1.
Q6)tIT
L A
SCIENCE ÉCONOMIQUE
LEÇON D'OUVERTURE
Dli
COURS D'ÉCONOMIE POLITIQUE
A l.'UNIVERSIT/j Oit OENÎiVI
-
(11
Novembre 1902)
PAR
EIJGARD -MJLIIÂUD
II
PARIS
GENÈVE
SOCIÉTÉ' NOUVELLE
GEORC ET C"
de Librairjo et d'djtjon
Librairies de i'JnhrersI4é
17, rue Cujac (\T.)
10, Corraterie
-
1902
u- -
Document
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-
0000005760978 -
r
c
j
LÀ SCIENCE ÉCONOMIQUE
Messieurs,
Je remercie M. le Doyen de la Faculté des Lettres
CI
des Sciences Sociales des paroles qu'il vient de
prononcer. Je tiens aussi, au moment où je prends
- possession de cette chaire, à remercier l'Université
de
Genève,
M. le Président du Département de l'ins-
truction publique et le Conseil d'État de la Répu-
blique (
l
e Genève, de l'honneur qu'ils
in 'on t fait en
in y appelant. Enfin, je manquerais à un devoir si
je n'adressais un respectueux hommage à la mémoire
4
de celui qui a réorganisé l'enseignement des scien-
'
ces économiques dans cette Université et en a si sin-
tgulièrement élargi les bases, - à la mémoire
dit
'Vgrand homme d'Etat que le peuple genevois perdait
• au mois de mai dernier, M. Georges Favon.
(j
Messieurs,
Je me propose, dans cette première leçon, de
-définir l'esprit et la méthode selon lesquels sera
donné mon enseignement. Cela est nécessaire, en
raison des divergences (le tendances pratiques et
'des divergences de méthodes dont l'économie poli-
- "ous offre le spectacle, soit que nous l'enrisa_
s son état présent, soit que nous en consi-
dérions -histoire cela est nécessaire, en d'autres
snies, en raison de ce fait qu'il existe, en économie
I
2
LA SCIENCE ÉCONOMIQUE
politique, des
écoles.
Les économistes ne sont point
même d'accord sui l'objet précis de leur science
Nous ne pouvons entre'., aujourd'hui, dans la dis-
cussion de ce point. Pour fixer les
idées
,
et parce
qu'une définition au moins provisoire et très gêné-
raie non paraît immédiatement indispensable, nous
dirons, avec M. Charles Gicle, que
(C
l'économie poli-
tique a polir objet les rapports dès hommes vivant
en société, en tant que ces rapports tendent à la sa-
tisfaction de leurs besoins matériels et au dévelop-
pement de leur bien-être »
Le fait qu'il a existé et qu'il existe encoreplu-
sieurs écoles d'économie politique s'explique par
deux enlises générales d'abord cette science traite
de questions dans lesquelles sont engagés les inté-
rêts les plus immédiats des hommes, - intérêts qui
ne sont point tous concordants ni dans l'espace, ni
clans le temps - et ei second lieu, pour la
manière
-
dont elle en traite, elle ne pouvait manquer de subir
J'influence des formes de pensée philosophiques ou
scientifiques successivement oui simultanément ré-
gnantes dans les pays où elle se développait.
Les trois grands systèmes qui ont paru d'abord
clans lestemps modernes, le s
y
stème inercan Lue, le
s
y
stème physiocràlique, et le système
liste ou
ou smithianisme, traduisent de la manière la
plus apparente des intérêts, des besoins. Le mer-
cantilisme répondait à l'impérieuse nécessité de
nu-
méraire éprouvée et par l'industrie et le commerce
grandissants, et
iar
les États eux-mêmes qui se troll-
vaient en voie de développement et d'organisation,
et étaient obligés, pour entretenir leurs armées per-
manentes, et leurs cours royales, et surtout les nom-
breux rouages nouveaux (le leurs administrations, à
s'assurer de nouvelles et considérables ressources
E
LA SCIENCE ÉCONOMIQUE
3
financières. Le système physiocratiquc traduisit
les besoins de l'agriculture, écrasée par les con-
traintes féodales, et aussi des besoins nouveaux du
commerce et de l'industrie, que les réglementations
mercantilistes commençaient à gêner dans leur libre
essor. Le smithianisme Poursuivit la lutte confit
toutes les entraves opposées à l'expansion écono-
mique, et principalement à l'expansion du commerce
et de l'industrie,, par les formes de l'organisation
féodale, et par les manifestations diverses de l'esprit
d'intervention nouveau.
La forme sous laquelle se firent jour les tendances
des physiocrates et celles des économistes de l'école
de Smith, était celle (le la philosophie rationaliste,
naturaliste, provirlentialistà du xviii
0
siècle. Les
besoins dont leurs doctrines sont l'expression se
couronnent en quelque sorte d'une auréole méta-
physique. L'ordre économique qui répond à ces
besoins, ils le conçoivent comme un ordre parfait, na-
turel, voulu par
Dieu,
éternel, ils l'entrevoient,
à
la
lumière de la raison, dans les plans de la Provi-
dence, comme Malebranche lisait dans la pensée
divine les rapports (le perfection des êtres, immua-
bles et éternels. Les lois de la société capitaliste
en voie de développement leur apparaissent comme
les lois immuables et éternelles de
lit
hu-
maine au terme de son progrès.
La doctrine du
laissez /hire,
de France et d'Angle-
terre, se répandit en Allemagne, en Italie, en
Espagne, un peu partout en Europe. Mais à mesure
qu'elle se répandait, à mesure que les années pas-
saient, son caractère changeait. Au début, les inté-
rôts du commerce et de l'industrie coïncidaient avec
• les intérêts généraux de la société ; mais à mesure
que se développa ],a
capitaliste, dans son
4
LA SCIENCE ÉCONOMIQUE
sein l'antagonisme du travail et du capital se déve-
loppa du intime mouvement. Des écrits socialistes,
des soulèvements ouvriers appelèrent l'attention
publique sur cet antagonisme, et dès lors les repré-
sentants de l'école
du
laissez passer
se donnèrent
pour tâche essentielle la lutte contre le socialisme.
Leurs devanciers avaient été les organes
'
les aspira-
tions du grand commerce et de la grande industrie,
mais non sans se soucier également du bien des
ouvriers. Ils devinrent, eux, contre les ouvriers, les
avocats du patronat. Les arguments par lesquels
Descartes ci les disciples de Descartes, principale-
ment Malebranche et Leibniz, avaient entendu con-
cilier avec la toute-bonté divine la présence dans le
monde du mal pliysi que, métaphysique et moral,
servaient maintenant aux économistes à concilier
l'existence du mal social - la misère
avec la per-
fection de l'ordre capitaliste. C'était le même provi-
dentialisme, le même optimisme, la môme pensée
d'une harmonie profonde sous des discordances ap N-
rentes. Bastiat écrivit le livre type
les Harmonies
économiques. -
Dunoyer proclama
Dans
la
meilleure organisation sociale, la misère et l'iné-
galité sont choses ittivuables.
La misère est un niaI nécessaire.
Plus lhu,nanité dans son développement avait
h
redouter
l'e[fôt de certains vices, et plus il était essentiel qu'ils fussent
entourés de maux capables d'eu, détourner.
Il est bon qu'il y ait dans la société des lieux inférieurs,
où soieni exposées à tomber les familles qui se conduisent
'na', et dont elles ne puissent se relever qu'à force de se hie,,
conduire. La Misère est ce redoutable enfer. C'est un ahime
épouvantable, placé à côté des fous, des dissipateurs, des
débauchés, de Joutes les espèces d'hommes vicieux, pour les
contenu, s'il est possible, pour les recevoir et les ehêti er,
s'ils n'ont su se contenir.
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