p.76). Le sportif en activité déchargerait ses
pulsions par l’intermédiaire de ce qu’il se passe
sur le terrain et les diverses actions de jeu lui
permettraient, en fonction de l’intensité, de
dériver son agressivité de façon sublimée.
Pour Brohm, il en est tout autrement puisqu’il
déclare que « la pratique du sport réduit le
champ de la conscience sociale (politique) mais
elle engage dans une économie psychique
répressive, le fonctionnement intime de
l’individu venant redoubler les mécanismes
externes de répression des pulsions ».
L’individu sportif en viendrait à réprimer ses
désirs lorsqu’il se trouve sur le terrain de sport.
Leyens, lui, affirme que « le spectacle de la
violence a pour conséquence d’augmenter la
violence du spectateur : il l’éveille, la suscite et
la renforce » (in Foot et violence, un
phénomène de société : exemple du Heysel,
p.128).
Dans un deuxième temps, le sport développerait
de véritables modèles d’identification dans la
mesure où le sportif qui réalise une performance
particulièrement extraordinaire (record du
monde, geste technique jugé comme «
éblouissant ») est perçu comme un héros, un
mythe vivant. En effet, « la célébration des
héros sportifs […] opère une transfiguration
des actes réellement accomplis et des personnes
» (J. Defrance in Sociologie du sport, p.78).
On peut appuyer cela par le fait que la
réalisation d’une performance perçue comme «
infaisable » mais qui est réussie par le sportif au
terme d’un travail coûteux devient un geste
léger, «simple », harmonieux et lui permet
d’accéder au rang de «surhomme », de héros. Il
existe un véritable « culte de la performance »
(Ehrenberg). « La figure du héros fonctionne
comme support d’identification collective […]
et peut contribuer à désamorcer des tensions
liées à l’inégalité sociale… » (J. Defrance Ibid.,
p.78).
C’est alors qu’intervient la troisième fonction
symbolique du sport en tant que modèle
d’ascension sociale. Il permet de briser certains
stéréotypes négatifs « attachés » à certaines
populations stigmatisées dans la mesure où
l’achèvement et la réussite d’une performance
vont permettre de relier des caractéristiques
positives aux populations initialement «
marquées ».
De plus, le sport en tant que modèle d’ascension
sociale permet de fournir ou au moins d’amener
une issue possible à une situation devenue
socialement inconfortable. Defrance explique
cela en déclarant « que d’autres ont cherché à
montrer comment le champion permettait de
penser un destin commun, de donner un point de
ralliement pour des populations hétérogènes en
voie d’intégration dans un groupe nouveau… »
(Ibid., p.78).
Ce modèle d’identification reste
cependant à nuancer puisque le regard d’autrui
obéit à des mécanismes complexes.
Grégoire Besnard
Pour aller plus loin :
Brohm, J., M., les meutes sportives: critique de la domination,
éditions l'harmattan, 2000.
Bromberger, C., Football: la bagatelle la plus sérieuse du
monde, Paris, Bayard éditions, 1998.
Defrance, J., Sociologie du sport, Paris, éditions de la
découverte, 2006.
Ehrenberg, A., Le culte de la performance, Paris, éditions
Calmann-Lévy, 1991.
Leyens, J., P., Foot & violence un phénomène de société:
exemple du heysel.
Perelman, M., Le sport barbare, éditions Michalon, Paris, 2008.