Editorial Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur tsi.revuesonline.com Les systèmes intégrés sur une puce de silicium, ou System-on-Chip (SoC), intègrent aujourd’hui une importante variété de blocs et de fonctions. Outre les équipements informatiques traditionnels et les équipements nomades spécialisés comme les lecteurs MP3, les lecteurs/enregistreurs DVD, on assiste dans le domaine des équipements mobiles à une intégration croissante du nombre de fonctions, pour des applications de plus en plus complexes. Les consoles de jeux, les appareils photo et caméscopes numériques, les jouets, les téléphones portables et les PDA en sont les exemples les plus probants. Par ailleurs, si l’on en juge par les travaux de recherche et développement, les nouveaux produits et les nouvelles applications, le domaine des réseaux d’équipements mobiles est en pleine expansion. Sous cette dénomination, outre les réseaux de téléphonie et d’internet, fleurissent toutes sortes de réseaux tels que des systèmes pour le relevé des compteurs d’eau, pour la surveillance du trafic autoroutier, pour la surveillance des bâtiments et biens publics, pour la mesure et l’observation de phénomènes naturels, pour la traçabilité des biens et consommables, pour la gestion des équipements domotiques, etc. Tous ces systèmes ont en commun des architectures logicielle et matérielle complexes qui doivent respecter des contraintes fortes de dissipation, d’autonomie et d’encombrement. Pour la partie matérielle, on trouve communément différents processeurs (microcontrôleurs, microprocesseurs, processeurs de traitement du signal), de la mémoire, des circuits dédiés (ASIC), parfois de la logique reconfigurable, mais aussi des parties analogiques, radio fréquence et optoélectroniques ainsi qu’un système de gestion de l’alimentation. Pour la partie logicielle, les SoCs intègrent des couches basses qui prennent la forme de pilotes très liés au matériel, un système d’exploitation dont la complexité est très variable en fonction des applications, parfois une machine virtuelle, et bien sûr des piles de protocoles pour la communication et de nombreux logiciels applicatifs. La maîtrise et la réduction de la consommation des équipements électroniques en général et de l’informatique embarquée dans les systèmes mobiles en particulier, sont essentielles. En effet, l’évolution des équipements conduit à augmenter leurs fonctionnalités et leurs performances pour rendre les produits plus attractifs, sans pour autant augmenter le coût, ni sacrifier l’autonomie, qui est une caractéristique commerciale clé des produits mobiles, ni augmenter la dissipation qui peut causer des problèmes thermiques et de fiabilité et nécessiter des systèmes de refroidissement onéreux et encombrants. Il faut aussi avoir à l’esprit que l’énergie consommée globalement par tous les équipements électroniques, nomades ou non, est considérable (voir les études de l’ADEME), et que la réduction de la consommation des systèmes électroniques constitue un enjeu majeur. 506 RSTI - TSI – 26/2007. SoC faible consommation Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur tsi.revuesonline.com Pour réduire la consommation des SoCs, il est maintenant bien admis par les chercheurs et développeurs que leur conception doit être abordée de façon globale, en incluant tous les éléments matériels et logiciels du système y compris la source d’alimentation (batterie, télé-alimentation, etc.). Pour atteindre cet objectif, nous estimons fondamental de travailler à l’élaboration, à la formalisation et à la validation de modèles de consommation d’énergie et de métriques qui s’appliquent à l’ensemble des niveaux d’abstraction d’un système intégré et qui puissent être facilement portés, réutilisés et interopérables. Ces modèles doivent dans un premier temps permettre aux concepteurs/chercheurs de mieux comprendre les phénomènes liés à la consommation d’énergie, y compris ceux qui sont en dehors de leur champ d’expertise scientifique, et doivent permettre ensuite d’élaborer des méthodes d’optimisation qui prennent en compte des paramètres caractéristiques de plusieurs niveaux d’abstraction. Si on considère les différents niveaux d’abstraction pour modéliser et concevoir un système intégré – technologique, logique, architectural, algorithmique et système – il apparaît important de créer des liens formels entre ces niveaux pour espérer traiter la réduction de la consommation dans sa globalité. En effet, la compilation faible consommation requiert des modèles de consommation des instructions de la machine cible ; l’élaboration de stratégie de contrôle statique ou dynamique de la tension d’alimentation et d’ordonnancement des tâches doit utiliser des modèles de consommation de la machine cible et des organes de contrôle/régulation de la tension ; la conception d’architectures mémoires, d’architectures multiprocesseurs, de systèmes de communication sur puce faible consommation utilise nécessairement des modèles de consommation des blocs logiques ; la conception d’un bloc logique faible consommation requiert des connaissances sur la dissipation d’énergie statique et dynamique des différentes classes de circuits logiques et des dispositifs élémentaires ; enfin, la modélisation des batteries est essentielle pour adapter le profil de consommation du système intégré aux aptitudes de la batterie et savoir garantir une qualité de service sur une durée donnée. Pour contribuer à cette thématique très pluridisciplinaire de la réduction d’énergie dans les SoCs, il nous semble important que la communauté scientifique élabore des connaissances formelles structurantes dans les domaines-clés de la modélisation de la consommation d’énergie, d’une part, et des stratégies de réduction de la consommation, d’autre part. Ces connaissances doivent aborder tous les domaines scientifiques impliqués dans la conception d’un SoC, les sources d’alimentation, la technologie, l’architecture matérielle, l’architecture logicielle, les réseaux, la programmation et les applications. La communauté scientifique française qui travaille sur cette thématique s’est organisée et est actuellement réunie dans un groupe de travail du GDR SoC-SiP intitulé « Consommation et énergie dans les SoC-SiP ». Le travail du groupe est organisé suivant 4 axes majeurs : Editorial 507 – Axe 1 : stockage et génération d’énergie Technologies des batteries et évolution, modélisation des cycles de charge, de décharge et de vie des batteries, dimensionnement, conversion DC/DC et AC/DC. – Axe 2 : architecture logicielle et matérielle faible consommation Logiciel applicatif, logiciel système, gestion dynamique de tension/fréquence, architectures spécialisées, architectures de processeur et multiprocesseur, architecture reconfigurable, logique synchrone et asynchrone, technologies, fonctions analogiques et radiofréquence. – Axe 3 : modélisation de la consommation Caractérisation et métriques de consommation, modèles d’estimation de la consommation aux différents niveaux d’abstraction (puissance, énergie statique et dynamique…) et détermination des paramètres significatifs. Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur tsi.revuesonline.com – Axe 4 : optimisations et outils pour la faible consommation Méthodes basées sur des modèles pour l’estimation et l’optimisation de la consommation, outils et flots de conception pour la faible consommation, validation des outils et des méthodes. Il est évidemment illusoire de couvrir tous ces aspects dans un seul numéro ou même un seul ouvrage. L’objectif de Méthodes et outils pour la conception de SoC faible consommation est de sensibiliser le lecteur aux multiples facettes de cette thématique et de montrer que la réduction de la consommation requiert des connaissances et compétences issues de multiples disciplines scientifiques de l’informatique et de l’électronique. Un numéro complémentaire à celui-ci paraîtra en 2008. Les communications illustrent la diversité des approches possibles pour traiter la réduction de la consommation dynamique : par domaine d’application ou classe de fonction (opérateurs arithmétiques), par niveau d’abstraction des circuits (estimation du couple énergie/délai des circuits logiques sans horloge) ou par catégorie d’architecture (structures mémoires multibancs faible consommation pour les systèmes multitâches et architectures reconfigurables faible consommation). Le premier article par J. Laurent, E. Senn et N. Julien, présente un panorama général des méthodes et outils d’estimation de la consommation de code embarqué sur processeur. Il aborde la modélisation de la consommation d’énergie à tous les niveaux de la conception (transistor, porte logique, micro-architecture, instruction, architecture, système). Le lecteur trouvera ici une synthèse des méthodes appliquées à tous les niveaux d’abstraction d’un système intégré, et une introduction aux modèles de consommation sous-jacents. Les circuits sans horloge apparaissent très prometteurs pour réduire la consommation dynamique d’énergie. L’article écrit par J. Fragoso, G. Sicard et M. Renaudin propose d’exploiter les propriétés des circuits insensibles aux délais, en particulier l’absence de transition parasite ou « glitch », pour proposer un modèle unifié de consommation d’énergie et de temps de calcul. A l’aide de ce modèle, les 508 RSTI - TSI – 26/2007. SoC faible consommation différents styles de logiques asynchrones insensibles aux délais peuvent être objectivement comparés. De même, différentes micro-architectures pour une fonction donnée peuvent être comparées en énergie et délai. L’article de H. Ben Fradj, C. Belleudy, M. Auguin et S. Icart s’intéresse à l’optimisation de la consommation d’un processeur et de sa mémoire pour un système multitâche utilisant la technique DVFS (Dynamic Voltage and Frequency Scaling). Il est montré que cette technique peut en réalité augmenter la consommation d’un système au lieu de la diminuer. Les auteurs proposent un partitionnement de la mémoire en plusieurs bancs et une politique d’allocation des tâches de façon à réduire le nombre de bancs mémoire actifs et placer le plus grand nombre de bancs mémoire dans des modes d’économie d’énergie. Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur tsi.revuesonline.com Dans le dernier article, R. David et S. Pillement présentent les différentes classes de circuits reconfigurables et les opportunités offertes pour réduire leur consommation. Les sources de dissipation d’une architecture reconfigurable, contrôle, mémorisation, opérateur de calcul, réseau d’interconnexion, sont passées en revue. La première chronique est consacrée à la consommation statique des circuits intégrés. En effet, la consommation statique due aux courants de fuite est une préoccupation importante des concepteurs et technologues, car sa proportion a augmenté ces dernières années pour atteindre couramment de l’ordre de 20 à 30 % de la consommation totale d’un circuit intégré (voire davantage pour les circuits rapides). Ch. Piguet propose une synthèse sur la consommation statique des circuits logiques en technologies avancées et les méthodes de réduction proposées. Cette synthèse présente des techniques de réduction applicables aux niveaux circuit, logique et architecture, et montre que le problème des fuites ne peut être résolu sans agir sur le « process » de fabrication (en particulier en ce qui concerne les courants statiques de grille). La chronique d’A. Tisserand aborde la conception d’opérateurs arithmétiques à faible consommation d’énergie. L’impact des principales représentations des nombres sur la consommation dynamique est discuté avec pour métrique le nombre de transitions logiques. Il apparaît que le problème de l’optimisation en consommation des opérateurs arithmétiques nécessite de prendre conjointement en compte la représentation des nombres, leur précision, les algorithmes de calcul et les performances en vitesse. Nous espérons que cet échantillon d’articles permettra aux lecteurs d’appréhender toute la complexité de la problématique de réduction de la consommation dans les SoCs, et qu’il contribuera au développement de cette thématique de recherche stratégique. Marc Renaudin, INPG - TIMA, Grenoble Nathalie Julien, LESTER, Lorient