Observatoire des Papillons des Jardins

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Observatoire des Papillons des Jardins
Les Résultats 2007
A l’issue de la deuxième année d’observation, quelques résultats marquants ont pu être
dégagés. Nous les présentons succinctement ci-dessous.
Richesse spécifique
Les données collectées par les observateurs de l’OPJ permettent de dresser des cartes de
richesse spécifique des papillons dans les jardins, à l’échelle de la France. Attention : ces
cartes ne représentent pas la richesse globale en papillons, puisqu’elles ne portent que sur 28
espèces/groupes d’espèces : elles traduisent la richesse de la faune de papillons communs
observée dans les jardins. On constate que les jardins ne présentent pas la même richesse dans
toutes les régions.
Ainsi, en 2006 et en 2007, dans le bassin parisien, les jardins du nord sont moins riches que
ceux du sud ouest, et ceux de la côte du Languedoc moins riches que ceux de Provence : on
peut donc penser que ces différences sont due à des caractéristiques du paysage. Dans le
grand ouest et dans le nord de la France, les jardins ont été moins riches en 2007 qu’en 2006,
probable conséquence d’un été moins ensoleillé et plus pluvieux en 2007 qu’en 2006.
Richesse moyenne en papillons dans les jardins en 2006 (gauche) et en 2007 (droite).
Phénologie et variations d’abondance
Les données collectées par les observateurs de l’OPJ permettent de suivre finement les
variations d’abondance et de phénologie des espèces, comme le montrent les deux exemples
suivants. Ainsi, on constate qu’en 2007, les belles-dames ont été beaucoup moins abondantes
qu’en 2006. Cette espèce migratrice est connue pour être beaucoup plus abondante certaines
années : l’année 2007 n’a pas été une année à belles-dames.
Les variations de phénologie du vulcain en 2006 et 2007 s’expliquent bien par la
météorologie : en 2006, l’automne a été particulièrement clément, favorisant une
augmentation des effectifs observés jusqu’en octobre ; ce phénomène s’est poursuivi début
2007 où la douceur du climat a favorisé l’émergence précoce et en nombre des vulcains. Au
cours de l’année 2007, le climat pluvieux et froid n’a pas permis que les effectifs observés
atteignent ceux de 2006.
L’Observatoire des Papillons des Jardins permet également de révéler des variations d’abondance
interannuelles structurées géographiquement. Trois espèces de papillons migrateurs, la belle-dame,
le souci et le morosphinx, montrent des variations similaires : abondance moindre en 2007, en
particulier dans le nord de la France. En revanche, le tircis a été beaucoup plus abondant en 2007,
surtout dans le sud du pays.
D’autres espèces, comme le myrtil, n’ont pas montré de variations d’abondance marquées entre
2006 et 2007. Les observations futures nous diront si ces variations interannuelles traduisent des
modifications à long terme de l’abondance des espèces, ou si elles ne sont liées qu’aux aléas
climatiques temporaires ou d’autres phénomènes tels que des pullulations ponctuelles de parasites.
Validation
Les premières analyses des données de l’OPJ montrent que les jardins accueillent une plus
grande diversité de papillons lorsqu’il y a beaucoup de fleurs nectarifères, ou lorsqu’ils ne
sont pas en milieu urbain. Ils révèlent également des patterns phénologiques qui sont en
accord avec ce qui était connu des entomologistes. Ces résultats ne sont pas surprenants : on
s’attend à voir davantage de papillons lorsqu’il y a des fleurs ou lorsqu’on est à la campagne.
Cela étant, ils sont très importants car ils montrent que les données collectées par des nonspécialistes, pourvu que ceux-ci soient suffisamment nombreux, traduisent la réalité
biologique.
Influence du paysage (gauche) et du type de jardin (droite) sur la richesse en papillons dans
les jardins (l’indice "plantes nectarifères" est calculé à partir de la diversité et de l’attractivité
pour les papillons adultes des fleurs plantées dans les jardins). Les variations d’abondance
2006-2007 révélées par l’OPJ (voir ci-dessus) et par le STERF (ci-dessous) sont comparables,
suggérant que les méthodes utilisées sont pertinentes.
Variations d’abondance entre 2006 et 2007 telles que révélées par le STERF.
Répartition et abondance
Pour 14 espèces, des cartes de répartition précises tirées des données de l’OPJ ont été
produites : elles sont visibles sur le site de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel
(http://inpn.mnhn.fr, voir par exemple le paon du jour ou le pacha à deux queues).
Néanmoins, ces cartes donnent une idée biaisée de la réalité, puisqu’elles ne prennent en
compte que des données de présence/absence, sans tenir compte de l’abondance locale des
espèces. Une observation unique de vulcain dans un jardin de la côte méditerranéenne aura le
même poids que des observations répétées dans un jardin du nord de la France où il est
observé en abondance pendant plusieurs mois de l’année. Afin de montrer de façon plus
exacte ce que représentent les données de l’OPJ, nous proposons ci-dessous des cartes de
répartition pondérées, tirées des données 2006-2007 de l’OPJ. Pour chaque commune, nous
avons calculé un indice en divisant le nombre de fois où une espèce a été signalée par le
nombre de relevés fournis en 2006-2007. Un indice de 1 signifie que l’espèce a été signalée à
chaque relevé, un indice de 0 qu’elle n’a jamais été signalée.
Le brun du pélargonium, présent partout, abondant au sud
En particulier, la carte du brun du pélargonium présentée sur le site de l’INPN mérite une
explication : on constate que cette espèce originaire d’Afrique du Sud a été observée par les
OPJistes sur la majeure partie de la France. On peut être surpris de cette répartition pour un
papillon réputé méditerranéen en Europe. Mais il ne faut pas oublier que les données de l’OPJ
proviennent de jardins, habitats peu visités par les lépidoptéristes et constituant pourtant le
principal biotope de cette espèce inféodée en Europe aux géraniums cultivés. Ces données
sont en accord avec ce qui est connu de l’espèce, déjà signalée de Seine-Maritime (Mace,
2005), du Loiret (Binon, 2005), de l’Yonne (Gallet, 2003) et même des Pays-Bas (Poot et al.,
2003) ou de Suède (Ryrholm, 2007). La carte d’abondance que nous présentons ci-dessous
montre cependant que si le brun des pélargoniums peut être observé partout en France, il est
surtout abondant dans le tiers sud.
Le tircis, un peu plus à l’ouest
Le tircis est une des espèces les plus souvent observées dans les jardins, et est présent sur
l’ensemble de la France. Pourtant, la carte d’abondance ci-dessous montre une situation plus
complexe, avec une forte abondance dans la moitié occidentale du pays en 2006-2007 : faut-il
y voir une influence climatique ? L’évolution de la situation devra être surveillée.
Des sentinelles du changement climatique ?
On remarque que des Nymphalidae très communs dans le nord de la France (paon du jour,
petite tortue, vulcain) sont plus rares en région méditerranéenne, et qu’à l’inverse certaines
espèces sont plus abondantes dans le sud (machaon, flambé), voire sont strictement
méditerranéennes (pacha à deux queues). De telles espèces, montrant des différences
d’abondance nord-sud, pourraient constituer de bons indicateurs du réchauffement
climatique : le pattern observé va-t-il se décaler vers le nord dans le futur ?
Les bastions du gazé
Le gazé, autrefois très abondant, est une espèce bien connue pour être en fort déclin, du fait
des modifications de son habitat. En effet, ses plantes-hôtes sont des petits arbres et arbustes
qui constituent les haies, en particulier l’aubépine ou le prunellier : la modification des
paysages par la destruction des haies est en partie responsable de sa raréfaction dans une
grande partie du pays. La carte ci-dessous montre que ses bastions sont des régions encore
relativement préservées du remembrement, comme le Massif Central, la Bourgogne, les Alpes
ou le Marais Breton. Nous verrons dans les années à venir si son déclin se poursuit.
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