É ditorial Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Profils d’expression génomique : une révolution dans la prise en charge des cancers colorectaux ? Genomic expression profiles: a revolution in treatment of colorectal cancer? Pierre Laurent-Puig CARPEM (Cancer Research for ^ pital Europeen Personalized Medicine), Ho Georges Pompidou ; Universit e Paris Descartes, 45 rue des Saints-Peres, 75006 Paris, France e-mail : <[email protected]> i les cancers colorectaux sont une entit e homog ene sur le plan histologique – 80 % d’entre eux sont des ad enocarcinomes plus ou moins diff erenci es –, les m ecanismes mol eculaires a l’origine de ces cancers sont au moins au nombre de trois. On distingue : S – les cancers ayant un ph enotype d’instabilit e g en etique due a un d efaut de reparation des m esappariements de l’ADN ; – les cancers ayant un ph enotype d’instabilit e chromosomique ; – et les cancers ayant une hyperm ethylation fr equente des r egions promotrices des g enes. notypes sont associ Ces phe es pour certains d’entre eux a des alt erations gen etiques particuli eres. Les mutations des g enes APC, TP53, KRAS sont frequentes dans les cancers colorectaux avec une instabilit e chromosomique, les mutations de l’oncog ene BRAF sont particuli erement fr equentes pour les cancers colorectaux avec un ph enotype m ethylateur. ‘‘ Les mécanismes moléculaires à l’origine des adénocarcinomes colorectaux sont au moins au nombre de trois ’’ Pour citer cet article : Laurent-Puig P. Profils d’expression genomique : une revolution dans la prise en charge des cancers colorectaux ? Hepato Gastro 2013 ; 20 : 84-86. doi : 10.1684/ hpg.2013.0834 84 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 20 n8 2, f evrier 2013 doi: 10.1684/hpg.2013.0834 Deux de ces trois ph enotypes (par exemple, ph enotype d’instabilit e g en etique et ph enotype m ethylateur) peuvent ^ etre associ es au sein d’un m^ eme cancer et ^lon associ rendre compte de l’ensemble des cas de cancers du co es a une instabilite genetique sporadique par une hypermethylation de la r egion promotrice du g ene hMLH1. Finalement, 4 entit es mol eculaires peuvent ^ etre d efinies assez simplement. La premi ere comprend les cancers coliques associant un ph enotype hyperm ethylateur associ es a un d efaut de r eparation des m esappariements de l’ADN. Cette entit e repr esente 10 a 12 % des cancers du ^lon, elle est plus fr co equente chez les femmes ^ ag ees atteintes par un cancer du ^lon droit, elle est associ co ee dans plus de 50 % des cas a une mutation de BRAF sur le codon V600E. Ces tumeurs ont un tr es bon pronostic. La seconde entit e est ^lon associes a un d eficit isol e dans le syst eme de r eparation celle des cancers du co des m esappariement de l’ADN. Cette entit e repr esente 3 a 5 % des cancers du ^lon, elle est associ ^lon, le co ee a une pr edisposition g en etique au cancer du co syndrome de Lynch, elle n’est jamais associ ee a une mutation BRAF. Le d efaut de r eparation des m esappariements de l’ADN est facilit e par une mutation Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Editorial germinale des g enes de la r eparation de l’ADN. La troisi eme entit e est celle des cancers ayant un ph enotype m ethylateur isol e sans instabilit e g en etique. Cette ^lon. Il a entit e repr esente 8 % de l’ensemble des cancers du co et e montr e que ces tumeurs ont un pronostic p ejoratif. Enfin, la quatri eme entit e, la plus fr equente, est celle des tumeurs avec une instabilit e chromosomique. La connaissance de l’existence d’une h et erog en eit e g en etique des cancers colorectaux a et e renforc ee par l’ etude du transcriptome de 2 tr es grandes s eries de cancers colorectaux. Ces etudes ont montr e l’existence de 5 a 6 soustypes mol eculaires de cancers colorectaux dont certains avaient un pronostic p ejoratif [1, 2]. Ces quatre entit es ne suffisent cependant pas a la d efinition de groupes homog enes de malades sur le plan du pronostic [1]. Une nouvelle approche a ete d evelopp ee au cours des 5 derni eres ann ees : l’ etude de l’expression de l’ensemble des g enes par des approches dites omics. La plupart des signatures publi ees a ce jour dans le cancer colorectal avaient un but, celui de trouver une signature pronostique, permettant de distinguer parmi les malades ayant une tumeur de stade II ou III ceux qui pouvaient b en eficier d’une chimioth erapie adjuvante, et ceux que l’on pouvait guerir uniquement par la chirurgie. ‘‘ Le but est de trouver une signature pronostique, permettant de distinguer parmi les malades ayant une tumeur de stade II ou III ceux qui pouvaient bénéficier d’une chimiothérapie adjuvante et ceux que l’on pouvait guérir uniquement par la chirurgie ’’ Le premier constat est que les m ethodologies d’ etude de l’expression des g enes est diff erente d’une signature a l’autre. Les unes utilisant des tissus fix es dans le formol et inclus dans la paraffine, les autres des fragments congel es. Les methodologies statistiques permettant l’identification de ces signatures ont et e tr es diff erentes selon les etudes. Certaines privil egiant des approches non supervis ees, d’autres des approches supervis ees, cette variabilit e induisant un nombre tr es diff erent de g enes retenus dans ces signatures allant d’une dizaine a quelques centaines. Le niveau de validation de ces signatures est lui aussi tr es diff erent. Certaines ont et e valid ees sur plusieurs milliers de malades, d’autres sur quelques dizaines. Elles ont toute ignor e la classification ant erieure des cancers colorectaux fond ee sur les diff erents ph enotypes mol eculaires, cherchant une ^lon (one size fits signature unique pronostique pour l’ensemble des cancers du co all). La comparaison de ces signatures entre elles montre des r esultats tr es peu superposables. Le taux de recouvrement de ces signatures est faible : peu de g enes sont redondants entre les signatures. Une etude pr esent ee a l’ASCO a a un niveau individuel, montr e la faible corr elation des signatures entre elles et, les signatures peuvent classer un malade dans un groupe a fort ou a faible risque de r ecidive. Aucune de ces signatures n’a int egr e les facteurs pronostiques r ecemment identifi es comme ceux de l’infiltration tumorale par les lymphocytes [3]. N eanmoins, elles apportent toutes une information additionnelle sur le plan pronostique par rapport a la classification TNM [4]. Peut-on utiliser ces signatures afin d’am eliorer la prise ne charge des malades atteints de cancer ? La signature la plus aboutie quant au nombre de malades test es est celle de Genomic Health (Recurrence Score Oncotype DX) avec plus de 4 800 malades analys es [5]. Elle permet de calculer une probabilit e de r ecidive pour un malade en fonction du stade TNM de sa tumeur. Cette information pourrait ^ etre utile dans le dialogue entre le m edecin et le malade sur la notion du rapport risque/b en efice attendu par exemple pour un patient de stade II dont le risque pr edit est sup erieur a celui d’un stade III moyen. HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 20 n8 2, f evrier 2013 85 te et honne ^te, il faudrait Cependant, pour que l’information soit comple montrer le b de en efice de la chimioth erapie adjuvante chez ces malades a haut risque de r ecidive. En sens inverse, pour les malades avec une tumeur de stade III a faible risque de r ecidive, est-on pr^ et a ne pas les traiter par chimioth erapie adjuvante ? ‘‘ ’’ Pour les malades avec une tumeur de stade III à faible risque ^ t à ne pas les traiter par chimiothérapie de récidive, est-on pre adjuvante ? Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. ^tre difficile, seul un La d emonstration de l’utilit e clinique de ces signatures va e essai prospectif randomis e testant l’utilit e clinique de ces signatures emportera notre adh esion. Cet essai n ecessitera un grand nombre de patients. Ces signatures sont-elles matures pour ^ etre l’objet d’un tel investissement. La ^lon quel que soit le sous-type signature unique pour l’ensemble des cancers du co consid er e est-elle le bon concept ? La communaut e doit s‘approprier ces signatures, les comparer, les tester dans les diff erents sous-groupes et dans les conditions cliniques clairement identifi ees au risque dans le cas contraire de laisser s’installer une d erive pr ejudiciable a la prise en charge des malades laissant les m edecins choisir des outils d’aide a la d ecision sans en comprendre les limitations et les risques. clare les liens d’int re ^ts : L’auteur de Liens d’inte er^ ets suivants : Interventions & ponctuelles et activit es de conseil pour Amgen et Merck Serono. Références 1. Marisa L, Vescovo L, de Reynies A, et al. Gene expression profiling of colon adenocarcinomas reveals six prototypic molecular subtypes with distinct clinical and molecular characteristics Can Res 2012 ; 72 (Suppl. 1) : 5065. 2. Eva Budinska E, Popovici VC, Sikora KO, et al. Identification and validation of gene expression subtypes in a large set of colorectal cancer samples. J Clin Oncol 2012 ; 30 (Suppl. 1) : 3511. 86 3. Broussard EK, Disis ML. TNM staging in colorectal cancer: T is for T cell and M is for memory. J Clin Oncol 2011 ; 29 : 601-3. 4. Roth A, Di Narzo AF, Tejpar S, et al. Validation of two gene-expression risk scores in a large colon cancer cohort and contribution to an improved prognostic method. J Clin Oncol 2012 ; 30 (Suppl. 1) : 3509. 5. Gray RG, Quirke P, Handley K, et al. Validation study of a quantitative multigene reverse transcriptase-polymerase chain reaction assay for assessment of recurrence risk in patients with stage II colon cancer. J Clin Oncol 2011 ; 29 : 4611-9. HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive vol. 20 n8 2, f evrier 2013