coûteux, pour un point de vue et un horizon temporel don-
nés. Même si on trouve quelques exemples de ce type d’étude
dans la littérature en oncologie, en ce qui concerne les
procédures de classification des cancers [13], les techniques
de radiothérapie [14] ou les chimiothérapies [15], il ne s’agit
pas d’une méthodologie couramment utilisée dans la mesure
où les stratégies appliquées aux cancers produisent rarement
une survie ou une qualité de vie équivalente [16].
–L’analyse coût-efficacité (ACE) est l’approche la plus com-
munément utilisée pour l’évaluation économique en santé.
Elle compare des options qui diffèrent aussi bien en ce qui
concerne leurs conséquences qu’en ce qui concerne les
ressources consommées. Elle permet de relier le coût de
chaque stratégie à son effet exprimé en unités physiques, le
critère retenu étant clinique (par exemple années de vie
sauvées, récidives évitées, etc.). Dans ce type d’étude, un seul
effet est pris en compte, commun à toutes les options. Bien
qu’il soit possible de comparer les simples ratios des coûts par
rapport aux résultats pour chacune des options, la comparai-
son correcte est celle des coûts supplémentaires d’une option
par rapport à une autre, en regard des effets ou des bénéfices
supplémentaires. Ainsi, les analyses coût-efficacité sont adap-
tées pour déterminer la stratégie qui permettra d’atteindre un
objectif d’efficacité médicale donné au moindre coût ou qui
permettra de maximiser l’efficacité médicale compte tenu
d’une contrainte budgétaire. La limite de ce type d’approche
en cancérologie est inhérente au fait qu’une seule approche
de l’efficacité (nombre d’années de vie gagnées, nombre de
cas traités avec succès, nombre de cas évités, etc.) peut être
mise en relation avec les coûts, sans prendre en compte la
notion de toxicité ou plus globalement d’effets sur la qualité
de vie de chacune des stratégies évaluées.
–L’analyse coût-utilité (ACU) est une forme particulière
d’analyse coût-efficacité dans la mesure où ce type d’étude
intègre la qualité de vie des personnes soumises à l’interven-
tion, évaluée comme critère de mesure ou leur préférence
vis-à-vis du résultat. Les ACU incorporent donc un jugement
de valeur du patient (utilité) par rapport au résultat de santé
obtenu. Les études de ce type sont particulièrement indiquées
si non seulement la survie mais aussi la qualité de cette survie
représentent des facteurs importants dans l’évaluation des
options [1]. La mesure du résultat est exprimée le plus sou-
vent en années de vie ajustées par la qualité de vie dont
l’unité est le Qaly (quality adjusted life years). Dans la mesure
où ce critère agrégé n’est pas spécifique d’une pathologie
donnée, cela offre la possibilité de comparer l’efficience
relative de différentes interventions en santé dans des contex-
tes différents [9].
–L’analyse coût-bénéfice (ACB) Les évaluations coût-
efficacité ou coût-utilité ne permettent pas de déterminer le
montant des ressources à partir duquel consacrer davantage à
telle intervention devient socialement injustifié, ce qui néces-
site une évaluation des conséquences sur une même échelle
que les coûts. Dans ce type d’étude, une valeur monétaire est
donc associée aux résultats des différentes options évaluées,
l’approche la plus fréquemment utilisée pour cela étant la
détermination de la disposition à payer (DAP) de la popula-
tion concernée par une étude d’évaluation contingente [17].
Cette méthode consiste à réaliser des sondages pour mesurer
la volonté qu’ont les citoyens de payer ou d’accepter une
option thérapeutique. Si l’analyse coût-bénéfice est la forme
la plus puissante de l’évaluation économique dans la mesure
où elle peut répondre directement à des questions d’effi-
cience allocative, c’est aussi la plus délicate à mettre en
œuvre. En effet, associer aux résultats de santé une valeur
monétaire soulève des difficultés dans lesquelles économie et
éthique sont liées. C’est la raison pour laquelle cette méthode
est rarement utilisée dans les évaluations économiques en
santé [18].
Choix d’un critère de résultat
Une des difficultés de l’analyse médico-économique est de
trouver un indicateur pertinent pour mesurer les résultats de
santé des actions évaluées. Le choix de l’indicateur de résultat
dépend du type de l’étude et de ses objectifs, mais aussi de la
nature des données disponibles. Différents critères de résultat
peuvent être utilisés :
•Le bénéfice clinique. Les études médico-économiques doi-
vent utiliser préférentiellement l’efficacité pratique (effective-
ness) définie comme étant la performance d’une stratégie
appliquée dans les conditions réelles d’utilisation sur une
population non sélectionnée. Toutefois, avant la commercia-
lisation d’une thérapeutique, seules les données d’essais de
phase III sur l’efficacité théorique ou efficacy (évaluée dans
des conditions contrôlées) sont disponibles. Des méthodes de
modélisation [12] peuvent être utilisées, le cas échéant, pour
extrapoler l’efficacité liée à un usage courant de la molécule.
Les hypothèses formulées dans le modèle seront clairement
explicitées et testées dans une analyse de sensibilité. Par
ailleurs, une méta-analyse permettant de combiner les résul-
tats de différentes études, de telle manière qu’il devient
possible d’en tirer des conclusions sur l’efficacité thérapeuti-
que d’un médicament, peut également constituer une source
d’information intéressante. En tout état de cause, la méthode
utilisée pour parvenir à la mesure de l’efficacité sera explici-
tée et argumentée. Il s’agit le plus souvent d’unités physiques
dites « naturelles » : nombre de vies sauvées, nombre d’an-
nées de vie gagnées. D’autres unités sont utilisables : elles
seront choisies en fonction de l’action spécifique de la stra-
tégie évaluée : gains aux épreuves fonctionnelles respiratoi-
res (traitement de l’asthme), durée de l’infection (antibiothé-
rapie), nombre de jours sans douleurs (antalgiques), etc.
•La qualité de vie liée à la santé. Deux types d’instruments
de mesure de la qualité de vie liée à la santé peuvent être
identifiés : les questionnaires psychométriques, génériques
(SF36, NHP, etc.) ou spécifiques à une maladie donnée
(EORTC, QLQ-C30, DQOL, etc.), d’une part, et les méthodes
fondées sur l’évaluation des préférences des patients, d’autre
part. Comme les profils génériques, ces mesures peuvent être
appliquées à une grande diversité de maladies et de patients.
En pratique, pour être utilisables dans des études médico-
économiques qui sont comparatives par nature, les mesures
de qualité de vie doivent être déterminées sur une échelle
d’intervalle comprenant la parfaite santé et la mort [19]. Tous
les calculs statistiques paramétriques sont alors autorisés et
les manipulations sur les différences sont valides. C’est le cas
des mesures fondées sur les préférences. Trois méthodes sont
classiquement reconnues pour l’évaluation de l’utilité des
stratégies en santé :
–Échelonnement au moyen d’échelles visuelles analogiques.
Chaque état est repéré sur une échelle où la mort, considérée
comme le pire des états, est placée à l’extrémité 0 et la vie en
bonne santé à l’autre extrémité 1. Les autres états sont loca-
lisés de sorte que les distances soient proportionnelles aux
différences entre les préférences de l’individu. Un certain
nombre de biais de mesure (biais d’extrémité d’échelle et
Méthodes d’évaluation médico-économique
Bull Cancer 2003 ; 90 (11) : 939-45 941