
Je ne pourrais pas le définir. Je vois une telle diversité avec de vrais propositions artistiques. Ca se
définit pas, ça part dans tous les sens. Ce qui est sûr, c’est qu’on y trouve le mot amour. C’est aussi
un art d’équipe, une communion d’émotions.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
Aller ensemble vers l’amour du texte, et réunir des forces artistiques qui permettent à la pièce de
prendre des proportions démesurées. C’est comme si l’on poussait un gros caillou, seul c’est
impossible mais à plusieurs et si tout le monde va dans la même direction, alors cela devient
possible.Il est aussi important de se respecter dans le travail.
Dernier conseil : avoir un metteur en scène qui sache ou pas faire, mais qui a une vision et qui nous
donne la direction à suivre.
Lecture dans la Cour Saint-Eutrope,
Les affreuses de Pierre Guillois
Pierre Guillois
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
Quand je suis arrivé à Bussang au théâtre du Peuple. Avant j’avais travaillé deux ans avec des
amateurs qui ne connaissaient rien au théâtre. Mais à Bussang les amateurs, amoureux du théâtre,
viennent pour partager le théâtre avec des professionnels.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
Des gens qui n’en font pas un métier et qui ont l’amour du théâtre.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
N’essayez pas d’imiter les professionnels. Soyez plus libres. Affranchissez-vous des lieux de
représentation. Faite autre chose ailleurs que dans les théâtres. Il n’ya pas d’enjeux économiques ni
institutionnels, que des enjeux artistiques.
Lecture dans la Cour d’honneur de la mairie,
Côté Courtes de Jean-Paul Alègre
Jean-Paul Alègre
Quelle a été votre première rencontre avec le théâtre amateur ?
Dans les années 80, avec ma pièce C’est nous les loups. Elle était beaucoup jouée dans le cadre
scolaire et dans les compagnies de lycée. Je me suis rendu compte quil existait un désir, une grande
curiosité, une passion pour le théâtre. C’est un faisceau d’amateurs, un patchwork de compagnies
qui m’ont fait connaître un théâtre amateur que je ne connaissais pas.
Comment définiriez-vous le théâtre amateur ?
Un théâtre de désir, de passion avec des gens qui choisissent de passer une grande partie de leur vie
pour servir les mots d’un autre, et de partager un même univers.
Quels conseils donneriez-vous à de jeunes amateurs de théâtre qui souhaitent créer leur
compagnie ?
En montant une troupe, les jeunes amateurs se rendront un fier service. Ils apprendront à vivre en
démocratie. Ils peuvent aussi prendre exemple sur des amis sportifs. Ils gagneront en s’imposant de
la rigueur, de l’entraînement et en se persuadant qu’ils vont gagner. Et s’ils le font, qu’ils le fassent à
fond.
Propos recueilli par Rachel Tallieu
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