Sur les énergies de désintégration nucléaires

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Sur les énergies de désintégration nucléaires
L. Goldstein
To cite this version:
L. Goldstein. Sur les énergies de désintégration nucléaires. J. Phys. Radium, 1937, 8 (6),
pp.235-240. <10.1051/jphysrad:0193700806023500>. <jpa-00233502>
HAL Id: jpa-00233502
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Submitted on 1 Jan 1937
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SUR LES ÉNERGIES DE DÉSINTÉGRATION NUCLÉAIRES
Par L. GOLDSTEIN
Institut Henri Poincaré
Sommaire. - Les données expérimentales directes obtenues dans l’étude des désintégrations nucléaires
fournissent pas immédiatement toute l’énergie mise en jeu dans les transformations du noyau, à l’exception des photons gamma qui, dans l’interprétation adoptée actuellement par la loi des fréquences de
Bohr, se rapportent directement à des niveaux d’énergie nucléaire. On montre qu’en dehors de la correction
mécanique de recul que l’on doit apporter aux énergies mesurées expérimentalement des corpuscules émis
ou absorbés par les noyaux pour évaluer l’énergie exacte mise en jeu dans la transformation nucléaire
considérée on doit tenir compte également du fait que les noyaux atomiques sont toujours plongés dans
l’ensemble des électrons de leurs atomes ce qui se traduit nécessairement par un échange adiabatique
d’énergie entre les corpuscules chargés libérés ou absorbés et les électrons atomiques. Ces corrections
d’énergie adiabatiques dues aux variations de charge des noyaux atomiques sont d’autant plus importantes
que les corpuscules libérés ou absorbés et les noyaux émetteurs ou absorbants ont une charge plus grande.
Dans les processus de désintégration radioactive naturelle par rayons alpha les corrections adiabatiques,
tout en étant plus faibles, sont du même ordre de grandeur que les corrections de recul mécanique. Dans
l’évaluation des énergies de désintégration radioactive naturelle alpha il paraît donc indispensable de tenir
compte simultanément de ces deux corrections. D’une manière générale, la correction adiabatique indiquée
apparaît comme une correction théorique imposée par la représentation actuelle de l’atome ; elle paraît
cependant, en principe, vérifiable expérimentalement par une étude du début de faible énergie des spectres
continus d’électrons négatifs et positifs.
ne
L’énergie des corpuscules et des photons gamma
émis dans les phénomènes de transformation nucléaire
radioactive constitue une donnée précise, suivant l’interprétation actuelle, sur la valeur énergétique des
termes spectraux nucléaires. Mais si la mesure de
l’énergie du rayonnement émis ou absorbé peut être
considérée réellement comme se rapportant directement à la séparation de deux niveaux nucléaires, conformément à la loi des fréquences de Bohr, la mesure
de l’énergie des corpuscules émis par les noyaux atomiques radioactifs ne conduit pas automatiquement à
une donnée nucléaire directe tout à fait précise. Les
transformations radioactives nucléaires s’effectuant
par émission d’un corpuscule chargé sont toujours
accompagnées inévitablement de deux processus secondaires se manifestant par une variation de l’impulsion
et de l’énergie des corpuscules émis dont on doit tenir
compte pour conclure de l’énergie mesurée du corpuscule loin de l’atome désintégré au niveau nucléaire
auquel cette énergie se rapporte.
Jusqu’à présent, à notre connaissance, on n’a teun
compte que d’un seul des deux processus accompagnant
l’émission d’un corpuscule chargé dans une transformation nucléaire radioactive. C’est le processus mécanique de recul. Les théorèmes de conservation de
l’énergie et de l’impulsion appliqués à l’émission du
corpuscule dans la désintégration radioactive conduisent à adopter pour l’énergie totale 1,1" mise en jeu
dans ce phénomène, ~, étant l’énergie du corpuscule, de
masse m, émis mesurée expérimentalement,
tante dans les radioactivités par électrons où elle peut
être laissée de côté actuellement aussi bien dans les
radioactivités naturelles qu’artificielles. Il est clair,
enfin qu’en principe, la correction de recul intervient
dans l’émission des photons aussi, mais pratiquement,
c’est toujours la précision atteinte dans la mesure de
l’énergie des corpuscules ou des photons qui décide de
ce que la correction de recul s’impose ou non.
En dehors de ce processus mécanique de recul fort
bien connu, il existe un second phénomène qui accompagne toujours les transformations nucléaires radioactives ou artificiclles comportant l’intervention d’un
corpuscule chargé. Ce second phénomène a également
pour effet de changer l’énergie nucléaire proprement
dite mise en jeu dans la transformation. On devrait
donc, en principe, tenir compte également toujours de
la variation d’énergie due à ce second processus satellite et apporter une correction nouvelle à l’énergie du
corpuscule mesurée expérimentalement avant de conclure sur la valeur du terme nucléaire intéressé dans
la transformation. La correction précédente est plus
faible que la correction de recul dans les transformations radioactives par rayon a, tout en étant du même
ordre de grandeur, elle est beaucoup plus importante,
en particulier pour les atomes lourds, dans les radioactivités par rayon ~ que la correction mécanique de
recul. Ce processus donnant lieu à cette nouvelle correction ne semble pas, à notre connaissance, avoir
retenu l’attention jusqu’à présent. Nous voudrions
l’étudier dans ce qui suit.
Le processus en question accompagnant toule phénomène de recul, une transformation
nucléaire radioactive ou artificielle, comportant l’émission ou l’absorption d’un corpuscule chargé et modifiant l’énergie de ce dernier a son origine dans le fait
que le noyau réel considéré est toujours plongé dans
un ensemble d’électrons, les électrons de son atome,
§ 1.
jours,
où M désigne la masse de l’atome de recul restant après
le départ de la particule. On sait que la correction
précédente est importante dans les transformations
radioactives accompagnées de l’émission d’un corpuscule chargé lourd (particule «), elle est moins impor-
-
avec
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:0193700806023500
236
tous lui sont liés. Pour
cependant
phénomène sur
un atome radioactif hydrogénoïde. L’électron unique de
cet atome dont le noyau a la charge -~- Ze, e étant la
charge électrique élémentaire, peut prendre les énergies approchées -22/n2, n’ ~. i , en unité atomique Rh,
~ étant la fréquence de Rydberg et h la constante
qui
nuire à la
généralité,
on
simplifier,
peut étudier
ce
sans
cette énergie d’excitation adiabatique pour pouvoir
conclure à l’énergie nucléaire proprement dite mise en
jeu dans la transformation. Enfin, une troisième éventualité consiste en la superposition des deux éventua-
lités précédentes.
En ce qui concerne la première possibilité de source
d’énergie d’excitation adiabatique, on doit noter que
de Planck. Considérons alors la transformation nutoute la représentation actuelle de l’atome est fondée
sur la description du noyau comme un centre de force
cléaire
ponctuel sans structure doué éventuellement d’un spin
et d’un moment magnétique. Les écarts à cette repréaccompagnée de l’émission d’un corpuscule de sentation conditionnés par une description du noyau
charge + ze. Ce corpuscule quittant l’atome peut subir comme un système de corpuscules occupant un voune collision interne élastique ou inélastique sur
lume fini dans l’espace peuvent être considérés comme
l’électron unique de 1-’atome. Plaçons nous d’abord entièrement
négligeables. Le fait que le noyau paraît
dans le cas de la première éventualité. Dans ce cas,
fonctionner essentiellement comme un centre de force
nous sommes certains que dans le nouvel atome, de
ponctuel sans structure conduit à penser que malgré
numéro atomique (Z-z), l’électron se trouvera, après
la possibilité qu’a l’électron, un électron s, de rester
la désintégration, dans un état qui peut être caractéà l’endroit où se trouve le noyau, un transfert d’énerrisé par l’ensemble des mêmes nombres quantiques
gie adiabatique de ce dernier à l’électron, lors de la
que l’état où l’électron se trouvait dans l’atome nudésintégration envisagée, ne puisse se réaliser qu’avec
méro Z, avant la désintégration. Mais l’énergie, en une
probabilité très réduite sinon nulle. On doit se
unité atomique,
rappeler ici, en effet, que :
a) le transfert d’énergie en question est conditionné essentiellement par la variation de charge du
et que cette variation de charge peut être conside l’électron clans l’atome initial, f (Z, n, 1) j) étant noyau
dérée comme terminée, du point de vue de la structure
un facteur de correction, 11, 1 et J’ les nombres quannucléaire, alors qu’elle est à son début du point de
tiques usuels, est devenue
vue de l’électron atomique.
Tant que la charge émise par le noyau reste dans la
région nucléaire, donc dans une région d’extension
linéaire de l’ordre du rayon ou diamètre nucléaire,
Comme l’ensemble des nombres quantiques de l’élecaucune variation de charge n’agit pratiquement sur
tron n’a pas varié alors que son énergie a changé,
l’électron qui ne peut non plus changer d’état pendant
on se trouve, par définition, devant une transformace temps.
tion adiabatique de l’état de l’électron sous l’influence
b) D’un autre côté, pour qu’un transfert d’énergie
de la variation du paramètre Z, le numéro atomique
conduisant à une modification, relativement faible, du
entrant dans l’expression de l’énergie de l’électron.
niveau nucléaire, d*où une particule chargée positiveComme l’électron passe d’un état plus lié à un état
ment a été émise, ait lieu, il semble justement nécessaire
moins lié, il a gagné de l’énergie; on peut dire aussi
que l’électron se trouve dans la région nucléaire
que le processus en question correspond à une excitapendant l’intervalle de temps où la conflagration
tion adiabatique de l’électron. L’énergie d’excitation
nucléaire se produit conduisant à l’émission de la
adiabatique est, laissant de côté le facteur de correc- particule chargée. Pendant ce temps, le noyau restant
tion l peu important,
et la particule à émettre forment un système instable
et le couplage de l’électron présent au voisinage de ce
système pourrait permettre un transfert d’énergie à cet
électron. Mais cette situation est contraire à celle qui
devrait se réaliser pour que la variation de charge se
en convenant d’appeler énergie d’excitation adiabamanifeste d’après l’argument (a). Il semble raisonnable
tique la différence entre l’énergie initiale et finale de penser qu’une fois la particule émise et lorsque
celle-ci quitte la région nucléaire le noyau restant
changée de signe de l’électron.
Le problème devant lequel on se trouve maintenant
fonctionne de nouveau, par rapport à l’électron, comme
est de trouver l’origine de l’énergie d’excitation adiaun centre de force ponctuel sans structure où une
batique précédente A priori, cette énergie ne peut être modification d’état ultérieure ne peut plus avoir lieu.
fournie que par le noyau restant dont l’énergie interne
c) Enfin un troisième argument contre l’intervention
ou le niveau où il a été laissé par la particule émise
du noyau comme source d’énergie d’excitation adiabaserait diminuée en conséquence ; elle peut être fourtique paraît résulter de la situation suivante : admettons
nie par la particule chargée émise dont l’énergie meun
instant la possibilité de transfert de l’énergie
surée expérimentalement devrait être augmentée de
d’excitation adiabatique à l’électron pendant la durée
°
237
de la désintégration, l’électron étant supposé pour cela
se trouver au voisinage du noyau et de la particule
nucléaire à émettre. Dès lors si l’on admet que le noyau
se présente à l’électron comme un ensemble de charges,
l’électron pourra être couplé à la particule à émettre
dans la même mesure, pendant la durée de la désintégration qu’aux autres charges. Dans ces conditions,
l’énergie d’excitation adiabatique pourra lui être
fournie en partie par le noyau et en partie par la
particule à émettre. Ceci aurait pour conséquence de
donner lieu, dans le cas d’une source radioactive, à
une fluctuation considérable de l’énergie des corpuscules émis; elle pourrait s’étendre sur un intervalle de
["ordre de l’énergie d’excitation adiabatique des atomes
en cas d’émission de particules par exemple et cet
intervalle serait compris, pour des noyaux radioactifs
naturels en rayon a, entre vingt et trente kilovolts environ. La finesse remarquable des raies a dans les spectres
magnétiques de Rosenblum (4) semble exclure cette
possibilité de l’intervention du noyau restant comme
d’énergie d’excitation adiabatique.
Nous croyons, sur la base des arguments précédents,
que l’unique éventualité réalisée est celle où toute
l’énergie d’excitation adiabatique de l’électron est
fournie par la particule de charge positive émise. Cette
éventualité paraît être soutenue également par le fait
que l’électron atomique reste couplé à la particule
émise pendant un temps que celle-ci met à parcourir
une distance de l’ordre du rayon atomique, la variation
de charge nucléaire, du point de vue de l’électron,
apparaissant également pendant ce temps. Ce temps
est beaucoup plus long que celui pendant lequel
l’électron se trouve dans la région nucléaire. L’excitation
adiabatique de l’électron atomique paraît se faire
raisonnablement pendant cette durée de collision
adiabatique de la particule et de l’atome.
L’interprétation précédente correspondrait à la
possibilité de séparer le processus de désintégration
total en deux processus successifs indépendants l’un de
l’autre, Le premier est le processus nucléaire dont il
semble permis d’affirmer, tant qu’il met en jeu une
énergie considérable, qu’il s’effectue en toute ignorance
de la présence de l’électron atomique et le second se
rapporte à la transformation nécessaire de l’atome qui
s’adapte à son nouveau noyau. Comme le processus de
recul se prolonge, à cause de la répulsion électrostatique mutuelle de l’atome restant et la particule de
charge positive émise, pendant la traversée de l’atome,
il résulterait que les corrections d’énergie à apporter
pour tenir compte du recul ainsi que de l’excitation
adiabatique discutée se superposent. Si E désigne de
nouveau l’énergie du corpuscule émis mesurée expérimentalement, l’énergie de désintégration nucléaire yl’
devrait être calculée par
source
(1) S. ROSE,-i]BLUM :1 Aclualtlés scientifiques
Paris, Hermann et Cie, éditeurs, i932.
et
industrielles,
n°
34,
le second terme duns le deuxième membre étant la
correction de recul indiquée par (1) et le dernier terme
est la correction d’énergie adiabatique ou brièvement
correction adiabatique qui, dans le cas de l’émission
d’un corpuscule de charge positive et pour les atomes
radioactifs hydrogénoïdes idéalisés, est donnée, avec
une bonne approximation, par (4).
Dans tout ce qui précède, nous nous sommes bornés
au cas où la particule émise dans la désintégration
subissait une collision interne élastique sur l’électron
solitaire de l’atome radioactif hydrogénoïde. Il est clair
qu’en général, cette collision interne peut amener
l’excitation d’un niveau discret ou l’ionisation del’atome.
Dans ce cas, une analyse détaillée du processus n’est
plus possible. Cependant le phénomène d’excitation
adiabatique paraît être contenu dans le processus plus
compliqué de collision interne inélastique où l’état
initial de l’atome est un état caractérisable par les
nombres quantiques (rz, 1, j) et l’énergie
~, 1, j),
Z étant le numéro atomique avant la désintégration et
l’état final (n’, l’, j’) d’énergie E (Z-z, ?i’, 1’, j’) est celui
de l’atome nouveau, + .~e é1 an t, par hypothèse, la
charge de la particule émise par le noyau. Le processus
de collision inélastique interne est manifestement un
processus qui n’a pas d’analogue dans les pbénomènes
de collision rencontrés jusqu’à présent, puisque ceux-ci
peuvent être caractérisés par la transition (n, 1, j)
(iil, l’, j’) entre deux états propres d’un même
système tandis que le processus de collision interne se
rapporte à une transition entre deux états appartenant
à deux systèmes différents entre eux par la valeur d’un
paramètre dont dépendent les représentations de ces
systèmes. Si l’on désigne alors par El’énergie mesurée
expérimentalement de la particule qui a subi une
collision interne inélastique, on trouvera pour l’énergie
de désintégration nucléaire
où I1Ead est encore donné par l’expression approchée (4)
et w désigne l’énergie d’excitation proprement dite
transférée à l’atome lors de la collision interne excitatrice. La perte d’énergie totale de la particule émise
par le noyau est, abstraction faite de la correction de
recul, dans ce cas :-.
tenu de (3),
éventualités
(3 a)
et (4).
diverses de collisions élastique
et inélastique pourraient se manifester par une largeur
de la raie corpusculaire, les corpuscules étant freinés
par l’atome désintégrant. La raie corpusculaire d’une
source d’atomes radioactifs hydrogénoïdes formée par
une couche
monoatomique présenterait dans ces
conditions un bord net du côté des grandes énergies et
compte
Ces
238
.
s’étalerait vers les petites énergies. Cependant une
discussion de cette largeur atomique dans le cas
d’atomes radioactifs hydrogénoïdes, ne présente aucun
intérêt pratique. Nous voudrions revenir sur ce point
brièvement en discutant la correction adiabatique sur
les atomes radioactifs réels.
Il est facile de se rendre compte maintenant de la
correction adiabatique dans le cas de l’émission radioactive d’un corpuscule chargé négativement. Ce côté du
problème est cependant beaucoup moins important
actuellement vu le peu de précision atteinte dans la
mesure de l’énergie des électrons négatifs au voisinage
de la limite hypothétique de grande énergie des
spectres ~ continus négatifs. Il est clair, en effet, que
c’est surtout l’électron d’énergie limite qui paraît être
important du point de vue de la correction adiabatique
associée à cette désintégration.
A l’heure actuelle cette correction n’a qu’un intérêt
théorique ici. En se bornant comme plus haut au cas
d’un atome radioactif hydrogénoïde et remarquant que
les désintégrations en question se rapportent à des
étant la
transformations du type Z - Z -~- 1, -~charge du noyau initial, on trouvera avec (3a), et (4),
en unité atomique. L’énergie de l’électron atomique
diminue de la quantité précédente sous l’influence de
la variation de charge nucléaire considérée. Un raisonnement semblable à celui fait plus haut à propos de
l’énergie d’excitation adiabatique transférée àl’électron
de l’atome lors de l’émission radioactive d’un corpuscule chargé positivement conduirait ici à reconnaître
que l’énergie de désactivation adiabatique (8) est
emportée par l’électron négatif libéré dans la transformation nucléaire ; celui-ci est supposé subir une
collision interne élastique. L’énergie de désintégration
de la particule se trouve être augmentée de l’énergie
de désactivation adiabatique et, abstraction faite un
instant du phénomène de recul, c’est leur somme qui
est mesurée expérimentalement. La correction de recul
est, avec une très bonne approximation,
collision interne élastique de l’électron émis par le
noyau. On se rend compte facilement de ce que la correction adiabatique est beaucoup plus grande dans le cas
des noyaux lourds que la correction de recul. On peut
discuter maintenant ici aussi l’éventualité d’une collision interne inélastique de l’électron émis dans la désintégration. Cette discussion se ferait comme dans le
cas des corpuscules lourds.
Il est facile de généraliser le problème idéal
§ 2.
étudié dans ce qui précède au cas réel des atomes radioactifs. Tout ce qui a été dit au sujet de la correction de
recul s’applique sans changement dans ce cas aussi.
Par contre la correction adiabatique présente une forme
plus compliquée à cause du grand nombre d’électrons
qui subissent la transformation adiabatique associée à
la désintégration du noyau. Si l’on désigne par E (Z,
fi) l’énergie approchée de l’électron i de l’atome
initial de numéro atomique Z, on aura pour la correction adiabatique dans le cas d’une transformation
nucléaire du type Z- Z- z accompagnée de l’émission
d’un corpuscule de charge + ze
-
approximativement. Comme dans le cas idéal de
l’atome radioactif hydrogénoïde cette correction représente une excitation adiabatique de tout l’atome aux
dépens de l’énergie de la particule émise. Une discussion analogue à celle faite à ce propos dans le cas des
atomes radioactifs hydrogénoïdes conduit à reconnaître
ici aussi que c’est la particule de charge positive émise
qui fournit l’énergie d’excitation adiabatique à l’atome.
De même lorsqu’il s’agit d’une désintégration radioactive du type Z -- 7, + z (~) accompagnée de l’émission d’une particule chargée négativement, de charge
ze, la correction adiabatique s’écrira, approximativement,
--
Cette
énergie est maintenant libérée par l’atome et elle
adiabatiquement à la particule de charge
négative émise par le noyau. Les radioactivités négatives appartiennent à la classe de transformation
nucléaire précédente. Mais comme cette transformation
s’accompagne de l’émission d’un spectre continu d’électrons négatifs la correction adiabatique précédente ne
paraît avoir actuellement qu’un intérêt surtout théorique. En effet, d’après les essais de représentation
actuels du processus d’émission d’électrons négatifs
par les noyaux on semble attacher à la limite de grande
énergie du spectre une importance particulièrement
grande en l’identifiant à l’énergie totale mise en jeu dans
est transférée
l’énergie cinétique de l’électron mesurée
expérimentalement, m la masse au repos de l’électron,
où E désigne
M lamasse de l’atome de recul, v la vitesse de l’électron
et c la vitesse de la lumière dans le vide. La relation
précédente s’obtient en écrivant l’égalité approchée de
l’impulsion non relativiste de l’atome de recul et de
l’impulsion relativiste de l’électron de vitesse v. On
aura donc, avec la correction adiabatique et la correction
de recul, l’énergie de désintégration nucléaire
tenant
compte
de
(8)
et
(9)
et dans l’éventualité d’une
(~) On notera qu’il y a formation d’un ion positif ici, alors que
dans le cas de diminution de charge nucléaire il pourrait y avoir
formation d’un ion négatif, toujours dans l’éventualité d’une
collision interne élastique.
239
la transformation nucléaire. C’est cette énergie qui
devrait être corrigée de l’énergie de désactivation adiabatique pour trouver l’énergie de désintégration
nucléaire propremendite. Mais la précision atteinte
actuellement dans la mesure de ces énergies limites
est si réduite qu’elle rend inopérante la correction
adiabatique relative à la désintégration en question.
Les corrections d’énergie adiabatiques établies dans
ce travail ne paraissent pas comme pouvant être contrôlées effectivement par l’expérience. Elles résultent
et s’imposent nécessairement dans la représentation
que l’on a actuellement sur la constitution des atomes.
Il nous semble cependant que précisément les spectres
B négatifs, malgré lepeu d’importance qu’ils ont actuelment pour les corrections adiabatiques en vue d’une
évaluation plus exacte de l’énergie nucléaire mise en
jeu dans la désintégration, pourraient, en principe,
permettre de vérifier directement l’existence de ces
corrections. En effet, on paraît admettre à présent que
les spectres ~ continus, s’ils doivent avoir une limite
supérieure du côté des grandes énergies, cette limite
étant regardée comme une donnée nucléaire précise
ayant
une
signification physique directe,
ces
spectres
doivent avoir une limite inférieure du côté des petites
énergies aussi. Mais la correction adiabatique exigée
par la variation de charge du noyau devrait intervenir
pour ces électrons de faible énergie aussi. Or ceux-ci
doivent désactiver l’atome initial et emporter l’énergie
de désactivation adiabatique donnée par (42) approximativement. En d’autres termes les spectres continus p
négatifs devraient présenter une sorte de limite du
côté des petites énergies qui ne pourrait pas différer
beaucoup de l’énergie
(Z, Z -F 1)1 vu que même
une excitation interne directe de l’atome par choc inélastique ne devrait pas s’accompagner d’une perte
d’énergie appréciable. L’énergie de correction adiabatique pourrait bien représenter le début des spectres p
négatifs ou, tout au moins, l’allure du spectre pour les
énergies inférieures à cette limite pourrait être entièrement différente de l’allure du spectre du côté des
grandes énergies de cette limite.
expérimentale
du début des spectres continus négatifs pourrait permettre éventuellement de vérifier la correction adiabatique imposée par la théorie de l’atome.
Il convient également de discuter brièvement le cas
des spectres continus des électrons positifs. Comme la
transformation nucléaire donnant lieu à ce spectre est
du type Z -->- Z - 1, l’atome initial subit une excitation adiabatique et l’énergie d’excitation pourrait se
calculer ici aussi à l’aide de la formule approchée (1I).
La correction adiabatique importe surtout à la limite
de grande énergie de ce spectre continu mais pour la
même raison, indiquée déjà, que, dans le cas des
spectres 8 négatifs, cette correction n’a, actuellement,
qu’un intérêt théorique. Une situation remarquable se
présente ici, toujours du point de vue théorique, au
début du spectre. Nous avons vu que lorsque la charge
du noyau diminue, l’énergie d’excitation adiabatique
doit être fournie à l’ensemble des électrons pour rendre
leur réorganisation dans le nouvel atome de
numéro atomique plus faible. Cette énergie devrait être
transférée adiabatiquement aux électrons atomiques
de la particule libérée dans la transformation nucléaire ;
encore, faudrait-il que cette particule dispose de cette
énergie d’excitation adiabatique. Mais ceci signifie que
le noyau ne peut donner naissance à un électron positif que si celui-ci possède au moins l’énergie d’excitation adiabatique qu’il doit transférer adiabatiquement
aux électrons atomiques pour que ceux-ci puissent se
réadapter au nouveau noyau. Cette intervention des
électrons dans la radioactivité pa,r électrons positifs et
pour les électrons de faible énergie serait un trait
caractéristique, d’ordre théorique, de ce genre de transformation nucléaire. Cette règle de sélection qu’impose
la présence des électrons atomiques à un noyau émetteur d’électrons positifs se traduit. par un enrichissement du début du spectre en électrons positifs de faible
énergie, contrairement à ce qui se présente avec les
débuts de spectres d’électrons négatifs où la correction
adiabatique appauvrit le spectre en électrons de faible
énergie. L’existence des corrections adiabatiques paraît
être vérifiable sur ces spectres d’électrons positifs aussi,.
En ce qui concerne la capture éventuelle par le noyau
d’un électron atomique orbital, la transformation étant
encore du type Z -~ Z -1, cette capture doit s’accompagner de l’excitation adiabatique de l’atome et les raies
qui pourraient apparaître dans ce cas devraient être
celles de l’atome nouveau de numéro atomique (Z2013 1).
Comme nous avions déjà l’occasion de le dire plus
haut, la correction adiabatique ne paraît avoir une
importance pratique que dans les désintégrations radioactives naturelles par rayons a. Nous donnons dans
le tableau suivant les énergies d’excitation adiabatique transférées aux atomes par les particules a
émises par les noyaux radioactifs naturels. Dans ce
et 6.Ead (83,81) sont
tableau, les
assez précises, la première est comprise entre 27,3 et
28 kV, cette limite étant une limite supérieure de
l’énergie d’excitation adiabatique relative à une désintégration par rayon a dans le tableau naturel des éléments ;la seconde est exacte à quelques dizaines de
volts près. Ces corrections adiabatiques ont été calculées à l’aide de (11), utilisant les énergies de liaison
données par Siegbahn (2). Les autres corrections indiquées dans notre tableau ne sont que peu précises, elles
ne portent d’ailleurs qu’à une soixantaine d’électrons
des atomes radioactifs naturels et ont été obtenues à
l’aide des énergies de liaison calculées par interpolation et données par M-1 Curie (3). L’essentiel est que
la correction adiabatique dans les transformations
radioactives naturelles ce est comprise entre 23,4 et
28 kV environ. Les corrections adiabatiques dans les
transformations radioactives naturelles # seraient comprises approximativement entre il et 14 kV.
possible
(2) Spektroskopie der Rüntgens trahlen , Springer, Berlin, 1931,
p. 347.
(3) Traité de
p. 526-21.
Radioactivité,
Hermann
et
Cie, Paris, 1935.
240
Tablea2c des énergies
pour 81
6.Ead (Z, Z - 21),
’
92.
a) Nous voudrions considérer finalement les
variations de charge nucléaire produites par l’entrée
dans le noyau d’un corpuscule de charge positive.
L’énergie cinétique initiale E de ces particules est sapposée connue. La correction de recul a pour effet de
diminuer cette énergie de la quantité
où ni
est la masse de la particule et (ilf+ na) désigne la
masse de l’atome formée. D’un autre côté, dans l’éventualité d’une collision élastique de la particule contre
les électrons de l’atome, l’augmentation de la charge
du noyau doit être accompagnée d’une libération
d’énergie par l’atome et ceci d’une manière adiabatique. Dans l’hypothèse fondée plus haut, il résulte ici
que l’énergie de désactivation adiabatique est transférée à la particule avant qu’elle pénètre à l’intérieur du
noyau. Si Z désigne le numéro atomique de l’atome
initial, le gain d’énergie adiabatique de la particule
Z + z), -~- .~e étant sa charge ; cette quanest
tité se calcule approximativement par (12). On aura
ainsi, dans l’éventualité d’une collision élastique de la
particule, l’énergie cinétique totalu disponible à l’intérieur du noyau
§
3.
-
,
L’utilisation de la correction adiabatique est subordonnée ici à la précision avec laquelle on mesure E. La
correction précédente s’atténue dans le cas d’une collision inélastique de la particule incidente contre les
électrons de l’atome, cette collision devant être
compatible avec l’entrée de la particule dans le noyau.
b) Nous nous sommes proposé plus haut de revenir sur le problème de la largeur atomique d’une raie
corpusculaire monocinétique. Cette largeur, comme
nous l’avions vu à propos des atomes rodioactifs hydl o-
serait due à la possible é qu’a l’atome émetter de freiner la particule chargée émise par son
noyau. Le processus de freinage en question est analogue à celui qui règle le parcours des corpuscules
chargés dans la matière ; il résulte de l’excitation
ou de l’ionisation de l’atome par la particule chargée
émise dans la transformation de son noyau. En réalité
ce n’est là qu’un des aspects limites du véritable phénomène de collision que subit la particule nucléaire
émise en traversant l’atome, l’autre correspond à l’excitation adiabatique due à la variation de charge nucléaire
ou variation du champ où se trouvent plongés les électrons atomiques et qui est aussi l’origine de la correction adiabatique. Pour trouver l’ordre de grandeur
approché de la largeur atomique des raies corpusculaires, il semble justifié d’utiliser les résultats obtenus
dans la théorie ordinaire du freinage. En particulier, si
l’on se borne aux résultats obtenus par la méthode de
Born, on est conduit à reconnaître (4) que la section différentielle de toutes les collisions inélastiques, pour des
angles de déviation très faibles, est plus grande que la
section différentielle de toutes les collisions élastiques
pour les mêmes angles, le rapport de ces sections étant
environ
est la vitesse de la particule incidente
et vo la vitesse orbitale moyenne d’un électron atomique
pour lequel la méthode de Born s’applique encore.
Appliquant ce résultat aux collisions internes des parr
génoïdes,
ticules a naturelles, on se rend compte que l’on doit,
en général, s’attendre à un élargissement de la raie
corpusculaire a d’une source radioactive formée par
une couche monoatomique, puisque les collisions inélastiques sont aussi fréquentes que les collisions élastiques. Cependant, l’énergie maximum perdue par la
particule dans ces collisions ne devrait pas dépasser,
étant la masse de
pratiquement, l’énergie 2
l’électron et v la vitesse de la particule a, ce qui représente l’énergie maximum qu’une telle particule peut
transférer sur un électron libre, initialement au repos.
Il a été établi (°) en effet, expérimentalement, que dans
les collisions externes de particules a, le rendement
d’ionisation dans les couches électroniques internes
des atomes lourds en particulier est très faible, de
sorte que ces pertes d’énergie ne semblent pas pouvoir
intervenir pratiquement dans les collisions internes.
Il en résulte que les raies corpusculaires Inonocinétiques, telles que les raies de particules a. doivent présenter une limite nette du côté des grandes énergies,
et diminueraient en intensité du côté des petites énergies ; la raie pourrait s’étendre à quelques kilovolts
environ, mais ne pas dépasser cette largeur, la source
étant, par hypothèse, une couche monoatomique.
Je voudrais remercier, en terminant, 1B1. L. de Broglie
F. Perrin et
pour son aimable intérêt aiiisi que
S. Rosenblum pour l’aide qu’ils m’ont fournie au cours
de diverses discussions des problèmes étudiés dans ce
travail.
1’) H. BETHE : Ann. l’hysik, 1930,
5, 325.
1’» NV. BOTHE eL H. FRXNZ : Z. Physik, 1929, 52, 466.
Manuscrit reçu le 9 avril 1937.
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