RACINES201 - Nov09

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Magazine Racines, le temps de vivre près de chez vous
Par Benoît Delabre
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Sur
la recherche avance…
Tout en continuant leurs recherches pour soigner les symptômes
de la maladie de Parkinson, les scientifiques explorent différentes pistes
pour ralentir, voire bloquer la dégénérescence neuronale.
a maladie de Parkinson est
devenue un véritable enjeu
de société. Deuxième cause
d’invalidité en France, après les
accidents vasculaires cérébraux,
cette maladie dégénérative du cerveau touche environ 120 000 personnes en France. Et probablement
beaucoup plus demain… L’allongement progressif de la durée de
vie risque en effet de voir doubler
le nombre de malades en Europe
occidentale d’ici à 2030. Un constat
inquiétant mais face auquel la
science n’est plus totalement impuissante. En effet, la recherche a fait
des progrès considérables dans le
décryptage du fonctionnement du
cerveau et des lésions occasionnant
la maladie de Parkinson.
La maladie de Parkinson est
caractérisée par la mort de neurones situés dans une petite partie
L
RACINES
du cerveau : la substance noire ou
substantia nigra. Dans cette région
du cerveau, qui ne mesure que
quelques millimètres cubes, sont
concentrées 500 000 cellules au
rôle fondamental : les neurones
dopaminergiques. Peu nombreux
si l’on considère les quatre milliards
de neurones que compte le cerveau, ils produisent la dopamine,
un neurotransmetteur, qui régule
notamment la motricité et les émotions, et qui pilote le cerveau pour
lui permettre d’effectuer plusieurs
tâches simultanément.
La L-dopa,
traitement de base
La destruction de ces neurones
dopaminergiques va de fait réduire
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la production de dopamine. Ce qui
va peu à peu faire apparaître les
symptômes. “À la différence de la
maladie d’Alzheimer, le cerveau du
parkinsonien fonctionne très bien,
explique Yves Agid, chef du service
neurologie à l’hôpital de la PitiéSalpêtrière. Mais c’est en quelque
sorte sa mise en route qui est affectée.” On estime que ces symptômes, dont le principal est
l’akinésie (lenteur générale des
mouvements) s’expriment et sont
détectables lorsqu’il ne reste que
10 000 de ces neurones dopaminergiques.
Dès lors que les chercheurs ont
découvert que les symptômes de
la maladie étaient dus à ce déficit en dopamine, ils ont bien évidemment envisagé le traitement
en conséquence : administrer de
la dopamine au patient. Ou plus
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exactement de la L-dopa, qui est
depuis les années 1970, le traitement
de référence de la maladie de Parkinson. Il s’agit d’une molécule “précurseuse”, c'est-à-dire que sous
l’action d’une enzyme (la dopa-décarboxylase), elle est transformée en
dopamine. “La dopa-décarboxylase
est présente naturellement en grande
quantité dans l’organisme, explique
le professeur Jean Costentin, directeur de l’unité de neurobiologie clinique au CHU de Rouen. En donnant
de la L-dopa au patient, on peut donc
reconstituer le niveau de dopamine
normal.”
Ralentir
la dégénérescence
Voilà la théorie. Seul hic, la L-dopa
se dégrade très vite dans l’organisme.
Il a donc fallu trouver des substances
pour éviter qu’elle ne soit attaquée
par les enzymes avant son arrivée
dans le cerveau. En outre, il faut impérativement stabiliser la libération de
dopamine dans le temps. C’est pourquoi il a fallu ajouter au traitement
des médiateurs à libération lente.
Bref, la recherche progresse autour
de ce traitement à la L-dopa, contournant peu à peu les effets secondaires
qu’il peut générer (constipation, hypotension, perte d’appétit, nausées…).
“Le problème, c’est que ces traitements
agissent sur les conséquences de la
maladie et non sur les causes, explique
le professeur Costentin. Ils ne stoppent en rien la dégénérescence neuronale. Et pour ralentir, voire stopper,
ce processus dégénératif, il faut que
nous parvenions à comprendre complètement le pourquoi de cette dégénérescence.”
C’est là tout l’enjeu des recherches
actuelles. Pour le Professeur Agid, ce
n’est “malheureusement pas pour tout
de suite. D’autant qu’il n’y a pas une
mais cent maladies différentes de Parkinson. Alors n’ayons pas de faux
espoir : on ne trouvera pas le remède
miracle du jour au lendemain. Mais
on va y arriver, nuance-il, car on a
commencé à comprendre le mécanisme de destruction de ces cellules.”
L a stimulation cérébrale profonde
Un pace-maker dans le cerveau… Voilà une
idée qui est explorée pour soigner la maladie de Parkinson et qui donne des résultats encourageants. Cette
technique de la stimulation cérébrale profonde consiste
à implanter deux électrodes de façon définitive au
cœur du cerveau, dans la substance noire, et à la relier
à un stimulateur électrique. Situé sous la peau, au
niveau de la clavicule, celui-ci envoie des impulsions
électriques qui vont stimuler les neurones dopaminergiques. Cette technique peut donner des résultats spectaculaires. Mais elle est réservée à des candidats aux
critères très restrictifs, et manque actuellement de
moyens pour se développer. Cette technique est aussi
employée pour traiter la maladie de Gilles-de-la-Tourette ou les troubles obsessionnels compulsifs (Toc).
Deux électrodes implantées
dans le cerveau vont stimuler
les neurones.
V rai ou faux ?
- Le principal symptôme de la maladie de Parkinson est le tremblement.
Faux. Le tremblement est l’un des symptômes de cette maladie, mais il n’est
pas le seul. Il n’est constaté que chez 70 % des malades. Ces tremblements sont
toutefois caractéristiques : ils surviennent au repos et de manière asymétrique (un
seul côté du corps) généralement au niveau de la main, mais aussi parfois du
pied ou de la tête. Le principal symptôme, rencontré chez tous les malades, reste
l’akinésie, c'est-à-dire la lenteur des mouvements. La personne marche à petits
pas, est gênée dans ses gestes courants et son visage devient moins expressif.
- La maladie de Parkinson touche plus les hommes que les femmes.
Faux. Selon le professeur Yves Agid, chef du service neurologie à l’hôpital de la
Pitié-Salpêtrière, le nombre de patients est à peu près identique pour les deux sexes.
- Il y a dans la maladie de Parkinson un facteur héréditaire.
Vrai. Même s’il n’est pas prépondérant, il y a dans cette maladie comme dans
toutes les autres (ou presque) un facteur génétique. Mais les porteurs de gênes
de prédisposition ne contracteront pas forcément la maladie.
- Les pesticides sont responsables de la maladie.
Vrai et faux. Certaines molécules utilisées dans les pesticides (herbicides,
fongicides et insecticides) ont un rôle toxique sur les neurones dopaminergiques
qui a été démontré. Le plus connu d’entre eux est le Paraquat qui a d’ailleurs été
retiré du marché. Mais l’exposition aux pesticides n’explique pas tout. D’autres raisons peuvent exister, voire cohabiter. On sait, par exemple, que les microtraumatismes répétés, comme chez les boxeurs, peuvent être une cause de la maladie.
Mais dans la grande majorité des cas, la maladie de Parkinson est multifactorielle.
Celui-ci serait dû à un dysfonctionnement des mitochondries, éléments
des cellules jouant le rôle de centrale
énergétique. De là, une piste thérapeutique prometteuse : la stimulation
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de ces mitochondries, grâce à des
médicaments comme la créatine. Et
comme d’autres pistes sont, en outre,
suivies : un vrai espoir est en train de
naître.
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