LES INFORMATIONS EXTRA-FINANCIÈRES ENVIRONNEMENTALES
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MEMOIRE
Master Professionnel de Droit de l’Environnement, de la Sécurité, et de la Qualité
dans les entreprises.
Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.
LES INFORMATIONS
EXTRA-FINANCIERES
ENVIRONNEMENTALES
BASTIEN BURIN
Sous la direction de M. Jean-Pierre DESIDERI.
Tuteur, M. Bernard HIRON.
LES INFORMATIONS EXTRA-FINANCIÈRES ENVIRONNEMENTALES
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SOMMAIRE
INTRODUCTION………………………..……………………..….2
PARTIE I Les informations extra-financières environnementales
dont s’est emparé le droit……………………………………….8
PARTIE II Les informations extra-financières environnementales
issues d’une démarche volontaire……………………...……...32
CONCLUSION………….……………………...………….…….56
ANNEXES………………………………………………………57
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………..70
TABLES DES MATIERES………………………………………...76
LES INFORMATIONS EXTRA-FINANCIÈRES ENVIRONNEMENTALES
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INTRODUCTION
« Les peuples auront pitié de nous plus tard lorsqu’ils auront tiré parti
de la lumière et de la chaleur du soleil, pitié de nous qui extrayons si
péniblement notre éclairage et notre combustible des entrailles du sol
et qui gaspillons le charbon sans souci des générations à venir. Quand
donc l’homme, industrieusement économe, apprendra-t-il à capter, à
canaliser sur tous les points ardents du globe la chaleur intempestive
ou superflue ? On y viendra ! On y viendra, continuait-il
sentencieusement. On y viendra quand le globe commencera de se
refroidir, car c’est alors aussi que l’on commencera à manquer de
charbon.»
André Gide, « Les nouvelles nourritures terrestres », 1935.
1. En 1935, André Gide avait déjà perçu les prémisses des problématiques
énergétiques du XXIème siècle. S’il a fait erreur sur l’élément déclencheur du
développement des énergies renouvelables, troquant l’actuel réchauffement
climatique contre un refroidissement du globe, il avait déjà décelé les limites du
système qui fonctionne sur l’épuisement des ressources naturelles non renouvelables.
Plus étonnant, il évoquait « le souci des générations à venir », qui sera conceptualisé
bien plus tard dans le développement durable.
2. L’émergence des préoccupations environnementales n’a par la suite eu de
cesse de s’accroître. Le premier « Sommet de la Terre » à Stockholm en 1972 portait
au rang de préoccupation internationale les questions environnementales ; au même
moment paraissait le rapport Meadows « Halte à la croissance », commandé par le
Club de Rome qui alertait sur les conséquences de la croissance économique et
démographique ; enfin le développement durable – traduction française du sustainable
development – naissait sous la plume de la ministre de l’environnement norvégienne,
Madame Brundtland, dans son rapport « Our common future1 » daté de 1987. Le
développement durable est « un développement qui répond aux besoins des
1 http://www.agora21.org/dd.html
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3
générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à
répondre aux leurs ».
3. On l’a vu, le souci des générations futures existait avant ce rapport. Le
concept de gestion durable a lui aussi été découvert il y a bien longtemps par un
allemand, Hans Carl von Carlowitz qui théorisa en 1713 la gestion durable des
ressources forestières2. La nouveauté du concept de développement durable, c’est
qu’il s’appuie sur trois piliers indissociables : l’économie, le social, et
l’environnement. Privilégier l’un c’est délaisser l’autre, et surtout, rompre le fragile
équilibre qui les lient. L’ère industrielle a adulé l’économie, délaissé le social et
oublié l’environnement, ce n’était pas « durable ».
4. Les preuves n’ont pas tardés à s’accumuler, des activités qui ne cherchent
qu’à satisfaire l’économie ont tôt fait de causer des dommages plus ou moins
réversibles dont la diversité n’a d’égale que la gravité : pollution des cours d’eau et
des nappes phréatiques, pollution de l’air, pluies acides … autant de symptômes qui
continuent à perdurer. Ainsi la Chine souffre de ces maux, alors qu’elle est dotée d’un
arsenal juridique qui pourrait faire arme égale avec notre arsenal européen, mais les
appliquer trop rigoureusement aurait pour effet de freiner le développement
économique. Ces dommages environnementaux ne sont pas l’apanage des
« économies émergentes », puisque la France en souffre aussi. En Guyane les activités
d’orpaillages clandestines polluent les fleuves au mercure. C’est l’effet du
déséquilibre existant entre les trois piliers du développement durable ; la ressource
environnementale est protégée, mais elle laisse les guyanais sans ressources, sans
activités – le pilier social est négligé. Le développement durable a été très bien pris en
compte par des conférences internationales et des sommets de chefs d’Etat, en somme
de la « soft law ».
5. La prise de conscience environnementale s’est poursuivie, au gré des
catastrophes écologiques, incidents industriels3, des marées noires4, de la prise de
2 Hans Carl von Carlowitz, « Sylvicultura oeconomica, oder haußwirthliche Nachricht und
Naturmäßige Anweisung zur wilden Baum-Zucht», 1713.
3 Seveso (1976), Bhopal (1984), Seveso, AZF (2001), l’usine pétrochimique de Jilin (2005).
4 Torrey Canyon (1967), Amoco Cadiz (1978), Exxon Valdez (1989), Erika (1999), Prestige (2002).
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conscience du réchauffement climatique5 et du combat contre les gaz à effet de serre6.
L’environnement, souvent oublié, non considéré, naviguant de res nullius à res
communis, a fait peu à peu son apparition dans le droit7. Le ministère chargé de la
protection de la nature et de l’environnement est créé en 1971, ses prérogatives ont été
élargies jusqu’à atteindre son point culminant en 2007 en devenant désormais le
ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement
du territoire. La réglementation environnementale n’a de cesse de s’étendre, sous
l’impulsion de l’Union européenne8. Les entreprises respectent scrupuleusement ces
obligations aux sanctions souvent dissuasives.
6. L’environnement est devenu un réel enjeu financier pour les entreprises et
leurs investisseurs. Les proportions que peuvent prendre l’apurement d’un passif
environnemental, la remise en état de sites pollués ou la mise en œuvre de
réglementations environnementales9 sont autant d’informations environnementales
qui sont de nature à éclairer la situation d’une entreprise.
7. Le temps où le marché – les marchés boursiers pour être précis – ne
s’intéressait qu’à des données économiques et comptables est révolu. Les
informations financières sont désormais accompagnées d’information extra-
financière, à savoir l’environnement, le social, le sociétal et la gouvernance
d’entreprise. C’est un réel bouleversement des informations circulant sur le marché.
Les informations financières sont évaluées par les agences de notation financière,
apparues aux Etats-Unis au début du XXème, et en France avec la loi du 14 décembre
1985 qui a ouvert le marché du papier ; un livre blanc du ministère de l’économie qui
prônait la déréglementation du système financier, avait fait apparaître la question de
l’appréciation du risque pour les investisseurs. La notation apparaissait comme un
élément structurant du marché10, qui permettait de proposer aux investisseurs des
produits financier aux risques évalués par des agences de notation financière. Le
5 Le deuxième Rapport d’évaluation du GIEC : « Changements climatiques 1995 » indique « qu’un
faisceau d’éléments suggère une influence perceptible de l’homme sur le climat global ».
6 Protocole de Kyoto.
7 Premier texte de droit de l’environnement, le décret impérial de 1810 qui soumettait à autorisation
préalable le fonctionnement des ateliers susceptibles d'occasionner des gênes pour le voisinage.
8 Par exemple le règlement REACH 1907/2006 n’aurait jamais vu le jour dans une législation
nationale.
9 Objectif de 120g.CO2/km en 2012 pour la moyenne constructeur européenne, dont les modalités sont
en négociations.
10 Jean-Pierre Mattout, Stéphane Mouy, « La notation », Bulletin Joly Bourse et produits financiers, n°
5, septembre-octobre 1994, p. 441-458.
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