Examen

publicité
Master Recherche 2e année
Astronomie, Astrophysique et Ingénierie Spatiale
Année 2014-2015
EL5
Emmanuel Dartois
François Levrier
Examen
9 janvier 2015
L’examen est constitué de deux exercices et d’un problème, tous indépendants. On prendra soin de rédiger
les réponses aux questions de manière claire, précise, et détaillée. Si l’on n’a pu établir un résultat fourni
dans l’énoncé, on peut l’admettre pour traiter la suite. Les notes de cours sont les seuls documents
autorisés. L’usage d’une calculatrice pour les applications numériques est permis.
I - Atmosphère grise
On considère une atmosphère stellaire en se plaçant dans l’approximation d’une couche plan-parallèle
infinie, comme celle représentée sur la figure 1.1. Les propriétés physiques du gaz (masse volumique ρ et
température T , notamment) ne dépendent que de la profondeur z. On note Iν l’intensité spécifique, et
on ignore la diffusion.
O
surface de l'étoile
z=0
✓
z
vers le centre de l'étoile
Figure 1.1 – Atmosphère stellaire plan-parallèle
1. Écrire l’équation du transfert le long d’un rayon faisant un angle θ avec l’axe Oz. On se placera dans
la convention observateur, et on notera τν = κν z la profondeur optique à la fréquence ν depuis la surface
z = 0, Sν = ν /κν la fonction source supposée isotrope, et µ = cos θ.
2. On fait l’hypothèse d’une atmosphère grise, c’est-à-dire que le coefficient d’absorption κν ne dépend
pas de la fréquence. En déduire l’équation du transfert intégrée sur la fréquence, en faisant apparaître
l’intensité et la fonction source intégrées
Z
I=
∞
Z
Iν dν
∞
et S =
0
Sν dν
0
On notera τ pour la profondeur optique désormais indépendante de la fréquence.
3. En introduisant l’intensité moyenne J, le flux F et la pression de radiation p par
Z
Z 1
Z
1 1
2π 1
J=
Idµ
F = 2π
Iµdµ
p=
Iµ2 dµ
2 −1
c
−1
−1
Déterminer une équation donnant dF/dτ , puis une autre donnant dp/dτ .
4. On fait l’hypothèse d’une atmosphère en équilibre radiatif. Écrire cette hypothèse en fonction de κν ,
de l’intensité moyenne par intervalle de fréquence Jν , et de l’émissivité ν . Comment se traduit cette
hypothèse pour le gradient du flux dF/dτ dans le cas de l’atmosphère grise ?
5. En déduire que la pression de radiation prend la forme
p=
F
τ +A
c
où A est une constante qu’on va déterminer dans la suite.
6. Pour cela, on fait l’approximation d’Eddington, en supposant que l’intensité intégrée est semi-isotrope :
+
I (τ ) pour µ > 0
I(µ, τ ) =
I − (τ ) pour µ < 0
Calculer J, F et p en fonction de I + et I − .
7. En déduire la constante A dans cette approximation. On fera l’hypothèse qu’il n’y a pas de rayonnement entrant à la surface de l’atmosphère.
8. En faisant l’hypothèse que l’atmosphère est en équilibre thermodynamique local, en déduire que sa
stratification en température T (τ ) prend la forme
T (τ ) = Teff
1
3
τ+
4
2
1/4
.
en expliquant ce que représente la température Teff .
II - Assombrissement centre-bord
La brillance du disque solaire n’est pas uniforme. Elle décroît du centre vers les bords, selon une loi
empiriquement bien représentée par la forme
Iν (µ) = I0 1 − u0 (1 − µ) − v 0 (1 − µ2 )
où I0 = Iν (1) est la brillance au centre et µ = cos θ, avec θ l’angle entre la normale à la surface et la
direction de l’observateur, supposé à l’infini, comme sur la figure 2.1. Pour comprendre cet effet, on va
faire trois modèles successifs de complexité croissante.
✓
O
vers l'observateur
Figure 2.1 – Géométrie du problème de l’assombrissement centre-bord. La couche supérieure mentionnée
dans les deux premiers modèles est représentée en gris.
1. Dans le premier modèle, on suppose que la surface du Soleil émet comme un corps noir à la température T , avec une couche supérieure absorbante mais non émissive. On note τν l’épaisseur optique de cette
couche à la fréquence ν (on se place dans la convention modélisateur). Exprimer Iν (µ) et tracer Iν (µ)/I0
en fonction de µ pour τν = 0.5.
2. Dans le deuxième modèle, on suppose qu’en plus d’absorber, la couche supérieure émet comme un
corps noir de température T2 plus faible que la surface de l’étoile (dont on note ici la température T1 ).
Exprimer Iν (µ)/I0 en fonction de µ, de τν et du rapport B1 /B2 , où l’on a posé, pour simplifier les notations, B1 = Bν (T1 ) et B2 = Bν (T2 ). Représenter Iν (µ)/I0 en fonction de µ pour τν = 0.5 et B1 /B2 = 2.
3. On suppose maintenant que la fonction source varie continûment avec la profondeur optique, en
adoptant un développement en série
X
Sν (τν ) = I0
an τνn .
n>0
Montrer que l’intensité spécifique émergente s’écrit alors
X
Iν (µ) = I0
(n!)an µn .
n>0
On pourra utiliser la famille d’intégrales
Z
∞
xn e−x dx = n!
0
Donner l’expression de a0 , a1 et a2 en fonction des paramètres empiriques u0 et v 0 .
III - Nébuleuse bipolaire
Les nébuleuses bipolaires sont des objets astrophysiques dans lesquels une étoile centrale illumine un flot
bipolaire de matière issu de l’étoile. La matière contenue dans ce flot, éjectée par l’étoile, prend la forme
de deux cônes coaxiaux, et dans certains cas, la lumière diffusée par les grains peut être observée. Plus
proche de l’étoile, et perpendiculaire à ce flot, il existe un disque circumstellaire interne de matière. On
représente sur la figure 3.1 le schéma d’un tel objet, l’observateur étant situé à l’infini à droite. L’axe du
flot se trouve dans le plan de la feuille, et le flot fait un angle i avec la ligne de visée passant par l’étoile.
θ
H Disque
circumstellaire
M i
M' Flot
H' Figure 3.1 – Schéma d’une nébuleuse bipolaire
On observe dans la photosphère de l’étoile une raie d’absorption qu’on associe à une transition électronique de l’atome très peu abondant de lithium. Cette transition a lieu depuis le niveau fondamental (de
configuration électronique 1s2 2s1 ) vers le premier état excité (de configuration électronique 1s2 2p1 ).
1. Donner les termes spectroscopiques associés à ces deux états électroniques.
2. Quel autre atome possède le même terme spectroscopique, dans son état fondamental, que celui de
l’état excité du lithium considéré ?
On considère d’abord un flot bipolaire pour lequel i = π/2 et une ligne de visée qui passe par le plan du
disque circumstellaire. On observe dans le domaine infrarouge le spectre donné à la figure 3.2. La bande à
9.7µm est associée à la présence de silicates. On sait par ailleurs qu’il existe une relation entre l’extinction
visuelle AV et la profondeur optique de la bande à 9.7µm :
AV
= 18.5
τ9.7
3. Quelle est l’extinction attendue dans le visible ?
4. Les grains dans le disque sont suffisamment froids pour que la glace d’eau condense, mais on ne l’observe pas. Pouvez-vous expliquer pourquoi ?
5. Quelle est la densité de colonne de silicium emprisonnée dans ces silicates ? On donne la largeur de cette
bande à mi hauteur ∆ν = 100cm−1 , ainsi que la constante A = 1.6 × 10−16 par groupement MgFeSiO4 .
9x10-­‐12 Flux (W m-­‐2 µm-­‐1 ) 8,5x10-­‐12 8x10-­‐12 7,5x10-­‐12 7x10-­‐12 8 10 11 12 9 Longueur d'onde (microns) 13 Figure 3.2 – Spectre infrarouge observé. Les mesures sont indiquées par des points avec leurs barres
d’erreur, le spectre sous-jacent est représenté par la courbe continue, et le spectre du continuum stellaire
est représenté par la courbe en pointillés.
On considère maintenant un flot bipolaire incliné, pour lequel i = π/4. On ne s’intéresse plus au disque,
mais uniquement au flot.
Soit s = Qe πa2 la section efficace (en cm2 ) d’un grain de rayon a, où Qe est le coefficient d’extinction
du grain, et soit ng (r) la densité volumique (en cm−3 ) des grains, qu’on suppose ne dépendre que de
la distance r à l’étoile centrale. Les grains ne peuvent se former qu’à partir d’une distance minimale à
l’étoile rM (au point M sur la figure), car plus près de l’étoile ils seraient immédiatements détruits.
6. Donner l’expression formelle de l’épaisseur optique τ (r) le long du rayon reliant l’étoile au point H où
se trouve un grain.
7. Quelle est la luminosité apparente de l’étoile vue par le grain (au point H), connaissant la luminosité
L? de l’étoile ?
On suppose que le grain diffuse la lumière reçue selon une loi angulaire, la fonction de phase, donnée par
la fonction de Henyey-Greenstein 1 :
G(φ) =
1 − g2
(1 + g 2 − 2g cos φ)3/2
où φ est l’angle entre la direction du photon incident et la direction du photon diffusé et g est un paramètre. La diffusion est isotrope pour g = 0. L’angle d’ouverture du flot étant petit, on considère que les
photons diffusés par les grains en direction de l’observateur ne subissent pas d’absorption ou de diffusion
supplémentaire. L’observateur compare la mesure de l’intensité depuis deux points H et H’, symétriques
l’un de l’autre par rapport à l’étoile.
8. Si le paramètre de la fonction de phase est donné par g = 0.5 pour les grains, quel est le rapport
d’intensité attendu entre ces deux lignes de visée ?
9. Quelle sera la conséquence pour l’observation des flots bipolaires en général ?
La densité des grains dépend de la masse de matière emportée par le flot bipolaire. La surface de la
calotte sphérique à la distance r de l’étoile vaut dS = 2π(1 − cos θ)r2 , où θ est l’angle d’ouverture du flot.
On suppose dans un premier temps que ce flot est principalement constitué d’hydrogène atomique, dont
la densité volumique (en cm−3 ) à l’intérieur du cône est donnée par nH (r).
10. Exprimer la masse de gaz d’hydrogène dM contenue dans la calotte sphérique d’épaisseur infinitésimale dr, dans le cas ou θ 1 (en utilisant le développement limité à l’ordre 2 en θ). On notera
mH = 1.67 × 10−27 kg la masse d’un atome d’hydrogène.
11. La perte de masse Ṁ associée au flot et la vitesse du flot Vf sont données par
Ṁ =
dM
= Cte
dt
et Vf =
dr
= Cte ,
dt
et sont constantes. Exprimer Ṁ en fonction de Vf et de nH (r).
On suppose maintenant que la composante condensable du gaz dans le flot, celle qui va mener à la formation de grains de poussière, représente une fraction constante, en nombre, de l’abondance d’hydrogène,
soit nX (r) = fX × nH (r).
1. NB : l’expression dans le polycopié "Transfert de rayonnement" est erronée. L’expression correcte est celle donnée ici.
12. Déterminer nX (r) comme le produit d’une constante n0 , qu’on explicitera en faisant notamment
intervenir Ṁ et Vf , et d’une fonction simple de r.
13. Même chose en fonction du temps t.
Nous avons montré en application du cours que la croissance du rayon de grains sphériques autour d’un
noyau préexistant (le noyau de condensation initial), au cours du temps, est indépendant du rayon initial :
da
SnX hVX imX
=
dt
4ρg
où S est le coefficient de collage moyen du gaz, mX la masse des condensables, ρg la masse volumique
moyenne des grains de poussière, et hVX i la vitesse moyenne du gaz de condensables, donnée en fonction
de la température Tgaz par
r
8kTgaz
hVX i =
πmX
On suppose que le réservoir de gaz pour la production des grains reste constant au cours du temps
(fX = Cte ). C’est alors l’expansion du flot qui domine la dynamique et contribue à l’accroissement de la
taille des grains en fonction de la distance à l’étoile.
14. Donner da/dt en fonction du temps.
Le noyau de condensation initial au point M, de rayon a0 , est très petit. La distance rM correspond à un
temps tM , l’origine des temps étant prise à la position de l’étoile.
15. Intégrer da/dt, puis exprimer a(t) en fonction des paramètres du flot et du gaz (Ṁ , Vf , Tgaz , fX ,
mH , mX , ρg , S, θ, tM ).
On donne Ṁ = 10−7 M an−1 = 6.3×1015 kg s−1 , Vf = 10 km s−1 , Tgaz = 100 K, fX = 10−3 , mX = 12mH ,
ρg = 2 × 103 kg m−3 , S = 1, θ = π/20. Le rayon où démarre la condensation (point M) est situé à 1 unité
astronomique de l’étoile, soit environ 1.5 × 1011 m.
16. Calculer le temps de voyage depuis l’étoile jusqu’au point de condensation des grains pour le matériau
éjecté par l’étoile en secondes, puis en jours.
17. Calculer a(t = ∞) en supposant que le rayon initial des grains au point M est très petit et correspond
juste à un noyau de nucléation.
Téléchargement