Maladies neurodégénératives : un déclin cellulaire, différentiel et

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Maladies neurodégénératives : un déclin cellulaire,
différentiel et programmé
lY. Agid
Q
uelles sont les affections les plus caractéristiques de la discipline de neurologie ?
Certainement les maladies neurodégénératives,
si particulières à notre spécialité, alors que les accidents vasculaires cérébraux, les tumeurs, les maladies inflammatoires et
infectieuses appartiennent aussi à d’autres disciplines. Ces
affections sont aussi fréquentes que les accidents vasculaires
cérébraux et l’épilepsie, mais elles sont encore plus fréquentes
au grand âge (par exemple, une personne sur cinq est atteinte
de maladie d’Alzheimer après 85 ans). Que le processus pathologique atteigne préférentiellement le cortex cérébral (maladie
d’Alzheimer), les noyaux gris centraux (maladie de Parkinson),
le cervelet (ataxie cérébelleuse), la moelle (sclérose latérale
amyotrophique), le nerf périphérique (maladie de CharcotMarie-Tooth), les tableaux cliniques sont nombreux pour une
même maladie. Par exemple, il n’y a pas une mais des maladies
de Parkinson aux visages les plus divers.
Mais qu’appelle-t-on maladie neurodégénérative ?
Jusqu’à ce qu’une meilleure définition ne soit trouvée, la
notion de maladie neurodégénérative repose sur trois critères :
– les symptômes apparaissent à l’âge adulte, ce qui permet de
distinguer ces affections des embryopathies ; l’apparition des
premiers symptômes s’effectue au-delà d’un certain seuil de
perte neuronale, c’est-à-dire suffisant pour entraîner un dysfonctionnement physiologique minime, même localisé ;
– l’évolution progressive est lente mais plus rapide que pour le
vieillissement normal, avec pour corollaire un mécanisme de
mort cellulaire différent ;
– la perte cellulaire est sélective, touchant un petit nombre de
populations cellulaires au sein du système nerveux ; par
exemple, la disparition de moins d’un million de neurones
dopaminergiques dans la substantia nigra est à l’origine de la
maladie de Parkinson, alors que des milliards d’autres cellules
nerveuses restent intactes au sein du système nerveux.
* Fédération de neurologie, centre d’investigation clinique et INSERM U289,
hôpital de la Salpêtrière, Paris.
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Quels sont les mécanismes des maladies
neurodégénératives ?
Le “déclin” symptomatique, qui se traduit par l’aggravation
progressive de symptômes spécifiques pour chaque maladie,
résulte du dysfonctionnement sélectif de diverses populations
de neurones. Le mécanisme du “déclin” cellulaire reste imparfaitement connu, même si les étapes biochimiques qui conduisent à la mort cellulaire commencent à être identifiées. La raison tient au fait qu’il n’est pas toujours possible de distinguer
ce qui est primaire ou secondaire dans la chaîne des événements métaboliques pathologiques qui conduit à la disparition
des neurones. Ainsi, telle baisse de l’énergie cellulaire ou telle
production apparemment inappropriée de radicaux libres peuvent faire partie du processus initial ou constituer des événements tout à fait terminaux de la mort cellulaire. Bien plus, il
n’est pas toujours facile d’identifier les événements moléculaires délétères par rapport à ceux qui pourraient être salvateurs
ou compensateurs. Par exemple, la gliose, considérée habituellement comme compensatrice, ou la sécrétion de cytokines,
toujours jugée dangereuse… Dans tous les cas – affections
neurodégénératives sporadiques, fréquentes, polygéniques ou
bien héréditaires, rares, monogéniques (autosomiques dominantes ou récessives) –, les facteurs génétiques sont aujourd’hui considérés comme prédominants, les facteurs épigénétiques restant le plus souvent au second plan, sauf pour
l’expression des symptômes.
Y a-t-il de l’apoptose dans les maladies
neurodégénératives ?
L’apoptose, ou mort cellulaire programmée, est considérée
comme un “suicide” cellulaire. L’apoptose est ubiquitaire dans
l’organisme, à la différence de la nécrose, ou “meurtre” cellulaire, dont quelqu’un a dit qu’elle était “exotique” (seulement
provoquée par une destruction aiguë à la suite d’un traumatisme, d’un infarctus...). Dès lors, il est essentiel de distinguer au
cours des maladies neurodégénératives (ou vieillissement cérébral pathologique) ce qui revient au vieillissement normal, à la
maladie proprement dite et à l’apoptose. Le vieillissement normal est lui-même différentiel, c’est-à-dire qu’il intéresse certaines populations de cellules mais pas d’autres. Il se traduit
par le dysfonctionnement de diverses fonctions cellulaires
(neurotransmission, transports membranaires…) et par une
diminution de la connectivité (terminaisons nerveuses, denLa lettre du neurologue - n° 1- vol. V - janvier 2001
drites). Un neurone vieillissant peut néanmoins vivre un siècle.
Le vieillissement pathologique ou processus de neurodégénérescence se traduit par un dysfonctionnement cellulaire plus
rapide que celui qu’on attendrait d’un vieillissement normal,
aboutissant dans un temps relativement bref à la mort cellulaire.
Un neurone malade ne peut pas survivre plus que la durée
d’évolution d’une maladie, probablement quelques mois tout
au plus. L’apoptose, ou mort cellulaire programmée, variable
dans son mécanisme moléculaire d’une affection à l’autre, a été
décrite dans la plupart des maladies neurodégénératives, mais
en quantité limitée. Comme le phénomène d’apoptose dure
quelques heures dans une boîte de Petri, l’espérance de vie
d’un neurone en apoptose dans une maladie neurodégénérative
ne devrait pas excéder quelques jours. Or, dans une affection
telle que la maladie de Parkinson ou d’Alzheimer, les trois
types d’altérations cellulaires sont observés. En effet, dans ces
pathologies, la plupart des cellules nerveuses apparaissent normales, bien que vieillies. Un nombre restreint de cellules nerveuses sont malades au sein des structures cérébrales spécifiques. Quant aux neurones en apoptose, ils sont en tout petit
nombre, probablement en raison de la rapidité du phénomène
d’apoptose. Si ces données sont exactes, c’est-à-dire si des neurones vieillissants, des neurones malades et des neurones en
apoptose sont présents dans le système nerveux du patient
atteint d’affection neurodégénérative, d’importantes conclusions peuvent être tirées pour le neurobiologiste et le pharmacologue. Le neurobiologiste qui souhaite prévenir ou arrêter
l’évolution de la maladie tentera d’empêcher la maladie du
neurone et non d’éviter au neurone de vieillir. Interrompre
l’apoptose, étape terminale de la mort cellulaire, empêchera
sans doute le neurone de disparaître, mais le neurone en place
restera malade, avec les conséquences que l’on imagine. Un
raisonnement analogue conduira le pharmacologue à essayer
de trouver des médicaments empêchant les neurones d’être
malades, et non des drogues qui éviteraient au neurone de
vieillir ou de mourir en apoptose. L’approche scientifique de
la physiopathologie des affections neurodégénératives doit
donc être effectuée en posant les bonnes questions, celles qui
concernent les neurones malades, non les neurones vieillissants ou la phase terminale d’apoptose. Les expériences
de biologie cellulaire et moléculaire destinées à comprendre le
mécanisme du vieillissement cellulaire normal ou l’apoptose
finale sont certainement très intéressantes, mais elles
n’ont peut-être pas de rapport direct avec le mécanisme de la
maladie cellulaire responsable du phénomène de neurodégénérescence.
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