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VIvRe ensemBLe • VOLUME 14, N° 49 (HIVER 2007)
et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu ” (Jean 1,1). Ce Verbe s’est incarné en
Jésus, a-t-on appris. Ce Verbe, nous a-t-on également dit “ illumine tout homme ” (Jean 1, 9).
Les auteurs chrétiens anciens ont vu dans ces versets un écho de l’Ancien Testament dans lequel
il est dit que la Sagesse a accompagné Dieu dans la création et que cette Sagesse s’adresse
maintenant au cœur de toute personne (voir Proverbes 8, 20-31 et Sagesse 7, 22-26). Le Verbe
éternel de Dieu incarné en Jésus, disaient ces auteurs chrétiens, touche le cœur de tous les
êtres humains nés en ce monde, les faisant aspirer à la sagesse et les poussant à l’humilité
et à l’amour de leur prochain. La grâce de Dieu révélé en Jésus-Christ rejoint donc l’ensemble
de l’humanité. Les auteurs anciens ont perçu un écho du Verbe de Dieu dans la sagesse des
philosophes grecs et dans la tradition hindoue.
Au XXe siècle, plusieurs théologiens catholiques, Henri de Lubac et Karl Rahner entre
autres, ont repris cette ancienne théologie. Ces auteurs pensent que le mystère du salut proclamé
par Jésus-Christ et célébré dans l’Église est à l’oeuvre, de façon cachée, dans l’ensemble de
l’histoire humaine. Quels que soient les endroits où les personnes se trouvent, elles entendent
l’appel à l’unité, à la recherche de la vérité, à l’amour du prochain et à l’émerveillement devant
l’origine invisible de tout ce qui existe. Cet appel rejoint les personnes dans leur rencontre avec
les autres, spécialement celles et ceux qui ont besoin d’aide. Jésus a dit un jour que tout ce
que nous faisons aux pauvres et aux méprisés, nous le lui faisons en fait, même si nous ne le
reconnaissons pas du tout (Mt 25, 40). L’appel divin s’adresse aux personnes aussi à travers
leurs traditions religieuses et la sagesse humaine. La grâce divine appelle le monde partout.
Avec Vatican II
C’est le Concile Vatican II qui a adopté cet enseignement, dans lequel il est dit : “ Puisque
le Christ est mort pour tous, et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à
savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit-Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la
possibilité d’être associés au mystère pascal ” (Gaudium et spes, 22.) Nous lisons également
que les grandes religions font écho au Verbe de Dieu:
L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère
avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines
qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose,
cependant apportent souvent un rayon de la Vérité (la Parole divine) qui illumine tous les
hommes... Elle exhorte donc ses fils pour que, avec prudence et charité, par le dialogue
et par la collaboration avec ceux qui suivent d’autres religions, et tout en témoignant de la
foi et de la vie chrétiennes, ils reconnaissent, préservent et fassent progresser les valeurs
spirituelles, morales et socioculturelles qui se trouvent en eux. (Nostra aetate, 2)
Tout en respectant les grandes religions et reconnaissant qu’elles dispensent le salut à
leurs fidèles, le Concile Vatican II continue à proclamer Jésus-Christ, Alpha et Omega de l’histoire
humaine. Des critiques font valoir que la nouvelle théologie de l’appel universel de Dieu au