Revue de presse - Théâtre Antoine Vitez

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 Théâtre underground à Grenoble | Place Gre'net
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REVUE DE PRESSE – CE QUELQUE CHOSE QUI EST LA – mise en scène de Chantal MOREL – Texte d’Antoine CHOPLIN THÉÂTRE UNDERGROUND À GRENOBLE
FOCUS – Avec plus de 5 500 spectateurs l’an dernier, le festival de caves compte désormais parmi les
grandes manifestations culturelles nationales de printemps. Cette année, Grenoble a rejoint le réseau des
villes et villages partenaires de l’évènement. Au programme, quatorze représentations et cinq créations
théâtrales dans des caves jusqu’au 8 mai prochain.
Créé en 2006 par une équipe d’artistes, le festival d’origine franc-comtois a, depuis, largement creusé son sillon dans
tout l’hexagone. Le long de l’axe Rhin-Rhône, de Strasbourg à Lyon, il se déploie aussi à Lille, Nantes, Orléans,
Toulouse, Grenoble… Et bat actuellement son plein, avec 33 spectacles différents et 240 représentations programmés
dans 60 villes jusqu’au 27 juin. A Grenoble, vous n’avez que jusqu’au 8 mai pour le découvrir !
—
© Joël Kermabon
« Le festival s’agrandit toujours de la même manière, au fil des rencontres, se construit dans une discussion. […] Nous
sommes des artistes qui nous adressons à d’autres artistes. S’il y a du répondant en face, un sentiment de confiance et
de partage, de curiosité mutuelle, un désir de travailler ensemble, on peut proposer aux artistes, à leur compagnie, de
développer le festival de caves dans leur ville » explique le metteur en scène Raphaël Patout. Ce dernier seconde, dans
l’organisation des Caves, son créateur et directeur artistique, Guillaume Dujardin. Ainsi le festival se développe, au fil de
l’eau, grâce à l’association de compagnies de théâtre entraînant dans leur sillage de nouvelles villes et villages.
Un festival sous-terrain
Rester toujours souterrain. C’est la pierre
angulaire du festival. A la source, une
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expérience forte. Imaginez-vous, en 2005.
C’est l’anniversaire de la libération des
camps et vous assistez au spectacle de la
compagnie de Guillaume Dujardin sur le
journal de l’écrivain et philologue allemand
Victor Klemperer. Il vous raconte comment le
nazisme s’est introduit dans la langue avant
de s’introduire dans les esprits et comment il
a touché d’abord les intellectuels pour se
répandre ensuite à tout un pays. Vous êtes
là, dans une cave qui a servi à stocker du
matériel pendant la guerre, qui fut un lieu de
résistance, où des personnes se sont
cachées. Et vous entendez le texte.
« Même en-deçà d’un tel contexte,
descendre sous terre crée d’emblée un
climat favorable à l’écoute » déclare Raphaël
—
© Raphaël Patout
Patout. C’est pour cela que le festival
continue d’investir les caves. Des caves de
particuliers, de commerçants ou d’institutions. Et le metteur en scène d’ajouter : « L’une des plus illustres que nous
ayons investies fut la cave de la préfecture de Besançon. A Lyon aussi, nous avons joué dans des caves utilisées par la
résistance et par Jean Moulin ».
Intimiste
Autre spécificité du festival, la jauge est très petite. « La charte du
festival impose en effet de ne pas dépasser quarante spectateurs pour
garantir l’intimité. A titre d’exemple, la moyenne à Besançon, c’est
trente personnes par représentation ». Le metteur en scène Chantal
Morel, directrice du Petit 38 à Grenoble, nous confie : « c’est une
expérience tout à fait spéciale, une espèce de contrat avec le public
sur un partage d’intimité.
Il faut accepter, par exemple, que son ventre fasse plein de bruits. Tout
d’un coup, le spectateur redevient un organisme vivant. Il n’est plus
complètement passif comme il peut l’être au moins dans la perception,
dans les grandes salles où le public est noyé dans une espèce de
chiffre indéfini. La singularité devient possible. C’est presque un
rapport personnel avec chaque spectateur. Ça, c’est une composante
très forte du festival de caves. »
Mystérieux
Le lieu des spectacles est aussi tenu secret pour favoriser une certaine
concentration, déjouer les habitudes, prendre le spectateur par surprise et ménager
un certain mystère. « La petite marche qu’il y a entre la billetterie et le lieu de la
représentation est toujours l’occasion pour le spectateur de se mettre en condition
d’écoute » précise Raphaël Patout.
—
© Joël Kermabon
Essentiellement des créations
A l’exception de “La mémoire d’une robe rouge” qui est un
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spectacle invité, toutes les autres pièces présentées à Grenoble
sont des créations pour le festival. Raphaël Patout déclare sans
hésiter : « On revendique le fait d’être avant tout un lieu de création
et pas de diffusion. Nous, ce qui nous intéresse c’est d’inviter des
artistes et des metteurs en scène à venir créer dans les caves. »
Ces derniers ont carte blanche. « On ne se positionne pas comme
des programmateurs qui décident de ce qui mérite d’être joué ou
pas. Il n’y a pas non plus de ligne commune, de travaux imposés et
aucune logique de contrôle des spectacles présentés ». Les artistes
font leur métier et le festival donne à chaque metteur en scène et à
tous les comédiens l’occasion d’essayer d’aller au plus loin de leur
geste. En ce sens, ce festival est “underground” et offre une grande
liberté aux artistes.
Il ajoute : « L’un des plus beaux compliments qu’on nous ait faits il y
a trois ans : “dans les caves, je ne sais jamais si je vais aimer les
spectacles mais je sais qu’on y prend des risques” . C’est ça notre
—
© Raphaël Patout
gage de qualité ».
Découvrir de nouvelles écritures
« Les scènes institutionnelles nous proposent souvent des spectacles à partir de textes d’auteurs déjà connus »
rapporte Chantal Morel. Pour elle, c’est très clair, le formatage est là.
Le festival permet l’émergence d’autres langages. « Je prends l’exemple de Howard Barker et de son théâtre de la
catastrophe qu’on voit désormais un peu sur les scènes institutionnelles. Il y a dix ans, très peu de théâtres
s’intéressaient aux écrits de ce dramaturge et poète britannique. Les caves ont été l’occasion d’expérimenter ces
textes. De faire entendre cette langue-là » explique Raphaël Patout.
—
© Chantal Morel
Qui connaît Antoine Choplin et “La Nuit tombée”, fiction construite autour de la réalité de Tchernobyl ? La simplicité,
l’humilité de ce texte ? Cette année, dans le cadre du festival de caves, il est possible de découvrir cette écriture à
Grenoble et dans d’autres villes de France.
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Au moment juste
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On aimerait découvrir d’autres textes, des pépites qui contiennent les mots qu’il faut, les mots pour le dire, à cet instant
précis. Chantal Morel se livre : « Face à la prolifération de propositions en tout genre, tout devient très compliqué à
décrypter. D’un coup, il y a un sentiment de découragement. Nous sommes comme noyés dans une abondance de
livres qui dégage plus une maladie qu’une santé. C’est au-delà d’une capacité humaine. Le monde fonctionne sur des
règles économiques qui se détachent de l’humain, de ses besoins, de ses capacités… Qui peut lire tout ça, même s’il le
veut ? On met bien en place des techniques, on lit en diagonale. Et pourtant le livre n’a pas été écrit en diagonale mais
page après page. Qu’est-ce que c’est une lecture en diagonale ? Une dénaturation de l’objet livre. C’est de la
consommation, donc ce n’est plus rien » .
Comment trouver ces textes qui nous sont nécessaires ? Qui peut prendre le temps de les chercher ? Pour les artistes,
c’est un cheminement qui s’impose. Il est question d’écoute, d’être touché. Ils lisent, se nourrissent d’écritures, tirent
des fils, se perdent en route, s’y retrouve, tombent dans le vide, se rattrapent jusqu’à découvrir le livre qu’il faut pour
raconter ce quelque chose qui est là, à ce moment-là, avec cette justesse là.
—
© Chantal Morel
Pour la metteur en scène cette année, c’est “La Nuit tombée”. « Le roman d’Antoine Choplin est un peu crépusculaire
parce qu’on s’approche de Tchernobyl, deux ans après l’explosion. Évidemment, il y a là une fin du monde et puis
l’oscillation, elle, va de cette fin du monde à ce qui garde, ce qui maintient de la lumière. Les hommes entre eux, leur
capacité de soutien, de solidarité, d’amitié et de partage ». Vient alors l’envie très forte de raconter l’histoire avec les
outils du théâtre.
« Il faut enlever, enlever beaucoup du texte. L’adaptation, c’est très souvent un travail d’épuration parce que la présence
physique d’un acteur raconte par elle-même. Un silence, un mouvement, un regard, tout ce qui fait la vie d’un être
humain n’est pas que verbal » explique Chantal Morel. Et pour faire face aux contraintes du festival, un petit plateau de
théâtre autonome a été mis en place. « Dessus, on fait naître toute l’histoire. Ce sont les deux acteurs, Roland Depauw
et François Jaulin, qui déclenchent les effets de lumière et de son, à l’intérieur même du jeu ».
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« Dans les caves, on ne peut pas tricher »
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© Chantal Morel
Le public est si près. Raphaël Patout et Chantal Morel s’accordent. « C’est rude pour les acteurs et c’est aussi très
exaltant ». L’intimité fait que ce n’est pas non plus le même régime de jeu. Tout devient ultra signifiant du fait de la
proximité. « La manière de diriger les acteurs, d’écrire l’espace est différente de celle d’un plateau traditionnel ». « Cela
nous a permis de travailler juste au-dessus du murmure ». La voix n’est pas portée. « Dans les caves, même un
battement de cil se met à jouer ». « Pas besoin de grossir certains gestes ; juste les marquer fait qu’on a la lecture. On
voit l’œil qui brille. On sent presque la respiration du comédien. »
Un festival de crise ?
Bien que le festival soit financièrement viable, avec 40 % des fonds provenant de la billetterie et 60 % des financements
région, département et ville, chaque artiste doit beaucoup s’investir dans l’aventure. « Par exemple, je suis metteur en
scène mais je fais aussi du montage, je réponds à des interviews… » nous précise Raphaël Patout. C’est positif dans un
certain sens car « c’est l’occasion pour les artistes, de se réapproprier complètement leur outil de travail ».
A la rencontre d’un public protéiforme
« La politique, c’est de se dire, on présente le même spectacle au public des grandes villes qu’à celui de tout petits
villages » rappelle Raphaël Patout.
Les acteurs, au nombre d’un ou deux par spectacle, déambulent ainsi de villes en villages, transportant le petit décor. A
chaque fois, ils découvrent une nouvelle cave. « De très belles caves et d’autres qui vont au contraire écraser. C’est la
règle du jeu » nous rappelle Chantal Morel.
Tout est prêt pour la rencontre avec le public. « C’est bizarre, du théâtre dans une cave. On attire un public plus large,
du fait de la curiosité de ce festival. Nos spectateurs n’ont pas forcément l’habitude d’aller au théâtre. Dans un village,
on touche un public rural. D’une région à l’autre, il y a aussi des profils différents qui se présentent » observe Raphaël
Patout.
Le concept séduit Outre-Rhin. Quelques dates sont programmées dans la ville de Karlsruhe pour cette neuvième
édition. Et des spectacles seront joués dans des caves à Genève. « Notre rêve, bien sûr, serait d’essayer de faire de cet
événement une manifestation européenne. Nous avons des débuts de discussion avec des compagnies à Berlin, à
Cracovie. Je ne sais pas si ce sera pour la quinzième, seizième ou dix-septième édition. Mais c’est ça aussi le projet »
confie Raphaël Patout.
Parce que le théâtre est un art éphémère, parce que c’est un art de l’élargissement de soi, il est urgent de découvrir ce
festival “underground” au sens premier.
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Véronique Magnin
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T H É Â T R E E T B A L A G AN
Chronique ambulante d’un amoureux du théâtre, d’un amateur de l’Est et plus si affinités.
Au festival des caves, Chantal Morel affine l’écriture d’Antoine
Choplin
Par J.-P. Thibaudat chroniqueur.
Publié le
05/05/2014 à 10h29
Gouri sur sa moto dans « Ce quelque chose qui est là » - dr
Le rendez-vous est à un coin de rue, dans le square d’une ville ou sur la place du
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village. Pas de signes apparents, « on » se reconnaît. Vous venez aussi pour la
cave ? Oui.
Un soul-sol pour une « zone »
A l’heure dite, on nous emmène au pied d’un immeuble, à la porte d’un logis. Et on
descend les marches. Des lampes de poche éclairent le chemin et souvent le
spectacle. Car, oui, on est venu voir du théâtre dans une cave, laquelle est forcément
sombre, un peu humide parfois. L’atmosphère est là avant même que les acteurs,
souvent en place en raison de l’exiguïté des lieux, ne commencent à jouer. Un, deux
trois, quatre acteurs maxi, et une vingtaine de spectateurs, pas plus.
Parmi les 33 spectacles du « Festival des caves », j’ai vu « Ce quelque chose qui est
là », une mise en scène de Chantal Morel, adaptation hyper sensible et sensuelle du
roman d’Antoine Choplin, « La nuit Tombée » (Points poche).
La cave est le lieu adéquat pour ce nouveau récit du sous-sol. Chantal Morel a
souvent monté des spectacles à partir de textes de Dostoïevski dans son petit lieu à
Grenoble, le P38, et ailleurs. Choplin est un romancier français vivant à Grenoble
mais son roman nous entraîne en Ukraine, du côté de la frontière biélorusse, dans
la « zone », le secteur interdit de Tchernobyl (ce nom ne traverse jamais le texte).
Gouri habitait là, à Pripiat. Peu après la catastrophe, la ville a été évacuée. Avec sa
femme et sa fille, Gouri s’est réfugié à Kiev où il est devenu écrivain public pour les
rescapés, tous plus ou moins atteints par les radiations.
Une moto dans la nuit ukrainienne
Choplin écrit comme en apnée. Un récit qui ne s’encombre pas de longues phrases,
ni de tirets pour les dialogues. Il économise ses mots comme ses personnages les
leurs, ce ne sont pas des phraseurs. Il avance léger en évitant de charger la barque
des épithètes. Seul le silence est lourd. Sa phrase retient son souffle comme les pieds
des marcheurs de la zone font attention à ne pas remuer la poussière.
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C’est Gouri que l’on suit dans la nuit. Il est là devant nous, bras écartés dans sa
lourde canadienne ou parka col relevé, des lunettes de motard d’un autre temps sur
les yeux, il a enfourché sa machine réduite ici à une lampe carrée semblable à celle
que portent encore les employés la nuit dans des gares provinciales un peu
paumées. La moto de Gouri pétarade. La bande son reproduit à merveille le bruit
d’une moto dont on devine qu’elle n’est pas de première jeunesse. On croirait sentir
l’odeur d’essence mêlée à celle de la nuit-, là-bas, sur une route à ornières de la
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campagne ukrainienne.
Chantal Morel avec trois fois rien et un bricolage sonore signé Patrick Najean, sait
distiller une ambiance prenante qui contamine acteurs et public. La vieille
canadienne de Gouri nous réchauffe.
L’adaptation de Chantal Morel prolonge l’écriture de Choplin en la concentrant.
Privilégiant l’amitié entre Gouri et Yakov, un liquidateur de Tchernobyl au corps
meurtri qui a trouvé refuge chez la vieille Véra, figurée ici par une marionnette.
Gouri est parti il y a deux ans laissant derrière lui ses poèmes qui chantent aux lèvres
de ceux qui sont restés. Retrouvailles. Vodka. Auprès de son ami, Yakov se souvient
de ces jours où on lui a dit qu’il fallait « enterrer la terre ».
« Ce n’est pas la même pourriture »
Livrée à elle-même, la zone interdite est depuis devenue une zone de non droits en
proie aux malfrats, aux trafiquants, la police restée à l’écart garde mollement les
routes. Tout a été pillé. Gouri veut aller à Pripiat récupérer la porte de la chambre de
sa fille où chaque année il marquait sa taille d’un trait, une porte sur laquelle ils
avaient tous les deux dessiné un arbre.
Gouri se rendra à Pripiat avec Kouzma, un voisin du village qui, connaît la zone
comme personne. Et l’aime à sa façon :
« Je ne m’y sens pas si mal. Sûr que c’est autre chose que le monde normal.
Disons que ce n’est pas la même pourriture. Mais, à choisir, je crois que je préfère
la pourriture d’ici. Elle est peut-être aussi vicelarde que l’autre mais, comment
dire, avec elle tu valdingues quand même pas autant dans le caniveau. »
Des mots qui, aujourd’hui, sonnent étonnement, qaund on songe à ce qui se passe
tous le sjours dans l’Est de l’Ukraine.
Les deux magnifiques acteurs, François Jaulin (Gouri), et Roland Depauw (Yakov,
Kouzma et les autres) sont aux petits soins pour cette écriture où les mots caressent
le silence. Au fond de la cave, ils éveillent la nuit.
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« Humaniser l’être humain »
Le festival des caves a été créé il y a neuf ans à Besançon à l’initiative de Guillaume
Dujardin qui anime la compagnie Maïa Noche. D’année en année, la manifestation a
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pris de l’ampleur, elle se déroule aujourd’hui sur 60 villes et villages. Loin des grands
théâtres, la cave privilégie le tête-à-tête, le chuchotement, l’intimité des corps et des
mots.
Chantal Morel cite Günther Anders :
« Le “trop grand’ nous laisse froids, mieux (car le froid serait encore une sorte de
sentir) même pas froids, mais complètement intouchés ; nous devenons des
analphabètes de l’émotion .”
Et Morel d’ajouter, de sa voix d’écorchée vive peuplée d’ombres, une voix trop
souvent absente de nos scènes :
“ Ainsi, l’humble et la mesure redonnent au théâtre de quoi se redresser de la
honte qui le pousse à délaisser sa tâche la plus difficile : humaniser l’être
humain.”
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CINÉMA(/CINEMA,58) + MUSIQUE(/MUSIQUE,59)
+ LIVRES(/LIVRES,60) + S C È N E S ( / T H E AT R E , 2 8 )
+ ARTS(/ARTS,99964) + IMAGES(/IMAGES,100296)
+ LIFESTYLE(/VOUS,15) + MODE(/MODE,99924)
+ BEAUTÉ(/BEAUTE,100215) + FOOD(/FOOD,100293)
THÉÂTRE
L ES M OT S D I T S
EN SOUS-SOL
Par Edouard Launet Envoyé spécial à Besançon (Doubs)
(http://www.liberation.fr/auteur/1866-edouard-launet)
— 16 mai 2014 à 18:06
Dans une soixantaine de villes en France,
dont Paris cette année, se déroule le très
underground Festival de caves, véritable
éloge du système D dévolu à la création.
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«Ce quelque chose qui est là», mis en scène par Chantal 
Morel. Photo Patrick Najean
(https://www.facebook.com
(https://twitter.com/inte
A Cannes, on monte les marches. Au Festival de caves,
on les descend. Pour se retrouver dans un lieu humide où
bruits et lumières ne parviennent qu’atténués, où
l’imaginaire est à son aise, où le théâtre est
naturellement chez lui : en bas à la cave, donc.
Depuis bientôt dix ans, Guillaume Dujardin organise un
festival de créations théâtrales en sous-sol. Cette année,
l’affaire s’est étendue à une soixantaine de villes, avec 35
spectacles différents présentés jusqu’à la fin juin (lire
ci-contre). On est loin de la Croisette, des bagouzes, des
perlouzes et des cocktails de Canal +. Les ingrédients
sont ici une vingtaine de spectateurs par représentation,
un ou deux acteurs, quelques spots, un texte neuf, une
envie de clandestinité. Il faut appeler un numéro pour
réserver. On vous rappelle la veille du spectacle pour
fixer un rendez-vous en ville.
Ce soir-là, c’est place Gravelle, à Besançon. Nous
sommes seize à nous rendre bientôt en procession vers
une petite cour, à cinq minutes à pied. Et là, nous
plongeons dans un escalier très vertical, vers l’obscurité
d’une cave voûtée qui pourrait bien dater du XVIe siècle.
Besançon, la «vieille ville espagnole» de Hugo, est
truffée de beaux celliers : il était presque naturel que le
festival naisse là. En 2005, la Compagnie Mala Noche
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créait dans la cave d’un particulier bisontin un premier
spectacle tiré du Journal de Victor Klemperer, résistant
qui décortiqua la langue du IIIe Reich. Le travail
souterrain du philologue allemand trouvait en sous-sol le
lieu idéal de son expression et donnait envie de
continuer. L’année suivante naissait le festival,
circonscrit à quelques caves de Besançon. Il s’est élargi
aux communes proches, puis à la région. Depuis trois
ans, il a débordé dans toute la France, parfois au-delà :
Genève, Karlsruhe.
Voyage furtif.
Dans la belle cave aux arches, murs et plafond en pierre
calcaire - de la pierre de Chailluz, me dit ma voisine -,
pas de scène, seulement quelques chaises et deux
acteurs, de dos, qui attendent que les lumières
s’éteignent. Commence aussitôt Ce quelque chose qui est
là, une pièce tirée du roman d’Antoine Choplin, la Nuit
tombée (prix France Télévisions 2012), et mise en scène
par Chantal Morel. Les comédiens Roland Depaw et
François Jaulin nous embarquent dans un voyage furtif à
Pripiat (Ukraine), pas loin d’une fameuse centrale
nucléaire. Nous sommes, acteurs et spectateurs,
regroupés sur une aire qui ne doit pas excéder les 30 m2.
Les radiations de Tchernobyl, on a l’impression de les
sentir, en même temps que l’humidité.
Guillaume Dujardin fut, à la Comédie de Caen, l’assistant
du metteur en scène Michel Dubois. Il a suivi ce dernier à
Besançon en 1997, puis a créé sa propre compagnie,
Mala Noche. Ce sont les huit acteurs de cette compagnie
qui créent les spectacles du festival, sauf exception (le
spectacle de ce soir en est une, Chantal Morel étant
venue avec ses propres comédiens). Dujardin, 44 ans, est
un directeur plutôt débonnaire, privilégiant
l’expérimentation, n’imposant aucune ligne artistique,
souhaitant contrôler le moins possible le processus quasi
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biologique qui contamine peu à peu les caves du pays.
«Nous n’avons pas cherché à essaimer, ça s’est fait tout
seul : des gens sont venus proposer des lieux, des
spectacles», dit-il. Son plaisir ? «Trouver la bonne
adéquation entre un lieu et un spectacle.»
Hygrométrie folle.
Le théâtre en petit comité (en appartement, voire en
2 CV) n’est pas exactement une nouveauté, mais une
cave sécrète une atmosphère particulière, insiste
Guillaume Dujardin, où se tissent esprit de résistance,
secret, illicite : «Et j’aime ce paradoxe, que l’on
s’enferme sous terre pour s’ouvrir à la création». En
outre, contrairement à un appartement, la cave est un
lieu mobilisable sans contraintes de temps, y compris
pour les répétitions. Evidemment la clandestinité
comporte des risques, à commencer par celui de tomber
sur un spectacle sans intérêt. Mais ce n’est pas le cas ce
soir : sur 5 m2 et dans une hygrométrie folle, Dupaw et
Jaulin ont fait surgir un petit bout d’Ukraine sinistrée,
traversée par instants par les pas des passants au-dessus
de nos têtes, et les rayons bêta de césium 137. La cave
appartient à un psy. La plupart des lieux sont prêtés par
des particuliers.
Le budget du festival (région, département, Besançon
ainsi que d’autres villes) est inférieur à 120 000 euros.
Chaque création est jouée une vingtaine de fois durant
les deux mois du festival. En comptant en sus les
spectacles invités, cela fait au total 240 représentations
drainant en moyenne 20 personnes, soit un peu moins
de 5 000 spectateurs. «Au début, le public à Besançon,
c’était des amis et des amis d’amis. Mais, depuis deux
ans, je ne connais plus les gens. Parmi les spectateurs, il
y en a beaucoup qui découvrent le théâtre», se réjouit
Guillaume Dujardin. Ce quelque chose qui est là va
maintenant partir visiter les caves d’Orléans, Blois,
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Montbéliard et enfin Paris (les 6, 7 et 8 juin), quelque
part sous la craie de Montmartre. Venez couverts.
Edouard Launet Envoyé spécial à Besançon (Doubs)
(http://www.liberation.fr/auteur/1866-edouard-launet)
Festival de caves Jusqu’au 27 juin. Entrée : 12 €. Rens. : 03 81 61 79 53
ou www.festivaldecaves.fr(http://www.festivaldecaves.fr/)
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Lumière sous les villes
Sur : http://rictus.info/lumiere-sous-les-villes.html
Mercredi 28 mai 2014 par Florence Roux
Jusqu’au 27 juin, la 9e édition du Festival de Caves présente une trentaine de spectacles de
théâtre dans 60 villes de France « dans des caves, sous-sols et autres petits lieux ». Premier
flash à Lyon avec Ce quelque chose qui est là, adapté à la scène par Chantal Morel d’après
le texte d’Antoine Choplin La nuit tombée. Un voyage de nuit vers Pripiat, en Ukraine.
Vertige assuré par des comédiens à vif, à l’os.
Un lundi soir. Rendez-vous sous un arbre à la station de métro Ampère, dans le 2e
arrondissement de Lyon. Les spectateurs arrivés, l’ouvreuse les guide « à deux pas », à trois
ou quatre rues de là. L’immeuble est bourgeois. On passe la porte, on traverse la cour, puis
plonge par l’escalier jusqu’à une voûte de pierres qui flaire l’humidité. Une trentaine de
chaise entoure, au fond, une estrade de bois que cernent quelques projecteurs. Deux
silhouettes patientent dans l’ombre.
©  Patrice Forsans / Atelier Contras
Lumière. Noir. Et là, le bruit de moto rompt le silence. C’est parti. Gouri, l’écrivain public et
poète, revient à Pripiat, zone interdite après l’accident nucléaire de Tchernobyl. Il passe
chez Iakov et Vera, des amis d’avant, croise encore un autre homme dans la nuit.
Sur la scène, les mots ne la ramènent pas, confinent parfois à la sécheresse. Les gestes,
contraints par l’espace réduit du plateau, un carré de vieilles planches, vont à l’essentiel, à
l’os : ce regard tourné, cette toux qui plie le corps contaminé, le buste tendu dans la nuit
sur une bécane. Du confinement extrême de la scène, les comédiens Roland Depauw et
François Jaulin tirent une douleur qui force la pudeur. Que se passe-t-il après l’accident
nucléaire, quand le désastre s’insinue dans chaque repli de la vie ?
Après, les hommes vivent, reviennent dans leur maison chercher les traces d’un quotidien
passé, posent la main sur l’épaule de l’autre, dictent une lettre à l’être aimé. Sous la voûte
de la cave, les voix et les corps se glissent dans la nuit, soutenus par une bande son au
cordeau : chuintement de la rivière, moteurs des patrouilleurs, tapis de feuilles mortes.
Chantal Morel, la metteure en scène, explique que « cette histoire simple, et les contraintes
qu’elle nous impose pour donner à voir et à entendre, nous conduisent à renouer avec ce
qui, au théâtre, se noie dans les recherches de la technique contemporaine ». Elle poursuit :
« Ainsi, l’humble et la mesure redonnent au théâtre de quoi se redresser de la honte qui le
pousse à délaisser sa tâche la plus difficile : humaniser l’être humain ». Limpide, encore.
« Ce quelque chose qui est là » sera joué les 30 et 31 mai à Montbéliard, puis les 6,7 et 8
juin à Paris
Lire : La nuit tombée, d’Antoine Choplin, ed La fosse aux ours
Sur http://courircaretcanton.fr/critique-dramatique/
Tribulations de M Boissard
Ce quelque chose qui est là… Au (Petit 38)
Ca va te paraitre étrange peut-être, mais cette zone, même avec sa poisse qui s’est fichue partout et qui n’en finit
pas de te coller à la peau, hé ben c’est un endroit que j’aime bien. Je m’y sens pas si mal. Sûr que c’est autre
chose que le monde normal. Disons que c’est pas la même pourriture. Mais à choisir, je crois que je préfère la
pourriture d’ici. Elle est peut-être aussi vicelarde que l’autre mais, comment dire, avec elle tu valdingues quand
même pas autant dans le caniveau .
Le (petit 38), une jauge de 30 spectateurs au plus, une scène minuscule à peine surélevée traversée
du 19 novembre au 15 janvier par une route toute droite, presque une piste, une route déserte qui va
de Kiev vers Prypiath où roule une moto tirant une remorque. C’est Gouri, un poète, un revenant, un
passant éveilleur de souvenirs et de rancœurs, un voyageur de la nuit énigmatique, sorte de Charon
des temps nouveaux, passeur en zone interdite, l’autre nom du royaume des morts depuis
Tchernobyl.
Le (Petit 38) le seul théâtre de Grenoble où l’on donne une authentique tragédie grecque, texte
adapté d’un livre d’Antoine Choplin, La nuit tombée, mise en scène de Chantal Morel dans la grande
tradition du genre, deux acteurs Roland Depaw (le pompiste Iakov et Kouzma) et Yves Jaulin (Gouri)
– des quasi géants sur leur petite scène – un chœur (les voix de la bande son de Patrick Najean,) des
masques, d’oiseaux, d’êtres aimés – la marionnette – ou de lieux familiers – la maquette de
l’appartement de Gouri – et Ce quelque chose qui est là… l’autre nom du destin depuis Tchernobyl.
L’Humanité dans toute sa complexité, son ambiguïté, avec les illusions perdues, le malheur, et les
mille et une manières toutes plus dérisoires les unes que les autres de le combattre par ce tout et
n’importe quoi qu’on appelle l’espoir : Retourner s’installer à la ferme, malgré les interdictions, revenir
avec le troupeau, enfin la vache qui reste, même si les champs ont disparu, enterrés eux aussi,
enfouis sous le sable, écrire comme Iakov une ultime lettre pour dire tout son amour à Véra qui devait
bien se douter de quelque chose, ramener une porte pour Gouri, celle de son appartement abandonné
sur laquelle il marquait chaque année la taille de la petite, retourner à la ville comme Kouzma et y
rester. S’habituer à la Centrale éventrée, retourner à la pêche… Se débrouiller …
Des mots simples, un texte dépouillé, une mise en scène minimaliste, épurée, pour une tragédie
magnifique, désespérée mais fraternelle.
Ce quelque chose qui est là… Une merveille. A voir absolument.
Juin 2014
Morel et Choplin, un peu plus près de Tchernobyl
Sur : http://www.scoop.it/t/revue-de-presse-theatre/?tag=Chantal+Morel
From www.petit-bulletin.fr - December 3, 2014 9:38 PM
Théâtre et danse Grenoble
La Nuit tombée d’Antoine Choplin (auteur qui est aussi le directeur du festival l’Arpenteur) est un roman fort
qui se confronte à la catastrophe de Tchernobyl à travers une figure singulière : celle d’un père qui veut
absolument retourner sur les lieux du drame pour récupérer la porte sur laquelle sa fille aujourd’hui décédée
a laissé des traces. Un voyage sur un temps très court, avec la nuit en toile de fond, au plus près des habitants
de cette zone interdite.
« Je n’ai pas fait un travail de journaliste ; mon but était surtout de comprendre ces personnes et de partager
des instants avec elles, autour d’un verre de vodka ou en chantant » nous avait expliqué Antoine Choplin lors
de la sortie du livre en 2012.
La metteuse en scène Chantal Morel, figure grenobloise d’un théâtre exigeant centré sur le verbe, a décidé
de monter ce texte avec deux comédiens. Après l’avoir créé ce printemps dans la cadre du Festival de caves,
elle redonne le spectacle dans son Petit 38 qui porte bien son nom : chaque soir, dans ce lieu exigu, le
spectateur est comme le lecteur, au plus près des personnages, comme immergé avec eux – grâce
notamment à la bande son évocatrice. Avec une économie de moyens et un brin de lyrisme appuyé, Chantal
Morel livre une proposition (baptisée Ce quelque chose qui est là) tendue, centrée sur certaines figures du
récit – dont un poignant liquidateur de centrale à l’agonie. Et recrée un bout d’Ukraine dévastée en tout juste
une heure.
Aurélien Martinez pour Le Petit Bulletin, Grenoble
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