Météo-France est placé sous la tutelle du Ministère de l’Ecologie,
du Développement durable, des Transports et du Logement
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Météo-France - Toulouse, le 30 juin 2011
Présentation des résultats du projet Climsec :
Un diagnostic complet sur les sécheresses passées, des projections pour le XXI
e
siècle
Le projet de recherche Climsec vient de s’achever et les chercheurs présentent leurs résultats
aujourd’hui au centre Météo-France de Toulouse. Lancé en mars 2008, Climsec avait pour objectif de
caractériser l’impact du changement climatique sur la ressource en eau, avec un focus particulier sur
l’humidité des sols, et de produire de nouveaux outils pour les services en charge du suivi climatique.
Coordonné par Météo-France, le projet a été mené avec le soutien de la Fondation MAIF
1
et a associé
des chercheurs du CNRS, du CERFACS, du Cemagref et de l’Ecole des Mines de Paris.
L'effet de serre et les émissions anthropiques modifient le climat. Si la température moyenne à l’échelle du
globe est la première concernée, d’autres composantes climatiques subissent ou subiront ce changement :
parmi elles, la ressource en eau.
De nombreuses études d’impact du changement climatique sur le cycle de l’eau ont été menées ces dernières
années, se focalisant essentiellement sur les précipitations et les débits des rivières. Très peu ont été
consacrées aux paramètres hydriques des sols superficiels (les couches supérieures dans lesquelles les
plantes puisent l’eau, de un à deux mètres de profondeur). Pourtant, une cheresse se décline en plusieurs
composantes: des composantes météorologique (déficit de pluviométrie) et hydrologique (niveau
anormalement bas des rivières) mais aussi une composante dite "agricole" (déficit des réserves en eau des
sols superficiels). Pour être en mesure de gérer durablement la ressource en eau, il est essentiel de prendre
en compte ces trois dimensions.
Le projet Climsec s’est donc attaché à compléter les études antérieures en produisant un diagnostic complet
des trois composantes des sécheresses. Les chercheurs ont construit des bases de données de référence
sur la période 1958-2008 pour les pluies, l’humidité des sols et les débits de rivière et ont défini des indices
pour évaluer l’intensité des sécheresses correspondantes (cf. page 2).
Ce travail a ensuite été étendu aux projections climatiques, pour évaluer l’impact du changement
climatique sur les pluies et les réserves en eau des sols superficiels pour le XXI
e
siècle (cf. page 5).
Ces différentes projections indiquent l’apparition, à partir du milieu du siècle, de phénomènes de sécheresse
inhabituels par rapport aux normes actuelles tant par leur étendue que leur durée, avec une aggravation de la
situation plus marquée encore pour l’humidité des sols superficiels que pour la pluviométrie.
1
Le projet a été sélectionné en juin 2007 dans le cadre d’un appel à projet de la Fondation MAIF sur le thème «Evolution climatique, risques
engendrés et impacts sur la société» (cf. fiche jointe).
Dossier de presse
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Un diagnostic complet des sécheresses passées
Des bases de données inédites construites par la modélisation numérique
Pour dresser un diagnostic étayé des sécheresses passées, les chercheurs ont besoin de longues séries de
données climatologiques. Des seaux d’observation fournissent depuis longtemps des mesures
hydrométéorologiques. Mais les bases de données obtenues par la seule observation sont hétérogènes, car
ces réseaux ont beaucoup évolué au cours du temps. Elles ont aussi une résolution spatiale relativement
faible (un point de mesure tous les 50 kilomètres environ pour le réseau actuel). Par ailleurs, jusqu’à
récemment, certains paramètres tels que l’humidité des sols n’étaient pas accessibles par des mesures
physiques directes.
Les climatologues ont donc eu recours à une chaîne de modélisation numérique pour construire les séries de
données nécessaires au diagnostic.
Ils ont tout d’abord produit une base de données des paramètres atmosphériques sur la période 1958-2008 en
effectuant une "réanalyse atmosphérique"
2
avec le modèle SAFRAN. En s’appuyant sur toutes les données
d’observations disponibles sur la période 1958-2008 (température, humidité, vent, précipitations solides et
liquides…) et les données issues de modèles de prévision du temps, le modèle SAFRAN a permis
d’extrapoler les valeurs des paramètres atmosphériques toutes les heures et à une échelle spatiale très fine
(un point tous les 8 kilomètres sur le plan horizontal et tous les 300 mètres d’altitude) sur ces cinquante
années. La base de paramètres atmosphériques obtenue constitue une nouvelle référence pour la
caractérisation du climat sur la période 1958-2008.
Cette base a ensuite alimenté le modèle numérique ISBA de Météo-France qui simule les échanges d'eau et
d'énergie entre la surface du sol, la végétation et les basses couches de l'atmosphère, ainsi que le modèle
MODCOU de l’Ecole des Mines de Paris qui simule le transfert de l'eau vers/dans les rivières et l'évolution des
nappes aquifères. Ces modélisations ont permis de produire des jeux de données homogènes avec une
résolution spatio-temporelle inédite sur la période 1958-2008 pour l’humidité des sols et les débits des
rivières. Ces résultats constituent un apport essentiel pour le suivi hydroclimatique national et les
futures études sur la ressource en eau.
De nouveaux indices pour évaluer l’intensité des sécheresses
Pour définir et décrire les épisodes de sécheresses, les climatologues utilisent des « indices », qui peuvent
être calculés à partir des paramètres de précipitations, d’humidité des sols, de débits mais aussi d’autres
paramètres climatiques (température de l’air, évaporation de l’eau…).
Depuis 2009, l’Organisation météorologique mondiale préconise d’utiliser l’indice SPI (Standardized
Precipitation Index), fondé sur la probabilité que surviennent des précipitations, pour décrire les sécheresses
météorologiques.
Les chercheurs engagés dans Climsec ont construit deux indices inspirés du SPI pour qualifier les autres
composantes des sécheresses :
- un indice d’humidité des sols (SSWI Standardized Soil Wetness Index), qui tient compte de la
capacité de la couverture végétale à absorber de l’eau et de la nature du sol,
2
Les paramètres atmosphériques sont calculés quotidiennement sur une grille régulière par des modèles numériques (appelés systèmes d’analyse
atmosphérique), à partir des données d’observation météorologiques. Mais ces systèmes d’analyse ont évolué au fil du temps. Pour reconstruire
une base de données de paramètres atmosphériques homogène sur une longue période passée, les climatologues procèdent donc à une nouvelle
analyse, une « réanalyse atmosphérique », à partir de toutes les données du passé et avec un seul système d’analyse.
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- un indice hydrologique (SFI – Standardized Flow Index), fondé sur la climatologie des débits simulés.
Comme le SPI, ces deux nouveaux indices sont standardisés : ils sont conçus de façon à s’affranchir des
particularités climatiques locales. Ils permettent donc de comparer la sévérité des cheresses touchant des
régions aux climats hétérogènes.
En calculant l’évolution dans le temps de
l’indice d’humidité des sols, les
climatologues peuvent identifier les
différents épisodes de sécheresse des
sols superficiels et évaluer leur durée,
leur sévérité et leur magnitude
(représentée ici par l’aire jaune).
Résultats
Grâce à ces trois indices, les événements majeurs, en particulier les grandes sécheresses de 1976, 1989 et
2003, ont écomparés les uns aux autres afin de dégager des situations de référence pour chaque type de
sécheresse.
La sècheresse de 1976 apparaît ainsi comme la plus sévère en termes de déficit de précipitations, alors que
l’événement de 1989 est celui qui correspond au plus fort déficit de l’humidité des sols superficiels. La longue
sècheresse des sols de 1989 dépasse ainsi largement l’événement de 2003, de forte intensité mais de courte
durée.
Relation entre surface moyenne et durée moyenne pour les principaux événements de sécheresses
météorologiques (à gauche) et des sols superficiels (à droite) depuis 1958 (durée de référence : 3 mois)
L'aire des disques est proportionnelle à la magnitude totale de chaque sécheresse.
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Les chercheurs ont également montré que la durée moyenne des sècheresses des sols superficiels s’avère
plus importante en Provence, dans les Pays de la Loire, le Bassin Parisien et les plaines d’Alsace et de
Limagne que sur le reste du territoire métropolitain.
Les produits de ces travaux, et notamment les nouveaux indices, sont actuellement testés avec les services
opérationnels en charge du suivi climatique, notamment afin de contribuer à qualifier la sécheresse actuelle.
Evolution annuelle de l’indice d’humidité des sols moyennée sur la France : comparaison de l’année 2011 (en rouge) avec la
distribution climatologique (médiane, quintiles et records) depuis 1958
Cette première phase du projet Climsec et les résultats obtenus ont été récompensés par l’obtention du prix
Norbert Gerbier Mumm 2010 de l’Organisation météorologique mondiale
3
.
3
Ce prix a été attribué à Jean-Philippe Vidal, Eric Martin, Laurent Franchistéguy, Florence Habets, Jean-Michel Soubeyroux, Michèle Blanchard et
Martine Baillon pour leur article "Multilevel and multiscale drought reanalysis over France with the Safran-Isba-Modcou hydrometeorological suite"
paru dans la revue Hydrology and Earth System Sciences.
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Des projections pour étudier l’impact du changement climatique
sur les pluies et l’humidité des sols superficiels
Dans un second temps, les chercheurs ont procédé à des études d’impact du changement climatique sur les
sécheresses météorologiques (déficit de précipitations) et agricoles (déficit en eau des sols superficiels).
Cette étape a consisté à produire de nouvelles simulations des modèles ISBA et MODCOU, non plus à partir
de paramètres atmosphériques représentatifs du climat passé, mais à partir de ceux attendus pour le futur,
issus de projections climatiques réalisées dans le cadre des travaux du 4
e
rapport d’évaluation du GIEC.
Les projections climatiques sont les réponses des modèles climatiques globaux
4
à différents scénarios
d’émission de gaz à effet de serre
5
. Les projections choisies pour les études d’impact du projet Climsec sont
celles qui ont bénéficié d’une régionalisation sur la France. Elles permettent ainsi de rendre compte des
particularités climatiques locales non prises en compte par les modèles climatiques globaux (dont la résolution
est d’environ 300 km).
Une analyse des incertitudes liées à l’étude d’impact
Chaque étape de l’étude d’impact introduit des sources d’incertitude. Il est crucial de les prendre en compte
dans l’analyse des résultats. Le projet Climsec s’est donc attaché à étudier l’influence des différentes sources
d’incertitude : le choix du modèle climatique global, le choix de la méthode de régionalisation et le choix d’un
scénario de concentration en gaz à effet de serre.
Il apparaît ainsi que :
- les résultats dépendent plus sensiblement du choix du modèle climatique pour les sécheresses des sols
superficiels que pour les sécheresses météorologiques ;
- pour les deux types de sécheresses, les résultats sont peu influencés par le choix de la thode de
régionalisation, hormis à la fin du siècle ;
- l’influence du choix du scénario de concentration de gaz à effet de serre n’est sensible qu’à partir du milieu
du XXI
e
siècle : les écarts restent toutefois faibles entre les scénarios A2 et A1B mais ils sont plus marqués
avec le scénario de concentration plus modeste B1
6
.
Des projections préoccupantes
La typologie des cheresses attendues dans les décennies à venir, sous l’effet du changement climatique et
par rapport au climat actuel (période de férence 1961-1990
7
), a été établie en comparant le résultat des
nouvelles simulations ISBA/MODCOU avec l’état de référence reconstruit sur les 50 dernières années.
4
Les modèles climatiques globaux sont des outils mathématiques complexes utilisés pour simuler l'évolution du climat. Ils sont capables de
représenter la dynamique de l’atmosphère sur l’ensemble du globe avec une résolution de quelques centaines de kilomètres.
5
Les gaz à effet de serre jouent un rôle important sur l’évolution du climat. Pour estimer les émissions anthropiques du futur, le GIEC a élaboré
plusieurs scénarios d'émissions reposant sur diverses hypothèses d'évolution des sociétés humaines à l’échelle du globe: démographie
mondiale, choix énergétiques futurs, développement économique, politiques environnementales, etc.
6
Les scénarios A2, A1B, B1 correspondent à trois hypothèses socio-économiques distinctes : ils se traduisent ainsi par des émissions de gaz à
effet de serre différentes, et donc des concentrations dans l’atmosphère différentes. Parmi les scénarios étudiés ici, le scénario A2 est associé aux
concentrations les plus élevées, le scénario B1 aux plus faibles. Le scénario A1B est un scénario intermédiaire.
7
Cette période de référence est celle préconisée par l’Organisation météorologique mondiale.
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