Dossier pédagogique - Ville de Pontarlier

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Dossier pédagogique
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Contenu
Introduction..................................................................................................................................................................... 4
Publics cibles ................................................................................................................................................................... 5
cycle 3 : A la découverte des Celtes ........................................................................................................................ 5
Partie 1 : Présentation de l’exposition pour l’enseignant ............................................................................................... 7
Parcours de l’exposition .......................................................................................................................................... 7
Entrée : Du Jura aux sources du Danube, voyages en terre celtique .................................................................. 7
>> A ne pas manquer : Histoire des fouilles archéologiques de Pontarlier et de Villingen-Schwenningen .... 7
Les Celtes du Premier âge du Fer ...................................................................................................................... 10
Section 1 : Des habitats ruraux et des centres territoriaux fortifiés ................................................................. 11
>> A ne pas manquer : Le site fortifié de Bourguignon-lès-Morey ............................................................... 13
Section 2 : Des produits locaux et des rencontres nord-sud… .......................................................................... 15
>> A ne pas manquer : le pommeau d’épée en ivoire et ambre de Chaffois ................................................ 18
Section 3 : Les pratiques funéraires .................................................................................................................. 19
>> A ne pas manquer : Le mobilier du tumulus XVI de la nécropole de Chavéria ........................................ 20
>> A ne pas manquer : le tumulus communautaire de Courtesoult ............................................................. 21
Section 4 : Des femmes parées pour leur dernier voyage ................................................................................ 23
Parures régionales et mode internationale....................................................................................................... 23
>> A ne pas manquer : Parures à pendeloques et disques ajourés du Jura .................................................. 25
>> A ne pas manquer : brassards tonnelets et bracelets en lignite .............................................................. 26
Chronologie synthétique ................................................................................................................................... 27
Le métier d’archéologue ....................................................................................................................................... 28
Glossaire ............................................................................................................................................................ 31
Partie 3 : Informations pratiques .................................................................................................................................. 34
HORAIRES ET TARIFS POUR LES GROUPES SCOLAIRES .......................................................................................... 34
Contacts............................................................................................................................................................. 34
Horaires d’ouverture ......................................................................................................................................... 34
Tarifs .................................................................................................................................................................. 34
POUR UNE VISITE ACCOMPAGNEE PAR LA MEDIATRICE CULTURELLE ................................................................. 34
Avant la visite, quelques conseils ...................................................................................................................... 34
Pendant la visite ................................................................................................................................................ 35
Après la visite .................................................................................................................................................... 35
Crédits photographiques ............................................................................................................................................... 36
Générique ...................................................................................................................................................................... 36
Annexes ......................................................................................................................................................................... 37
Annexe 1 : Bulles « oui » ....................................................................................................................................... 38
Annexe 2 : Bulles « non » ...................................................................................................................................... 39
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Introduction
En 2014, la ville de Pontarlier célèbre ses cinquante ans de jumelage avec Villingen-Schwenningen, ville
d’Allemagne du Sud. Pour faire écho à cette année de commémoration, le Musée municipal de Pontarlier a
souhaité mettre en lumière une thématique valorisant à la fois l’histoire, le patrimoine et les collections
muséales des deux territoires associés. Il a donc choisi de promouvoir les Celtes du Premier âge du Fer (800 –
450 avant notre ère) par une exposition temporaire intitulée « Du Jura aux sources du Danube, voyages en
terre celtique », du 19 avril au 28 septembre 2014. En effet, dans les années 1970, à proximité de Pontarlier
et de Villingen, des tombes ont livré du mobilier archéologique celte de première importance. Ces vestiges
témoignent de la vie des communautés et de leurs échanges. Quels sont les éléments culturels, historiques,
sociaux, économiques ou environnementaux qui relient ces régions entre elles, durant plusieurs siècles ?
Qu’est-ce qui contribue à les individualiser ?
Pour répondre à ces questions et construire le discours de l’exposition, le Musée de Pontarlier a sollicité des
archéologues spécialistes de l’âge du Fer. Le propos est donc ancré dans la recherche archéologique
internationale et contemporaine.
Depuis les fouilles de la plaine de l’Arlier, à quelques kilomètres de Pontarlier, et du « Magdalenenberg », la
nécropole celte de Villingen, la découverte de nouveaux sites est venue enrichir notre connaissance de l’âge
du Fer. En effet, les fouilles de la nécropole de Courtesoult (Haute-Saône), de celle de la forêt des Moidons
(Jura), les fouilles des sites fortifiés de Bourguignon-lès-Morey (Haute-Saône), du « Camp du Château » à
Salins-les-Bains (Jura), du « Britzgyberg » à Illfurth en Alsace, celles d’Onnens sur le tracé de l’autoroute A5
dans le canton de Vaud (CH) ont permis de réviser les observations et de proposer de nouvelles
interprétations.
Le Musée municipal de Pontarlier a réuni 230 pièces archéologiques contemporaines du mobilier des défunts
du « Magdalenenberg » de Villingen et de la région pontissalienne. Trois siècles, de 800 à 500 avant notre ère,
sont plus particulièrement explorés à travers des armes, des outils, des céramiques et des bijoux découverts
dans les sites du Jura français, suisse et de part et d’autre du Rhin.
Ces objets montrent l’ampleur et la richesse des relations entre des peuples celtes qui partageaient des
conceptions du monde similaires, tout en conservant leur identité propre. Les visiteurs découvrent aussi les
liens tissés par les hommes du Premier âge du Fer avec les civilisations grecques et étrusques d’Italie du nord.
Les témoignages des habitats, des échanges commerciaux, des productions artisanales et des pratiques
funéraires emmènent le public dans un voyage au cœur du monde celte. L’évocation du costume et de la
parure féminine, à partir du mobilier funéraire, permet d’approcher des nuances régionales et chronologiques
dans la mise en valeur du corps des riches notables.
Deux maquettes, des facsimilés et de nombreuses illustrations inédites redonnent vie à ce mobilier
archéologique exceptionnel.
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Publics cibles
L’équipe du Musée de Pontarlier propose différentes activités pédagogiques en fonction du niveau des élèves
et des programmes scolaires. Le thème et la chronologie de cette nouvelle exposition temporaire étant
complexes, nous avons choisi de cibler les publics scolaires seulement à partir du Cycle 3.
CYCLE
3 : A
L A DÉ C O U V E R T E D ES
CELTES
A travers la visite de l’exposition temporaire, les élèves découvrent la civilisation celte.
La visite s’inscrit dans le programme d’histoire et d’histoire des arts des élèves de primaire.
A travers la visite de l’exposition temporaire, les élèves pourront découvrir :
- L’histoire antique :
Alors que les cités-états de Grèce antique et la civilisation étrusque se développent, nos régions abritent des
populations celtes. Elles entretiennent des rapports étroits entre elles et avec leurs voisins méditerranéens par
des échanges culturels, humains et commerciaux.
- L’histoire des techniques :
Les objets mis au jour par les archéologues témoignent de la qualité des matériaux utilisés par les Celtes et de
leur habilité technique. Ils possédaient un grand savoir-faire dans la réalisation des céramiques, le tissage et le
filage de la laine et des fibres végétales pour la confection des vêtements, la métallurgie du bronze et du fer
pour la fabrication de leurs outils, armes et bijoux.
- L’histoire des civilisations :
Les parures féminines ou les armes de luxe sont ornées de matériaux précieux venus des confins du monde
connu par les Celtes. Ils devaient certainement être associés à des pouvoirs magiques et à des représentations
mythologiques comme chez les Grecs. Certaines parures jurassiennes ont même été retrouvées dans des
sanctuaires grecs, elles étaient probablement investies d’un pouvoir symbolique.
Les similitudes entre les objets découverts sur tout le territoire du Nord des Alpes ont permis aux archéologues
de reconnaître une culture commune. Des communautés celtes indépendantes les unes des autres
partageaient néanmoins une même vision du monde.
L’étude des pratiques funéraires des Celtes pourra amener les élèves à réfléchir sur leur rapport à la mort et à
l’au-delà. Comment les communautés humaines organisent-elles le passage d’un individu du monde des
vivants au monde des morts ?
Enfin, les élèves pourront voir un des tout premiers témoignages d’écriture dans le Jura : le tesson de
Montmorot qui porte un graffiti.
- L’archéologie :
L’archéologie est une discipline née au XVIIIe siècle. Elle s’est progressivement professionnalisée pour devenir
une science pluridisciplinaire. Entre les figures fantasmées d’Indiana Jones et d’Howard Carter, le métier
d’archéologue continue de fasciner notre imaginaire contemporain mais en quoi consiste-il vraiment ?
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- L’histoire des arts :
La qualité et la beauté des objets archéologiques mis au jour permettent d’approcher l’art de l’âge du Fer. Les
élèves pourront se familiariser avec les décors, les motifs, les formes et les techniques artistiques de cette
période, apprendre à regarder et à commenter un objet archéologique, le replacer dans le temps et dans
l’espace et le mettre en relation avec d’autres œuvres de la même époque.
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Partie 1 : Présentation de l’exposition pour l’enseignant
PARCOURS
D E L ’ EX P O S I TI O N
Entrée : Du Jura aux sources du Danube, voyages en terre celtique
Entre 800 et 52 avant Jésus-Christ, les populations de l’Europe occidentale du Nord des Alpes portent le nom
de Celtes*. Cette civilisation n’a pas écrit son histoire. On la connait par quelques mentions chez les auteurs
antiques et surtout par les découvertes archéologiques.
Vers 500 av. J.-C., ce sont les Grecs, Hécatée de Milet et Hérodote, qui évoquent les peuples celtes et les
placent au nord de Marseille jusqu’aux sources du Danube.
L’archéologie a mis au jour de nombreux vestiges celtes, dès le XIXe siècle. Grâce à des méthodes scientifiques,
elle peut dater et comparer ces découvertes. Elle a reconnu une culture commune sur l’ensemble des
territoires de la France de l’Est, de la Suisse et de l’Allemagne du Sud.
A proximité de Pontarlier, la plaine de l’Arlier a révélé une nécropole de l’âge du Fer avec du mobilier
archéologique celte de première importance. Il est mis en relation avec celui trouvé dans le Jura français,
suisse, souabe, et la plaine d’Alsace. Des vestiges celtes d’Allemagne ont une résonnance particulière : ceux de
Villingen-Schwenningen, ville jumelée avec Pontarlier depuis 1964. Ainsi, les échanges entre ces deux villes
existent depuis plus de 2 500 ans…
Carte du Domaine d’occupation
des Celtes au Premier âge du Fer
(domaine hallstattien)
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>> A NE PAS MANQUER : HISTOIRE DES FOUILLES ARCHÉOLOGIQUES DE PONTARLIER ET DE
VILLINGEN-SCHWENNINGEN
1. A la recherche des Celtes de l’Arlier (fouilles archéologiques à La Rivière-Drugeon, Chaffois,
Dompierre-les-Tilleuls)
Les tombeaux celtes de la plaine de l’Arlier sont connus par les érudits locaux dès 1847. Mais il faut
attendre 1960 pour que des fouilles archéologiques soient organisées. Les opérations sont menées par le
peintre Pierre Bichet, entouré d’un groupe de Pontissaliens enthousiastes, issus du Club Alpin Français. Elles
sont dirigées par le professeur Jacques-Pierre Millotte, spécialiste de l’âge du Fer dans le Jura et directeur des
antiquités préhistoriques de Franche-Comté.
Fouilles du tumulus « La Censure » à Chaffois, 1967
Les fouilles débutent en 1964 et se poursuivent jusqu’en 1986. Elles se tiennent essentiellement les
week-ends d’été. Elles concernent des tumulus* facilement repérables dans le paysage, à pied ou lors d’un
survol par avion, mais aussi ceux qui sont menacés par l’aménagement du territoire ou l’élevage. Une
trentaine de monuments est fouillée et révèle de nombreuses sépultures renfermant du mobilier. Les défunts
sont accompagnés de leurs bijoux, de leurs armes et parfois de quelques poteries. Ces objets permettent de
dater les tumulus du Premier âge du Fer essentiellement. Ils rendent compte du statut social privilégié de la
population retrouvée.
La communauté vivait probablement de l’élevage et de l’agriculture. Elle devait contrôler la voie de
passage creusée par le Doubs, qui permettait de traverser le massif jurassien. Les femmes avaient
certainement une place dominante au sein de cette société. Elles sont largement représentées dans les
tumulus et sont parées de beaux bijoux.
Ces découvertes sont valorisées par plusieurs expositions temporaires. Les résultats sont publiés en
1992. Depuis 2001, ces vestiges archéologiques sont présentés de façon permanente au Musée de Pontarlier.
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2. Les fouilles du tumulus géant du « Magdalenenberg » à Villingen
Plan du tumulus du Magdalenenberg et photographie de la tombe
centrale, 616 avant J.-C.
A quelques centaines de mètres du centre-ville de Villingen-Schwenningen, ville jumelée avec
Pontarlier, se dresse la colline du Magdalenenberg. Dès 1890, cette butte est identifiée comme un monument
funéraire de l’âge du Fer : un tumulus de 100 m de diamètre pour 7 m de hauteur encore conservée. Des
fouilleurs, dirigés par Karl Schumacher, en ouvrent le centre. Ils découvrent une grande chambre funéraire en
bois de 8 m x 6 m. Elle était destinée à un « prince » ou une « princesse » celte, accompagné(e) de ses objets
précieux. Mais ces derniers ont été pillés, peu de temps après le décès de ce personnage de haut rang.
En 1970, un jeune scientifique, Konrad Spindler, initie de nouvelles campagnes de fouilles. Il découvre
126 tombes organisées en cercles concentriques autour de la chambre centrale. Grâce à l’étude des bois bien
conservés, le tumulus a pu être précisément daté de 616 avant notre ère.
Récemment, des analyses des os de certains squelettes ont montré que les défunts ne provenaient pas
tous de la région. Les archéologues ont également pu déterminer le régime alimentaire des notables à base de
viande.
Le modèle de ce tumulus communautaire géant est à chercher dans les nécropoles orientalisantes de
l’Etrurie méridionale (comme à Cerveteri) et dans les monuments funéraires princiers de l’Etrurie du Nord.
Une partie du mobilier des sépultures du Magdalenenberg est exposée au Musée des Franciscains de
Villingen-Schwenningen.
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Les Celtes du Premier âge du Fer
Les peuples celtes présentés dans l’exposition appartiennent au Premier âge du Fer, de 800 à 450 av. J.-C.
Cette période est aussi appelée période de Hallstatt*, du nom d’une petite ville autrichienne où des mines
de sel et 2000 tombes de cette époque ont été découvertes.
Ces quatre siècles sont caractérisés par le développement de la métallurgie du fer. Ce métal est apprécié pour
sa solidité. Il permet de créer des outils et des armes plus performants.
L’âge du Fer succède à l’âge du Bronze (2000 à 800 av. J.-C.). Le passage s’est fait progressivement. Comme
leurs ancêtres, les Celtes sont installés depuis longtemps au centre de l’Europe. Ils sont essentiellement
éleveurs et agriculteurs. Une élite contrôle les voies de communication. Elle peut se déplacer à cheval. Elle a la
main mise sur l’approvisionnement en ressources naturelles. Des artisans spécialisés fabriquent des objets en
bronze.
Sans abandonner ce métal, les hommes réussissent à maîtriser les difficultés techniques du fer. Son usage,
comme l’exploitation du sel ou le développement d’un élevage spécialisé, aurait été favorisé par la
dégradation du climat et le bouleversement des circuits d’échanges. Ces différents facteurs contribuent à
renforcer la hiérarchie sociale, à centraliser les richesses et à développer de nouveaux réseaux d’échanges
avec la Méditerranée. Les changements touchent peu à peu les habitats, les coutumes funéraires et les
costumes.
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Section 1 : Des habitats ruraux et des centres territoriaux fortifiés
Les Celtes vivent dans des fermes parfois regroupées en petits villages ou dans des sites fortifiés sur des
promontoires naturels.
Les habitats ruraux sont les moins bien connus. Ils ne sont pas faciles à localiser : ils n’ont pas laissé de traces
dans le paysage actuel. Ils sont souvent découverts à l’occasion des grands chantiers d’aménagement du
territoire comme la construction des autoroutes ou des lignes grandes vitesses (LGV).
Les fermes sont associées à leurs dépendances : greniers, silos pour conserver les céréales, dépotoirs, parfois
puits et four. Les bâtiments sont faits de torchis et de bois. Ils couvrent une surface de 50 à 70 m² et
s’organisent quelquefois en un petit village d’une vingtaine de constructions.
Evocation d’une maison hallstattienne et d’un
grenier ou d’une resserre sur poteaux à
Wolfgantzen.
Lors des fouilles archéologiques, le plan des
maisons hallstattiennes apparaît sous la forme de
trous de poteaux. Il est assez standardisé :
rectangulaire ou trapézoïdal. Vers - 620, il peut se
diversifier. Une rangée de poteaux divise alors la
maison en deux parties.
Ces habitats livrent de nombreux vestiges. Les objets de la vie quotidienne sont les plus nombreux :
céramiques, bijoux, outils. Les restes de boucherie indiquent que les Celtes élèvent des porcs, des moutons,
des chèvres et des bœufs. Ils cultivent des céréales. Ils filent et tissent de la laine essentiellement pour leurs
vêtements. Dans certains villages, ils pratiquent des activités de métallurgie.
Site dit de Gamsen, Brig-Glis « Waldmatte » dans
le Valais suisse, vers 600 avant J.-C.
Cette restitution est représentative d’un village avec
ses habitations et ses dépendances. Les habitants
vivent de l’agriculture et de l’élevage. Ils peuvent
échanger des objets artisanaux de qualité.
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Les sites fortifiés sur les bordures des plateaux escarpés sont occupés dès l’âge du Bronze. Ouvrages défensifs,
ils sont protégés par des remparts. Ils contrôlent des axes de communication importants pour les échanges de
sel, de fer et d’objets prestigieux. Leur position stratégique leur permet de dominer un territoire plus ou moins
grand. Dans ces centres de richesse et de pouvoir, on trouve des objets importés depuis les régions
méditerranéennes : amphores, vaisselle et bijoux d’Italie, vases grecs.
Les premiers témoignages d’écriture au nord
des Alpes ont été mis au jour sur un site de
hauteur au pied du Jura, à Montmorot près
de Lons-le-Saunier. Une inscription sur un
tesson de jatte de fabrication locale recourt
à l’alphabet étrusque écrit de droite à
gauche. Le mot « Prís » est peut-être
l’abréviation d’un nom propre en langue
celte. Un ou une Etrusque aurait peut-être
séjourné sur le site du « Château »
e
à Montmorot dans la première moitié du VI
siècle avant notre ère ?
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>> A NE PAS MANQUER : LE SITE FORTIFIÉ DE BOURGUIGNON-LÈS-MOREY
L’aménagement de l’accès au site
fortifié de Bourguignon-lès-Morey
avait pour effet de canaliser les
arrivants le long d’une sorte de
corridor entre le rempart sud-ouest et
le versant abrupt. Ce dispositif de
contrôle efficace conduisait à un
porche commandant le franchissement
du rempart.
Les habitats fortifiés de hauteur sont facilement repérables dans le paysage avec les vestiges de leurs
remparts hauts de plusieurs mètres. Ils occupent des bordures de plateaux escarpés dont les parties
accessibles sont bordées par un mur de bois et de pierres sèches. Ces sites fortifiés sont identifiés très tôt par
les érudits locaux et les archéologues. Dès la seconde moitié du XIXe siècle, les sites comtois de Bourguignonlès-Morey, Montmirey-la-Ville, Salins-les-Bains sont connus. Une soixantaine de ces fortifications en pierre est
conservée en Franche-Comté.
Ces habitats permanents de hauteur font leur apparition au Néolithique. Ils constituent une étape importante
dans l’évolution des habitats des premiers agriculteurs. Dans la région, ils émergent dès la seconde moitié du
Ve millénaire. Certains de ces sites sont réoccupés et aménagés à plusieurs reprises jusqu’au début du Moyenâge. Ils peuvent remplir plusieurs fonctions : une fonction défensive, une fonction de prestige et une fonction
culturelle. Ces places centrales sont dominées par une élite qui étend son pouvoir sur le territoire environnant,
contrôle les voies de circulation et les échanges, et centralise les richesses.
Le site de Bourguignon-lès-Morey couvre 17 hectares, ce qui en fait un des sites fortifiés les plus
importants de l’Est de la France. Fouillé dès le XIXe siècle à la demande de l’empereur Napoléon III, il fait
l’objet d’un programme pluriannuel de recherche en archéologie depuis 1992. Implanté sur un éperon rocheux
dominant la vallée de la Rigotte, il est naturellement protégé sur ses côtés nord, ouest et sud par des
escarpements rocheux de plusieurs mètres. Un rempart long de 480 m défend les parties les plus accessibles
selon un tracé en U. Le site n’est pas occupé de façon continue, deux périodes se distinguent : le Néolithique
moyen (4200-3600 av. J.-C.), puis l’âge du Fer entre le VIe et IIIe siècle avant J.-C. Entre les deux, l’abandon du
site est difficile à expliquer : est-ce une période de paix ? Les occupants se sont-ils déplacés vers les plaines ?
La réoccupation du site au début du VIe siècle avant J.-C. s’inscrit dans un contexte de mutation et de
compétition. Le pouvoir se centralise entre les mains d’une minorité qui assoit son emprise sur le reste de la
communauté. Le rempart néolithique de Bourguignon-lès-Morey est restauré, renforcé et prolongé au sudouest. Cette architecture en pierres sèches est composée des deux côtés par plusieurs lignes de parements,
peut-être disposées en gradins faisant contrefort. La stabilité du remplissage est assurée par des caissons et
deux rangées de poteaux verticaux, espacés de deux mètres, symétriques à l’axe central. Le mur est large de
2,80 m à 3,50 m. Un chemin d’accès de 6 m de large, aménagé le long du rempart et du versant abrupt,
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canalise les arrivants jusqu’à un porche. Cette porte latérale dans un coude du rempart est couverte et dotée
d’un plancher.
L’espace intérieur reflète différentes activités. Des habitations sont implantées le long du mur
d’enceinte, signalées par l’emplacement de trous de poteaux des maisons de bois ou par des foyers aménagés
en pierre et en argile. Contre le rempart au sud, des vestiges, creusets et scories, témoignent de l’existence
d’un atelier métallurgique. Un abondant matériel a été rejeté dans les dépotoirs ou abandonné sur les sols
d’habitat.
Des éléments de parure, fibules (sorte d’épingle à nourrice ou de broche), bracelets en lignite, armilles
en bronze, perles, plaques de ceinture ou pendeloques, sont caractéristiques du costume des femmes celtes.
Ils témoignent de l’évolution chronologique de la mode et rendent compte du savoir-faire des artisans. Des
ustensiles de toilette, rasoirs, pinces à épiler, cure-ongles, témoignent de l’attention apportée au soin du
corps. Quelques outils en fer montrent l’usage nouveau de ce métal. Le travail des textiles de laine est
représenté par des poids (pesons) de métier à tisser, des fusaïoles pour lester les fuseaux, des aiguilles à chas
en bronze. Les nombreux tessons de céramique, souvent décorés, constituaient une riche gamme de
récipients de volumes et de formes variés pour différents usages : grandes jarres de stockage, pots culinaires,
jattes, coupes, écuelles, gobelets pour la consommation des aliments et des boissons. Ces objets montrent les
liens entre la communauté de Bourguignon-lès-Morey et d’autres sites du Jura (Salins, Courtesoult, Pontarlier).
Dans quelques cas, les réseaux d’approvisionnement et les échanges dépassent les horizons du monde
celtique comme la céramique provençale, les amphores étrusques ou les fibules aux modèles inspirés par
l’Italie.
Le site fortifié de Bourguignon-lès-Morey se révèle secondaire comparé à de grands centres comme la
Heuneburg sur le Haut Danube. Il s’agit d’un centre territorial secondaire, en marge d’un pouvoir princier
contrôlant les principaux passages de la Saône dans la région de Gray.
Fibules, sorte d’« épingles à nourrice » pour
fermer les vêtements, de divers types à arc
simple et à ressorts en arbalète des
habitats fortifiés de Bourguignon-lès-Morey
et du « Camp du Château » à Salins-lesBains.
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Section 2 : Des produits locaux et des rencontres nordnord-sud…
Au Premier âge du Fer, les transactions sont basées sur des échanges nombreux et parfois sur de très
longues distances. À cette époque, les Celtes n’utilisent pas encore de monnaie. Il faut attendre quelques
siècles.
Ils échangent des métaux (fer, or, cuivre et étain pour fabriquer du bronze), du cuir, de la laine, des fourrures,
du sel pour conserver les aliments. Ils reçoivent de l’ambre de la Baltique, de l’ivoire d’Afrique, du corail et de
la vaisselle en céramique ou en métal de la Méditerranée.
Les archéologues ont trouvé des témoignages des rencontres entre les Celtes et les civilisations
méditerranéennes grecques et étrusques (Italie). Contre du métal, du sel et certainement des hommes, les
Celtes acquièrent des vases à figures noires venues de la région d’Athènes, des bijoux, de la vaisselle et des
amphores à vin d’Italie et de Provence. Ces importations prestigieuses sont concentrées entre les mains d’une
élite. Ces chefs détiennent le pouvoir d’organiser le commerce. En tant qu’intermédiaire, ce sont eux qui
reçoivent les produits de luxe en cadeau.
Voyages des ressources et des matières
L’ambre, l’ivoire et le corail sont très prisés par les Hallstattiennes. Ils représentent les confins du monde connu au
Nord pour l’ambre, au Sud pour le corail et l’ivoire d’éléphant ou d’hippopotame. Ils sont associés à la mythologie et
dotés de pouvoirs magiques. Leur approvisionnement mobilise des réseaux d’échanges sur de très longues distances.
Le sel fait également partie des ressources précieuses qui circulent sur de longs trajets. Cette substance est
indispensable aux hommes et aux animaux. Il est notamment utilisé pour la conservation des aliments. Difficile à
isoler, il a une valeur comparable à celle de l’or. Il procure de grandes richesses aux communautés qui l’exploitent. Le
sel sous la forme de roche est extrait dans des mines. Sous la forme de solution, il est présent dans des sources
salées. Pour le récupérer, les hommes font chauffer l’eau dans des récipients d’argile. L’eau évaporée, le sel reste.
C’est le briquetage.
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Des artisans spécialisés gravitent autour des notables. Leur haute technicité leur permet de confectionner des
objets de grande qualité en fer, en bronze ou en matériaux précieux. A côté de cet artisanat de luxe, un
artisanat domestique pratiqué au sein de la maison subsiste pour la fabrication de pots, de vaisselles
quotidiennes et de vêtements.
1. La vaisselle hallstattienne
e
e
Céramiques de Montmorot, VI -V siècles
Au début de la période de Hallstatt, la céramique est
montée au colombin. Des boudins de pâte sont
superposés puis lissés pour façonner l’objet. C’est
essentiellement une production domestique pour de la
vaisselle utilitaire : stockage et cuisson des aliments.
La vaisselle de présentation est plus fine. A la fin de la
période, l’apparition du tour permet la réalisation de
céramiques de meilleure qualité par des artisans
spécialisés. La céramique fine évolue, au cours de la
période de Hallstatt, vers des formes diversifiées et
une raréfaction des décors. Les jattes à bords, pots à
panse ovoïde, élégantes écuelles carénées ou à
épaulement, dotées d’un pied creux, vases
rapprochent les séries franc-comtoises, des suisses ou
des alsaciennes.
2. Bronziers et forgerons
Des ateliers régionaux existent aux côtés de centres
de production plus importants.
Le bronze est produit à partir de cuivre et de l’étain.
Il est fondu dans un récipient en argile résistant à de
fortes températures : le creuset. Il est en forme de
poire, muni d’un bec de coulée. Le métal liquide est
ensuite versé dans des moules aux formes des
objets.
Le fer est plus fréquent à l’état naturel dans nos
régions, mais il fait appel à une technique plus
complexe. Le minerai, une fois concassé, grillé et
trié, est chauffé à 1500° dans un four aménagé dans
le sol. Les impuretés du minerai forment des scories.
Le métal, quant à lui, devient visqueux et forme une
loupe. Celle-ci est ensuite frappée à chaud à coups
de marteau.
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3. L’art des tisserandes
Comme le chanvre et le lin, la laine est
utilisée pour fabriquer des tissus. La
matière première est filée. Le filage est
réalisé manuellement au moyen d’un
fuseau suspendu, composé d’une tige et
d’un poids, la fusaïole. La rotation du
fuseau torsade les fibres et fabrique le fil.
Les fils obtenus sont ensuite tissés, à l’aide
de métiers verticaux, entre autres. Les fils
de trame, horizontaux, s’entrecroisent
autour des fils de chaîne verticaux. Ils
peuvent dessiner des motifs.
Les tissus hallstattiens sont très rarement
conservés. Mais la taille des fibules nous
renseigne sur la qualité des vêtements.
Plus la fibule est petite, plus le tissu est fin.
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>> A NE PAS MANQUER : LE POMMEAU D’ÉPÉE EN IVOIRE ET AMBRE DE CHAFFOIS
Le tumulus de « La Censure » n°3 à Chaffois a été fouillé entre 1960 et 1970 par l’équipe de Pierre
Bichet et de Jacques-Pierre Millotte. Une sépulture centrale a été mise au jour. Le squelette, mal conservé n’a
pas permis de déterminer le sexe du défunt. Mais celui-ci était accompagné d’un riche mobilier : à côté de la
tête, un anneau d’or et un pommeau d’épée en ivoire et ambre (sans épée) ; à chaque bras, un bracelet en
lignite ; aux pieds, des céramiques.
Le pommeau d’épée est constitué de fragments d’ivoire d’éléphant, incrustés de pastilles d’ambre
triangulaires et losangiques, disposées en bandeaux superposés, tête-bêche, sur des lamelles de métal blanc.
Cette pièce tout à fait exceptionnelle témoigne des échanges longue distance qui existaient entre les
communautés celtes et les populations voisines.
En effet, cet équipement de prestige, représentatif du guerrier celte, est typique de l’Europe centrale.
Il rappelle le pommeau d’ivoire d’une épée trouvée dans la tombe 573 de la nécropole de Hallstatt en
Autriche, fameuse nécropole qui a donné son nom à la période du Premier âge du Fer. Le pommeau de
Chaffois avait dû être monté sur une épée en fer de type dit de Mindelheim, datée du milieu du VIIe siècle
avant J.-C. La grande taille et la décoration de ces épées laissent penser à un usage plus symbolique que
pratique. Ces objets de luxe ont été exportés jusqu’en Pays de Galles. Mais les décors du pommeau de Chaffois
ressemblent à ceux d’accessoires raffinés fabriqués en Italie centrale comme la corne à boire de la tombe
Barberini près de Rome.
La combinaison de l’ivoire et de l’ambre réunit deux matières précieuses qui évoquent les confins du
monde connu par les peuples celtes. Elles étaient certainement investies de pouvoirs magiques. L’ivoire
d’éléphant représentait le Sud et la Méditerranée. L’ambre, originaire du Nord de l’Europe, était associé à un
peuple mythique : les Hyperboréens, installés dans un Nord lointain et inaccessible. Pour les Grecs de
l’Antiquité, l’ambre était composé des larmes solidifiées des Héliades, filles du Soleil, inconsolables à la mort
de leur frère. Cet imaginaire était probablement partagé par les Celtes. L’approvisionnement de ces deux
matériaux mobilise des réseaux d’échanges sur de longues distances.
Le pommeau d’épée de Chaffois, par sa technique de fabrication et les matériaux employés, manifeste
le luxe et l’investissement dont pouvaient faire preuve les notables hallstattiens.
18
Section 3 : Les pratiques funéraires
Les notables de la société celte sont enterrés dans des tumulus. Ces buttes en terre et/ou en pierres
recouvrent une ou plusieurs tombes. Elles sont entourées par un fossé circulaire ou une couronne de pierre. A
la surface, des stèles en bois ou en pierre marquent l’emplacement des sépultures.
Evocation d’un paysage funéraire hallstattien à Muttenz près de Bâle
Ces monuments funéraires sont réservés à l’élite. Pour les construire, toute la population s’investit. Visibles de
loin, ils marquent le territoire de chaque communauté. Ils peuvent être isolés ou regroupés en nécropole
(cimetière).
Le rite de l’incinération, hérité de l’âge du Bronze, côtoie le rite de l’inhumation. Les morts sont brûlés sur un
bûcher. Leurs ossements calcinés sont placés dans une urne ou directement dans une fosse. Mais, on préfère
progressivement inhumer les défunts dans un cercueil en bois.
Au début de la période de Hallstatt, les tumulus recouvrent souvent une tombe individuelle. Les hommes
sont accompagnés d’une épée, en bronze puis en fer, d’un rasoir et, pour les plus riches, de divers récipients
en bronze. Ce mobilier stéréotypé témoigne de l’appartenance du défunt à une caste dominante. L’arme
signale son statut guerrier. La vaisselle indique sa participation au banquet entre égaux. Le rasoir rappelle le
soin qu’il porte à sa toilette. Tous ces éléments symbolisent son pouvoir.
A partir de 620 / 600 avant J.-C., les tumulus deviennent plus grands. Ils abritent plusieurs sépultures
organisées en cercles concentriques autour d’une riche tombe centrale féminine ou masculine. Ils sont
utilisés sur plusieurs générations. Les descendants ou l’entourage rejoignent ainsi le monument funéraire du
membre fondateur. Dans ces monuments, le mobilier des tombes masculines s’appauvrit. En revanche, les
femmes sont parées de riches ornements. Elles semblent donc dotées de pouvoirs importants.
19
>> A NE PAS MANQUER : LE MOBILIER DU TUMULUS XVI DE LA NÉCROPOLE DE CHAVÉRIA
Mobilier de la tombe XVI de la nécropole de
e
Chavéria (VIII siècle avant J.-C.).
Essai d’interprétation du mode d’assemblage du harnais
de tête de cheval avec un mors du tumulus XVI.
La nécropole de Chavéria au Sud du département du Jura, compte 20 tertres funéraires environ. 16 d’entre eux ont
été fouillés à partir de 1964, suite aux projets d’arasement des tumulus dans le cadre du remembrement. Les
monuments funéraires étaient limités par un cercle de pierres. Ils recouvraient des sépultures uniques où les
inhumations et les incinérations coexistent. Six tombes renfermaient des épées de bronze et de fer avec leurs
bouterolles* qui ont permis d’avancer une datation du VIIIe siècle avant J.-C. Ces tumulus illustrent donc la
transition entre l’âge du Bronze et l’âge du Fer avec le renouveau d’une pratique funéraire qui avait disparu depuis
400 ans : l’inhumation individuelle sous tumulus. Les bénéficiaires de ces monuments funéraires sont
principalement des hommes, jeunes comme âgés. Ils sont accompagnés par un mobilier stéréotypé qui témoigne de
leur statut social privilégié.
Le tumulus XVI a livré la sépulture la plus riche de la nécropole. Il s’étend sur presque 20 m de diamètre pour une
hauteur conservée d’environ 1,20 m. Au centre, une sépulture orientée est-ouest a été mise au jour.
Le défunt était enseveli dans un cercueil en bois à côté duquel étaient déposés un vase et une coupe en
céramique, destinés au service de la boisson. Il avait son équipement personnel composé d’une épée en bronze de
type Wehringen, associée à la bouterolle de son fourreau et complétée par quelques anneaux. Vers l’extrémité de
l’épée, était placé le harnachement de deux chevaux : deux mors à canon droit, deux paires de phalères en tôle de
bronze (non conservées) et une série de 70 éléments quadrangulaires en os qui devait orner le harnais. La taille des
mors laisse penser à des chevaux de petite taille. Ce harnachement correspond à celui de chevaux attelés à un char
plus que de chevaux montés.
Ces vestiges symbolisent les fonctions réelles ou revendiquées du défunt. Le service à boire marque sa
participation au banquet élitaire entre égaux. Le droit de porter une arme signale son statut de chef guerrier. Le
harnachement de chevaux indique sa possession d’animaux de prestige et d’un moyen de locomotion. Le défunt du
tumulus XVI appartenait à la caste dominante martiale et patriarcale du début de l’âge du Fer (800-725 avant J.-C.).
20
>> A NE PAS MANQUER : LE TUMULUS COMMUNAUTAIRE DE COURTESOULT
Plan du tumulus communautaire de
Courtesoult (Haute-Saône) : la place
des hommes, des femmes et des
e
e
enfants (VI - V siècles avant J.-C.)
Plan et restitution de la sépulture 48
de Courtesoult : la dame est placée
dans un cercueil, accompagnée de
ses bijoux et d’une série d’amulettes
Le tumulus de Courtesoult est un des monuments funéraires complexe les mieux connus pour le
Premier âge du fer en France de l’Est. Il a été fouillé en 1987. Son organisation rappelle celle du tumulus géant
du Magdalenenberg de Villingen-Schwenningen.
Il a été construit au VIe siècle avant J.-C., pour une femme membre fondateur de la communauté. La
tombe centrale était abritée par un caisson de dalles, installé sur le rocher préalablement nettoyé. Cette dame
était parée d’une ceinture à fermoir rectangulaire ornée d’appliques circulaires en bronze, d’une paire de
brassards-tonnelets et de nombreuses armilles sur les avant-bras. Son vêtement était fermé par une fibule
serpentiforme en bronze caractéristique de l’Italie du Nord-Ouest, de l’Allemagne du Sud, de la Suisse
occidentale et de la France de l’Est. Cette attache témoigne donc de l’appartenance de la défunte à une élite
celte de culture commune.
Autour de cette sépulture, 45 tombes s’organisent en cercles concentriques. Elles s’étalent sur deux
siècles, ce qui représente environ six générations. Mais les tombes se superposent rarement, ce qui semble
indiquer un marquage de surface sous la forme de stèle par exemple. Le nombre restreint de défunts autorisés
à rejoindre le tumulus indique clairement qu’ils ont été sélectionnés. Ils faisaient partie des notables de la
21
communauté. Ils entretenaient probablement entre eux des rapports hiérarchiques et/ou étaient parents.
Hommes, femmes et enfants sont présents dans le tumulus. Néanmoins, les archéologues ont relevé
seulement neuf sépultures d’enfants. Les incinérations côtoient les inhumations sans que l’on puisse
déterminer la raison qui a motivé le choix de telle ou telle pratique funéraire. L’incinération est-elle un moyen
de conserver les restes quand les funérailles sont retardées ? Correspond-elle à un statut particulier du
défunt ?
Les sépultures de ce tumulus communautaire révèlent un basculement décisif dans les coutumes
funéraires de l’élite : les femmes sont davantage valorisées qu’à la période précédente comme en témoignent
les dépôts de mobilier dans leurs tombes. Les tombes masculines renferment un mobilier plus sobre : fibules,
rasoirs, bracelets. Les femmes, par contre, emportent dans l’au-delà de nombreux accessoires et bijoux. Elles
semblent donc instaurées en tant que figure de référence : sont-elles les ancêtres fondatrices du lignage ? Le
pouvoir se transmet-il par les femmes ? Sont-elles investies de pouvoirs magiques qui leur permettent de
communiquer avec le monde des morts et des dieux ?
Deux sépultures féminines sont particulièrement remarquables : elles abritent des parures tout à fait
semblables composées d’une plaque de ceinture, de fibules et surtout d’amulettes suspendues au cou. Ces
deux défuntes portaient sur l’épaule un petit ensemble d’objets magiques : dent d’ours ou de sanglier, galet
percé, coquillage, fossiles. Cette association complexe de matières curieuses dans l’ornementation du
vêtement féminin s’est développée à partir de la seconde moitié du VIIe siècle avant J.-C. Elle apparaît d’abord
dans les riches tombes féminines de l’Allemagne du Sud avant de se transmettre aux communautés de l’est de
la France comme à Courtesoult.
22
Section 4 : Des femmes parées pour leur dernier
dernier voyage
Le mobilier trouvé dans les tombes permet aux archéologues d’évoquer le costume des femmes
hallstattiennes. A travers leur parure, elles affirment leur identité, leur statut social et leur appartenance à
une communauté.
Pourtant, on ne sait pas qui sont ces femmes : des chefs ? Des femmes de chef ? Des prêtresses ? On ne peut
pas déterminer non plus à quelle occasion elles portaient leurs précieux bijoux : mariage ? Cérémonies
religieuses ? Fêtes rituelles ? Elles les emportaient ensuite dans leurs sépultures pour leur voyage dans l’audelà.
L’ensevelissement des défuntes avec leur prestigieuse parure montre que leurs funérailles étaient un moment
particulièrement important dans la vie du groupe. La famille en deuil devait réaffirmer sa position sociale à
travers la richesse de la cérémonie. L’abondance et la préciosité des objets enterrés témoignent de l’opulence
et du pouvoir du lignage. Dans la tombe, les bijoux sont soustraits au commerce et au patrimoine familial. Les
héritiers ne disposeront pas de ces richesses. Mais les liens avec les puissances surnaturelles et la
communauté des ancêtres sont renforcés.
Parures régionales et mode internationale
Les bijoux sont fabriqués en matériaux précieux. Le bronze compose l’essentiel des parures. A l’origine, il est
brillant et doré comme l’or. Il peut être agrémenté de perles en corail, en ambre ou en verre. Des bracelets ou
des brassards en lignite, noirs et brillants, complètent la panoplie. Ces matières, venues des extrémités du
monde connu, sont certainement parées de pouvoirs magiques.
Certaines parures se retrouvent dans tout le domaine hallstattien, témoins des contacts et des échanges. Les
riches hallstattiennes apprécient toutes les brassards-tonnelets ou les bracelets en lignite sur leurs avant-bras.
Selon une mode venue d’Italie, elles ferment leur vêtement grâce à des fibules, sorte de broches ou
d’ « épingles à nourrice ».
Mais d’autres ornements sont typiquement régionaux. Les parures se transforment avec le temps, selon le
goût et la mode féminine, mais aussi en fonction de la position sociale.
23
Des Jurassiennes
d’exception
Femme du Jura et sa parure
circulaire dorée
Au cours du VIIe siècle avant J.C., certaines Jurassiennes
portent des ornements sonores
faits de grelots-cages, de
crotales, de rouelles et d’une
multitude d’anneaux de
cheville. Elles arborent parfois
des pendeloques montées sur
des plaques ouvragées. Cellesci étaient peut-être cousues sur
A partir de la seconde moitié du
VIIe siècle avant J.-C., des
femmes adoptent une parure
étonnante : des disques ajourés
cernés d’anneaux mobiles. Ils
étaient portés sur la poitrine ou
à la ceinture. La signification de
ce bijou spectaculaire nous reste
inconnue. Il a voyagé jusqu’en
Grèce, peut-être sous la forme
d’un talisman.
un plastron.
Une dame du
Magdalenenberg
Jeune femme sur les rives
du Rhin
Contemporaines des
Jurassiennes, les notables de la
région des sources du Danube
ont aussi le goût pour les
brassards-tonnelets. Mais elles
se distinguent par des coiffes ou
des voiles maintenus par une
multitude d’épingles.
Au même moment, entre
Vosges et Forêt Noire, les
femmes riches aiment les
bracelets massifs en bronze
produits dans leurs régions.
Toutes à la mode hallstattienne
Aux environs de 550 av. J.-C., les femmes du domaine
hallstattien adoptent une nouvelle mode internationale.
Elles revêtent une large ceinture de cuir ornée d’une plaque
de tôle rivetée. Les motifs décoratifs peuvent varier d’une
région à l’autre.
La parure ostentatoire se fait de plus en plus rare dans les
tombes.
24
>> A NE PAS MANQUER : PARURES À PENDELOQUES ET DISQUES AJOURÉS DU JURA
Parure de Cademène conservée au Musée de Besançon
Disque à renflement central du tumulus 1
« La Carrière » à Chaffois
La parure en bronze de Cademène est composée d’une plaque ajourée de grandes dimensions à
laquelle tubes, anneaux et grelots sont suspendus. A l’origine, elle avait une couleur dorée. Elle était
certainement cousue sur un plastron. Cette parure est sonore puisque les pendeloques et les grelots tintent et
s’entrechoquent. Le son dans certaines traditions antiques avait une valeur prophylactique (il préserverait la
santé). Ce type d’ornement apparaît dans la parure féminine du Jura au cours du VIIe siècle avant J.-C. Il
combine différents éléments qui peuvent être portés indépendamment, accrochés à la ceinture ou cousus sur
la poitrine. La combinaison imposante de grelots-cages, crotales, rouelles suspendus à une barre ajourée, reste
exceptionnelle et devait être réservée à certaines femmes dont le rang social et la fonction étaient distinctifs.
Les archéologues n’en trouvent des traces que dans l’Arc jurassien. Etait-elle destinée des notables aux
pouvoirs religieux ou/et politiques importants ? Jouait-elle un rôle spécifique dans des cérémonies
particulières ?
Au milieu du VIIe siècle, à la génération suivante, les femmes du Jura abandonnent les plaques à
pendeloques et préfèrent une étrange parure circulaire ajourée entourée d’anneaux mobiles concentriques.
S’agit-il d’une autre mode ? d’une nouvelle expression symbolique ? Ces disques à anneaux mobiles étaient
parfois reliés à un élément de suspension. Ils étaient certainement retenus les uns aux autres ou fixés sur du
tissu ou du cuir. Dans les tombes féminines, ils sont retrouvés tantôt à hauteur de la poitrine, tantôt à hauteur
du bassin si bien qu’une tradition ancienne a nommé ce bijou « bouclier de pudeur ». Les anneaux sont
décorés de lignes et de triangles hachurés.
Un morceau de disque ajouré a été découvert dans le sanctuaire d’Héra à Pérachora, en Grèce. Ce
grand sanctuaire extra-urbain situé au fond du golfe de Corinthe, était associé au soleil mais aussi à la
navigation et à la fécondité. Cette découverte témoigne d’un long circuit d’échanges qui porte les parures de
l’Est de la France jusqu’au Languedoc, puis en Sicile méridionale et enfin en Grèce. L’offrande de ce disque
ajouré montre le caractère précieux de cet objet, peut-être symbole solaire. Il était certainement investi de
pouvoirs magiques en lien avec le culte du soleil et la protection contre la maternité tragique. En effet, les
25
Grecs de la fin du VIIe siècle avant J.-C., devaient assimiler les femmes du Jura à des descendantes du soleil,
Hélios. Ils attribuaient peut-être à leurs parures des vertus particulières liées à la personnalité et aux
caractéristiques mythiques des filles du Soleil. Le sanctuaire d’Héra à Pérachora est lié à cette mythologie.
Selon une tradition recueillie par Euripide, Médée petite-fille d’Hélios, y aurait porté ses enfants, après les
avoir tués. Elle les aurait placés sous la protection de la déesse.
>> A NE PAS MANQUER : BRASSARDS TONNELETS ET BRACELETS EN LIGNITE
Les riches femmes hallstattiennes apprécient sur leurs avant-bras les brassards-tonnelets dorés ou les
bracelets en lignite, noirs et brillants. Ces bijoux sont présents dans tout le domaine hallstattien. Ils peuvent
avoir des formes, des tailles et des décors qui diffèrent mais ils rendent bien compte d’une culture partagée.
Le lignite est un matériau fossile brun-noir. Il provient
d’une roche carbonée qui résulte de la transformation
des restes végétaux, via un processus de
carbonisation long de plusieurs dizaines de millions
d’années. Les gisements sont nombreux sur
l’ensemble de l’Europe celtique. Néanmoins des
études récentes attestent que certains d’entre eux
ont pu être privilégiés. Pour obtenir la courbure
régulière du bracelet, le bloc de lignite devait
certainement être monté sur un tour. L’intérieur était
évidé à l’aide d’outils dont les traces sont encore visibles. La face externe était polie, ce qui lui donnait un
reflet métallique. Ces bracelets devaient être appréciés pour la pureté de leur forme et la simplicité de leur
design. Ils sont retrouvés aux poignets de défunts adultes dans de nombreuses tombes hallstattiennes. Parfois,
leur faible diamètre laisse penser qu’ils étaient mis aux bras des enfants qui ne les enlevaient plus. Les
marques de réparation sur certains bracelets montrent qu’ils étaient précieux.
Les brassards tonnelets en bronze doré sont
également nombreux dans les tombes féminines
des Celtes de l’ensemble du domaine hallstattien.
La tôle de bronze est mise en forme pour dessiner
la courbure et le renflement central. Puis le décor
de motifs géométriques est incisé. La présence et
l’association des lignes, cercles, damiers, triangles,
losanges et autres varient selon les régions. Les
brassards n’ont pas toujours la même taille ni le
même profil. Ceux mis au jour dans le
Magdalenenberg sont, par exemple, très grands.
L’abondance de ces parures en matériaux précieux témoigne de l’investissement important dont font preuve
les élites hallstattiennes pour s’approvisionner en matière première et pour faire fabriquer l’objet.
26
Chronologie synthétique
800 – 620 av. J.-C. : Hallstatt ancien (Ha C)
Vers -750 : fondation légendaire de Rome par Romulus et Remus
-726 : Premiers Jeux Olympiques en Grèce
-707 : Palissade du tumulus de Mussig (Alsace) datée par dendrochronologie
La période la plus ancienne du Premier âge du Fer, dénommée Hallstatt ancien ou Hallstatt C par les archéologues,
est marquée par le prolongement d’un ordre social établi à l’âge du Bronze. Il n’y a pas de véritable rupture. Les
sociétés rurales sont organisées en chefferies. Le cheval reste l’animal emblématique des élites sociales. L’épée est
toujours l’apanage du guerrier puissant. Les motifs de l’oiseau, du cheval et du soleil continuent d’orner parures et
ornements, dessinant un thème mythologique dominant.
Néanmoins, la dégradation du climat et le bouleversement des réseaux d’échanges entrainent un certain nombre
de changements. Les communautés se tournent vers des alternatives économiques exploitables localement : un
élevage spécialisé, moins tributaire d’un climat devenu froid et humide, une exploitation plus intensive du sel pour
l’exportation, et la métallurgie du fer. Ce nouveau métal, apparu aux Xe et IXe siècles av. J.-C. dans le Jura,
concurrence le bronze dans l’armement réservé à une élite. Dans leur majorité, les épées en fer proviennent des
tombes de privilégiés. Ces derniers délaissent peu à peu les rites d’incinération pour se faire inhumer sous un
tumulus. Souvent de taille moyenne, ces monuments funéraires recouvrent une sépulture individuelle, masculine
en général.
Environ 620 – 500 av. J.-C. : Hallstatt récent (Ha D1, D2, D3)
-616 : Chambre funéraire du « Magdalenenberg » à Villingen-Schwenningen
dendrochronologie
-600 : fondation de Marseille
(Allemagne)
datée
par
Cette deuxième période du Premier âge du Fer, le Hallstatt récent, voit l’accroissement d’un trafic Nord-Sud, sur de
longues distances. Les contacts sont plus intenses avec les Grecs et les Etrusques. Les chefs qui organisent ces
échanges, gagnent en prestige et en richesse. Les archéologues ont pu déceler un processus de hiérarchisation et
de centralisation des territoires. Des centres dits « princiers » apparaissent sous la forme de sites fortifiés. A leur
proximité, des tumulus importants renferment une tombe prestigieuse où le défunt est accompagné des éléments
d’un char, de vaisselle et de bijoux en or. Les importations méditerranéennes sont attestées par la présence de
céramiques attiques et étrusques.
A côté de cette quinzaine de sites « princiers » connue, de nombreux sites fortifiés secondaires, comme
Bourguignon-lès-Morey en Haute-Saône, constituent des relais de pouvoir. Ces centres fournissent des témoignages
d’artisanat spécialisé avec des céramiques fines fabriquées au tour, des bijoux en matières précieuses importées de
loin, des tissus légers et de grande qualité.
Les tumulus sont toujours réservés à une élite, mais ils deviennent communautaires. Le membre fondateur de la
communauté est placé en son centre, sa clientèle ou son entourage autour. Les femmes semblent dotées de
pouvoirs importants au moment de leur passage dans l’au-delà : elles sont bien représentées dans les tumulus et
sont parées de très riches ornements.
27
LE
MÉTIER D’ARCHÉOLOGUE
Les archéologues sont de véritables détectives de l’histoire : ils mènent des enquêtes pour comprendre les
civilisations disparues.
Pour contribuer à la connaissance des Celtes, ils recherchent dans le sol des traces de leurs habitats et de leurs
nécropoles (cimetières), ce qui représente les principaux vestiges de cette civilisation. Comme les Celtes n’utilisaient
pas l’écriture, ils n’ont laissé aucun texte pour aider à les comprendre. C’est donc principalement par l’archéologie
que l’on peut obtenir des informations.
En France, les archéologues pratiquent 2 types de recherches archéologiques : l’archéologie préventive et
l’archéologie programmée. L’une et l’autre sont contrôlées par l’Etat français qui délivre les autorisations,
supervise la recherche et gère la ressource archéologique.
-
L’archéologie préventive est liée à l’aménagement du territoire : constructions de parking, routes,
voies de chemin de fer, lotissements, zones commerciales... Ces fouilles sont réalisées uniquement par des
professionnels car les contraintes techniques sont importantes. Quand un promoteur a un projet
immobilier sur un terrain, les archéologues procèdent à un diagnostic qui leur permet d’évaluer
l’importance archéologique de ce terrain avant tout commencement des travaux. Si ce diagnostic montre
l’existence de vestiges remarquables que l’aménagement détruira, des fouilles sont organisées.
La quantité et la qualité des fouilles menées en France depuis plus de 20 ans en archéologie préventive
offrent une foule de renseignements nouveaux sur les Celtes.
Vue aérienne en direction du
nord-est de la partie
vaudoise du chantier de
l’autoroute A5 au pied du
Jura. Des fouilles
archéologiques préventives
ont été réalisées sur ce tracé
entre 1995 et 2004.
-
L’archéologie programmée planifie des fouilles archéologiques à partir de thèmes de recherches
précis. Elles sont souvent réalisées au printemps et en été sur plusieurs années. En hiver, les archéologues
poursuivent des études spécifiques ne nécessitant pas ou peu d’interventions sur le terrain (études
documentaires par exemple). De nombreux bénévoles participent à ces fouilles.
L’archéologue travaille en équipe sur des opérations de fouilles. De nombreuses disciplines scientifiques
complémentaires les unes des autres collaborent à l’étude des vestiges.
28
Les étapes d’une fouille archéologique
A. Avant la fouille : prospections et diagnostic
Avant de commencer l’exploration d’un site, l’archéologue doit
évaluer son intérêt archéologique à partir de repérages, de
sondages et de prospections. Il peut repérer les sites
archéologiques depuis le ciel ou se promener dans les champs à
la recherche de débris d’objets ramenés à la surface par les
labours ou les animaux.
Quand il y a urgence, dans le cadre de l’archéologie préventive, il
réalise des tranchées à la pelle mécanique sur 5 à 10% du terrain.
Les résultats lui permettent d’établir son diagnostic et de
La nécropole de Sainte-Croix-en-Plaine
(Alsace). Les photographies aériennes, qui
révèlent des centaines de fossés dans les
plaines alluviales, témoignent de l’abondance
des tumulus aujourd’hui disparus.
prescrire la fouille si nécessaire.
Les tumulus celtes sont assez faciles à repérer car ils sont en relief
à la surface du sol. Les sites fortifiés celtes eux aussi sont connus
depuis le XIXe siècle puisqu’ils dominent souvent le paysage sur un
promontoire naturel. Par contre les habitats ouverts, fermes et
villages sont plus difficiles à localiser. C’est souvent grâce à
l’archéologie préventive que les archéologues en ont découverts
quelques-uns.
B. La fouille
Pour atteindre le niveau archéologique, un premier travail consiste à enlever la terre qui recouvre le site grâce à des
pelles, des pioches voire de gros engins mécaniques : pelleteuses, camions. C’est le décapage.
Les vestiges du passé sont empilés et forment des couches
(strates) successives que les archéologues fouillent l’une après
l’autre, des plus récentes aux plus anciennes. Les fouilles
provoquent une destruction des données archéologiques au
fur et à mesure de l’avancement des travaux. Il faut collecter
un maximum d’informations en cours de fouilles pour
interpréter les découvertes. Le site est donc délimité par un
quadrillage de 1 m sur 1 m : c’est le carroyage. Chacun des
carrés est numéroté afin de pouvoir situer les objets et les
structures dans l’espace. Les vestiges découverts sont reportés
Fouilles du tumulus de La Rivière-Drugeon
sur des plans. Tout est répertorié sur des relevés. Les structures
importantes (foyers, fours, puits, couches géologiques et archéologiques) sont dessinées et photographiées. Chaque
objet est inventorié : il est décrit, numéroté, dessiné…
Pour fouiller, les archéologues utilisent la truelle, le pinceau et les instruments de dentiste. Ils choisissent l’outil le
plus adapté selon la fragilité des vestiges.
29
Fouille de la sépulture 28 du tumulus de
Courtesoult
C. Après la fouille : études, analyses et valorisation
La fouille achevée, le mobilier est lavé, dessiné,
étudié et analysé. Des prélèvements peuvent être
envoyés dans un laboratoire spécialisé. Les objets
trouvés dans les chantiers de fouilles sont écrasés par le
poids de la terre et abîmés par l’acidité du sol. C’est
pourquoi ils sont confiés à une personne qui les
restaure. Elle va intervenir directement sur l’objet pour
le renforcer, le recoller, le consolider par exemple, afin
d’en améliorer la compréhension.
Parfois, elle va même faire des reconstitutions.
Redonner à l’objet sa forme ou son aspect d’origine
permet de comprendre à quoi il servait et comment il
était fabriqué.
Onnens – Praz Berthoud, fouille en laboratoire de
l’une des deux urnes provenant du petit tumulus.
Les découvertes de la fouille donnent lieu à un rapport de fouilles. L’ultime étape représente la publication
des travaux. C’est la synthèse de toutes les informations recueillies sur le terrain et en laboratoire. Elle présente le
déroulement des recherches et les conclusions de l’équipe de travail.
Les archéologues peuvent aussi participer à des colloques, des congrès ou des conférences. Ils préparent
des expositions pour présenter le mobilier et les études archéologiques à un large public.
30
L’archéologie : travail d’équipe
Pour comprendre les choix qui ont conduit les hommes de l’âge du Fer à installer leurs maisons dans un lieu précis,
des géologues étudient le paysage autour des sites. Les études de pollens par des palynologues, de graines par
des carpologues, de charbons de bois par des anthracologues, de faune (ensemble des animaux) par des
archéozoologues, permettent d’identifier les liens qui unissent les hommes à leur environnement.
Les déchets (os des animaux, vaisselle, bijoux) que les habitants d’un site ont jetés sont des indices importants pour
connaître leur niveau de vie, leurs préférences alimentaires et les activités qu’ils pratiquaient. Là encore, on fait
appel à des spécialistes : les archéozoologues qui étudient les ossements des animaux nous renseignent sur les
espèces élevées par les Celtes, les céramologues examinent les tessons pour repérer des types de céramiques et
établir une chronologie. Quand il y a des tombes, on fait appel à des anthropologues qui cherchent à
comprendre comment les Celtes enterraient leurs morts.
Pour exercer ce métier :
On ne s’improvise pas archéologue, on le devient après une longue formation. L’archéologie est une activité
encadrée par la loi dans le Code du Patrimoine. L’Etat a organisé la protection du patrimoine
archéologique du fait de sa fragilité. Il délivre les autorisations de fouilles à des professionnels formés.
-
Vers la recherche scientifique : doctorat, 8 ans après le Bac
Pour travailler dans un service de l’archéologie : Master, 5 ans après le Bac
N.B. : La détection n’est pas un loisir. L’utilisation
des détecteurs de métaux hors des cadres légaux
est interdite : elle menace l’étude et la préservation du
patrimoine archéologique. Sonder le sol avec des
détecteurs de métaux, creuser et extraire des objets
métalliques pour soi ou pour les vendre est un délit. Nul
ne peut effectuer des fouilles, même sur son propre
terrain. Cette pratique ruine la compréhension d’un site
et perd définitivement des pans entiers de la
connaissance du passé. Le patrimoine archéologique
est une ressource précieuse et non renouvelable !
La loi prévoit une peine pouvant aller jusqu’à 7 ans de
prison et 100 000 € d’amende.
31
Glossaire
Analyse dendrochronologique : la dendrochronologie est une méthode qui permet de dater, à l’année près,
les bois retrouvés dans les sites archéologiques. Elle consiste à mesurer, un à un et dans l’ordre, les cercles
annuels de croissance des arbres jusqu’à l’écorce et à comparer les résultats obtenus avec toutes les données
dendrochronologiques recueillies à l’échelle européenne notamment pour déterminer une date précise
d’abattage de l’arbre.
Bouterolle : armature métallique placée à l’extrémité des fourreaux d’épée pour les renforcer et éviter que
l’épée ne les troue.
Celtes : peuples qui occupaient l’Europe du Nord des Alpes à l’âge du Fer. Ils sont les descendants des
populations de l’âge du Bronze. Organisés en communautés, ils partageaient une culture commune et
parlaient probablement des dialectes celtiques. Ils ont été nommés « Celte » par les Grecs, Hécatée de Milet et
Hérodote au Ve siècle avant notre ère. Des groupes celtes ont envahi l’Italie du Nord, pillé Rome au IVe siècle
avant notre ère, puis Delphes au IIIe siècle avant notre ère.
Au XVIIIe siècle, des savants comparent les sons, le vocabulaire et la grammaire des langues parlées en Europe
et les regroupent par familles. Ils réunissent sous le nom de « celtiques » plusieurs dialectes qui ne descendent
pas du latin et sont sporadiquement parlés aujourd’hui sur les îles Britanniques, en Irlande, et en Bretagne. Ils
découvrent également des noms de lieux à racine celtique sur une vaste partie du continent européen. Par
ailleurs, ils trouvent plusieurs inscriptions datant du VIe siècle av. J.-C., transcrivant des parlers celtiques à
l’aide de caractères empruntés aux alphabets grec, étrusque, phénicien ou ibérique. Ils en concluent donc
qu’on parlait celte en Europe dès 600 av. J.-C.
Les Celtes du Domaine hallstattien auraient alors gagné les côtes atlantiques et les îles Britanniques avant la
conquête romaine (Ier siècle av. J.-C.).
Etrusques : peuple qui apparaît vers le VIIIe siècle av. J.-C. L’Etrurie se situait sur l’actuelle Toscane au Nord de
l’Italie.
Hallstatt : Terme retenu en référence aux mines de sel et à leur nécropole de plus de 2000 tombes,
surplombant la petite ville de Hallstatt au bord du lac du même nom dans le « Salzkammergut » en Autriche.
Les dépôts funéraires d’une abondance, d’une qualité et d’une richesse hors du commun ont été rendus
célèbres par la publication à Vienne, en 1868 déjà, d’une monographie de Eduard von Sacken, illustrant les
découvertes documentées par l’ingénieur des mines, Johann Georg Ramsauer, à partir de 1846. Cette
publication contribuera ainsi à forger le concept de groupe de Hallstatt, qui deviendra période, culture (de
Hallstatt ou hallstattienne), synonyme de Premier âge du Fer.
Tumulus : butte de terre et/ou de pierre construite au-dessus d’une tombe pour la protéger et la rendre
visible de loin.
32
POUR
L E S C Y C LE S
3
Atelier 1 : visite guidée puis questionnaire et jeu de Qu’est-ce que c’est ?
Durée : 1 heure 30.
Visite guidée de l’exposition temporaire avec toute la classe pendant 45 minutes.
Division de la classe en deux groupes :
- Groupe 1 : avec la médiatrice du musée, les élèves répondent à un questionnaire en lien avec la visite et les
objets présentés.
- Groupe 2 : avec l’enseignant ou l’un des accompagnateurs du groupe, les élèves jouent deux par deux à un
jeu de « Qu’est-ce que c’est ? ». Sur le modèle du jeu de « Qui est-ce ? », les élèves doivent deviner, non
pas un personnage mais l’objet de leur adversaire : ces objets sont des objets évoqués dans l’exposition.
Une fiche descriptive des objets accompagne le jeu pour aider les élèves à poser des questions et à pouvoir
y répondre.
Au bout de 20 minutes, les groupes changent d’atelier.
Atelier 2 : visite guidée puis questionnaire et fabrication d’une fibule
Durée : 1 heure 30.
Visite guidée de l’exposition temporaire avec toute la classe pendant 45 minutes.
Division de la classe en deux groupes :
- Groupe 1 : avec la médiatrice du musée, les élèves répondent à un questionnaire en lien avec la visite et les
objets présentés.
- Groupe 2 : avec une archéologue, les élèves fabriquent une fibule en cuivre.
Au bout de 20 minutes, les groupes changent d’atelier.
Atelier 3 : visite guidée puis questionnaire, jeu de Qu’est-ce que c’est ? et fabrication d’une fibule
Durée : 2 heures.
Visite guidée de l’exposition temporaire avec toute la classe pendant 1 heure.
Division de la classe en trois groupes :
- Groupe 1 : avec la médiatrice du musée, les élèves répondent à un questionnaire en lien avec la visite et les
objets présentés.
- Groupe 2 : avec l’enseignant ou l’un des accompagnateurs du groupe, les élèves jouent deux par deux à un
jeu de « Qu’est-ce que c’est ? ». Sur le modèle du jeu de « Qui est-ce ? », les élèves doivent deviner, non
pas un personnage mais l’objet de leur adversaire : ces objets sont des objets évoqués dans l’exposition.
Une fiche descriptive des objets accompagne le jeu pour aider les élèves à poser des questions et à pouvoir
y répondre.
- Groupe 3 : avec une archéologue, les élèves fabriquent une fibule en cuivre.
Au bout de 20 minutes, les groupes changent d’atelier.
33
Partie 3 : Informations pratiques
HORAIRES ET TARIFS POUR LES GROUPES SCOLAIRES
Le Musée ne peut recevoir de groupes scolaires que sur réservation.
Contacts
Service éducatif Elise Berthelot : 03 81 38 82 13, [email protected]
Horaires d’ouverture
Lundi, mercredi, jeudi, vendredi de 8h30 à 12h00 et de 13h30 à 18h00
Tarifs
Gratuit pour les groupes scolaires.
POUR
UNE
VISITE
ACCOMPAGNEE
PAR
LA
MEDIATRICE
CULTURELLE
Avant la visite, quelques conseils
Il est indispensable d’avoir pris connaissance du contenu de la visite et du déroulement des activités.
Il est nécessaire de prendre contact avec la médiatrice culturelle du Musée, Elise Berthelot :
•
•
•
•
•
•
pour réserver la visite,
pour discuter du contenu de la visite,
pour qu’elle puisse adapter son discours aux élèves de la classe,
pour qu’elle puisse prévoir le matériel nécessaire,
pour que l’enseignant puisse travailler sur les pistes pédagogiques,
pour que l’enseignant puisse sensibiliser les élèves au musée, aux comportements et aux attitudes à
adopter.
Il est fortement recommandé d’aller au musée avant la visite avec la classe.
Pour les activités, la classe est généralement divisée en plusieurs groupes. Lorsque les groupes sont formés en
amont de la visite, le déroulement de la visite est plus fluide et les enfants plus attentifs.
Il est important de présenter les objectifs et le déroulement de la visite aux parents accompagnateurs. Ils
seront plus investis et pourront faire respecter les consignes.
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Afin de sensibiliser les élèves au comportement qu’ils doivent adopter dans un musée, voici un petit exercice à
faire en classe, avant de venir visiter le musée.
•
•
•
Imprimer les vignettes « bulles » (cf. Annexes 1 et 2) et les découper.
Individuellement, en groupe ou la classe entière, les élèves choisissent où ranger ces vignettes, entre
« ce qu’il est possible de faire au musée » et « ce qu’il n’est pas possible de faire au musée ».
Moment de discussion et de réflexion avec la classe entière : pourquoi est-il possible de faire certaines
choses et pas d’autres. Des vignettes vides peuvent servir pour de nouvelles idées.
Exemples :
Pour ne pas déranger les autres visiteurs, préserver les œuvres… : ne pas crier, ne pas courir…
Pour ne pas les abimer, les œuvres sont souvent des objets fragiles et anciens auxquels il faut faire attention,
pour que tout le monde puisse en profiter, même les générations suivantes… : ne pas toucher les œuvres.
On peut éprouver quelque chose en regardant une œuvre et avoir envie d’en faire partager les autres : parler
ou chuchoter.
Visiter un musée doit être l’occasion de laisser libre court à son imagination… : rêver
Pour aider les élèves à comprendre l’intérêt de faire attention aux œuvres, les faire penser à un objet qu’ils
aiment beaucoup, qui serait exposé : voudraient-ils que tout le monde le touche ? Comment réagiraient-ils s’il
était abimé ?
Pendant la visite
Le musée est susceptible d’accueillir d’autres publics pendant la visite de la classe. Les élèves doivent
respecter le règlement intérieur afin de garantir leur sécurité, celle des autres visiteurs, celle des œuvres. Ils
doivent respecter également les règles de savoir-vivre : ne pas crier, ne pas courir, ne pas toucher les œuvres.
La médiatrice culturelle ne peut pas animer la visite et les activités et en même temps faire la discipline. Elle a
besoin de l’aide de l’enseignant et des accompagnateurs.
Après la visite
Les activités, les thèmes de la visite peuvent être repris en classe pour être complétés, enrichis par d’autres
notions, d’autres exemples. Ils peuvent être prolongés par des pratiques artistiques qui ne peuvent se dérouler
au musée pour des raisons de place, de temps et de matériel.
Le musée donne un questionnaire de satisfaction qui dresse le bilan de cette visite. Le remplir aidera le musée
à mieux répondre aux attentes de l’enseignant et de ses élèves.
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Crédits photographiques
Pages 7, 10, 15, 24 : F. Passard-Urlacher, DAO CS Claude Schmitt. Page 8 : Archives P. Bichet. Page 9 : DAO CS Claude
Schmitt d’après Bittel, Kimmig, Schiek, 1981, fig. 55 in Bräuning A., Löhlein W., Plouin S., Die frühe Eisenzeit zwischen
Schwarzwald und Vogesen / Le Premier âge du Fer entre la Forêt-Noire et les Vosges, Freiburg, 2012 ;
Franziskanermuseum Villingen-Schwenningen. Page 11 : G. Kuhnle ; A. Houot, J. Charrance, Musées cantonaux du Valais,
Sion, Musée d’Archéologie et d’Histoire, Lausanne, Musée d’Art et d’Histoire, Genève. Pages 12, 16, 20 : D. Vuillermoz,
Musée d’archéologie du Jura, Lons-le-Saunier. Pages 13, 21 : DAO CS Claude Schmitt d’après J.-F. Piningre. Pages 14, 16,
30 : J.-F. Piningre. Page 17 : dessin F. Médard ; d'après Schlabow 1976. Page 18 : F. Passard-Urlacher, Service régional de
l’archéologie de Franche-Comté ; DAO S. Gizard. Page 19 : Archäologische Bodenforschung Basel-Stadt und Historisches
Museum Basel, Lebensbild: Digitale Archäologie, Freiburg im Breisgau. Page 20 : D. Vuaillat, 1977. Page 21 : Piningre et al.
1996, p. 72, dessin F. Passard-Urlacher, DAO S. Gizard. Page 25 : J.-L. Dousson, Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de
Besançon ; Musée municipal de Pontarlier. Page 26 : Musée Unterlinden, Colmar, cliché C. Kempf ; Musée des Beaux-Arts
et d’Archéologie de Besançon, cliché F. Passard-Urlacher. Pages 28, 30 : C. Falquet, Archéologie cantonale vaudoise. Page
29 : 2C2L Inrap ; F. Passard-Urlacher.
Générique
Commissariat : Laurène MANSUY, directrice du Musée de Pontarlier et Françoise PASSARD-URLACHER, archéologue,
ingénieure au Service Régional d’Archéologie de Franche-Comté
Accompagnées par un comité scientifique : Noémi DAUCE, conservatrice au Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de
Besançon ; Cynthia DUNNING, directrice d’Archaeoconcept et chef des projets archéologie ; Gilbert KAENEL, directeur du
Musée cantonal d’archéologie et d’histoire de Lausanne ; Sylvie LOURDAUX-JURIETTI, responsable des collections
d’archéologie des Musées de Lons-le-Saunier ; Jean-François PININGRE, conservateur en chef honoraire du patrimoine au
Service régional d’archéologie de Franche-Comté ; Suzanne PLOUIN, conservateur au Musée Unterlinden de Colmar
Régie des œuvres, suivi des prêts, transports d’œuvres : Laurène MANSUY, Marie GALVEZ, Emmanuel DEBOIS
Service éducatif : Laurène MANSUY (textes dossier pédagogique), Elise BERTHELOT, Anne BICHET
Médiation culturelle et ateliers pédagogiques : Elise BERTHELOT, Kristine LARSEN – Le Creuset d’Argile
Supports de médiation : Christophe ROUSSET
Suivi administratif : Florence BLONDEAU
Montage de l’exposition : Laurène MANSUY, Marie GALVEZ, Emmanuel DEBOIS
Scénographie : Véronique BRETIN (décors), Annie FIEUX (graphisme), l’Atelier le Chien Jaune et Centre Technique
Municipal (réalisation)
Dessins : Françoise Passard-Urlacher
Infographie / DAO : CS Claude SCHMITT
Edition du catalogue : Sékoya, Paul Royer (graphisme)
Relations presse : Laurène MANSUY
Cette exposition a été réalisée grâce au soutien de la Direction régionale des affaires culturelles de Franche-Comté, du
Conseil régional de Franche-Comté et de l’Association des Amis du Musée de Pontarlier.
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Annexes
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A N N EX E 1 : B U LL ES «
OUI
Parler
»
Ecouter
Chuchoter
Rêver
S’asseoir
Discuter
Marcher
Regarder
Donner
son avis
Découvrir
Prendre
son temps
Poser des
Etre
questions
curieux
38
A N N EX E 2 : B U LL ES «
Boire
NON
»
Courir
Faire du
roller
Manger
Sauter
Crier
S’appuyer
Toucher
39
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