1 UNIVERSITE PARIS XII VAL-DE-MARNE FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL ****************** ANNEE 2007 N° THESE POUR LE DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Médecine Générale ------------- Présentée et soutenue publiquement le à BORDEAUX Par Olivier AOUN Né le 25 août 1980 à SARBA-KESROUAN (LIBAN) Elève de l’Ecole du Val de Grâce ------------- TITRE : Epidémiologie des infections cérébro-méningées chez les voyageurs hospitalisés en Ile de France. PRESIDENT DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA M. le Pr Michel LE BRAS BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE DIRECTEUR DE THESE : M. le Pr Christophe RAPP Signature du Cachet de la bibliothèque Président de thèse universitaire 2 A mon père, tu seras toujours dans notre cœur, A ma mère, merci de ton amour intarissable, A mon frère, merci de ton éternel soutien, A Caroline et Margaux, avec tendresse, A mes grands-parents, que Dieu vous bénisse, A mes amis, votre aide est inestimable, A mes enseignants, je vous dois énormément, Et à mon Ecole de Santé Navale. Mari transve mare, hominibus semper prodesse 3 A Monsieur le Médecin Chef des Services Hors Classe Thierry DEBORD Professeur Agrégé du Val de Grâce Chef du Service des Maladies Infectieuses et Tropicales de l’HIA Bégin Chevalier de la Légion d’Honneur Chevalier de l’Ordre National du Mérite Nous tenons à vous exprimer notre reconnaissance pour le semestre effectué dans votre service. Vous nous avez fait partager votre passion pour les maladies infectieuses et tropicales. Veuillez accepter l’expression de notre profonde gratitude. 4 ECOLE DU VAL DE GRACE A Monsieur le Médecin Général Inspecteur Jean-Etienne TOUZE Directeur de l’Ecole du Val de Grâce Professeur Agrégé du Val de Grâce Officier de la Légion d’Honneur Officier de l’Ordre National du Mérite Chevalier des Palmes Académiques Récompenses pour travaux scientifiques et techniques - échelon vermeil - *** A Monsieur le Médecin Général Inspecteur Frédéric FLOCARD Directeur Adjoint de l’Ecole du Val de Grâce Professeur Agrégé du Val de Grâce Chevalier de la Légion d’Honneur Officier de l’Ordre National du Mérite Récompense pour travaux scientifiques et techniques Médaille d’Honneur du Service de Santé des Armées 5 ECOLE DU SERVICE DE SANTE DES ARMEES DE BORDEAUX A Monsieur le Médecin Général Gérard CAMILLERI Médecin des Hôpitaux des Armées Officier de la Légion d’Honneur Officier de l’Ordre National du Mérite Commandant l’Ecole du Service de Santé des Armées de Bordeaux *** A Monsieur le Médecin Chef des Services Jean-François LAGRANGE Chevalier de la Légion d’Honneur Chevalier de l’Ordre National du Mérite Commandant en Second et Chef de Corps de l’Ecole du Service de Santé des Armées de Bordeaux 6 RESPONSABLES PEDAGOGIQUES A Monsieur le Médecin Chef des Services Hors Classe Bernard BAUDUCEAU Professeur Agrégé du Val de Grâce Chef du Service d’Endocrinologie de l’HIA Bégin Chevalier de la Légion d’Honneur Chevalier de l’Ordre National du Mérite Référent pédagogique militaire de l’HIA Bégin *** A Monsieur le Professeur Claude ATTALI Coordonnateur du Département Universitaire d’Enseignement et de Recherche en Médecine Générale de la Faculté de médecine de CRETEIL *** A Monsieur le Docteur Jean-Louis LEMOINE Référent pédagogique de la Faculté de médecine de CRETEIL 7 A NOTRE PRESIDENT DE THESE : Monsieur le Professeur Michel LE BRAS Professeur des Universités Praticien Hospitalier Ancien Chef du service des Maladies Infectieuses et Tropicales Hôpital Saint-André Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux Nous sommes particulièrement sensibles à l’honneur que vous nous faites en acceptant de présider ce Jury. Vous nous avez fait découvrir et aimer l’univers de la médecine tropicale. Veuillez accepter l’expression de notre profonde gratitude. 8 A NOTRE JUGE : Madame le Professeur Christiane BEBEAR Doyen de la Faculté de Médecine Hyacinthe VINCENT Professeur des Universités Praticien Hospitalier Chef de Service du Laboratoire de Bactériologie -Virologie Hôpital Pellegrin Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux Malgré vos très nombreuses obligations et responsabilités, vous nous faites l’honneur de juger ce travail. Soyez assurée de notre gratitude et de nos sentiments respectueux. 9 A NOTRE JUGE : Monsieur le Professeur Jean-Marc ORGOGOZO Professeur des Universités Praticien Hospitalier Chef de Service de Neurologie Hôpital Pellegrin Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux Vos connaissances et votre sens de l’enseignement nous ont fait découvrir et aimer la neurologie. Veuillez trouver ici l’expression de notre sincère reconnaissance. 10 A NOTRE JUGE : Monsieur le Docteur Hervé DUTRONC Praticien Hospitalier Fédération des Maladies Infectieuses et de Médecine Tropicale Hôpital Pellegrin Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux Vous avez su par votre dévouement et votre encadrement nous faire découvrir et partager votre passion pour les maladies infectieuses. Soyez assuré de notre profond respect. 11 A NOTRE DIRECTEUR DE THESE : Monsieur le Médecin en Chef Christophe RAPP Professeur Agrégé du Val de Grâce Service des Maladies Infectieuses et Tropicales Hôpital d’Instruction des Armées Bégin Saint-Mandé Avec beaucoup de gentillesse et de bienveillance, vous nous avez guidé au cours de ce travail. Par votre disponibilité et votre expérience, vous avez beaucoup contribué à son élaboration. Puissiezvous être récompensé par l’accueil que lui réserveront vos pairs. 12 TABLE DES MATIERES 1. PREAMBULE Pages ............................................................................................................................. 2. INTRODUCTION .................................................................................................................... 18 20 3. OBJECTIFS .................................................................................................................................. 21 4. ETAT DE L’ART ...................................................................................................................... 22 4.1. Infections cérébro-méningées de l’adulte en France ...................................................... 22 4.1.1. Les méningites ............................................................................................................................. 22 4.1.1.1. Les méningites bactériennes ................................................................................................. 22 4.1.1.2. Les méningites virales ............................................................................................................ 22 4.1.2. Les méningo-encéphalites ........................................................................................................ 23 4.1.3. Les abcès cérébraux .................................................................................................................... 24 4.1.3.1. Agents responsables ................................................................................................................ 24 4.1.3.2. Mécanisme ................................................................................................................................. 24 4.1.3.3. Létalité ........................................................................................................................................ 24 4.2. Infections cérébro-méningées de l’adulte au retour de voyage .................................. 25 4.2.1. En France métropolitaine .......................................................................................................... 25 4.2.2. A l’échelon international ........................................................................................................... 25 4.2.2.1. Infections neurologiques au retour de voyage ................................................................ 26 4.2.2.2. Infections cérébro-méningées des voyageurs .................................................................. 26 4.2.2.2.1. Etudes consacrées aux pathologies d’importation ...................................................... 26 4.2.2.2.2. Etudes consacrées aux fièvres chez les voyageurs ..................................................... 27 5. PATIENTS ET METHODES .......................................................................................... 30 5.1. Cadre et type d’étude .................................................................................................................. 30 5.2. Critères d’inclusion ...................................................................................................................... 30 5.2.1. Critère démographique .............................................................................................................. 30 5.2.2. Critères cliniques ......................................................................................................................... 30 5.2.3. Critères paracliniques ................................................................................................................. 30 13 5.2.4. Critères chronologiques ............................................................................................................. 31 5.3. Critères de non inclusion ........................................................................................................... 31 5.4. Sélection des dossiers ................................................................................................................... 32 5.5. Recueil des données ..................................................................................................................... 32 5.5.1. Paramètres socio-démographiques ......................................................................................... 32 5.5.2. Paramètres du voyage ................................................................................................................ 32 5.5.2.1. Avant le séjour .......................................................................................................................... 32 5.5.2.2. Pendant le séjour ..................................................................................................................... 32 5.5.2.3. Après le séjour .......................................................................................................................... 33 5.5.3. Paramètres cliniques ................................................................................................................... 33 5.5.4. Paramètres biologiques utiles au diagnostic étiologique ................................................. 33 5.5.4.1. Données du sang ...................................................................................................................... 33 5.5.4.2. Données du liquide céphalorachidien ............................................................................... 33 5.5.4.3. Autres .......................................................................................................................................... 33 5.5.5. Paramètres radiologiques .......................................................................................................... 34 5.5.6. Paramètres électrophysiologiques .......................................................................................... 34 5.5.7. Diagnostic de sortie .................................................................................................................... 34 5.5.8. Paramètres évolutifs ................................................................................................................... 34 5.6. Analyse .............................................................................................................................................. 34 6. RESULTATS ............................................................................................................................... 35 6.1. Caractéristiques socio-démographiques .............................................................................. 35 6.2. Caractéristiques du voyage ....................................................................................................... 36 6.2.1. Avant le séjour ............................................................................................................................. 36 6.2.2. Pendant le séjour .......................................................................................................................... 36 6.2.3. Après le séjour .............................................................................................................................. 38 6.2.4. Prise en charge ............................................................................................................................. 38 6.2.5. Automédication ............................................................................................................................ 41 6.3. Caractéristiques cliniques ......................................................................................................... 41 6.3.1. Symptômes généraux et fonctionnels inauguraux ............................................................. 41 6.3.2. Signes cliniques ........................................................................................................................... 42 6.3.3. Comparaison des patients atteints de paludisme avec les patients infectés par un autre agent infectieux ........................................................................................................................................ 43 14 6.4. Caractéristiques biologiques .................................................................................................... 45 6.4.1. Données de l’hémogramme ...................................................................................................... 45 6.4.2. Données de la biochimie ........................................................................................................... 45 6.4.2.1. Syndrome inflammatoire ........................................................................................................ 45 6.4.2.2. Fonction hépatique .................................................................................................................. 46 6.4.2.3. Fonction rénale ........................................................................................................................ 46 6.4.3. Données des recherches d’hématozoaires de Plasmodium falciparum ....................... 47 6.4.4. Données des hémocultures ....................................................................................................... 47 6.4.5. Données des ponctions lombaires .......................................................................................... 47 6.4.6. Confirmation du diagnostic à l’aide de l’analyse du liquide céphalorachidien ........ 48 6.4.7. Données des prélèvements périphériques (sang, gorge, selles et urines) .................... 48 6.5. Caractéristiques radiologiques ................................................................................................ 49 6.6. Caractéristiques électrophysiologiques ............................................................................... 49 6.7. Diagnostics étiologiques retenus ............................................................................................. 49 6.7.1. Distribution des étiologies confirmées selon le tableau clinique .................................. 49 6.7.2. Profil des étiologies indéterminées ........................................................................................ 52 6.8. Paramètres évolutifs .................................................................................................................... 53 7. DISCUSSION ............................................................................................................................... 54 7.1. Commentaires des résultats ...................................................................................................... 54 7.1.1. Généralités ..................................................................................................................................... 54 7.1.2. Fréquence des infections cérébro-méningées ...................................................................... 54 7.1.3. Profil des voyageurs et caractéristiques du voyage ........................................................... 54 7.1.4. Présentation clinique .................................................................................................................. 55 7.1.5. Parcours de soins ......................................................................................................................... 55 7.1.5.1. Sur le lieu de voyage ............................................................................................................... 55 7.1.5.2. Au retour .................................................................................................................................... 55 7.1.6. Examens paracliniques .............................................................................................................. 56 7.1.7. Panorama étiologique ................................................................................................................. 56 7.1.8. Morbidité et mortalité ................................................................................................................ 59 7.2. Limites du travail ......................................................................................................................... 60 7.3. Prise en charge diagnostique d’une infection cérébro-méningée d’importation chez l’adulte ....................................................................................................................................................... 61 15 7.3.1. Données cliniques ....................................................................................................................... 61 7.3.1.1. Evaluation de la gravité et gestes d’urgence ................................................................... 61 7.3.1.2. Interrogatoire du patient et de son entourage ................................................................. 62 7.3.1.3. Examen clinique ....................................................................................................................... 68 7.3.2. La ponction lombaire ................................................................................................................. 72 7.3.2.1. Orientation diagnostique suivant l’aspect du LCR ......................................................... 72 7.3.2.2. Orientation diagnostique en fonction de l’analyse du LCR ........................................ 73 7.3.2.2.1. Situation facile ...................................................................................................................... 73 7.3.2.2.2. Situation difficile .................................................................................................................. 73 7.3.2.2.2.1. Pléiocytose avec prédominance de polynucléaires neutrophiles .................. 73 7.3.2.2.2.2. Pléiocytose avec prédominance de lymphocytes ................................................ 74 7.3.2.2.2.3. Pléiocytose avec une formule panachée ................................................................. 77 7.3.2.2.2.4. Pléiocytose avec prédominance de polynucléaires éosinophiles .................. 77 7.3.2.2.2.5. Cellularité normale ........................................................................................................ 78 8. CONCLUSION ........................................................................................................................... 82 9. BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 83 10. ANNEXES ................................................................................................................................... 90 10.1. Annexe 1 : Principaux agents pathogènes responsables d’infections cérébroméningées ................................................................................................................................................. 90 10.2. Annexe 2 : Destinations des 56 voyageurs ........................................................................ 92 10.3. Annexe 3 : Répartition des pathogènes suivant les activités et terrains à risque ....................................................................................................................................................................... 93 11. RESUME 95 ...................................................................................................................................... 12. SUMMARY ................................................................................................................................ 96 16 LISTE DES ILLUSTRATIONS Pages 1) Tableaux : Tableau 1 : Estimation de l’incidence de certains événements de santé pour un séjour d’un mois dans un pays en développement ............................................................................................... 19 Tableau 2 : Manifestations cliniques révélatrices d’une infection cérébro-méningée ...... 31 Tableau 3 : Répartition des régions visitées par les patients ..................................................... 36 Tableau 4 : Caractéristiques socio-démographiques des voyageurs ainsi que celles du séjour suivant leur destination .......................................................................................................................... 37 Tableau 5 : Fréquence des symptômes inauguraux chez les 56 patients ............................... 42 Tableau 6 : Fréquence des différents signes cliniques retrouvés à l’examen à l’admission ou dans les premières 24 heures ............................................................................................................... 43 Tableau 7 : Caractéristiques cliniques des cas de paludisme par rapport aux autres étiologies .................................................................................................................................................... 44 Tableau 8 : Caractéristiques biologiques des cas de paludisme par rapport aux autres étiologies .................................................................................................................................................... 46 Tableau 9 : Répartition du type de cellularité du LCR suivant l’étiologie ........................... 47 Tableau 10 : Fréquence des critères OMS 2000 chez les 12 cas de paludisme grave ....... 50 Tableau 11 : Distribution des étiologies suivant la région visitée ........................................... 51 Tableau 12 : Distribution des étiologies suivant le profil du voyageur ................................. 52 Tableau 13 : Détails des séquelles observées chez les patients ................................................ 53 Tableau 14 : Distribution géographique des germes à tropisme neurologique .................... 63 Tableau 15 : Agents responsables d’ICM et délai d’incubation inférieur à 15 jours ......... 64 Tableau 16 : Agents responsables d’ICM et délai d’incubation supérieur à 15 jours ....... 65 Tableau 17 : Sites de veille sanitaire multilingues disponibles sur Internet ......................... 66 Tableau 18 : Répartition des pathogènes suivant les activités à risque ................................. 66 Tableau 19 : Répartition des pathogènes suivant les animaux à risque ................................. 67 Tableau 20 : Orientation diagnostique devant des signes cliniques extra-neurologiques électifs ........................................................................................................................................................ 69 Tableau 21 : Orientation diagnostique devant des signes biologiques associés à une ICM 76 Tableau 22 : Etiologies des méningites à éosinophiles .............................................................. 78 17 2) Les figures : Figure 1 : Parcours de soins des 20 patients ayant présenté des symptômes lors du séjour ........................................................................................................................................................... 38 Figure 2 : Prise en charge des patients consultant aux urgences après le séjour ................. 40 Figure 3 : Prise en charge des patients consultant au cabinet de médecine générale après leur retour ........................................................................................................................................................... 40 Figure 4 : Prise en charge initiale d’une infection cérébro-méningée chez un voyageur ... 71 Figure 5 : Orientation diagnostique devant une méningite lymphocytaire à examen direct négatif au Gram ....................................................................................................................................... 75 Figure 6 : Arbre décisionnel selon les caractéristiques du LCR .............................................. 79 18 1. PREAMBULE La médecine des voyages, qui n’est pas stricto sensu reconnue comme une spécialité médicale en France, est une discipline d’individualisation récente [12,75]. Son avènement remonte à 1991, date de la création de la Société Internationale de Médecine des voyages (ISTM) [75]. Son champ d’action, très vaste, couvre la prévention des nombreux risques liés aux voyages [75,88]. Ces risques ne se résument pas qu’aux risques infectieux, comme en témoignent les résultats concordants des nombreuses études consacrées aux causes de morbidité et de mortalité en voyage [40, 74, 86, 88]. En effet, les maladies infectieuses ne représentent que 1 à 2 % des problèmes de santé chez les voyageurs, loin derrière les accidents, les traumatismes et la pathologie cardio-vasculaire [40,38,74,86,88]. Initialement dévolue à la protection des voyageurs se rendant des pays industrialisés vers les pays du Sud, la médecine des voyages s’est élargie à l’ensemble des risques, quel que soit le voyageur et quel que soit le voyage. Les problèmes de santé survenant pendant le voyage et après le retour (pathologie dite d’importation) représentent également l’une de ses missions prioritaires [74,75]. En deux décennies, cette discipline initialement centrée sur les maladies tropicales, est devenue pluridisciplinaire, en réponse à l’explosion et à la diversification des voyages que l’on peut résumer en quelques chiffres : au niveau planétaire, en 2006, 842 millions de voyageurs ont été recensés par l’Organisation du Tourisme Mondial soit une augmentation de près de 4,4 % par rapport à 2005 [92]. Plus de 50 millions de personnes se rendent chaque année dans des pays en voie de développement dont presque 4 millions consultent un médecin à l’étranger ou au retour [35]. En France, chaque année, plus de 20 % de la population française adulte effectue au moins un voyage à l’étranger et 2 à 3 % des Français sont expatriés (séjour supérieur à six mois) [42]. Ainsi, en 2006, près de 11,5 millions de Français ont séjourné à l’étranger [6]. En réponse à la multiplicité et à la diversité des problèmes de santé rencontrés chez les voyageurs, la médecine des voyages est en pleine expansion. Cependant, l’incidence des problèmes de santé du voyageur est difficile à mesurer, et quelques estimations provenant d’études anciennes méritent d’être rappelées (Tableau 1) [74,88]. 19 Tableau 1 : Estimation de l’incidence de certains événements de santé pour un séjour d’un mois dans un pays en développement [74,88] Evénement de santé Incidence (%) Problème de santé quel qu’il soit 60 Diarrhée du voyageur 40 Alitement 8 Arrêt de travail au retour 2 Hospitalisation (à l’étranger) 0,4 Evacuation sanitaire (aérienne) 0,06 Décès à l’étranger 0,001 En France, les médecins du voyage sont encore trop peu nombreux. On constate cependant une augmentation croissante de l’implication des médecins généralistes. Selon une enquête nationale effectuée en France en 1999, 41 % d’entre eux conseillent entre 10 et 30 voyageurs par an [70]. Cette demande apparaît croissante et en Allemagne, en 2000, une enquête nationale a montré que les généralistes effectuaient une moyenne de 158 consultations de médecine des voyages par an [79]. Les médecins généralistes et les urgentistes sont également de plus en plus souvent sollicités pour la prise en charge de problèmes de santé au retour. On estime en effet que 8 à 19 % des voyageurs consultent pour un problème de santé au retour de voyage [88,96]. Ces praticiens doivent donc se familiariser avec la prise en charge des grands syndromes infectieux (fièvre, diarrhée, troubles neurologiques) au retour des tropiques. La notion de voyage n’étant pas synonyme d’une affection tropicale, ils ne doivent jamais oublier d’évoquer les causes cosmopolites, largement prédominantes dans les études les plus récentes [3]. Leurs désirs et leurs besoins en formation sont réels [70]. Les travaux de recherche clinique en médecine des voyages doivent y concourir. 20 2. INTRODUCTION Les infections cérébro-méningées (ICM) regroupent l’ensemble des atteintes du système nerveux central d’origine infectieuse. Elles englobent les méningites, les encéphalites, les méningo-encéphalites1, les abcès cérébraux, mais également les manifestations neuroméningées compliquant de nombreuses infections cosmopolites ou tropicales, comme le paludisme ou les arboviroses [80]. Ces infections, très diverses, appartiennent au cadre étiologique des « urgences infectieuses de l’adulte » que tout praticien se doit de connaître. En dépit des progrès des méthodes diagnostiques (biologie moléculaire, imagerie cérébrale), leur épidémiologie, en constante évolution (immunodépression acquise ou thérapeutique, émergence de nouveaux pathogènes), reste mal connue [56]. Dans la pratique, ces pathologies inhabituelles, posent des problèmes diagnostiques et thérapeutiques complexes. Cette difficulté est renforcée par la notion de voyage, a fortiori en pays tropical, qui élargit le spectre étiologique des agents infectieux à considérer dans le diagnostic. Ces derniers comprennent les infections spécifiques connues pour leurs complications neurologiques (paludisme à Plasmodium falciparum, trypanosomoses, rickettsioses, rage, etc.) et les infections émergentes à tropisme neurologique d’individualisation récente (Hendra en Australie en 1994-1995 [62], Nipah en Malaisie et au Singapour en 1998-1999 [22], West-Nile à New-York en 1999 [59], Chikungunya à la Réunion en 2005 [69], etc.). Les médecins impliqués dans la prise en charge des voyageurs doivent donc se préparer à faire face à deux types de situations. La première est la confrontation inopinée à des pathologies non familières, graves, nécessitant une démarche diagnostique spécifique. La seconde est liée à la plus grande fréquence des causes cosmopolites favorisées par les conditions du transport et du voyage (infection à méningocoque, tuberculose, VIH), dont certaines justifient un traitement spécifique précoce. C’est l’intérêt de cette étude descriptive consacrée aux infections cérébro-méningées observées au retour d’un voyage en dehors du territoire métropolitain. 1 Nous n’envisagerons que les méningo-encéphalites infectieuses aiguës 21 3. OBJECTIFS L’objectif principal de ce travail est de décrire le spectre étiologique des infections cérébroméningées observées chez les voyageurs hospitalisés dans un service de maladies infectieuses et tropicales. L’objectif secondaire est de proposer aux médecins de première ligne (médecins généralistes, urgentistes) un algorithme décisionnel susceptible d’optimiser la prise en charge initiale de ces situations complexes. 22 4. ETAT DE L’ART 4.1. Infections cérébro-méningées de l’adulte en France Les infections cérébro-méningées de l’adulte répondent à des étiologies multiples, bactériennes, virales, parasitaires et plus rarement fongiques. Les principaux agents pathogènes concernés sont présentés en annexe 1. La distribution des agents pathogènes dépend de plusieurs facteurs : - L’âge - L’état immunitaire du sujet - La région géographique, qui influence la répartition des agents pathogènes, maladies vectorielles en particulier (paludisme, arboviroses, rickettsioses). En France, la part respective des différentes étiologies d’ICM est très imprécise. A partir des sources de données disponibles (système de surveillance, données des centres nationaux de référence, études transversales, et données du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI)), quelques chiffres peuvent être avancés concernant les méningites et encéphalites. 4.1.1. Les méningites 4.1.1.1. Les méningites bactériennes Chez l’adulte, trois agents pathogènes sont responsables de la majorité des cas de méningites purulentes : Streptococcus pneumoniae, Neisseria meningitidis et Listeria monocytogenes. La fréquence des méningites bactériennes n’est connue avec précision que pour le méningocoque (déclaration obligatoire). En 2002, selon l’étude du réseau de laboratoires hospitaliers EPIBAC, 844 cas de méningites bactériennes ont été estimés chez les sujets d’âge supérieur à 15 ans avec un taux de létalité de 27,5 %, toutes causes confondues. Le pneumocoque arrivait en tête (58,7 %), suivi du méningocoque (27 %), Listeria (6,5 %), H.influenzae (4 %) et streptocoque B (3,8 %) [66]. En 2005, 748 cas d’infections invasives à méningocoques dont 241 (32%) chez des individus âgés de plus de 20 ans ont été notifiés. Une méningite était retrouvée chez 588 patients (78,5 %) [63]. 4.1.1.2. Les méningites virales Les méningites virales de l’adulte peuvent se classer schématiquement en quatre groupes. Les méningites à Entérovirus (virus Echo, Coxsackie, poliovirus) responsables de poussées 23 épidémiques sur un fond endémique [53]. Elles sont désormais la première cause de méningite virale et sont la cause majeure très anciennement reconnue des méningites aseptiques dans tous les pays [2,20]. Les méningites accompagnant une virose connue (oreillons, rougeole, rubéole, Varicelle-Zona Virus, adénovirus) ou inaugurant une infection virale (Virus de l’Immunodéficience Humaine, Epstein-Bar Virus, Cytomégalovirus, Human Herpes Virus 6) [20], les méningites à Herpes Simplex Virus 2 (HSV-2) caractérisées par la possibilité de récurrence [48] et enfin, les causes exceptionnelles (grippe, arboviroses, chorioméningite lymphocytaire, etc.). 4.1.2. Les méningo-encéphalites Elles sont réparties en trois groupes: les méningo-encéphalites (ME) aiguës (infectieuses et post infectieuses), les encéphalites subaiguës et les affections à prions [16]. Les ME aiguës infectieuses sont liées à une atteinte directe du système nerveux central (SNC) alors que les ME post infectieuses correspondent à une réaction immunitaire dirigée à tort contre le SNC de l’hôte. Dans ces dernières affections, on ne retrouve pas habituellement de signe direct de la présence des micro-organismes dans le SNC. Les encéphalites subaiguës sont des maladies évoluant très progressivement sans épisode de souffrance cérébrale aiguë. Ce sont donc des manifestations tardives d’une infection virale initiale, constituées avant tout d’une atteinte de la substance blanche. Les affections à prions sont liées à des agents transmissibles non conventionnels et sont caractérisées par une spongiose. Seules les ME aiguës infectieuses seront envisagées dans ce travail. Jusqu'à très récemment, nous ne disposions pas en France de données épidémiologiques précises concernant la fréquence des encéphalites infectieuses. L’incidence calquée sur les données de pays similaires (USA et Royaume-Uni) était estimée autour de 1 à 1,5 cas pour 100 000 habitants et par an [56]. Selon une étude réalisée de 2000 à 2002 à partir des bases de données hospitalières (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information), l’incidence des encéphalites infectieuses chez les sujets non infectés par le VIH serait de 1,9 pour 100 000 habitants et par an. En nombre absolu, cela correspond à 800-900 cas par an chez les adultes, avec une prédominance masculine (sexe ratio H/F : 1,20). Selon la même source de données, l’étiologie des encéphalites n’était pas identifiée dans 80 % des cas. Chez les patients avec un diagnostic étiologique enregistré, la cause la plus fréquemment rapportée était une infection par Herpes Simplex Virus (5 à 13 % selon les années), puis par VaricelleZona Virus (4 à 7 %), les arbovirus se classant en troisième position (2 % toutes familles 24 virales confondues) [56]. La létalité était de 6 %, taux concordants avec les bases hospitalières des autres pays : 6,5 % pour l’Angleterre et 5,2 % aux Etats-Unis [30,46]. La part respective des encéphalites survenues chez des voyageurs n’a pas été étudiée. 4.1.3. Les abcès cérébraux Les abcès cérébraux sont rares (1 sur 10 000 hospitalisations) et leur incidence précise méconnue en France. 4.1.3.1. Agents responsables Les bactéries les plus fréquemment isolées sont les streptocoques aérobies et anaérobies (40%), Bacteroides sp et Fusobacterium (30%) et les Enterobacteriacea. Les flores mixtes sont fréquentes (en particulier Enterobacteriacea et Bacteroides fragilis). L’isolement de Staphylococcus sp est plus rare. Mycobacterium tuberculosis est observée surtout mais pas exclusivement en zone d’endémie tuberculeuse. Listeria monocytogenes est impliquée principalement dans les abcès cérébelleux. Les protozoaires et champignons s’observent uniquement chez les immunodéprimés [24]. 4.1.3.2. Mécanisme Les abcès cérébraux sont la plupart du temps liés à une infection par contiguïté (à partir d’un foyer ORL ou dentaire), une diffusion hématogène (foyer primitif pulmonaire ou cardiaque, fistules artério-veineuses, cardiopathies congénitales cyanogènes), une neurochirurgie, un traumatisme crânien ou d’origine indéterminée. Dans tous les cas, l’état neurologique peut s’aggraver brutalement par un engagement cérébelleux ou une ouverture dans les ventricules ou les espaces sous-arachnoïdiens [24,52]. 4.1.3.3. Létalité Avant les antibiotiques, la mortalité était de 90 %. Actuellement les abcès cérébraux chez les sujets immunocompétents ont un taux de mortalité de 5 à 15 % et aboutissent à des séquelles (à type de déficit focal, d’hydrocéphalie communicante ou d’épilepsie) dans 30 à 70 % des cas [24,52]. Au total, malgré le caractère parcellaire des données, les ICM sont des infections rares, en comparaison avec d’autres maladies infectieuses telles que les pneumonies qui touchent environ 400 000 personnes par an [51]. Il s’agit cependant d’infections graves, dont certaines peuvent être rapidement fatales. De surcroît, elles peuvent être responsables de séquelles fonctionnelles dont la fréquence est sous-estimée chez l’adulte. La part des ICM imputable aux voyages est inconnue en France. 25 4.2. Infections cérébro-méningées de l’adulte au retour de voyage Chez les voyageurs, les infections cérébro-méningées n’apparaissent pas au premier rang des causes de morbidité au retour de voyage [4,10,34,35,40,60]. Leur incidence est probablement sous estimée en raison de leur polymorphisme clinique, de la multiplicité des agents pathogènes en cause (Plasmodium falciparum, Neisseria meningitidis, Leptospira sp, virus West-Nile, Angiostrongylus cantonensis) et des difficultés d’isolement de nombreux agents pathogènes, virus en particulier [78]. Quels outils peut-on utiliser pour mesurer l'importance des ICM ? 4.2.1. En France métropolitaine En France, peu de données officielles sont disponibles sur les causes de morbidité ou de mortalité chez les voyageurs. Une étude récente réalisée par l’Institut National de Veille Sanitaire [42] permet de dégager quelques tendances. Les maladies infectieuses représentent seulement 1,4 % des décès à l’étranger et sont responsables de 10 % des rapatriements sanitaires quelle que soit la destination du séjour. La mortalité liée aux pathologies d’importation entre 2000-2002 a été estimée respectivement à 98 décès dont 68 décès par paludisme (69 %), neuf décès par les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes, six décès par amibiase, trois décès par encéphalite virale, trois décès par rickettsioses et fièvres récurrentes et trois décès par anguillulose. La part respective des atteintes cérébro-méningées est inconnue. 4.2.2. A l’échelon international Une recherche bibliographique, réalisée en interrogeant la banque de données Medline (cerebro-meningeal infections, meningitis, encephalitis, travel, traveler...) a permis d’identifier de nombreuses observations cliniques isolées, la description d’épidémies, quelques mises au point, mais aucune étude spécifique. En élargissant la recherche aux grandes causes de morbidité lors du voyage et aux affections fébriles des voyageurs (mots-clés : illness, disease, travel, traveler, fever), une quinzaine d’études rapportant des séries de patients ont été identifiées. 26 4.2.2.1. Infections neurologiques au retour de voyage La première, ancienne, est une étude princeps consacrée à l’épidémiologie de la pathologie du voyageur, publiée il y a 20 ans par Steffen [87]. Dans cette étude rétrospective, de plus de dix mille voyageurs, réalisée par questionnaire, les infections neurologiques, les plus fréquemment observées chez les voyageurs, étaient la poliomyélite asymptomatique (0,005 pour cent voyageurs par mois de séjour) et la poliomyélite paralysante (0,0001 %). Les méningites, les encéphalites et les infections compliquées de troubles neurologiques n’étaient pas citées. La seconde, récente, conduite par Freedman [35], a confirmé la part modeste des infections neurologiques au sein des causes de morbidité au cours du voyage. Cette étude, rétrospective, multicentrique et regroupant 30 centres spécialisés en médecine tropicale, répartis à travers le monde a inclus 17 353 patients ayant consulté de juin 1996 à août 2004 (49 % dans des centres européens), pour un problème de santé survenu dans les 10 ans au retour d’un séjour dans les tropiques. En dépit de biais de sélection (centres de référence et délai d’inclusion de 10 ans), la fréquence des troubles neurologiques a été estimée à 15/1000, loin derrière les quatre premiers syndromes identifiés : une maladie systémique fébrile (dont fièvre nue) (226/1000), une diarrhée aiguë (222/1000), une dermatose (170/1000) et une diarrhée chronique (113/1000). Parmi les affections rares, un cas de trypanosomose africaine, un cas de méningite à méningocoque et un cas d’angiostrongylose nerveuse ont été signalés. 4.2.2.2. Infections cérébro-méningées des voyageurs Faute de données spécifiques, nous avons passé en revue les différentes études signalant des ICM. 4.2.2.2.1. Etudes consacrées aux pathologies d’importation Dans l’étude de McKendrick et al, réalisée de 1983 à 2002, 2 202 voyageurs hospitalisés à leur retour dans deux services de maladies infectieuses et tropicales du Royaume-Uni ont été inclus de façon rétrospective. Trente cas d’ICM ont été diagnostiqués : sept infections invasives à méningocoque, 22 encéphalites/méningites d’origine virale sans plus de précision, et un cas de rage [58]. La série rétrospective de Roberts et al, réalisée de 1998 à 2002, dans un service de maladies infectieuses, au Royaume-Uni comportait 301 patients hospitalisés pour une pathologie de retour. Elle retrouvait un seul cas de méningo-encéphalite virale d’étiologie non précisée. Parmi les autres maladies à tropisme cérébro-méningé, étaient citées sans plus de précisions : 56 cas de paludisme à P. falciparum, 23 cas de primo infection à VIH, sept cas de dengue, 27 trois cas de typhus, deux cas de cysticercose, deux cas de fièvre typhoïde et un cas de toxoplasmose [78]. Dans une étude prospective (et en partie rétrospective), réalisée en Australie [60], qui avait comme objectif principal de comparer les causes de morbidité entre les voyageurs et les immigrés, 1 106 patients présentant une infection acquise à l’extérieur de l’Australie (Asie 56 %, Afrique 15 %, Pacifique 14 %) ont été inclus de façon mixte. Neuf cas d’infections cérébro-méningées (quatre encéphalites aiguës, quatre méningites virales et une méningite bactérienne) ont été répertoriés, représentant 1 % des 917 diagnostics posés. Dans une autre étude rétrospective, réalisée en Israël de janvier 1999 à décembre 2003 et s’intéressant aux causes d’hospitalisation chez des voyageurs, seul un cas de méningite virale a été diagnostiqué parmi les 211 patients provenant majoritairement d’Asie (48 %) et d’Afrique (34 %) [89]. Dans un travail français réalisé en 2005 sur une période de six mois, 622 voyageurs consécutifs recourant à la consultation d’urgences tropicales d’un hôpital parisien, pour un problème de santé survenu au cours ou au décours d’un séjour tropical, ont été inclus prospectivement. Parmi les maladies tropicales, qui représentaient 36 % des pathologies observées, seuls quatre cas d’ICM (neurobilharzioses) ont été individualisés [4]. D’autres grandes séries, récentes pour la plupart, consacrées aux causes de morbidité au retour de voyage, ne mentionnent aucune ICM dans leurs effectifs [40,45,71]. Ces résultats sont sujets à caution car la présentation clinique des infections à tropisme neuro-méningé signalées (paludisme, dengue, schistosomose, typhoïde, toxoplasmose, VIH, cysticercose, leptospirose, etc.) n’a pas été détaillée, minorant certainement l’importance des ICM. Enfin, il faut se rappeler que les résultats de ces études consacrées aux causes de morbidité au retour de voyage offrent des informations intéressantes qui doivent toujours être confrontées à leurs limites méthodologiques : une hétérogénéité de définitions des causes de morbidité, des biais de sélection liés aux sites d’inclusion (centres référents connus accueillant les patients les plus sévères) et un recrutement le plus souvent rétrospectif. 4.2.2.2.2. Etudes consacrées aux fièvres chez les voyageurs L’étude rétrospective de MacLean et al réalisée de 1981 à 1988 au Canada, a inclus 587 patients vus en consultation externe à l’issue de leur retour de voyage. Un seul cas de méningite a été observé sans plus de précision [55]. Dans une étude de 232 cas de fièvre au retour de voyage, réalisée par O’Brien et al, rétrospectivement de 1997 à 1998 puis prospectivement de 1998 à 1999 en Australie, cinq 28 ICM ont été observées (deux méningites et trois encéphalites aiguës) soit 2 % de l’ensemble des cas répertoriés [61]. L’étude prospective de D’Acremont et al réalisée en Suisse, de 1990 à 1998 a inclus 336 voyageurs qui se sont présentés en consultation externe à la Clinique Médicale de l’Université de Lausanne pour de la fièvre ou un autre signe fonctionnel suite à leur retour de voyage. La majorité des voyageurs provenait d’Afrique (65 %). Un seul cas de méningite d’étiologie non précisée, a été rapporté [29]. L’étude prospective de Doherty et al réalisée de novembre 1992 à avril 1993 dans un hôpital de Londres au Royaume-Uni a inclus 195 patients hospitalisés pour une fièvre de retour. Trois cas d’ICM (deux méningites aseptiques et une méningite à cryptocoque) ont été observés [34]. L’étude prospective de Casalino et al réalisée d’août 1995 à juillet 1999, a inclus prospectivement tout patient chez lequel un frottis sanguin et une goutte épaisse avaient été effectués au service des urgences d’un hôpital parisien à la recherche d’un paludisme. L’équipe a ainsi retrouvé 783 patients (79 % revenant d’Afrique subsaharienne et 13,3% d’Asie) parmi lesquels 27 cas de méningites aiguës (3,4 %) ont été observés. Le détail des 131 cas de paludisme à Plasmodium falciparum n’a pas été précisé [19]. L’étude prospective de Bottieau et al, réalisée d’avril 2000 à décembre 2005 en Belgique a inclus 1962 voyageurs. Ces patients avaient consulté à l’Institut de médecine tropicale, aux urgences de l’hôpital universitaire ou étaient hospitalisés dans l’unité des maladies tropicales de ce même établissement pour une fièvre survenant dans l’année au décours d’un séjour dans une région tropicale ou subtropicale. Parmi les 565 patients hospitalisés, quatre cas d’ICM ont été observés (trois trypanosomoses humaines africaines et une angiostrongylose nerveuse) [11]. Dans une étude multicentrique du réseau de surveillance GeoSentinel, faite de mars 1997 à mars 2006, sur les causes de fièvre chez le voyageur, seuls 13 cas de méningites virales ont été rapportés parmi les 6 957 patients fébriles inclus sur une période de 10 ans [95]. Enfin, dans une étude parisienne, élaborée par trois services hospitaliers de maladies infectieuses et un centre médical de l’Institut Pasteur, d’octobre 1999 à avril 2001, 394 patients de plus de 18 ans, présentant une fièvre dans les 12 jours suivant leur retour des tropiques ont été inclus (173 de façon prospective et 221 rétrospectivement). Les infections du système nerveux central représentaient seulement 1 % de l’ensemble de l’échantillon (trois méningites d’origine non précisée et une méningo-encéphalite virale) [82]. 29 D’autres grandes séries, consacrées aux fièvres chez les voyageurs, ne mentionnent aucune ICM dans leurs effectifs [5,64]. Là aussi, ces résultats sont sujets à caution car la présentation clinique des infections à tropisme neuro-méningé signalées (paludisme, dengue, schistosomose, typhoïde, toxoplasmose, VIH, cysticercose, leptospirose, etc.) n’a pas été détaillée, minorant certainement l’importance des ICM. Comme nous l’avons signalé précédemment, toutes ces études apportent des informations utiles, mais leurs résultats méritent d’être interprétés avec prudence pour deux raisons essentielles. Premièrement, l’inclusion de patients fébriles sous-estime les ICM au retour de voyage dont la présentation clinique ne se résume pas à de la fièvre; des troubles neurologiques ou psychiatriques pouvant être au premier plan (biais de sélection). Deuxièmement, l’approche syndromique de ces grandes études et le manque de précisions sur les formes cliniques des infections à tropisme nerveux (paludisme grave à P. falciparum en particulier) minore probablement l’incidence des ICM au retour de voyage, au sens large du terme. 30 5. PATIENTS ET METHODES 5.1. Cadre et type d’étude Il s’agit d’une étude rétrospective réalisée dans le service des maladies infectieuses et tropicales et le service de réanimation médicale de l’Hôpital militaire Bégin (Saint-Mandé, Val de Marne) entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2005. Tous les patients adultes hospitalisés pour une infection cérébro-méningée acquise lors d’un voyage hors de la métropole ont été inclus. 5.2. Critères d’inclusion Les critères d’inclusion étaient les suivants : 5.2.1. Critère démographique - Patients âgés d’au moins 16 ans militaires ou civils. 5.2.2. Critères cliniques - Présence à l’examen clinique d’un syndrome méningé et/ou d’un syndrome encéphalitique ou de signes d’hypertension intracrânienne (HTIC) (associés ou non à des signes de focalisation) (cf. Tableau 2). - Fièvre supérieure ou égale à 38°C à l’admission ou notion de fièvre pendant la phase aiguë pré-hospitalière. Et au moins un des critères paracliniques suivants : 5.2.3. Critères paracliniques - Anomalie cytochimique du liquide céphalorachidien (LCR) avec une cellularité supérieure à 5 leucocytes/mm3 et/ou une protéinorachie supérieure à 0,4 g/l [25]. - Isolement d’un agent pathogène dans le LCR (examen direct, culture, biologie moléculaire), et/ou le sang (hémocultures, frottis sanguin), et/ou sur d’autres prélèvements périphériques (gorge et selles pour les entérovirus). - Présence d’anticorps dans le sérum : mise en évidence d’IgM ou séroconversion ou ascension du titre des anticorps IgG sur deux prélèvements réalisés à au moins 15 jours d’intervalle. - Présence d’anomalies à l’imagerie cérébrale (tomodensitométrie ou imagerie par 31 résonance magnétique). - Présence d’anomalies à l’exploration électrophysiologique du système nerveux (électroencéphalogramme). Tableau 2 : Manifestations cliniques révélatrices d’une infection cérébro-méningée [1,23] Syndrome méningé HTIC1 Syndrome encéphalitique Céphalées (phono/photophobie) Troubles de conscience Céphalées Nausées/Vomissements Crises convulsives Nausées/Vomissements Constipation Signes de focalisation Troubles de conscience Raideur méningée (Kernig / Brudzinski) Troubles du comportement Troubles cognitifs Vivacité des réflexes ostéotendineux Troubles neuro-végétatifs Œdème papillaire 1 HTIC : Hypertension Intra Crânienne 5.2.4. Critères chronologiques Survenue du tableau clinique pendant le voyage hors de métropole ou dans les 4 semaines après le retour en métropole, ou dans un délai compatible avec une contamination lors du voyage dans le cas d’une maladie à incubation prolongée (supérieure à un mois). 5.3. Critères de non inclusion - Les migrants et réfugiés, dont la pathologie cérébro-méningée n’était pas imputable à un séjour hors de France postérieur à leur date d’immigration (par exemple une tuberculose méningée). - Les tumeurs cérébrales, thrombophlébites cérébrales, méningites carcinomateuses, accidents vasculaires cérébraux, vascularites auto-immunes du système nerveux central, les encéphalopathies liées aux agents transmissibles non conventionnels (prions), les encéphalopathies toxiques ou métaboliques. - Les méningismes : ils correspondaient à un tableau de syndrome méningé avec une cellularité normale du LCR (ils étaient contemporains d’une infection extra neurologique). 32 5.4. Sélection des dossiers Les dossiers médicaux des patients ont été sélectionnés, à l’aide du codage du Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information, puis récupérés auprès des archives du service des maladies infectieuses et tropicales et du service de réanimation. 5.5. Recueil des données Un questionnaire type a été complété pour chaque patient à l’aide des informations contenues dans le dossier médical. Les variables suivantes ont été étudiées : 5.5.1. Paramètres socio-démographiques - Age, sexe, pays de résidence, pays d’origine et statut immunitaire. - Profil des voyageurs : • Touriste : personne d’origine française ou autre, résidant en France et effectuant un séjour dans un pays qui lui est étranger, pour moins de 6 mois. • Militaire : membre de l’Armée française, résidant en France et partant en mission à l’étranger pour une durée indéterminée. • Migrant : personne d’origine étrangère, résidant en France et effectuant un voyage dans son pays d’origine pour visiter des proches et amis. • Expatrié : personne d’origine française ou autre, séjournant pour des raisons professionnelles ou personnelles, dans un pays qui lui est étranger, pour plus de 6 mois. 5.5.2. Paramètres du voyage 5.5.2.1. Avant le séjour - Recours à des conseils médicaux avant le voyage - Prescription d’une chimioprophylaxie antipaludique - Statut vaccinal. 5.5.2.2. Pendant le séjour - Mode de transport et pays visité(s) lors du voyage contaminant. Les pays étaient par la suite regroupés en régions géographiques (l’Afrique, l’Europe, l’Asie, l’Amérique Latine, les Caraïbes, l’Océan Indien et l’Océanie). - Durée du séjour - Prophylaxie : utilisation de mesures de protection antivectorielle, prise éventuelle d’une chimioprophylaxie antipaludique (observance et adéquation aux recommandations de l’OMS) 33 - Expositions à des risques (morsures animales, expositions sexuelles ou sanguines, baignades…) - Présence de symptômes lors du séjour, consultation sur place, automédication, évacuation sanitaire. 5.5.2.3. Après le séjour - Observance de la chimioprophylaxie antipaludique - Délai entre la date de retour et le début des symptômes - Délai entre le début des symptômes et l’hospitalisation - Parcours de soins (automédication, type et lieu de consultation). 5.5.3. Paramètres cliniques - Signes généraux et signes fonctionnels - Signes physiques à l’admission. 5.5.4. Paramètres biologiques utiles au diagnostic étiologique 5.5.4.1. Données du sang - Numération Formule Sanguine (NFS), bilan hépatique, bilan rénal, frottis sanguin, goutte épaisse, recherche de l’antigène HRP 2 (Histidine-Rich Protein 2), Quantitative Buffy Coat (QBC), hémocultures et sérologies réalisées selon l’orientation clinique ou les résultats des analyses biologiques. 5.5.4.2. Données du liquide céphalorachidien - Cytologie (cellularité et formule), biochimie (protéinorachie, glycorachie), examen direct, culture, recherche d’antigènes solubles bactériens (méningocoque, streptocoque, haemophilus), technique d’amplification génomique : Polymerase Chain Reaction (PCR), et dosage de l’interféron alpha. - Le LCR était défini comme purulent (> 50 % de polynucléaires neutrophiles), lymphocytaire (> 50 % de lymphocytes), panaché (50 % lymphocytes et 50 % polynucléaires neutrophiles) ou éosinophilique (> 10 éosinophiles/mm3 ou au moins 10 % de la pléiocytose). - L’hyperprotéinorachie était définie par une protéinorachie > 0,40 g/l. - L’hypoglycorachie était définie par un rapport glycorachie/glycémie < 40 %. 5.5.4.3. Autres - Isolement de virus dans les prélèvements périphériques (gorge, selles, sang) - Présence d’antigènes urinaires (pneumocoque, cryptocoque). 34 5.5.5. Paramètres radiologiques - Tomodensitométrie (TDM) cérébrale - Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) cérébrale. 5.5.6. Paramètres électrophysiologiques - Electroencéphalogramme (EEG) - Electroneuromyogramme (EMG). 5.5.7. Diagnostic de sortie Le diagnostic de sortie était établi par un spécialiste en maladies infectieuses et tropicales. Les définitions suivantes ont été retenues pour les cas : - Cas certain : mise en évidence directe de l’agent pathogène (LCR et/ou sang) - Cas probable : diagnostic indirect (arguments sérologiques et/ou au moins deux prélèvements périphériques positifs dans les méningites à entérovirus) - Cas possible : absence d'identification de l'agent pathogène ou d'arguments diagnostiques indirects, mais présence d’un faisceau d’arguments épidémiologiques, cliniques, biologiques, radiologiques et réponse à un traitement adapté. Dans cette dernière situation, l’origine virale de l’ICM a été retenue chez les patients dont l’évolution a été spontanément favorable. 5.5.8. Paramètres évolutifs - Séjour en réanimation, durée de séjour globale (jours), traitement présomptif, durée d’hospitalisation globale (jours) et évolution clinique à la sortie (décès, guérison, séquelles). 5.6. Analyse Les données ont été saisies avec le logiciel Microsoft® Excel. Le test t de Student a été utilisé pour comparer les variables quantitatives et le test du chi-2 pour les variables qualitatives. Le seuil de significativité a été fixé à 5 %. 35 6. RESULTATS Parmi les cent soixante quatorze patients hospitalisés pour une suspicion d’infection cérébroméningée dans le service de maladies infectieuses et tropicales et/ou en réanimation médicale, entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2005, cinquante six patients (32 %) répondant aux critères ont été inclus. Cet échantillon représentait environ 4 % des 1200 voyageurs hospitalisés durant la période. Quatorze voyageurs ont été exclus (six cas de méningisme, un cas de tuberculose neuroméningée chez une migrante et sept méningites virales survenues plus d’un mois après le retour de voyage). 6.1. Caractéristiques socio-démographiques • Sexe L’échantillon était composé de 35 hommes et 21 femmes (sexe ratio : 1,66). • Age L’âge médian était de 29 ans (extrêmes : 16-83). • Pays de résidence Quarante neuf patients (87 %) résidaient en France avant leur voyage. Sept patients étaient expatriés. • Pays d’origine Quarante et un patients (73 %) étaient d’origine française. Les 15 autres patients (27 %) étaient d’origine étrangère (deux Polonais, une Allemande, un Russe, un Portugais, une Vietnamienne, deux Algériens, deux Tunisiens, un Marocain, un Comorien et une Camerounaise). • Statut immunitaire Deux patients infectés par le VIH, suivis dans le service des maladies infectieuses de l’Hôpital Bégin, figuraient dans cette cohorte. • Profil des voyageurs L’échantillon était constitué de 25 touristes (44,6%), 15 militaires (26,8%), neuf migrants (16,1%) et sept expatriés (12,5%). Les nationalités des voyageurs étaient distribuées de la façon suivante : - Les touristes : 22 Français, un Polonais, une Allemande et une Vietnamienne. - Les militaires : 14 Français et un Russe, membre de la Légion Etrangère. - Les migrants : ils étaient d’origine portugaise (1), polonaise (1), algérienne (2), tunisienne 36 (2), camerounaise (1), marocaine (1) et comorienne (1). - Les expatriés : cinq Français, un Japonais et un Espagnol. 6.2. Caractéristiques du voyage 6.2.1. Avant le séjour Vingt-sept patients (48,21 %) ont bénéficié de conseils médicaux auprès d’un médecin généraliste avant le voyage. Vingt-deux patients se rendaient (39,3 %) en zone tropicale. Quinze d’entre eux (55 %) étaient des militaires. Une chimioprophylaxie antipaludique a été prescrite chez 19 patients (34 %), dont neuf militaires. Le statut vaccinal était disponible pour 30 patients, 27 d’entre eux étaient à jour dans leur vaccination. 6.2.2. Pendant le séjour Le mode de transport emprunté par les 49 voyageurs non expatriés était l’avion dans 47 cas (96 %), seuls deux patients ont utilisé le train en Europe. La répartition des régions visitées est représentée dans le tableau 3. Tableau 3 : Répartition des régions visitées par les patients Région Nombre de voyageurs Pourcentage % Afrique 32 57,2 Europe 11 19,5 Asie 7 12,5 Caraïbes 2 3,6 Océan Indien 2 3,6 Océanie 1 1,8 Amérique Latine 1 1,8 Total 56 100 La distribution par zone géographique et par pays est décrite dans l’annexe 2. Parmi les voyageurs non expatriés, la durée médiane de séjour était de 21 jours (IQ1 25-75 : 12-60). Pour neuf d’entre eux, la durée de séjour était supérieure à trois mois. La répartition des caractéristiques socio-démographiques des voyageurs et de leur séjour en fonction de leur destination est présentée dans le tableau 4. 1 IQ : interquartile : deux bornes délimitant les quarts supérieurs et inférieurs des données 37 Tableau 4 : Caractéristiques socio-démographiques des voyageurs ainsi que celles du séjour suivant leur destination Variable Nombre de patients Age (médiane et extrêmes) Sexe ratio (H/F) D-S3 médiane (extrêmes) Total Afrique1 Europe Asie Autres2 56 32 11 7 6 29 (16-83) 34 (16-83) 27(17-48) 31 (21-51) 29 (23-28) 1,66 2,55 (23/9) 1,75 (7/4) 0,75 (3/4) 0,5 (2/4) 24 (5-550) 60 (5-550) 12 (10-300) 21 (10-119) 12 (8-120) 4 10 (0,5-180) 12 (0,5-180) 10 (3-15) 6 (1,5-14) 10 (2-14) 5 4 (0,5-96) 4 (0,5-96) 3 (0,5-8) 4 (0,5-12) 2,25 (0,5-19) Militaire 15 8 4 2 1 Touriste 25 10 5 5 5 Migrant 9 7 2 0 0 Expatrié 7 7 0 0 0 Délai R-S médian (extrêmes) Délai S-H médian (extrêmes) 1 Afrique du Nord et Afrique subsaharienne 2 Autres : Amérique Latine, Océanie, Caraïbes, Océan Indien 3 Durée du séjour (en jours) 4 Délai entre le retour et l’apparition des symptômes (en jours) pour les 36 patients dont les symptômes ont débuté après le séjour 5 Délai entre l’apparition des symptômes et l’hospitalisation (en jours) Parmi les 31 voyageurs ayant séjourné en zone impaludée (Afrique subsaharienne, Asie, Océan Indien et Amérique du Sud), 19 (61 %) avaient utilisé des mesures de protection antivectorielle (répulsifs, vêtements imprégnés d’insecticides, moustiquaire). La chimioprophylaxie antipaludique (CAP) était adaptée aux recommandations du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire chez 15 voyageurs (79 %). L’observance déclarée pendant le séjour était satisfaisante dans 16 cas, trois voyageurs (16 %) ayant interrompu leur traitement. Dans un cas, l’interruption du traitement était due à un effet secondaire attribué à la chloroquine (troubles oculaires). Parmi les 12 cas de paludisme grave : cinq n’avaient pas de CAP, trois l’ont arrêtée au retour, deux avaient une CAP inadaptée. Seuls deux patients atteints de paludisme grave avaient une CAP optimale. Trois patients (5 %) ont signalé une exposition sexuelle à risque pendant leur voyage (dont deux ont développé une primo-infection à VIH) et un patient a séjourné dans une ferme (il y contracta une brucellose neuroméningée). Vingt patients (35,71 %) ont présenté des symptômes cliniques pendant le séjour. 38 6.2.3. Après le séjour Au sein des 16 voyageurs observants durant le séjour, cinq ont arrêté leur CAP dans la semaine suivant leur retour en métropole. Au total, sur les 31 voyageurs ayant séjourné en zone impaludée, seuls neuf voyageurs (29 %) ont eu une CAP optimale. Pour les 36 patients dont les symptômes ont débuté après le retour, le délai médian entre le retour et l’apparition des symptômes était de dix jours (IQ 25-75 : 4-14). Le délai médian pour l’ensemble des patients, entre l’apparition des symptômes et l’hospitalisation était de 4 jours (IQ 25-75 : 1,5-7). 6.2.4. Prise en charge Parmi les 20 patients qui ont présenté des symptômes lors du séjour, 15 (75 %) ont consulté un médecin sur place (généraliste ou urgentiste). Onze (55 %) ont bénéficié d’une évacuation sanitaire. Le parcours de soins de ces 20 patients est schématisé dans la figure 1. Figure 1 : Parcours de soins des patients ayant présenté des symptômes lors du séjour (n=20) 20 patients Absence de SAU1 Médecin généraliste Neurologue consultation 5 patients 9 patients 1 patiente 5 patients EVASAN 2 EVASAN RAD3 4 patients 5 patients Médecin militaire puis EVASAN EVASAN REA5 1 patient 1 SAU : Service d’Accueil des Urgences 2 EVASAN : Evacuation sanitaire 3 RAD : Retour à domicile 4 NEURO : Service de Neurologie 5 REA : Service de Réanimation NEURO4 39 Dans la figure 1, la patiente qui a consulté un neurologue en Tunisie, est décédée malgré son évacuation sanitaire (EVASAN) dans le service de réanimation de l’hôpital Bégin : il s’agissait d’une méningo-encéphalite herpétique non évoquée, et traitée à tort comme une méningite purulente. Cinq voyageurs n’ont pas consulté sur place mais ont préféré attendre leur retour en métropole (un paludisme, une méningococcie, deux méningites à entérovirus et une méningite indéterminée). Cinq patients se sont rendus dans un service d’accueil des urgences (SAU) local puis ont été évacués en France en transport médicalisé (trois cas de paludisme, une encéphalite et une méningite à entérovirus respectivement). Parmi ces cinq, un patient a été évacué avec un diagnostic de pneumopathie associée à une fièvre jaune alors qu’il avait un paludisme grave. Neuf patients ont consulté un médecin généraliste (militaire ou civil) : dans quatre cas (un paludisme, une encéphalite indéterminée, une méningite à mycoplasme et une méningite indéterminée) des EVASAN ont été organisées et dans cinq cas les patients ont été renvoyés à domicile (RAD) avec un diagnostic erroné. Parmi ces derniers, un patient a consulté à nouveau un praticien militaire, puis a été évacué vers la France (méningite à entérovirus). Aux 36 patients dont la symptomatologie a débuté après le séjour et qui ont consulté en métropole, se rajoutent neuf patients qui ont eu des symptômes lors du séjour (Fig. 1) mais qui soit n’ont pas consulté sur place (n=5), soit ont été renvoyés à domicile avec un diagnostic erroné (n=4). Le parcours de ces 45 personnes est présenté dans les figures 2 (patients consultant aux urgences après le séjour) et 3 (patients consultant au cabinet de médecine générale après leur retour). Trente et un patients ont consulté en première ligne un service d’urgence après leur retour en métropole (Fig. 2) : Six patients ont été renvoyés à domicile : trois cas avec un diagnostic de syndrome pseudogrippal (en réalité trois méningites virales : deux à entérovirus et une à Toscana) et trois cas de paludisme à P. falciparum : deux mis sous méfloquine malgré des nausées qui se sont aggravés secondairement et un autre non diagnostiqué qui a consulté par la suite à deux reprises avant d’être hospitalisé en réanimation pour un paludisme grave. Vingt quatre patients ont été hospitalisés dans le service des maladies infectieuses et tropicales (MIT) après un passage par les urgences (dont sept des neuf patients qui ont eu des symptômes lors du séjour). Un patient a été admis en réanimation pour une méningite aseptique puis transféré secondairement dans le service de MIT. 40 Figure 2 : Prise en charge des patients consultant aux urgences après le séjour (n=31) SAU1 31 patients 1 SAU : Service d’Accueil des Urgences 2 RAD : Retour A Domicile 3 MIT : Service de Maladies Infectieuses et Tropicales 4 REA : Réanimation RAD2 MIT3 REA4 6 cas 24 cas 1cas SAU Figure 3 : Prise en charge des patients consultant au cabinet de médecine générale après leur retour (n=14) Médecin généraliste 14 patients SAU1 RAD2 5 cas 9 cas MIT3 REA4 SAU Généraliste 4 cas 1 cas 8 cas 1 cas MIT RAD 1 SAU : Service d’Accueil des Urgences 2 RAD : Retour A Domicile 3 MIT : Service de Maladies Infectieuses et Tropicales 4 REA : Réanimation SAU 41 Quatorze patients ont consulté un médecin généraliste après leur retour en métropole (Fig. 3) : Cinq ont été adressés immédiatement par leur médecin au service des urgences (SAU) d’où quatre patients ont été admis en MIT (une dengue à présentation encéphalitique, deux méningites à VIH et HSV-2 respectivement et une fièvre typhoïde). Le cinquième patient a été hospitalisé en réanimation pour un purpura fulminans à méningocoque. Neuf patients ont été renvoyés à domicile : six avec un traitement symptomatique pour un tableau de syndrome pseudo grippal et trois sous traitement antibiotique. Parmi ces neuf patients, huit sont retournés aux urgences où fut établi le diagnostic final : six méningites indéterminées, une méningite virale à EBV et un paludisme à P. falciparum qui s’aggrava par la suite et fut transféré en réanimation. Le neuvième patient était à nouveau retourné chez son généraliste avant d’être réadressé à son domicile. Par la suite, il consulta successivement dans deux SAU différents avant d’être hospitalisé pour une méningite aseptique. Au total, on notait un retard diagnostique médian de 4 jours (extrêmes : 1-50) chez vingt patients (4 cas de paludisme, 2 cas de méningo-encéphalite et 14 cas de méningite). 6.2.5. Automédication Parmi les 50 patients pour lesquels l’information était disponible, 17 ont utilisé des médicaments : antipyrétiques (13), antipaludéens (2), antibiotique (1) et anti-inflammatoire non stéroïdien (1). 6.3. Caractéristiques cliniques 6.3.1. Symptômes généraux et fonctionnels inauguraux Les symptômes ayant conduit les patients à consulter sont présentés dans le tableau 5. Un syndrome infectieux inaugural (fièvre mesurée ou arguments indirects : frissons, sueurs) était présent chez 96 % des cas. Des céphalées étaient notées chez les trois quarts des patients. Près de la moitié avait eu des vomissements. Chez trois patients (5 %), une crise convulsive représentait le motif d’admission (une méningo-encéphalite herpétique, une neurocysticercose et une encéphalite indéterminée). Dans un cas, des manifestations psychiatriques trompeuses étaient au premier plan (dengue). 42 Tableau 5 : Fréquence des symptômes inauguraux chez les 56 patients Symptômes n % Fièvre 54 96 Céphalées 51 91 Vomissements 24 43 Nausées 19 34 Diarrhée 5 9 Convulsions 3 5 Myalgies 3 5 Douleurs abdominales 3 5 Amaigrissement 2 3,5 1 2 1 2 Lombalgies Troubles du comportement 1 1 Accès maniaque 6.3.2. Signes cliniques Les signes cliniques présents lors de l’examen initial sont présentés dans le tableau 6. La raideur méningée, les troubles de la conscience et la photophobie représentaient les signes physiques les plus fréquemment retrouvés à l’admission. Trois types de présentation clinique neurologique prédominaient à l’entrée. Dans 24 cas, la présentation était un syndrome méningé typique : neuf méningites indéterminées, neuf cas à entérovirus, trois cas à HSV-2, une primo-infection à VIH, un cas à méningocoque et un cas à VZV. Dans 20 cas, la présentation était encéphalitique et/ou méningo-encéphalitique : une fièvre typhoïde, une neurocysticercose, une dengue, une HSV1, deux cas à entérovirus, deux indéterminées et 12 paludismes graves. Dans 12 cas, la présentation était un syndrome méningé atypique (céphalées et/ou fièvre) : une neurocryptococcose, une brucellose méningée, une méningite à Mycoplasma pneumoniae, six méningites virales (primo-infection à VIH, Toscana, HSV-2, HHV-6, EBV, entérovirus) et trois méningites indéterminées. Un exanthème était noté chez deux cas d’entérovirus, un cas de VIH, un cas de VZV, un cas de fièvre typhoïde et trois cas d’ICM indéterminées. 43 Tableau 6 : Fréquence des différents signes cliniques retrouvés à l’examen à l’admission ou dans les premières 24 heures Signes cliniques n % Hyperthermie1 50 89 Raideur méningée 28 50 Troubles de conscience2 18 32 Troubles du comportement3 3 5 Convulsions 1 2 Signes focaux 4 7 Photophobie 11 19,5 Phonophobie 3 5 10 18 Exanthème 8 14 Ictère cutanéo-muqueux 9 16 Purpura 2 3,5 Hépatomégalie 5 9 Splénomégalie 3 5 Adénopathies 3 5 Pharyngite 5 9 Conjonctivite 1 2 Dyspnée 1 Température > 38°C 2 Echelle de Glasgow 3 Manifestations psychiatriques, hallucinations sensorielles, agressivité,… Un ictère cutanéo-muqueux était présent uniquement chez neuf patients tous atteints d’un paludisme grave. Les signes focaux étaient retrouvés dans trois cas d’encéphalites (deux à entérovirus et une indéterminée) et dans un cas de méningite à Mycoplasma pneumoniae. Une pharyngite était visible dans cinq cas de méningites (une à entérovirus et quatre indéterminées). 6.3.3. Comparaison des patients atteints de paludisme avec les patients infectés par un autre agent infectieux La présentation clinique des paludismes graves a été comparée avec celle des autres étiologies (cf. Tableau 7). 44 Tableau 7 : Caractéristiques cliniques des cas de paludisme par rapport aux autres étiologies Symptômes Paludisme Autres ICM n=12 n=44 p Hyperthermie 12 (100%) 38 (86%) NS Céphalées 12 (100%) 39 (88%) NS 0 (0%) 28 (63,5%) <0,05 12 (100%) 8 (18%) <0,05 Troubles du comportement 2 (16,5%) 1 (2%) NS Signes focaux 0 (0%) 4 (9%) NS Convulsions 1 (8%) 3 (7%) NS Photophobie 1 (8%) 10 (23%) <0,05 Dyspnée 6 (50 %) 4 (9%) <0,05 Nausées 2 (16%) 17 (38,5%) NS Vomissements 4 (33%) 20 (45,5%) NS Diarrhée 1 (8%) 4 (9%) NS Douleurs abdominales 1 (8%) 2 (4,5%) NS Exanthème 0 (0%) 8 (18%) NS Ictère cutanéo-muqueux 9 (75%) 0 (0%) <0,01 Purpura 1 (8%) 1 (2%) NS Hépatomégalie 3 (25%) 2 (4,5%) NS Splénomégalie 2 (16%) 1 (2%) 0,025 Adénopathies 0 (0%) 3 (7%) NS Conjonctivite 0 (0%) 1 (2%) NS Pharyngite 0 (0%) 5 (11%) <0,05 Myalgies 1 (8%) 2 (4,5%) NS Raideur méningée Troubles de conscience Chez les 12 sujets atteints de paludisme grave, on constatait l’absence de raideur méningée, d’exanthème, de signes neurologiques focaux et d’adénopathies. En revanche, la présence d’un ictère, d’une dyspnée et d’une splénomégalie était significativement associée au paludisme grave (p < 0,05). 45 6.4. Caractéristiques biologiques 6.4.1. Données de l’hémogramme La médiane de la leucocytose des 56 patients était à 7465 GB/mm3 (extrêmes : 3 000-26 000). Quinze patients (27 %) avaient une hyperleucocytose à polynucléaires (>10 000 GB/mm3) : deux paludismes graves, deux encéphalites (HSV-1 et entérovirus), une encéphalite indéterminée, une méningite bactérienne à N. meningitidis, trois méningites virales (HHV-6, EBV, entérovirus) et six méningites indéterminées. Une lymphopénie (lymphocytes < 1500/mm3) était mise en évidence chez 30 patients (53,5%) : dix paludismes graves, trois encéphalites (une à entérovirus, une à fièvre typhoïde, une indéterminée), 17 méningites (six à entérovirus, sept aseptiques, une cryptococcose, une méningococcie, une à HHV-6, une à HSV-2). Une seule patiente présentait une hyper éosinophilie (> 500 polynucléaires éosinophiles/mm3). Elle avait une neurocysticercose. Dix patients (18 %) avaient une anémie (hémoglobine < 12 g/dl) : quatre paludismes graves, cinq encéphalites (neurocysticercose, fièvre typhoïde, brucellose, HSV-1, entérovirus) et une méningite à entérovirus. Seul un paludisme grave avait une hémoglobinémie inférieure à 8 g/dl à l’admission. Quinze patients (27 %) avaient une thrombopénie (< 150 000 plaquettes /mm3) : onze cas de paludisme grave, une fièvre typhoïde et trois méningites (C. neoformans, N. meningitidis et une indéterminée). 6.4.2. Données de la biochimie 6.4.2.1. Syndrome inflammatoire Le dosage de la protéine C réactive (CRP) était disponible chez tous les patients. La CRP était élevée chez 33 patients (59 %). Elle était supérieure à 100 mg/l chez 13 patients (neuf cas de paludisme grave, une encéphalite à entérovirus, une méningococcie et deux méningites d’origine indéterminée). Seuls cinq patients avaient une CRP supérieure à 200 mg/l (trois cas de paludisme grave, une méningococcie et un cas d’encéphalite à entérovirus). La CRP était normale (< 5 mg/l) chez les 23 autres patients (41 %). Parmi les 24 patients présentant une ICM d’origine virale confirmée, quatorze (58 %) avaient un taux de CRP normal. Dans neuf cas (37,5 %), le taux de CRP était inférieur à 100 mg/l. Seul un cas d’encéphalite à entérovirus était associé à un taux de CRP supérieur à 100 mg/l (300 mg/l). 46 6.4.2.2. Fonction hépatique Une hyper bilirubinémie (bilirubinémie totale > 20 µmol/l) était mise en évidence chez 13 patients (23 %) dont 11 des 12 cas de paludisme (91,5 %). Parmi eux, sept avaient un taux de bilirubine total supérieur à 50 µmol/l (critère de gravité de l’OMS). Une cytolyse hépatique (ASAT > 35 UI/l et/ou ALAT > 45 UI/l) était individualisée chez 20 patients (36 %) : six paludismes graves, une fièvre typhoïde, une méningococcie, une brucellose, une cryptococcose, deux encéphalites (HSV-1 et entérovirus) et huit méningites (quatre indéterminées, trois à entérovirus et une à HSV-2). 6.4.2.3. Fonction rénale Six patients présentaient une insuffisance rénale aiguë à l’admission (paludisme ; n=5, méningococcie ; n=1). Les caractéristiques biologiques des cas de paludisme ont été comparées avec celles des autres étiologies (Tableau 8). Tableau 8 : Caractéristiques biologiques des cas de paludisme par rapport aux autres étiologies Examens Paludisme (n=12) Autres étiologies (n=44) 7385 (3000-26000)1 7465 (3330-25000)1 Lymphocytose médiane (/mm3) 600 (215-1800)1[250-1040] 2 1600 (470-3200)1[1000-2000] 2 Hémoglobinémie médiane (g/dl) 12 (6-15,2)1 [10,5-12,6] 2 13,55 (10,5-16)1[13-14,2]2 37, 25 (13-178)1[23,1-40,6] 2 220 (94-368)1[165-248]2 CRP médiane (mg/l) 122 (57-343)1[96-197] 2 12 (1-382,5)1[1-28,6] 2 ALAT médiane (UI/l) 34,5 (19-139) 1[29-45] 2 32 (11-90) 1[20-42] 2 Bilirubinémie totale médiane (µmol/l) 57,5 (13-253)1[22-66] 2 12 (1-28)1[9-14] 2 Leucocytose médiane (/mm3) Thrombocytose médiane (x 1000/mm3) 1 (Extrêmes) 2 [Interquartiles] Le taux de plaquettes était significativement plus bas chez les cas de paludisme grave (p < 0,05). La lymphopénie était plus basse dans les cas de paludisme grave (p < 0,05). La valeur médiane de la CRP était significativement plus élevée dans les cas de paludisme grave (p < 0,05). L’hyper bilirubinémie était significativement associée au paludisme grave (p < 0,005). 47 6.4.3. Données des recherches d’hématozoaires de Plasmodium falciparum Une recherche d’hématozoaires de P. falciparum a été réalisée chez 32 patients (frottis, goutte épaisse, QBC, TDR). P. Falciparum était identifié dans 12 cas. La valeur médiane de la parasitémie estimée sur les frottis sanguins était de 12,5 % (extrêmes : 1-55) avec une valeur moyenne de 14,6 %. Dix patients avaient une parasitémie supérieure à 4 % (critère OMS de gravité). Celle-ci était supérieure à 10 % chez sept d’entre eux. 6.4.4. Données des hémocultures Les hémocultures réalisées chez tous les patients étaient positives dans trois cas. Chez deux patients, elles ont apporté le diagnostic étiologique de certitude : isolements respectifs de Brucella melitensis et Salmonella typhi. Dans le dernier cas, il s’agissait d’une co-infection à Salmonella enteritidis au cours d’un paludisme grave à P. falciparum. 6.4.5. Données des ponctions lombaires Une ponction lombaire (PL) a été effectuée chez 45 patients (80 %) dont deux cas de paludisme. Une pléiocytose fut retrouvée chez 44 patients dont un paludisme grave. La PL a permis de faire le diagnostic d’infection cérébro-méningée dans 43 cas. La cellularité médiane de ces 43 PL était de 175 éléments/mm3 (extrêmes : 14-2060), avec une moyenne de 293 éléments/mm3. Le profil cytologique des LCR se répartissait en trois groupes (Tableau 9). Tableau 9 : Répartition du type de cellularité du LCR suivant l’étiologie (n=43) Etiologie Lymphocytaire Polynucléaire Panachée Total 18 5 1 24 Bactérienne 2 1 - 3 Parasitaire - - 1 1 Fongique - - 1 1 Indéterminée 8 2 4 14 28 8 7 43 Virale Total La protéinorachie médiane de ces 43 PL était de 0,79 g/l (extrêmes : 0,18-8). Quatorze patients avaient une protéinorachie supérieure à 1 g/l : quatre encéphalites (entérovirus : 2, 48 indéterminées : 2), dix méningites (HSV-2 : 3, primo-infection à VIH : 2, entérovirus : 2, EBV : 1, HHV-6 : 1, méningococcie : 1). Cinq patients avaient une protéinorachie normale : deux encéphalites virales (une dengue et une à HSV-1) et trois méningites (deux indéterminées et une à entérovirus). La glycorachie rapportée à la glycémie capillaire était anormale dans quatre cas : deux encéphalites virales (entérovirus) et deux méningites (N. meningitidis et HSV-2). Le dosage de l’interféron alpha a été réalisé à douze reprises. Il était supérieur au seuil de 5 UI/l chez quatre patients (HSV-1, Toscana, VZV, indéterminée). Deux patients atteints de paludisme ont eu une PL. Dans un cas, on notait une pléiocytose lymphocytaire associée à une hyperprotéinorachie (0,82 g/l), dans l’autre il n’y avait pas d’anomalie du LCR. 6.4.6. Confirmation du diagnostic à l’aide de l’analyse du liquide céphalorachidien Un diagnostic étiologique était obtenu dès la PL dans 19 cas d’ICM : - Isolement de Neisseria meningitidis à l’examen direct et en culture dans un cas - Détection de l’antigène soluble dans un cas (cryptococcose neuroméningée) - Identification d’Herpesviridae (n = 8) et d’entérovirus (n =8) par PCR - Mise en évidence d’anticorps dirigés contre Taenia solium (ELISA et Western Blot) dans un cas. 6.4.7. Données des prélèvements périphériques (sang, gorge, selles et urines) Un diagnostic étiologique était affirmé de façon indirecte à l’aide des sérologies dans six cas : deux arboviroses (dengue et Toscana), deux primo-infections à VIH, une méningite à Mycoplasma pneumoniae et une brucellose méningée corroborant ainsi l’hémoculture positive. Dans trois cas, les résultats des sérologies plasmatiques confirmaient les données du LCR (infection à HHV-6, EBV et cysticercose neuroméningée). La recherche périphérique d’entérovirus (prélèvements de gorge et selles) a été réalisée 30 fois. Les cultures virales étaient positives dans 11 des 12 cas d’ICM à entérovirus. Dans sept cas, elles confirmaient les résultats de la PCR. Dans un autre cas, elles s’ajoutaient à la mise en évidence d’une virémie sur sang total à entérovirus chez un patient infecté par le VIH. Enfin, dans le cas de la cryptococcose neuroméningée, l’antigène soluble de Cryptococcus neoformans a été également retrouvé dans les urines. 49 6.5. Caractéristiques radiologiques Une TDM cérébrale a été réalisée chez 17 patients. Elle était anormale chez deux patients. Dans le premier cas, il s’agissait d’hypodensités cortico-sous-corticales temporo-pariétales associées à un effet de masse et un engagement sous-falcoriel au cours d’une encéphalite à HSV-1. Le second cas présentait une ventriculite associée à une lésion nodulaire corticale frontale droite au cours d’une encéphalite à entérovirus. Neuf patients ont eu successivement une TDM puis une IRM cérébrales. Cinq patients n’avaient aucune anomalie radiologique aux deux examens (ils présentaient un paludisme, une méningococcie, deux méningites à EBV et à entérovirus respectivement et une méningite indéterminée), trois patients avaient une IRM pathologique alors que la TDM cérébrale était jugée normale (un cas de neurocysticercose, une encéphalite à entérovirus et une encéphalite indéterminée) et le dernier patient avait des résultats concordants aux deux examens (un cas d’encéphalite à entérovirus). Une IRM cérébrale a été réalisée en première intention chez sept patients, elle était normale dans tous les cas. L’IRM du rachis lombaire effectuée chez le patient atteint d’une brucellose méningée révélait une épidurite de topographie S1. 6.6. Caractéristiques électrophysiologiques L’EEG, réalisé à six reprises, était pathologique dans cinq cas (deux cas de paludisme, une encéphalite herpétique, une encéphalite indéterminée et une encéphalite à entérovirus). Un EMG confirmait une paralysie faciale périphérique gauche chez une patiente atteinte d’une encéphalite à entérovirus. 6.7. Diagnostics étiologiques retenus Le diagnostic étiologique était confirmé dans 42 cas (75 %). Il était considéré comme certain dans 33 cas (59 %), probable dans neuf cas (16 %). Dans 14 cas (25 %), il était indéterminé. 6.7.1. Distribution des étiologies confirmées selon le tableau clinique Les encéphalites ou méningo-encéphalites confirmées étaient au nombre de 18 : - Un cas d’origine bactérienne à Salmonella typhi, contractée en Inde par une patiente vaccinée avant son départ par Typhim Vi® - Quatre cas d’origine virale : deux encéphalites à Enterovirus dont une contractée en Côte d’Ivoire par un patient infecté par le VIH, une méningo-encéphalite herpétique à HSV-1 survenue lors d’un séjour en Tunisie et une encéphalite due à un virus de la dengue, 50 contractée à Djibouti et révélée par un tableau d’accès maniaque. - Treize cas d’origine parasitaire : une neurocysticercose survenue chez une expatriée et douze cas de paludisme grave à P. falciparum contracté en Afrique subsaharienne par des sujets non-immuns (cinq expatriés, deux militaires, trois touristes et deux migrants résidant en France depuis plus de deux ans). La CAP était inadaptée chez dix des douze patients (83 %). Tous les patients avaient au moins un critère de gravité OMS 2000 à l’admission (Tableau 10). Cinq patients avaient plus de trois critères de gravité durant les premières 24 heures. Tableau 10 : Fréquence des critères OMS 2000 chez les 12 cas de paludisme grave [64] Critères N (%) 1 8 Trouble de la conscience 6 50 Convulsions répétées 1 8 Collapsus cardiovasculaire 3 25 Détresse respiratoire 6 50 Œdème pulmonaire 2 16,5 Ictère clinique ou bilirubine totale > 50 µmol/l 9 75 Parasitémie ≥ 4 % 10 83 Insuffisance rénale2 2 16,5 Cliniques Prostration : extrême faiblesse 1 Biologiques 1 Score de Glasgow ≤ 9 2 Créatininémie > 265 µmol/l avec diurèse < 400 ml/24 h après réhydratation Les méningites confirmées étaient au nombre de 24 : trois cas d’origine bactérienne [Mycoplasma pneumoniae (n=1), Neisseria meningitidis (n=1), Brucella melitensis (n=1)], 20 d’étiologie virale [Enterovirus (n=10), HSV-2 (n=4), VIH (n=2), Epstein-Barr Virus (n=1), Varicella Zoster Virus (n=1), Human Herpes Virus 6 (n=1), Toscana (n=1)] et une ICM fongique [Cryptococcus neoformans (n=1)] révélatrice d’un SIDA chez un patient non dépisté auparavant. La distribution des étiologies selon la région et le profil du voyageur est décrite dans les tableaux 11 et 12 respectivement. Chez les voyageurs de retour d’un séjour sous les tropiques, la survenue d’un paludisme à P. 51 falciparum était fortement associée à l’Afrique subsaharienne. Les autres maladies tropicales étaient minoritaires, loin derrière les causes cosmopolites. Au sein des causes cosmopolites, les viroses (Enterovirus, Herpesviridae, VIH et Toscana) représentaient 82 % des diagnostics confirmés (Tableau 11). Tableau 11 : Distribution des étiologies suivant la région visitée Etiologie Total Afrique Europe Asie Autres1 14 13 - 1 - 12 12 - - - Dengue 1 1 - - - Typhoïde 1 - - 1 - 28 13 7 3 5 12 6 1 2 3 Herpesviridae 8 3 3 1 1 VIH 2 1 - - 1 Toscana 1 - 1 - - Méningocoque 1 - 1 - - M pneumoniae 1 1 - - - Brucellose 1 1 - - - Neurocysticercose 1 1 - - - Neurocryptococcose 1 - 1 - - Indéterminées 14 6 4 3 1 Total 56 32 11 7 6 Maladies tropicales Paludisme Maladies cosmopolites Entérovirus 1 Région Autres : Amérique Latine, Océanie, Caraïbes, Océan Indien 52 A l’exception des expatriés qui étaient majoritairement touchés par le paludisme (71 %), les autres voyageurs présentaient une prédominance d’infections cosmopolites (Tableau 12). Tableau 12 : Distribution des étiologies suivant le profil du voyageur Etiologie Profil du voyageur Total Touriste Militaire Migrant Expatrié 14 4 3 2 5 Paludisme 12 3 2 2 5 Dengue 1 - 1 - - Typhoïde 1 1 - - - 28 13 7 6 2 Entérovirus 12 6 3 2 1 Herpesviridae 8 5 1 2 - VIH 2 - 2 - - Toscana 1 1 - - - Méningocoque 1 1 - - - M pneumoniae 1 - 1 - - Brucellose 1 - - 1 - Neurocysticercose 1 - - - 1 Neurocryptococcose 1 - - 1 - Indéterminées 14 8 5 1 - Total 56 25 15 9 7 Maladies tropicales Maladies cosmopolites 6.7.2. Profil des étiologies indéterminées Les infections cérébro-méningées indéterminées étaient au nombre de 14 : neuf méningites typiques, trois méningites atypiques et deux encéphalites. Sur le plan clinique, un exanthème et une pharyngite étaient observés chez trois et quatre voyageurs respectivement. Sur le plan hématologique, on notait une hyperleucocytose (n=7), une lymphopénie (n=8) et une thrombopénie (n=1). Sur le plan inflammatoire, la CRP était normale chez six des quatorze patients. Concernant le bilan hépatique, on retrouvait une 53 cytolyse chez quatre patients. En ce qui concerne le LCR, la formule était lymphocytaire (n=8), panachée (n=4) ou purulente aseptique (n=2). La protéinorachie était inférieure à 1 g/l chez dix patients. 6.8. Paramètres évolutifs Seize patients (28, 5 %) ont été admis en réanimation : dix cas de paludisme grave, une méningite à méningocoque et cinq cas d’ICM virales (entérovirus, HSV-1, trois méningites indéterminées). Dix patients ont nécessité une ventilation mécanique (six cas de paludisme, un cas de méningo-encéphalite à HSV-1, un cas de méningo-encéphalite à entérovirus, un cas de méningococcie et un cas d’encéphalite indéterminée). Trois patients ont eu une épuration extrarénale par hémofiltration continue (trois cas de paludisme). Deux patients ont nécessité une transfusion (deux cas de paludisme). Quatre patients ont reçu des amines vasopressives (trois cas de paludisme et un cas de méningococcie). La durée médiane de prise en charge en soins intensifs était de 9,5 jours (extrêmes : 1-63). La durée médiane de séjour calculée sur l’ensemble des patients hospitalisés était de 10 jours (extrêmes : 3-63). La durée moyenne de séjour de l’ensemble des hospitalisés était de 14,21 jours. La durée médiane de séjour des cas de paludisme grave était significativement plus élevée que celle des autres causes d’ICM (18,5 vs 8 jours, p < 0,05). L’évolution clinique était favorable dans 55 cas. Une patiente est décédée d’une méningo-encéphalite à HSV-1 survenue au décours d’un séjour en Tunisie. Quatre patients (7 %) ont conservé des séquelles (Tableau 13). Tableau 13 : Détails des séquelles observées chez les patients (n = 4) Etiologie Age Séquelles Paludisme 48 Troubles vestibulo-acoustiques et insuffisance rénale organique Encéphalite à entérovirus 41 Paralysie faciale périphérique Encéphalite indéterminée 29 Troubles cognitifs et hémiparésie unilatérale Brucellose 67 Lombosciatiques invalidantes 54 7. DISCUSSION 7.1. Commentaires des résultats 7.1.1. Généralités L’analyse des données épidémiologiques effectuée dans la première partie de notre travail permet de dresser les constats suivants : premièrement, les infections cérébro-méningées n’apparaissent pas au premier rang des causes de morbidité en voyage et, deuxièmement, leur spectre étiologique est mal connu. En raison de nombreuses limites méthodologiques, les rares données disponibles sous-estiment l’importance réelle des ICM. Notre étude, qui à notre connaissance est la première consacrée spécifiquement aux étiologies des infections cérébroméningées d’importation, apporte des informations utiles qui méritent d’être successivement discutées. 7.1.2. Fréquence des infections cérébro-méningées En dépit de larges critères de définition intégrant tous les agents infectieux responsables de manifestations cérébro-méningées, les ICM importées représentent un motif rare d’admission à l’hôpital. Durant la période de l’étude (huit ans), elles ne représentent que 4 % des voyageurs hospitalisés dans notre service spécialisé de maladies infectieuses et tropicales. Ces résultats concordent avec les données issues des études récentes consacrées aux causes de morbidité chez les voyageurs ou aux voyageurs fébriles, qui estiment la part respective des ICM à 2 % en ne prenant en compte que les cas de méningite et d’encéphalite [60,61,82]. 7.1.3. Profil des voyageurs et caractéristiques du voyage Notre population est globalement représentative de celle des voyageurs. Du fait de l’inclusion de militaires (26,8 %), la proportion d’hommes jeunes est plus élevée que dans les études récentes consacrées aux causes de morbidité chez le voyageur [4,5,10,40,60,61,64]. Le recours à des moyens de prévention et le niveau d’observance de la CAP pour les voyageurs se rendant en zone impaludée semblent comparables aux données rapportées [36]. A l’exception de deux patients infectés par le VIH, nous n’avons pas relevé de comorbidités particulières favorisant la survenue d’une ICM. En revanche, notre étude diffère des études classiques réalisées chez les voyageurs du fait des destinations étrangères retenues : surreprésentation de l’Afrique (57,2 %) et inclusion de voyageurs à destination de l’Europe. 55 La prise en compte de séjours non tropicaux, souvent exclus dans les études, s’avère désormais nécessaire en regard du flux de voyageurs français à destination de l’Europe [6]. Cette destination, qui majore l’importance des causes cosmopolites, expose également à des arboviroses géographiquement localisées (encéphalites à tique, infections à Toscana virus par exemple) méconnues en France. 7.1.4. Présentation clinique Sur le plan clinique, nous souhaitons insister sur le polymorphisme clinique des ICM d’importation. Ces infections ne doivent pas être assimilées aux seuls syndromes méningés. La fréquence des présentations atypiques (21 %), voire la possibilité de manifestations psychiatriques inaugurales comme dans notre observation de dengue révélée par un accès maniaque [72] expliquent les difficultés diagnostiques rencontrées par les praticiens de première ligne. La notion d’un voyage récent doit être systématiquement recherchée lors de l’interrogatoire d’un patient fébrile et/ou présentant des manifestations aiguës neurologiques et/ou psychiatriques. 7.1.5. Parcours de soins L’analyse du parcours de soins de nos patients est instructive à plusieurs titres. 7.1.5.1. Sur le lieu de voyage Le taux élevé de recours à un médecin sur le lieu de voyage (75 %) et la forte proportion (55 %) d’évacuations sanitaires témoignent de la difficulté diagnostique et de la sévérité des ICM. Sur place, six patients (40 %) sur quinze ont été victimes d’un diagnostic erroné et d’une prise en charge inadaptée (traitement ambulatoire à tort pour cinq cas et traitement hospitalier inadapté dans le sixième cas). 7.1.5.2. Au retour Dans notre étude, le délai médian de 4 jours entre les symptômes et l’hospitalisation est comparable aux données classiques rapportées dans les études consacrées au paludisme d’importation à P. falciparum [10,15,19]. Cependant, parmi les patients qui se sont présentés aux urgences (SAU), six (20 %) ont été pris en charge de façon inadaptée. Dans quatre cas (13 %), le diagnostic initial était erroné (un paludisme à P. falciparum, trois méningites). Au sein des 14 patients ayant eu recours à un médecin généraliste, neuf (64 %) ont été pris en charge à tort en ambulatoire (un cas de paludisme, huit cas de méningite). Au total, sur l’ensemble de notre population, un retard au diagnostic moyen de 6,9 jours a été estimé chez 20 patients (36 %). 56 Ces constatations résultent de deux écueils fréquemment observés dans la prise en charge des pathologies du retour. D’une part, la méconnaissance de pathologies non familières pour les médecins non expérimentés (paludisme en particulier), d’autre part des carences dans la prise en charge initiale au niveau des services d’accueil des urgences (SAU). Compte tenu de la gravité potentielle de certaines étiologies d’ICM, la découverte par un praticien de manifestations neurologiques ou psychiatriques, associées ou non à de la fièvre, chez un voyageur, justifie une prise en charge hospitalière urgente, a fortiori s’il existe une notion de séjour en zone d’endémie palustre. Au niveau des SAU, les infections graves ont été bien repérées dans l’ensemble. En revanche, les tableaux frustes d’allure virale ont été sous estimés. Ainsi, au SAU, si un diagnostic bénin formel n’est pas rapidement confirmé, ou bien que la surveillance et la continuité des soins ne puissent pas être assurées, la règle est d’hospitaliser le voyageur dans un service spécialisé. 7.1.6. Examens paracliniques Dans notre étude, deux examens simples ont guidé l’enquête étiologique : le frottis sanguin à la recherche d’hématozoaires du paludisme et la ponction lombaire. Parmi les examens biologiques usuels rapidement disponibles, la mise en évidence d’une thrombopénie à l’hémogramme et d’une hyper bilirubinémie apportaient des arguments indirects en faveur d’un paludisme à P. falciparum. La présence d’un syndrome inflammatoire était peu discriminante pour le diagnostic étiologique des méningites. En effet, la CRP était élevée chez 42 % des patients présentant une ICM d’origine virale confirmée. Nous n’avons pas utilisé le dosage de la procalcitonine sérique qui permet de distinguer une cause bactérienne d’une cause virale [93]. L’interprétation de l’analyse cytologique du LCR doit être prudente. En accord avec les données récentes, un quart des ICM d’origine virale avaient une prédominance de polynucléaires à la PL. La présence d’une hypoglycorachie n’est pas non plus synonyme de méningite bactérienne. L’imagerie cérébrale est utile au diagnostic des encéphalites et des lésions focales (abcès, cysticercose). Elle participe surtout au diagnostic différentiel. Dans cette indication l’IRM cérébrale est plus performante que la TDM cérébrale [21]. 7.1.7. Panorama étiologique Notre étude confirme la diversité des causes d’ICM chez le voyageur. Au sein de notre effectif réduit de 56 patients, plus de quinze agents pathogènes différents ont été mis en évidence chez les 42 patients dont le diagnostic était confirmé. Les taux élevés de 57 confirmation diagnostique de 75 % en prenant en compte les cas de paludisme et de 68 % pour les ICM non palustres méritent d’être soulignés. Ce pourcentage inhabituel [73], en partie dû à la forte proportion du paludisme à P. falciparum, peut également s’expliquer par la réalisation systématique d’une enquête étiologique approfondie (biologie moléculaire du LCR en particulier). A l’instar des études récentes dédiées aux fièvres de retour ou aux pathologies d’importation [3,4,5,34,40,45,71], nous retrouvons une large prédominance des causes cosmopolites. Dans notre série, les infections cérébro-méningées tropicales ne représentent que 33 % des diagnostics étiologiques confirmés et seulement 25 % de l’ensemble des ICM. Au sein des infections tropicales, le paludisme grave dans son expression neurologique (neuropaludisme) est quasiment la seule étiologie observée, seuls deux cas d’encéphalite attribués respectivement à une dengue et une typhoïde ayant été dénombrés. Ce résultat, en partie explicité par l’importance des voyages en Afrique subsaharienne (57 %), appelle deux commentaires. Premièrement, l’absence de chimioprophylaxie adaptée est un facteur de risque reconnu d’évolution vers le paludisme grave [15]. Seuls deux patients atteints de paludisme grave ont reçu une CAP optimale. Deuxièmement, il faut systématiquement évoquer cette hypothèse devant des symptômes neurologiques chez un voyageur. A condition de l’évoquer, le diagnostic obtenu par la réalisation d’un frottis sanguin est aisé. Dans les cas difficiles, les arguments épidémiologiques (zone impaludée, sujet non immun), la présence d’une splénomégalie et/ou d’un ictère (clinique ou biologique) et d’une thrombopénie permettent de distinguer cette encéphalite parasitaire des autres causes d’ICM [11,19,29]. Parmi les maladies cosmopolites, les viroses représentent la principale cause d’ICM. Au sein des diagnostics étiologiques confirmés, une origine virale a été retenue chez 57 % des patients, indépendamment de la destination visitée. Comme dans les études consacrées aux méningites dans la population générale [47], les méningites à Enterovirus figurent au premier rang des causes de méningite chez le voyageur. Un séjour en région tropicale ne doit pas les faire éliminer, bien au contraire, les circonstances du voyage favorisent le développement de ces affections à transmission oro-fécale, comme cela a été rapporté en Tunisie ou à Djibouti lors d’une épidémie favorisée par les phénomènes climatiques [8,50]. Des tableaux d’encéphalite sévère sont possibles. Quelle que soit la forme clinique, et compte tenu de la faible valeur prédictive de la cytologie du LCR dans les infections virales, la précocité du diagnostic est améliorée par l’utilisation systématique des outils de biologie moléculaire dans le LCR. Les virus de la famille des Herpesviridae (observés à huit reprises dans notre étude) sont à 58 rechercher systématiquement, prioritairement HSV-1 (plus rarement HSV-2) qui demeure la première cause d’encéphalite de l’adulte [46,56]. Cette encéphalite potentiellement mortelle, comme en témoigne le décès inacceptable de notre patiente rapatriée de Tunisie, doit être une hantise pour le clinicien. Elle justifie le recours à un traitement probabiliste par de l’aciclovir par voie parentérale devant tout tableau de méningo-encéphalite à liquide clair [14]. Dans les pays en voie de développement, les moyens diagnostiques et l’aciclovir peuvent faire défaut, justifiant ainsi le rapatriement sanitaire urgent, vers un service spécialisé, de toute suspicion d’encéphalite. Les infections à EBV, CMV, VZV ou HHV-6 sont des causes rares d’ICM chez l’immunocompétent [16]. Elles doivent être évoquées en seconde intention. Nous avons identifié quatre cas (7 %) d’infection par le VIH. Dans deux cas, il s’agissait de méningites lymphocytaires révélatrices d’une primo-infection par le VIH chez des militaires. Ces infections étaient secondaires à des expositions sexuelles à risque survenues lors de mission de courte durée (Djibouti, Nouvelle-Calédonie). Elles traduisent la faillite des mesures de lutte réglementaires instituées dans les armées (éducation sanitaire, distribution de préservatifs et mise à disposition de kits de prophylaxie post-exposition au VIH sur tous les théâtres d’opérations). Chez les voyageurs, le risque d’infection par le VIH est également élevé. Son importance dépend de la prévalence de l’infection à VIH dans la région visitée, de la durée de séjour (risque majoré chez l’expatrié en particulier), du nombre de partenaires et de l’absence ou du mauvais usage des préservatifs. Chez les voyageurs effectuant des séjours brefs, la fréquence des conduites sexuelles à risque est estimée entre 5 et 50 % selon les destinations et le profil du voyageur [57]. La consommation d’alcool et l’utilisation de drogues récréatives augmentent ce risque. Malgré les campagnes d’informations, une étude récente réalisée en France, montre que la perception de ce risque VIH est insuffisante chez les voyageurs [43]. Ce risque ne doit pas être éludé lors des consultations de conseils aux voyageurs dont les objectifs ne se limitent pas à la prévention du paludisme et aux vaccinations [77]. A fortiori, l’hypothèse d’une primo-infection VIH doit être envisagée devant des céphalées fébriles ou des manifestations neurologiques centrales inexpliquées au retour de voyage. Les deux autres infections par le VIH sont survenues chez des touristes appartenant à des groupes à risque (toxicomane, homosexuel). Elles ont été diagnostiquées à l’occasion d’ICM sévères inaugurales d’un SIDA. Les patients infectés par le VIH sont des voyageurs à risque, le dépistage de l’infection par le VIH fait également partie intégrante des conseils aux voyageurs. Parmi les causes singulières d’ICM rencontrées, il faut souligner l’observation d’un cas de 59 méningite à Toscana virus contractée en Italie. Cette arbovirose due à la piqûre d’un phlébotome, fréquente en Méditerranée, est de plus en plus souvent rapportée chez les voyageurs [32]. Elle illustre la réalité des risques d’importation de pathogènes géographiquement localisés en Europe. Seules quatre infections cérébro-méningées d’origine bactérienne ont été observées. Parmi celles-ci, on doit signaler un cas de méningite à méningocoque de sérotype B contracté en Allemagne à l’occasion d’un voyage scolaire. Les infections à méningocoques sont des infections redoutables, rares chez le voyageur. Le risque global est estimé à 0,4/100 000 voyageurs par mois, il culmine à 200/100 000 chez les pèlerins de la Mecque [49]. Chez le voyageur immunocompétent, cette infection cosmopolite doit être prise en considération dans trois circonstances : les rassemblements de population de type Pèlerinage de la Mecque en Arabie Saoudite, un séjour prolongé en Afrique subsaharienne pendant la saison sèche (ceinture méningitique de Lapeyssonnie) et la survenue d’une épidémie locale de méningites. Selon les recommandations françaises, la vaccination n’est obligatoire que pour se rendre au pèlerinage de la Mecque (vaccin tétravalent A, C, Y, W135). Elle est recommandée chez les voyageurs se rendant dans une zone où sévit une épidémie (mission humanitaire en particulier), les personnes se rendant dans une zone endémique au moment de la saison de transmission, dans des conditions de contact étroit et prolongé avec la population locale [39]. Dans les pays où circulent des souches évitables par un vaccin (par exemple l’Angleterre), la vaccination peut être discutée chez les étudiants amenés à vivre en collectivité [94]. De nombreuses autres causes rares d’infections neuro-méningées n’ont pas été rencontrées dans notre étude comme la trypanosomose, la rage ou les encéphalites dues à des arboviroses (fièvre de la vallée du Rift, West-Nile, encéphalite japonaise), nous les envisagerons dans le cadre de la démarche diagnostique. 7.1.8. Morbidité et mortalité Nos résultats illustrent la sévérité des ICM importées. Près d’un tiers (28,5 %) des patients ont été admis en réanimation. La durée moyenne de séjour de l’ensemble des patients hospitalisés (14 jours) est comparable aux données disponibles sur le paludisme grave d’importation [27]. En ce qui concerne la létalité et compte tenu du faible effectif, le décès observé est à rapprocher des taux de létalité cités dans les études consacrées aux encéphalites (6 %) [30,46,56] ou au paludisme grave d’importation (10 %) [15,27]. Le taux de séquelles de 7 % apparaît non négligeable. 60 7.2. Limites du travail Les résultats de notre étude doivent être interprétés avec prudence pour trois raisons principales. 1. Etant donné la rareté des ICM d’importation, nous avons conduit une analyse rétrospective, ce qui est critiquable. Néanmoins, le codage des pathologies (PMSI) et la prise en charge de tous les patients ont été réalisés par la même équipe durant la période de l’étude, assurant ainsi un recueil exhaustif, une homogénéité de prise en charge et un faible taux de données manquantes. 2. Ces résultats ne peuvent pas être stricto sensu extrapolés à la population globale des voyageurs du fait de la présence de biais de sélection : - Biais lié à l’inclusion de militaires qui constituent une population particulière, jeune, sélectionnée, bénéficiant de mesures prophylactiques étendues, mais également plus exposée. - Biais en rapport avec une surreprésentation des séjours à destination de l’Afrique subsaharienne (57 %) qui rendent compte de l’importance du paludisme grave dans notre série. Notons qu’à l’inverse des nombreuses études conduites chez les voyageurs fébriles hospitalisés, le biais d’hospitalisation (effet centre et recrutement des formes les plus sévères) ne peut être incriminé dans ce type de pathologie relevant nécessairement d’une prise en charge hospitalière. 3. Le faible effectif de l’échantillon limite bien entendu la portée de nos résultats. Il s’explique par la rareté des ICM et suggère l’intérêt de la mise en place d’une étude prospective multicentrique. 61 7.3. Prise en charge diagnostique d’une infection cérébro-méningée d’importation chez l’adulte La prise en charge diagnostique des infections cérébro-méningées importées est difficile. A partir de notre expérience et des données de la littérature, dans cette dernière partie du travail, nous proposons des recommandations de pratique clinique à l’intention des médecins généralistes ou urgentistes. Nous centrerons nos propos sur les ICM du sujet immunocompétent. En pratique, le clinicien suspecte une infection cérébro-méningée d’importation en présence d’anomalies neurologiques associées le plus souvent à une fièvre (retrouvée à l’examen ou dans l’anamnèse) et la notion d’un séjour à l’étranger (récent ou ancien). Compte tenu de la diversité et du nombre important des étiologies à tropisme cérébroméningé, le médecin doit utiliser des données simples pour tenter de rétrécir le champ des diagnostics possibles, tout en privilégiant les causes les plus graves et celles pour lesquelles on dispose d’un traitement efficace. La stratégie initiale se fonde surtout sur l’interrogatoire, l’examen clinique et quelques examens biologiques simples. Selon les cas et les possibilités locales, il peut être nécessaire de réaliser rapidement une imagerie cérébrale voire un EEG. 7.3.1. Données cliniques 7.3.1.1. Evaluation de la gravité et gestes d’urgence La présence de signes neurologiques représente en soi un élément de gravité qui justifie une hospitalisation dans un service spécialisé. Parallèlement, la recherche d’autres paramètres de gravité imposant un transfert immédiat en unité de soins intensifs et/ou des mesures thérapeutiques immédiates est impérative. Ainsi, devant tout patient présentant un purpura fébrile comportant au moins un élément nécrotique ou ecchymotique de diamètre supérieur ou égal à 3 millimètres, il faut immédiatement évoquer une infection à méningocoque et lui administrer sans retard (avant tout examen complémentaire) un antibiotique par voie intraveineuse (sans lidocaïne) ou intramusculaire (ceftriaxone 1 à 2 g ou céfotaxime aux mêmes doses ou amoxicilline 1 g). On recherchera également des troubles de la conscience (estimés par le score de Glasgow), des troubles du comportement, des convulsions, des signes de choc (une pression artérielle systolique < 90 mm Hg, un rythme cardiaque > 90 battements/min, une fréquence respiratoire > 20/min, des marbrures, une oligurie), une cyanose, des sueurs et des signes hémorragiques (ces derniers faisant discuter l’isolement du patient pour suspicion de fièvre hémorragique virale en cas de retour d’une zone d’endémie il y a moins de 3 semaines). La recherche d’une comorbidité susceptible de 62 décompensation achève cette première étape. 7.3.1.2. Interrogatoire du patient et de son entourage On recherchera en priorité à l’interrogatoire du patient (ou de son entourage si l’état de conscience du malade ne lui permet pas de répondre) la notion d’un voyage à l’étranger récent ou ancien, la destination exacte du séjour, comprenant également les lieux d’escale éventuelle ainsi que l’itinéraire et les conditions du séjour afin d’orienter vers un agent pathogène d’importation suivant la zone géographique (Tableau 14). 63 Tableau 14 : Distribution géographique des germes à tropisme neurologique (d’importation) Zones géographiques Amérique du Nord Germes d’importation Bactéries : Rickettsia sp, Ehrlichia sp. Virus : Encéphalites équines de l’Ouest et de l’Est, Saint-Louis, Powassan, California, La Crosse, Jamestown Canyon, Trivittatus, vallée Cache, West Nile, chorioméningite lymphocytaire, fièvre du Colorado. Parasites : Paragonimus sp Champignons : Histoplasma sp, Coccidiodes immitis, Blastomyces dermatitidis. Amérique Latine Bactéries : Rickettsia sp Virus : Encéphalite équine du Venezuela, Saint-Louis, dengue, fièvre jaune, Rocio, chorioméningite lymphocytaire, Machupo, Junin, Sabia, Guanarito, Oropouche. Parasites : Trypanosoma cruzi, Plasmodium falciparum, Schistosoma sp, Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Strongyloides stercoralis, Taenia solium, Paragonimus sp, Wuchereria sp, Onchocerca volvulus, Mansonella perstans, Gnathostoma spinigerum, Angiostrongylus cantonensis. Champignons : Coccidioides immitis, Histoplasma sp. Caraïbes Bactéries : Rickettsia sp. Virus : Dengue, Saint-Louis Parasites : Plasmodium falciparum Taenia solium, Schistosoma sp, Paragonimus sp, Strongyloides stercoralis, Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Trypanosoma rhodesiense, Trypanosoma gambiense, Wuchereria sp, Angiostrongylus cantonensis. Champignons : Histoplasma sp. Afrique Bactéries : Rickettsia sp. Virus : Dengue, West Nile, vallée du Rift, Lassa, Marburg, Ebola, Bhanja, Orungo, Thogoto, Chikungunya, Fièvre Hémorragique Crimée-Congo, fièvre jaune. Parasites : Plasmodium falciparum, Taenia solium, Schistosoma sp, Paragonimus sp, Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Wuchereria sp, Loa loa, Onchocerca. volvulus, Dracunculus medinensis, Mansonella perstans, Angiostrongylus cantonensis, Strongyloides stercoralis. Champignons : Blastomyces dermatitidis, Histoplasma sp. Europe Bactéries : Rickettsia sp, Ehrlichia sp. Virus : West Nile, chorioméningite lymphocytaire, Encéphalite de l’Europe Centrale, Encéphalite verno-estivale russe, Encéphalomyélite ovine (louping ill), Tahyna, Inkoo, Snowshoe hare, Toscana, Arbia, Erve, Bhanja, Lipovnik, Tribec, Eyach, Thogoto, Kemerovo, Fièvre Hémorragique Crimée-Congo, Puumala, Omsk. Parasites : Opistorchis sp, Ancylostoma duodenale. Asie Bactéries : Rickettsia sp. Virus : Dengue, West Nile, Encéphalite japonaise, Negishi, Nipah, Bhanja, Tahyna, Fièvre Hémorragique Crimée-Congo, Chikungunya, Langat, Kyasanur. Parasites : Plasmodium falciparum, Taenia solium, Schistosoma sp, Paragonimus sp, Clonorchis sp, Opistorchis sp, Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Wuchereria sp, Brugia sp, Gnathostoma spinigerum, Angiostrongylus cantonensis, Strongyloides stercoralis. Champignons : Blastomyces dermatitidis, Histoplasma sp. Océanie Bactérie : Rickettsia sp. Virus : Dengue, Encéphalite de la vallée Murray, Hendra, Kunjin. Parasites : Plasmodium falciparum, Taenia solium, Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Wuchereria sp, Angiostrongylus cantonensis, Strongyloides stercoralis. 64 On précisera également les dates de séjour (arrivée et retour) pour retenir les étiologies d’incubation compatible (Tableaux 15 et 16). Tableau 15 : Agents1 responsables d’ICM et délai d’incubation inférieur à 15 jours [13,28,31,33] Bactérie Virus Parasite Champignon Neisseria meningitidis Enterovirus Plasmodium falciparum Coccidioides immitis Streptococcus pneumoniae HSV - 1,2 Taenia solium Histoplasma sp Listeria monocytogenes VIH Gnathostoma spinigerum Haemophilus influenzae HHV6 Trypanosoma sp Borrelia burgdorferi VZV Toxoplasma gondii Brucella melitensis Flaviridae Naegleria fowleri Mycoplasma pneumoniae Bunyaviridae Angiostrongylus cantonensis Salmonella paratyphi Togaviridae Trichinella spiralis Salmonella typhi Adenovirus Strongyloides stercoralis Leptospira sp Virus Herpes B Fasciola sp Rickettsia sp Rougeole Chlamydiae sp Arenaviridae Streptococcus agalactiae Nipah, Hendra Escherichia coli Marburg, Ebola Ehrlichia sp Reoviridae 1 Les agents principaux sont en gras 65 Tableau 16 : Agents1 responsables d’ICM et délai d’incubation supérieur à 15 jours [13,28,31,33] Bactérie Virus Parasite Champignon Mycoplasma pneumoniae Enterovirus Plasmodium falciparum Cryptococcus neoformans Borrelia burgdorferi HSV - 1,2 Trypanosoma sp Coccidioides immitis Brucella melitensis VIH Taenia solium Blastomyces dermatitidis Leptospira sp Rage Toxoplasma gondii Mycobacterium tuberculosis EBV Acanthamoeba sp Salmonella typhi VZV Balamuthia mandrillaris Salmonella paratyphi CMV Angiostrongylus cantonensis Treponema pallidum Oreillons Multiceps sp Coxiella burnetii Trichinella spiralis Chlamydiae sp Toxocara sp Bartonella henselae Paragonimus sp Ehrlichia sp Filaires Schistosoma sp Fasciola sp Echinococcus sp 1 Les agents principaux sont en gras La période du séjour peut être déterminante car il existe d’importantes variations saisonnières des maladies. En Afrique, par exemple la saison sèche augmente le risque de méningite à méningocoque au niveau de la ceinture méningitique. La saison des pluies favorise les maladies à transmission vectorielle telles que la dengue en Asie [97]. La connaissance des diverses épidémies en cours dans les pays visités est primordiale. On retiendra par exemple les épidémies de méningite à méningocoque W135 au retour du pèlerinage de la Mecque en 2000 [90], de dengue à Saint-Martin [68] et de West-Nile à NewYork en 1999 [59]. La veille épidémiologique est facilitée par les multiples sources d’informations désormais disponibles sur Internet. Une liste de sites d’accès facile est présentée dans le tableau 17. 66 Tableau 17 : Sites de veille sanitaire multilingues disponibles sur Internet http://www.invs.sante.fr http://www.who.int http://www.cdc.gov http://www.eurosurveillance.org http://www.promedmail.org http://edisan.timone.univ-mrs.fr/edisan/default.html http://www.gideononline.com Par ailleurs, l’exposition à des risques infectieux particuliers de contamination, doit être recherchée (comportement sexuel à risque, baignade, contact animal) (Tableaux 18 et 19). Tableau 18 : Répartition des pathogènes suivant les activités à risque1 Activités à risque Pathogènes Randonnées forestières ou rurales Rickettsia sp, Erlichia sp, Borrelia burgdorferi Arboviroses et fièvres hémorragiques virales (FHV) Trypanosoma sp Exposition sexuelle ou sanguine VIH, Treponema pallidum, FHV Baignades Leptospira sp, amibes telluriques, Schistosoma sp Ingestion de poissons crus Clonorchis sp, Opistorchis sp, Gnathostoma spinigerum Ingestion de crustacés Paragonimus sp, Angiostrongylus cantonensis, Salmonella sp Ingestion de viande insuffisamment cuite Trichinella spiralis, Toxoplasma gondii, Taenia solium Ingestion de lait cru Brucella melitensis, Listeria monocytogenes Marche pieds nus Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Strongyloides stercoralis 1 Une liste plus exhaustive figure en annexe 3 67 Tableau 19 : Répartition des pathogènes suivant les animaux à risque1 Activités à risque Pathogènes Morsure de carnassiers ou de chiroptères Rage Morsure de singe Herpès B Morsure de rongeur Chorioméningite lymphocytaire Contact avec rongeur Puumala, Lassa, Junin, Guanarito, Machupo, Sabia, Leptospira sp Contact avec un chat Bartonella henselae, Toxocara cati, Toxoplasma gondii Echinococcus multilocularis Contact avec un chien Toxocara canis, Capnocytophaga canimorsus Multiceps sp, Echinococcus sp Contact avec les porcs Nipah, Encéphalite japonaise, Taenia solium Contact avec des animaux d’élevage Coxiella burnetii, Brucella melitensis Morsure de tique Rickettsia sp, Ehrlichia sp, Borrelia burgdorferi Encéphalite de l’Europe Centrale, Encéphalite verno-estivale russe et autres arbovirus à tiques. Piqûre de moustique West-Nile, dengue, fièvre jaune, Saint-Louis, Encéphalite japonaise, Chikungunya, vallée du Rift et autres arbovirus à moustiques, Wuchereria sp, Brugia sp Piqûre de moucheron Mansonella perstans Piqûre de simulie Onchocerca volvulus Piqûre de taon (Chrysops) Loa loa Piqûre de phlébotome Toscana, Arbia 1 Une liste plus exhaustive figure en annexe 3 Il faut également rechercher une notion de contage dans l’entourage (entérovirus, tuberculose, mycoplasme, adénovirus, rougeole, oreillons, varicelle, rubéole, etc.). De même, le terrain du patient, son âge, ses comorbidités et surtout son statut immunitaire (infection par le VIH, corticothérapie au long cours, chimiothérapie et autres traitements immunosuppresseurs) doivent être pris en considération car ils élargiront le spectre des agents pathogènes à incriminer (toxoplasmose, cryptococcose, listériose, candidose, tuberculose, aspergillose, CMV, etc.). Enfin, le statut vaccinal, les mesures prophylactiques réellement suivies, la prise et l’observance d’une chimioprophylaxie antipaludique (en cas de séjour en zone impaludée) complètent l’interrogatoire. 68 7.3.1.3. Examen clinique L’examen neurologique permet le plus souvent d’orienter le diagnostic vers l’une des trois grandes formes cliniques : méningite, encéphalite ou syndrome tumoral. Dans les situations difficiles, certains signes neurologiques évocateurs méritent d’être recherchés. C’est le cas des troubles de la mémoire, de la personnalité, du langage et de l’épilepsie temporale (hallucinations auditives, olfactives ou gustatives) qui doivent alerter sur la méningoencéphalite herpétique, véritable urgence thérapeutique. D’autres signes tels que des paralysies des paires crâniennes (surtout III, VI, VII, IX et X) réalisent le tableau classique de rhombencéphalite évocateur d’une listériose neuroméningée. Malheureusement, les données cliniques sont le plus souvent peu spécifiques. Dans ces situations, la recherche de signes associés prend toute son importance. Les principaux signes cliniques orientant vers une étiologie spécifique figurent dans le tableau 20. 69 Tableau 20 : Orientation diagnostique devant des signes cliniques extra-neurologiques électifs1 Données cliniques Purpura Etiologies Bactéries : méningocoque, pneumocoque, rickettsioses Virus : dengue, CMV, EBV, rubéole, varicelle, oreillons, fièvre jaune et autres fièvres hémorragiques virales Exanthème Bactéries : mycoplasme, maladie de Lyme, rickettsioses, leptospirose, fièvre typhoïde, syphilis Virus : entérovirus, VIH, rougeole, rubéole, VZV, HHV-6, CMV, EBV, arboviroses Parasites : trypanosomose africaine Ictère Bactéries : leptospirose, fièvre typhoïde, mycoplasme. Virus : EBV, CMV, fièvre jaune Parasites : paludisme Urticaire Virus : VIH Parasites : schistosomose, distomatose, ascaridiose, toxocarose Tache noire d’inoculation Bactéries : rickettsioses à tiques Pharyngite Virus : entérovirus, VIH, adénovirus, EBV, CMV, HHV-6, fièvres hémorragiques virales Adénopathies Bactéries : tuberculose, bartonellose, brucellose, rickettsioses, syphilis Virus : VIH, EBV, CMV, rubéole, adénovirus, varicelle Parasites : toxoplasmose, trypanosomose, filariose lymphatique, Champignons : histoplasmose Splénomégalie Bactéries : fièvre typhoïde, brucellose, rickettsioses, leptospirose, bartonellose, tuberculose Virus : EBV, CMV, VIH, dengue Parasites : paludisme, trypanosomose Champignons : histoplasmose Hépatomégalie Bactéries : brucellose, tuberculose, fièvre Q Parasites : paludisme, trypanosomose, schistosomose Parotidite et/ou orchite Virus : oreillons, chorioméningite lymphocytaire Signes pulmonaires Bactéries : mycoplasme, tuberculose, Chlamydiae sp, fièvre Q Virus : adénovirus, HHV-6, chorioméningite lymphocytaire Parasites : paragonimose Champignons : histoplasmose Syndrome hémorragique Bactéries : leptospirose, fièvre typhoïde, méningocoque Virus : dengue, fièvre jaune et autres fièvres hémorragiques virales Parasites : paludisme 1 En gras figurent les étiologies essentielles à évoquer 70 Au terme de l’examen clinique, après avoir éliminé les signes de gravité, une attitude pragmatique se dessine. Premièrement, en cas de signes de focalisation, d’HTIC, de convulsions, d’antécédents de maladies du système nerveux central ou de terrain d’immunodépression, un scanner cérébral doit être réalisé en urgence à la recherche d’un processus expansif cérébral (d’origine infectieuse, tumorale, vasculaire, inflammatoire, etc.). Toutefois, la réalisation de cet examen expose à une perte de chance [38] (en cas de méningite grave ou de méningo-encéphalite herpétique). Ainsi, des hémocultures systématiques et un traitement probabiliste par voie parentérale associant 2 g d’amoxicilline et 750 mg d’aciclovir doivent être initiés avant la réalisation de l’imagerie. Bien que classique, la recherche d’un œdème papillaire au fond d’œil manque en pratique de pertinence et ne doit pas intervenir dans la décision. Deuxièmement, en cas de séjour en région tropicale ou subtropicale, un frottis sanguin sera demandé systématiquement. Associé à la goutte épaisse et au QBC, il permettra de repérer même des parasitémies très faibles. Néanmoins, nous voudrions insister sur un point essentiel : la recherche de Plasmodium falciparum doit être réalisée par des biologistes expérimentés et le résultat doit être obtenu en moins d’une heure. En cas de négativité du premier frottis, associée à la présence d’une thrombopénie et/ou d’une perturbation du bilan hépatique, un traitement d’épreuve par quinine parentérale peut être initié. D’autres frottis seront à refaire 8 heures plus tard. Le frottis sanguin permet également de mettre en évidence Trypanosoma brucei sp agent de la trypanosomose humaine africaine, rare mais possible en cas de voyage dans une zone d’endémie ainsi que des Borrelia sp exceptionnellement, dans un contexte de fièvre récurrente [9,17]. Troisièmement, après avoir écarté l’hypothèse d’un paludisme et en l’absence de signes d’un processus expansif intracrânien (déjà cités supra), on réalisera une ponction lombaire. La figure 4 schématise la prise en charge initiale d’une infection cérébro-méningée chez un voyageur dans un service d’accueil des urgences. 71 Figure 4 : Prise en charge initiale d’une infection cérébro-méningée chez un voyageur Purpura ? Oui Céphalosporine de troisième génération par voie parentérale en urgence puis transfert en réanimation Oui Hémocultures, amoxicilline 2 g et aciclovir 750 mg par voie parentérale puis Non Convulsions ? HTIC ? Troubles de conscience ? imagerie cérébrale en urgence Signes de focalisation ? Non Abcès, empyème, tumeur, Imagerie cérébrale normale Séjour en zone impaludée ? Non hémorragie méningée ou intraparenchymateuse, thrombophlébite cérébrale, pathologie inflammatoire, … Oui Frottis sanguin à la recherche d’hématozoaires Ponction lombaire Avis spécialisé médico-chirurgical Négatif Positif Réanimation 72 7.3.2. La ponction lombaire C’est un examen primordial du diagnostic positif puis du diagnostic étiologique. Elle doit être réalisée rapidement puisque dans les infections cérébro-méningées curables, la précocité du traitement antibiotique ou antiviral est un élément majeur du pronostic [85]. Elle ne doit pas être retardée par la réalisation d’une imagerie cérébrale dont les seules indications sont une immunodépression connue, des convulsions inaugurales, des troubles de la conscience ou des signes neurologiques déficitaires [91]. Les analyses du LCR qui sont indispensables sont la biochimie (protéinorachie et glycorachie), une étude microbiologique avec mise en culture et recherche de bactéries, de mycobactéries, de champignons et de parasites à l’examen direct, une analyse cytologique qui est en général réalisée par le laboratoire de bactériologie et un examen anatomopathologique. Deux à trois tubes supplémentaires sont prélevés puis gardés à 4°C, et utilisés secondairement pour l’enquête étiologique si nécessaire (LCR clair en particulier). La suite de la démarche s’articule autour des données du LCR, du contexte épidémiologique et de l’ensemble des renseignements cliniques. 7.3.2.1. Orientation diagnostique suivant l’aspect du LCR Si le LCR est hémorragique, il faut éliminer une hémorragie méningée où le liquide est uniformément rouge et incoagulable dans les trois premiers tubes. En cas de doute avec une PL traumatique où la teinte se modifie dans les trois premiers tubes avec un éclaircissement progressif du LCR, on peut demander une centrifugation : si le surnageant demeure xanthochromique, c’est un argument en faveur d’une hémorragie méningée (présence de pigments). Le LCR peut être hémorragique dans certains cas de méningites bactériennes, dans la tuberculose neuroméningée, lors de la rupture d’un anévrisme infectieux cérébral et dans la méningo-encéphalite herpétique. La mise en culture d’un liquide hémorragique doit donc être systématique. Il faudra penser aussi à la gnathostomose en cas de séjour dans le Sud-Est Asiatique [13]. Si le LCR est trouble, il faut envisager en premier la possibilité d’une méningite purulente (méningocoque, pneumocoque, listéria, haemophilus) qui peut parfois être décapitée par une antibiothérapie préalable. Si le LCR est clair, le clinicien doit systématiquement demander une PCR à la recherche des herpesviridae et des enterovirus ainsi que des prélèvements de gorge et selles pour mise en culture puis envisager de principe une méningo-encéphalite herpétique (MEH) qui justifie un traitement probabiliste par de l’aciclovir 15 mg/kg toutes les 8 heures par voie parentérale jusqu’à l’obtention des résultats de la PCR. Après avoir évoqué la MEH, on gardera à l’esprit 73 la possibilité d’une méningite bactérienne décapitée, d’une listériose neuroméningée, voire d’une méningite tuberculeuse dans les formes subaiguës. 7.3.2.2. Orientation diagnostique en fonction de l’analyse du LCR La première étape dans l’analyse paraclinique du LCR est l’examen direct après coloration au Gram qui peut permettre la détermination de la cellularité et la mise en évidence de l’agent pathogène. 7.3.2.2.1. Situation facile Examen direct du LCR positif Si l’examen direct par la coloration de Gram met en évidence une pléiocytose (cellularité supérieure à 10 leucocytes/mm3) avec une bactérie (cocci ou bacille à Gram positif ou négatif), l’enquête étiologique est simple, il s’agit d’une méningite purulente (pneumocoque et méningocoque surtout chez l’adulte) dont les schémas thérapeutiques sont bien codifiés [26]. On adaptera le traitement suivant les résultats de la culture et de l’antibiogramme (selon le contexte il est possible de mettre en évidence des champignons ou des parasites). 7.3.2.2.2. Situation difficile Examen direct du LCR négatif En cas d’absence de germe à la coloration de Gram à l’examen direct, l’enquête étiologique prend toute son importance. Il faudra tenir compte du contexte épidémiologique, de l’examen clinique et des données de la PL (cellularité, protéinorachie, glycorachie). On distingue schématiquement quatre situations. 7.3.2.2.2.1. Pléiocytose avec prédominance de polynucléaires neutrophiles (supérieurs à 50 %) (méningite puriforme) Il s’agit dans la grande majorité des cas d’une méningite bactérienne à son début ou décapitée par une antibiothérapie préalable en particulier si le rapport glycorachie/glycémie est inférieur à 0,4 (hypoglycorachie) et la protéinorachie supérieure à 1 g/l. C’est dans ce cadre qu’il est licite de réaliser sur le LCR une recherche des antigènes solubles (pneumocoque, méningocoque, haemophilus) par méthode immuno-chromatographique [83] ou une détection du méningocoque par PCR [76]. La PCR est essentielle car elle reste positive les premiers jours même sous antibiothérapie. Des hémocultures peuvent également permettre la mise en évidence du pneumocoque notamment. On débutera un traitement antibiotique probabiliste actif sur le méningocoque, le pneumocoque et Listeria selon le contexte épidémiologique et la gravité du tableau clinique. En cas de négativité des cultures du LCR à 48 h, il s’agira donc d’une méningite puriforme aseptique (MPA) qui fera discuter l’arrêt de l’antibiothérapie probabiliste et évoquer les diagnostics de méningite virale débutante (en particulier à 74 entérovirus), de processus expansif intracrânien (infectieux ou non) et de thrombophlébite cérébrale. Dans ces situations, on s’aidera des outils de biologie moléculaire en faisant une PCR sur LCR à la recherche des entérovirus et des herpesviridae (par principe), des prélèvements de gorge et de selles et d’une imagerie cérébrale en privilégiant l’IRM. 7.3.2.2.2.2. Pléiocytose avec prédominance de lymphocytes (supérieurs à 50 %) (méningite lymphocytaire aiguë) Une méningite lymphocytaire normoglycorachique avec élévation modérée de la protéinorachie (inférieure à 1 g/l) est a priori, virale. Il faut éliminer en premier la seule cause grave et curable qui est la méningo-encéphalite herpétique (HSV-1 et 2). En présence de signes encéphalitiques, on débutera un traitement par aciclovir 15 mg/kg toutes les huit heures en attendant les résultats de la recherche par PCR d’HSV dans le LCR. En second lieu, on évoquera les entérovirus qui constituent la cause principale des méningites lymphocytaires et ne nécessitent pas de traitement. Le diagnostic repose sur l’identification du génome d’entérovirus par PCR au niveau du LCR. Dans cette indication, des prélèvements de gorge et selles à la recherche de signes indirects d’infection à entérovirus (cultures virales positives sur deux sites) sont utiles. Chez le voyageur, ce d’autant qu’il existe un comportement à risque, une méningite lymphocytaire inexpliquée doit faire rechercher une primo-infection par le VIH. Le diagnostic repose sur le dosage de l’antigénémie P24, et la réalisation d’une sérologie VIH ELISA. Ailleurs, surtout s’il existe un exanthème, on évoquera d’autres viroses communes bénignes chez l’immunocompétent qui sont en pratique, détectées au niveau du LCR (PCR) en même temps que l’herpès : EBV, CMV, HHV-6 et VZV. Dans les cas vus tardivement où les tests directs s’avèrent négatifs, il peut être utile de faire des recherches de sécrétions intra-thécales d’anticorps en comparaison avec le sérum, en utilisant d’autres marqueurs (notamment un virus contrôle) comme comparateurs. Quand le ratio titre des anticorps sériques / titre des anticorps dans le LCR est inférieur à 20, il est presque pathognomonique d’une sécrétion intra-thécale d’anticorps, donc d’un processus infectieux spécifique du SNC (malgré le caractère inflammatoire de la barrière hémato-méningée qui laisse diffuser passivement les anticorps sériques). Quand le ratio est entre 20 et 100, il existe un doute. Au delà de 100, il n’y a pas de sécrétion intra-thécale. Cette méthode permet donc un diagnostic plutôt rétrospectif. Une méningite lymphocytaire hypoglygorachique avec protéinorachie supérieure à 1 g/l doit faire évoquer une listériose (dont la recherche par PCR est également possible), une méningite 75 bactérienne décapitée ou au tout début (intérêt de la PCR et des antigènes solubles) et enfin une méningite tuberculeuse au retour d’une zone d’endémie, chez un migrant ou un immunodéprimé (VIH en particulier). Le diagnostic repose sur un faisceau d’arguments épidémiologiques, cliniques, et la détection du génome dans le LCR et surtout la culture du LCR. En cas de signes encéphalitiques évocateurs d’une MEH, il convient de débuter un traitement antiviral présomptif (cf. ci-dessus). Les infections à Cryptococcus neoformans occupent une place à part. Elles peuvent donner un LCR très variable, cependant la présentation la plus fréquente est une formule lymphocytaire avec hyperprotéinorachie et hypoglycorachie. Cet agent fungique doit toujours être recherché en cas d’examen direct du LCR négatif. Le diagnostic repose sur la mise en évidence des levures par coloration à l’encre de Chine et par culture sur milieu de Sabouraud. Dans ce contexte, un test de dépistage rapide du VIH peut s’avérer utile. La figure 5 résume la conduite à tenir devant une méningite lymphocytaire aiguë à examen direct négatif au Gram. Figure 5 : Orientation diagnostique devant une méningite lymphocytaire à examen direct négatif au Gram Méningite lymphocytaire Hypoglycorachie Normoglycorachie Protéinorachie Méningite bactérienne décapitée à méningocoque, pneumocoque, haemophilus > 1g/l < 1g/l + signes encéphalitiques Antibiothérapie < 1g/l sans signes encéphalitiques Listeria, BK, herpès Cryptocoque 1 2 EV : Entérovirus HV : Herpesviridae Aciclovir 1 PCR EV +HV Entérovirus 2 Pas de traitement 76 Après avoir éliminé les étiologies précédentes, on évoque des causes bactériennes curables pour lesquelles la glycorachie est variable. Selon le contexte, le lieu du séjour (Tableau 14), le délai d’incubation (Tableaux 15 et 16), l’exposition (Tableaux 18 et 19), les signes cliniques (Tableau 20), biologiques (Tableau 21) et radiologiques pulmonaires (devant une toux), on recherchera à l’aide de sérologies ainsi que par PCR sur LCR Mycoplasma pneumoniae (sujet jeune, épidémie, signes respiratoires, exanthème), Borrelia burgdorferi (contexte de promenades forestières, camping, morsures de tiques), Leptospira sp (baignades, ictère, conjonctivite), Treponema pallidum (rapports sexuels non protégés, notion d’une ulcération génitale), Coxiella burnetii (contact avec des animaux d’élevage, signes respiratoires, cytolyse hépatique), Bartonella henselae (contact avec un chat), Chlamydiae sp (signes respiratoires), Brucella melitensis (tableau subaigu, contact avec du bétail, ingestion de laitage cru, leucopénie), Rickettsia sp et Ehrlichia sp (morsures de tiques, exanthème). Tableau 21 : Orientation diagnostique devant des signes biologiques associés à une ICM1 Signes biologiques Anémie Etiologies Bactéries : leptospirose Virus : fièvres hémorragiques virales Parasites : paludisme, trypanosomiase Thrombopénie Bactéries : leptospirose, rickettsioses Virus : arboviroses, VIH, fièvres hémorragiques virales Parasites : paludisme Leuconeutropénie Bactéries : fièvre typhoïde, rickettsioses, brucellose Virus : arboviroses, VIH, fièvres hémorragiques virales Parasites : paludisme Hyperéosinophilie Parasites : trichinose, fasciolose, angiostrongylose, anguillulose, toxocarose, gnathostomose, schistosomose, neurocysticercose Syndrome mononucléosique Virus: VIH, EBV, CMV Parasites : trypanosomiase, toxoplasmose Cytolyse hépatique Bactéries : leptospirose, fièvre typhoïde, maladie de Lyme, rickettsioses, fièvre Q Virus : VIH, EBV, CMV, fièvre jaune, dengue et autres arboviroses, fièvres hémorragiques virales Parasites : paludisme Hyper bilirubinémie Bactéries : leptospirose Virus : fièvre jaune. Parasites : paludisme 1 En gras figurent les étiologies principales 77 Concernant les sérologies, il faut insister sur l’importance des prélèvements sanguins tardifs (J0 et J15-21) susceptibles de mettre en évidence une ascension significative du titre des anticorps. Pour certains agents pathogènes (Mycoplasma pneumoniae, virus de la dengue), l’utilisation de tests de détection d’anticorps de type IgM par méthode ELISA permet un diagnostic précoce. Au retour de Guyane, il faut penser à la toxoplasmose « amazonienne » dont il existe des formes neurologiques sévères chez l’immunocompétent [18]. Ensuite, en cas de séjour dans une zone endémique ou touchée par une épidémie (importance de la veille sanitaire, voir le tableau 16), une arbovirose doit être recherchée au moyen de sérologies en fonction de la région géographique (Tableau 14). C’est le cas du West-Nile en cas de séjour en Camargue (zone endémique) ou de retour de New-York lors de l’épidémie de 1999 [59]. Autre exemple d’arbovirose, celui de l’encéphalite japonaise en cas de séjour en zone rurale (élevage de porcs) dans le Sud-Est asiatique. 7.3.2.2.2.3. Pléiocytose avec une formule panachée (50 % de lymphocytes et 50 % de polynucléaires neutrophiles) En cas d’hypoglycorachie et d’hyperprotéinorachie supérieure à 1g/l, on évoquera classiquement une listériose [54] puis l’ensemble des viroses. Dans cette situation, le rôle de la procalcitonine peut s’avérer utile afin de départager les causes bactériennes des causes virales. 7.3.2.2.2.4. Pléiocytose avec prédominance de polynucléaires éosinophiles (> 10 éosinophiles/mm3 ou au moins 10 % de la pléiocytose) (méningite à éosinophiles) Dans cette situation exceptionnelle, on évoquera devant une méningite à éosinophiles chez un voyageur suivant le lieu du séjour et les aliments consommés trois causes principales [13,33,41] : la neurocysticercose qui a une durée d’incubation pouvant aller jusqu’à des dizaines d’années après le séjour (ingestion de viande de porc pas assez cuite, séjour à la Réunion ou en Amérique du Sud), l’angiostrongylose (ingestion de crudités ou de crustacés d’eau douce crus en Polynésie) et la gnathostomose (ingestion de poissons crus en Asie du Sud-Est). Les autres étiologies sont présentées dans le tableau 22. 78 Tableau 22 : Etiologies des méningites à éosinophiles1 [33] Tropicales2 Cosmopolites3 Angiostrongylose Cysticercose Gnathostomose Trichinose Schistosomoses Toxocarose Filarioses Hydatidose Paragonimose Echinococcose alvéolaire Distomatose 1 En gras, figurent les étiologies les plus fréquentes 2 Sauf pour la paragonimose que l’on peut retrouver en Amérique du Nord 3 Sauf pour l’échinococcose alvéolaire que l’on retrouve dans les régions septentrionales 7.3.2.2.2.5. Cellularité normale Il peut s’agir d’un méningisme, d’une méningite bactérienne vue très précocement ou d’une méningite infectieuse chez un sujet immunodéprimé (VIH en particulier). Cette démarche générale guidée par les données de la PL est résumée dans la figure 6. 79 Figure 6 : Arbre décisionnel selon les caractéristiques du LCR Ponction lombaire Hémorragie méningée Examen direct négatif Examen direct positif Avis spécialisé Traitement probabiliste médicochirurgical adapté à l’examen direct Méningite Méningite Méningite Méningite Cellularité à formule puriforme lymphocytaire à normale aiguë éosinophiles panachée Cysticercose Listériose Angiostrongylose Gnathostomose Glycorachie Glycorachie Glycorachie abaissée normale abaissée Bactérienne Méningite virale Tuberculose Cryptocoque, listériose décapitée ou débutante Arbovirose Listériose Imagerie cérébrale Tuberculose Intracellulaire Cryptocoque Au terme de cette démarche, devant une recherche négative du paludisme et une ponction lombaire normale ou non contributive, soit il s’agit d’une cause virale bénigne cosmopolite ou d’importation (arbovirose), soit il s’agit de causes exceptionnelles qu’il faudra évoquer suivant l’anamnèse. 80 C’est le cas de la fièvre typhoïde qui peut se manifester par un tableau d’encéphalite (tuphos). C’est une maladie cosmopolite mais sa fréquence est plus importante dans les pays pauvres en raison du péril fécal. La diarrhée n’est pas obligatoire. Le diagnostic se fera grâce aux hémocultures réalisées à l’admission parallèlement au bilan sanguin standard. Les coprocultures sont positives de façon inconstante et tardive [37]. Une autre pathologie classique qui doit être évoquée en cas de séjour dans certaines régions de l’Afrique subsaharienne est la trypanosomose humaine africaine à incubation très variable (de quelques semaines à plusieurs mois). Elle évolue constamment vers un tableau de méningo-encéphalite d’évolution mortelle d’où la nécessité de l’évoquer en cas de séjour dans une zone d’endémie. En effet, plusieurs cas ont été décrits chez des voyageurs visitant des parcs animaliers africains [44]. Le diagnostic repose sur la mise en évidence du parasite par frottis sanguin (avec ou sans centrifugation), ganglionnaire, médullaire ou du LCR. Il existe également des sérologies par plusieurs techniques (ELISA, hémagglutination, immunofluorescence indirecte) de performance variable. L’analyse du LCR peut révéler une pléiocytose avec des plasmocytes spécifiques (cellules de Mott), une hyperalbuminorachie ainsi qu’une augmentation polyclonale des IgM [41]. Enfin, la rage est une maladie cosmopolite (elle est absente dans un nombre restreint de pays), endémique dans de nombreux pays dans le monde (55 000 morts par an). Elle conduit inéluctablement à la mort dans un tableau d’encéphalite ou de syndrome paralytique mortels. De diagnostic aisé dans sa présentation classique, elle doit être cependant envisagée devant toute encéphalite inexpliquée [84]. En France, des cas de rage d’importation sont régulièrement rapportés (vingt personnes sont mortes de rage de 1970 à 2003) [65]. Elle peut être aussi bien transmise par des carnassiers domestiques (rage urbaine) que sauvages (rage sylvatique). Son incubation est longue, en général de 20 à 90 jours, jusqu’à plusieurs années. Elle sera à évoquer en cas de morsure d’un carnassier ou d’un chiroptère dans une zone d’endémie (Afrique, Sud-Est asiatique, Népal, Inde par exemple) [7]. Tout patient victime d’une morsure doit être vacciné de principe car le seul diagnostic de certitude de rage est biologique et post-mortem par la mise en évidence du virus dans l’encéphale. D’autre part, il existe une affection d’origine non infectieuse mais toxinique qui peut donner un tableau aigu de manifestations neurologiques avec une PL normale. Il s’agit de la ciguatera qui est une intoxination liée à l’ingestion de poissons avec une durée d’incubation de 2 à 30 heures et qui sévit dans les Caraïbes, le Pacifique et l’Océan Indien. Les signes neurologiques sont polymorphes et sont souvent associées à des signes digestifs [7,31]. 81 Finalement, pour conclure cet algorithme décisionnel, en cas de tableau d’ICM d’installation subaiguë, il ne faut pas oublier les exceptionnelles ICM d’origine non infectieuse : méningites carcinomateuses, méningites des maladies inflammatoires (sarcoïdose, lupus, Behcet) qui sont responsables d’une réaction lymphocytaire non spécifique du LCR mimant une méningite d’allure virale. 82 8. CONCLUSION Les infections cérébro-méningées représentent une cause rare de pathologie d’importation. Le plus souvent aiguës et fébriles, elles sont associées à des signes neurologiques variés. A l’exception du paludisme grave dans son expression neurologique (neuropaludisme) significativement associé à un séjour en zone endémique (Afrique subsaharienne en particulier), les causes tropicales sont rares. En raison de la gravité potentielle de certaines étiologies, la démarche diagnostique urgente est dominée par la recherche des infections cosmopolites à tropisme neurologique curables : infections bactériennes (méningocoque en particulier) et méningo-encéphalite herpétique. Au sein des causes cosmopolites, les méningites à entérovirus représentent la première cause de méningite chez le voyageur. Les nombreuses autres étiologies possibles, exceptionnellement rencontrées seront envisagées selon la destination du voyage, la situation épidémiologique locale, l’exposition à un risque particulier et le délai d’apparition par rapport au retour de voyage. 83 9. BIBLIOGRAPHIE1 1. Améri A, Timsit S. Neurologie clinique: Guide pratique. Thoiry: Heures de France, 1997 : 474 p. 2. Andréoletti L. Entérovirus. Encycl Méd Chir, Maladies infectieuses, 8-056-A-10, 2003, 12 p. 3. Ansart S, Garré M, Caumes E. Pathologies observées au retour ou au décours de voyages en pays tropicaux. 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Annexe 1: Principaux agents pathogènes responsables d’infections cérébroméningées Bactérie Virus Parasite Champignon GRAM POSITIF Picornaviridae Protozoaires Levures Streptococcus pneumoniae Enterovirus Trypanosoma sp Candida albicans Plasmodium falciparum Cryptococcus neoformans Streptococcus agalactiae Listeria monocytogenes Herpesviridae Toxoplasma gondii Herpes Simplex Virus - 1,2 (HSV) Entamoeba histolytica GRAM NEGATIF Virus Varicelle Zona (VZV) Naegleria fowleri Aspergillus fumigatus Neisseria meningitidis Virus Epstein- Barr (EBV) Acanthamoeba sp Pseudallescheria boydii Haemophilus influenzae Cytomégalovirus (CMV) Balamuthia mandrillaris Escherichia coli HHV-6 Bartonella henselae Virus Herpes B Filamenteux Dimorphiques Helminthes Blastomyces dermatitidis • Cestodes Coccidioides immitis Salmonella typhi Retroviridae Taenia solium Histoplasma sp Salmonella paratyphi VIH Echinococcus sp Brucella melitensis Capnocytophaga canimorsus Multiceps sp Adenoviridae Adenovirus • Trématodes Chlamydiae sp Rhabdoviridae Fasciola sp Rickettsia sp Rage Dicrocoelium sp INTRACELLULAIRES Mycoplasma pneumoniae Schistosoma sp Ehrlichia sp Coxiella burnetii MYCOBACTERIES Paragonimus sp Arenaviridae Clonorchis sp Chorioméningite lymphocytaire Opistorchis sp Lassa, Machupo, Junin, Sabia, Guanarito Mycobacterium tuberculosis • Nématodes Flaviridae Ascaris lumbricoïdes Enterobius vermicularis SPIROCHETES West-Nile, dengue, fièvre jaune Borrelia burgdorferi Encéphalite de l’Europe Centrale Strongyloides stercoralis Leptospira sp Encéphalite verno-estivale russe Ancylostoma duodenale Treponema pallidum Encéphalomyélite ovine (louping ill) Necator americanus Powassan, Kyasanur, Omsk Trichuris trichiura Encéphalite japonaise, Kunjin Wuchereria sp Rocio, Saint-Louis, Negishi, Langat Brugia sp Encéphalite de la vallée Murray Mansonella perstans Dracunculus medinensis Bunyaviridae Loa loa La Crosse, vallée Cache, vallée du Rift Onchocerca. volvulus California, Jamestown Canyon, Oropouche Toxocara sp Tahyna, Inkoo, Snowshoe hare Trichinella spiralis Toscana, Arbia, Erve, Bhanja Gnathostoma spinigerum Fièvre Hémorragique Crimée-Congo Angiostrongylus cantonensis Trivittatus, Puumala 91 10.1. Annexe 1: Principaux agents pathogènes responsables d’infections cérébroméningées (suite) Bactérie Virus Togaviridae Encéphalites équines de l’Ouest et de l’Est Encéphalite équine du Venezuela Chikungunya, rubéole Paramyxoviridae Rougeole, oreillons, Nipah, Hendra Orthomyxoviridae Thogoto Filoviridae Marburg, Ebola Reoviridae Fièvre du Colorado, Eyach Lipovnik, Tribec, Kemerovo, Orungo Parasite Champignon 92 10.2. Annexe 2 : Destinations des 56 voyageurs Zone géographique Pays Nombre de patients Afrique Algérie 2 Egypte 1 Maroc 1 Tunisie 4 Bénin 2 Cameroun 3 Comores 1 Côte d’Ivoire 6 Djibouti 2 Gabon 1 Mozambique 1 République Centrafricaine 1 République Démocratique du Congo 1 Sénégal 4 Tchad 2 Afghanistan 1 Bali 1 Inde 1 Indonésie 1 Japon 1 Malaisie 1 Tadjikistan 1 Océan Indien Ile Maurice 2 Caraïbes Ile non spécifiée 1 Martinique 1 Amérique Latine Panama 1 Océanie Nouvelle-Calédonie 1 Europe Allemagne 3 Angleterre 1 Baléares 1 Espagne 1 Italie 1 Kosovo 2 Pologne 1 Portugal 1 Asie 93 10.3. Annexe 3 : Répartition des pathogènes suivant les activités et terrains à risque Activités et terrains à risque Pathogènes Randonnées forestières ou rurales Rickettsia sp, Erlichia sp, Borrelia burgdorferi Arboviroses et fièvres hémorragiques virales (FHV) Trypanosoma sp Morsure de carnassiers ou de chiroptères Rage Morsure de singe Herpès B Morsure de rongeur Chorioméningite lymphocytaire Contact avec rongeur Puumala, Lassa, Junin, Guanarito, Machupo, Sabia, Leptospira sp Contact avec un chat Bartonella henselae, Toxocara cati, Toxoplasma gondii Echinococcus multilocularis Contact avec un chien Toxocara canis, Capnocytophaga canimorsus Multiceps sp, Echinococcus sp Morsure de tique Rickettsia sp, Erlichia sp, Borrelia burgdorferi Encéphalite de l’Europe Centrale, Encéphalite verno-estivale russe, Encéphalomyélite ovine (louping ill), Powassan, Kyasanur, Omsk, Erve, Bhanja, Thogoto, Lipovnik, Tribec, Kemerovo, Fièvre du Colorado, Eyach Negishi, Langat, Piqûre de moustique Orungo, Tahyna, Inkoo, Snowshoe hare, West-Nile, dengue, fièvre jaune, Rocio, Saint-Louis, Encéphalite de la vallée Murray, Kunjin, Encéphalite japonaise, Trivittatus Encéphalites équines de l’Ouest et de l’Est, Encéphalite équine du Venezuela, Chikungunya, vallée du Rift, vallée Cache, La Crosse, Jamestown Canyon, Oropouche, Wuchereria sp, Brugia sp Piqûre de moucheron Mansonella perstans Piqûre de simulie Onchocerca volvulus Piqûre de taon (Chrysops) Loa loa Piqûre de phlébotome Toscana, Arbia Contact avec les porcs Nipah, encéphalite japonaise, Taenia solium Ingestion de poissons crus Clonorchis sp, Opistorchis sp, Gnathostoma spinigerum Ingestion de crustacés Paragonimus sp, Angiostrongylus cantonensis, Salmonella sp 94 10.3. Annexe 3 : Répartition des pathogènes suivant les activités et terrains à risque (suite) Activités et terrains à risque Pathogènes Ingestion de viande insuffisamment cuite Trichinella spiralis, Toxoplasma gondii, Contact avec les moutons Multiceps sp, Echinococcus granulosus, Coxiella burnetii Brucella melitensis Ingestion de lait cru Brucella melitensis Rapports sexuels non protégés VIH, Treponema pallidum, FHV Baignades Leptospira sp, Acanthamoeba sp , Naegleria fowleri, Balamuthia mandrillaris, Schistosoma sp, Pseudallescheria boydii Marche pieds nus Ancylostoma duodenale, Necator americanus, Strongyloides stercoralis 95 11. RESUME Les infections cérébro-méningées (ICM) représentent une cause rare de morbidité chez les voyageurs. Objectifs : Décrire l’épidémiologie des infections cérébro-méningées importées puis proposer un algorithme diagnostique. Patients et méthode : Nous avons évalué de manière rétrospective le spectre étiologique des ICM observées pendant le voyage ou dans le mois suivant le retour chez les patients admis dans les services des maladies infectieuses ou de réanimation de l’hôpital Bégin, Saint-Mandé, de janvier 1998 à décembre 2005. Résultats : Cinquante-six patients (21 femmes, 35 hommes) d’âge moyen 29 ans (16-83) ont été inclus. On comptait 25 touristes (44,6 %), 15 militaires (26,8%), 9 migrants (16 %) et 7 expatriés (12,5%). Les régions visitées étaient les suivantes : Afrique (n=32; 57,2 %), Europe (n=11; 19,5 %), Asie (n=7; 12,5 %), Caraïbes (n=2; 3,6 %), Océan Indien (n=2; 3,6 %), Amérique Latine (n=1; 1,8 %) et Océanie (n=1; 1,8 %). La durée médiane de voyage était de 24 jours (24-550). Vingt patients ont présenté des symptômes sur place, une évacuation sanitaire a été nécessaire chez onze d’entre eux. Pour les trente-six autres patients, le délai médian entre le retour et l’apparition des symptômes était de 10 jours (IQ 25-75 : 4-14). Le délai médian entre les symptômes et l’hospitalisation était de 4 jours (0,5-96). Un syndrome méningé typique était observé dans 25 cas. La présentation clinique initiale était encéphalitique dans 20 cas et la symptomatologie était atypique (céphalées ou fièvre) dans 11 cas. Les diagnostics étiologiques étaient confirmés chez 42 patients (75 %). Les causes tropicales minoritaires (n=14) étaient dominées par le paludisme grave à P. falciparum (12 cas) au retour d’Afrique subsaharienne. Parmi les causes cosmopolites, les infections virales (n=22) étaient prédominantes (enterovirus: 12, herpesviridae: 8 dont un cas de méningo-encéphalite à HSV1, VIH: 2). Seules quatre infections bactériennes ont été observées (Neisseria meningitidis, Mycoplasma pneumoniae, Brucella melitensis, Salmonella typhi). Seize patients ont séjourné en réanimation pour une durée médiane de 9,5 jours (1-63). La durée moyenne de séjour à l’hôpital était de 14 jours (3-63). Une patiente est décédée d’une encéphalite à HSV-1. Quatre patients (7 %) ont conservé des séquelles neurologiques. Conclusion : La diversité étiologique des infections cérébro-méningées ne doit pas égarer. A l’exception du paludisme au retour d’Afrique subsaharienne, les causes cosmopolites sont largement prédominantes (viroses en particulier). La démarche diagnostique guidée par le frottis sanguin, l’imagerie et la ponction lombaire doit privilégier la recherche de causes curables. 96 12. SUMMARY Cerebro-meningeal infections (CMI) are a rare cause of morbidity in travellers. Objectives : To describe the epidemiology of imported cerebro-meningeal infections then propose a diagnostic guideline. Methods : We retrospectively assessed the aetiological spectrum of travel-related cerebromeningeal infections which were observed during the stay or in the following month, in patients admitted to the infectious diseases or the intensive care units of the Begin military hospital in Saint-Mandé, France between January 1998 and December 2005. Results : Fifty six patients (21 females, 35 males) with a median age of 29 years (16-83) were included. Twenty five patients were classified as tourists (44,6 %), 15 as military (26,8%), 9 as immigrants (16 %) and 7 as expatriates (12,5%). Travel destinations were: Africa (n=32; 57,2 %), Europe (n=11; 19,5 %), Asia (n=7; 12,5 %), Caribbean (n=2; 3,6 %), Indian Ocean (n=2; 3,6 %), Latin America (n=1; 1,8 %) and Oceania (n=1; 1,8 %). The median duration of travel was 24 days (5-550). Twenty patients presented symptoms while abroad, among them 11 required a medical evacuation. For the 36 other patients, the median duration between return from travel and onset of symptoms was 10 days (IQ 25-75 : 4-14). The median time from the onset of symptoms to hospitalization was 4 days (0,5-96).A typical meningeal syndrome was observed in 25 cases. Initial clinical presentation was encephalitic in 20 cases and the symptomatology was incomplete (headaches or fever) in 11 cases. The diagnoses were confirmed in 42 patients (75 %). The minority tropical causes (n=14) were dominated by severe P. falciparum malaria (12 cases) after a stay in sub-Saharan Africa. Among the cosmopolitan causes, viral infections were the leading cause (n=22) (enteroviruses: 12, herpesviridae: 8 including a HSV-1 encephalitis, HIV: 2). Only four bacterial infections have been reported (Neisseria meningitidis, Mycoplasma pneumoniae, Brucella melitensis, Salmonella typhi). Sixteen patients were admitted in the intensive care unit for a median time of 9,5 days (1-63). The average duration of hospitalization was 14 days (3-63). One death by HSV-1 encephalitis was recorded. Four patients (7%) had neurological sequelae. Conclusion : The aetiological diversity of cerebro-meningeal infections should not mislead. Except for malaria in travelers returning from sub-Saharan Africa, cosmopolitan diseases are widely predominant (particularly viral infections). The diagnostic approach guided by thin smear, imaging and lumbar puncture should focus on curable causes. 97 “SERMENT DIT DE GENEVE” (Association Médicale Mondiale) « Au moment d’être admis au nombre des membres de la profession médicale, je prends l’engagement solennel de consacrer ma vie au service de l’Humanité. Je garderai le respect à mes maîtres et la reconnaissance qui leur sont dus. J’exercerai mon art avec conscience et dignité. Je considérerai la santé de mon patient comme mon premier souci. Je respecterai le secret de celui qui se sera confié à moi. Je maintiendrai, dans toute la mesure de mes moyens, l’honneur et les nobles traditions de la profession médicale. Mes collègues seront mes frères. Je ne permettrai pas que des considérations de religion, de nation, de race, de parti ou de classe sociale, viennent s’interposer entre mon devoir et mon patient. Même sous la menace, je n’admettrai pas de faire usage de mes connaissances médicales contre la loi de l’Humanité. Je fais ces promesses solennellement, librement. » ANNEE : 2007 98 NOM ET PRENOM DE L’AUTEUR : AOUN Olivier PRESIDENT DE THESE : Monsieur le Professeur LE BRAS Michel DIRECTEUR DE THESE : Monsieur le Professeur RAPP Christophe TITRE DE LA THESE : Epidémiologie des infections cérébro-méningées chez les voyageurs hospitalisés en Ile de France. RESUME Les infections cérébro-méningées (ICM) représentent une cause rare de morbidité chez les voyageurs. Objectifs : Décrire l’épidémiologie des infections cérébro-méningées importées puis proposer un algorithme diagnostique. Patients et méthode : Nous avons évalué de manière rétrospective le spectre étiologique des ICM observées pendant le voyage ou dans le mois suivant le retour chez les patients admis dans les services des maladies infectieuses ou de réanimation de l’hôpital Bégin à Saint-Mandé, de janvier 1998 à décembre 2005. Résultats : Cinquante six patients (21 femmes, 35 hommes) d’âge moyen 29 ans (16-83) ont été inclus. On comptait 25 touristes (44,6 %), 15 militaires (26,8%), 9 migrants (16 %) et 7 expatriés (12,5%). Les régions visitées étaient les suivantes : Afrique (n=32; 57,2 %), Europe (n=11; 19,5 %), Asie (n=7; 12,5 %), Caraïbes (n=2; 3,6 %), Océan Indien (n=2; 3,6 %), Amérique Latine (n=1; 1,8 %) et Océanie (n=1; 1,8 %). La durée médiane de voyage était de 24 jours (24-550). Vingt patients ont présenté des symptômes sur place, une évacuation sanitaire a été nécessaire chez onze d’entre eux. Pour les trente six autres patients, le délai médian entre le retour et l’apparition des symptômes était de 10 jours (IQ 25-75 : 4-14). Le délai médian entre les symptômes et l’hospitalisation était de 4 jours (0,5-96). Un syndrome méningé typique était observé dans 25 cas La présentation clinique initiale était encéphalitique dans 20 cas et la symptomatologie était atypique dans 11 cas. Les diagnostics étiologiques étaient confirmés chez 42 patients (75 %). Les causes tropicales minoritaires (n=14) étaient dominées par le paludisme grave à P. falciparum (12 cas) au retour d’Afrique subsaharienne. Parmi les causes cosmopolites, les infections virales (n=22) étaient prédominantes (enterovirus: 12, herpesviridae: 8 dont un cas de méningo-encéphalite à HSV-1, VIH: 2). Seules quatre infections bactériennes ont été observées (Neisseria meningitidis, Mycoplasma pneumoniae, Brucella melitensis, Salmonella typhi). Seize patients ont séjourné en réanimation pour une durée médiane de 9,5 jours (1-63). La durée moyenne de séjour à l’hôpital était de 14 jours (3-63). Une patiente est décédée d’une encéphalite à HSV-1. Quatre patients (7 %) ont conservé des séquelles neurologiques. Conclusion : La diversité étiologique des infections cérébro-méningées ne doit pas égarer. A l’exception du paludisme au retour d’Afrique subsaharienne, les causes cosmopolites sont largement prédominantes (viroses en particulier). La démarche diagnostique, guidée par le frottis sanguin, l’imagerie et la ponction lombaire doit privilégier la recherche de causes curables. MOTS-CLES : - Voyage - Encéphalite - Méningite - Paludisme - Prise en charge. ADRESSE DE L’ UFR : 8, Rue du Général SARRAIL 94 010 CRETEIL CEDEX