Les Sciences sociales de l`éducation: approaches disciplinaires et

Revue
trimestrielle
publiée par
l'Unesco
Vol. XXXVII,
n° 2, 1985
Rédacteur
en
chef
: Ali
Kazancigil
Maquettiste
:
Jacques
Carrasco
Illustrations
:
Florence
Bonjean
Les
correspondants
Bangkok
: Yogesh
Atal
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Belgrade
:
Balsa
Spadijer
Buenos
Aires
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M.
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Chen
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S.
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Akiwowo
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Lamy
Singapour
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Alatas
Tokyo
:
Hiroshi
Ohta
Tunis
: A.
Bouhdiba
Les
sujets
des
prochains
numéros
Systèmes
alimentaires
Jeunesse
Temps
et société
Couverture
et
ci-contre
:
Une
allégorie
de
l'éducation
:
le
maître
et ses élèves
sont
assis
sous
un
arbre
symbolique
portant
l'alphabet en caractères
gothiques.
Par
Johannes
Zainer,
Ulm, 1490.
SnarWB.N.
REVUE
INTERNATIONALE
DES
SCIENCES SOCIALES
Vc\
ISSN
0304-3037
LES
SCIENCES SOCIALES
DE
L'ÉDUCATION
104
Gaston
Mialaret
Ettore
Gelpi
Martin
Carnoy
Fred
Mahler
Vladimir
Choubkine
Stefano
Várese
L'approche
scientifique
Les
sciences de l'éducation en
France
151
Problèmes
de la
recherche
éducative 163
Économie
politique,
sociologie
et
anthropologie
L'économie
politique
de l'éducation 173
Un
modèle
global de
développement
théorique de la
sociologie de l'éducation 193
La
sociologie du
système
éducatif : les besoins de la
société
et les
aspirations
professionnelles des jeunes 205
Développement
culturel
des
groupes
ethniques :
explorations
anthropologiques
dans
le
domaine
de
l'éducation ' 219
Le
Thành
Rhôi
J.
O. Enaohwo
Sylvain
Lourié
J.
Michael
Brittain
Sciences
économiques
et
planification
L'économie
de l'éducation 237
Éducation
et
économie
nationale au Nigéria 257
La
planification
de l'éducation 269
Données
en sciences
sociales
: problèmes
et
évaluation
La
pertinence de la
documentation
en sciences
sociales
dans
le
monde
281
Services
professionnels
et documentaires
Calendrier
des
réunions
internationales
' .
299
Livres
reçus 302
Publications récentes de
l'Unesco
304
Les
sciences
de
l'éducation
en
France
Gaston
Mialaret
Bref
historique
et
réflexions
sur la
pertinence
de
l'expression
«
sciences
de
l'éducation
»
L'expression
« sciences de l'éducation » est
relativement récente
dans
le
monde
scientifique
(le mot « sciences »
étant
utilisé
au
pluriel).
s 1879,
Alexandre
Bain
publiait
un
ouvrage
sur la
Science
de
l'éducation,
mais
l'expression
est bien au
singulier
;
il
s'agit,
en
fait,
d'un
livre
de
méthodologie,
et
l'auteur
se
limite
à essayer
d'étudier « scientifiquement »
l'art
d'enseigner.
C'est
le
moment
où
Gabriel
Compayre
écrivait,
en 1898
: «
L'éducation
n'est
qu'une
œuvre
de
hasard
où la
méthode
scientifique
n'a point
pénétré.
»
Dans
la
même
perspective, et à peu
près
à la
même
époque,
en 1910,
Lucien
Cellérier
publie une Esquisse
d'une
science
pédagogique.
Le mot « science » est
encore
utilisé
au
singulier,
mais
le
sous-titre
est déjà
significatif
et
annonce
les
développements
ulté-
rieurs
:
« Les
faits
et les
lois
de l'éducation » ;
l'auteur
expose
quelles sont, à ses
yeux,
les
conditions
d'une
science
qu'il
nomme «
pédago-
gique
»
pour
la distinguer de l'éducation, consi-
dérée
comme
l'art
d'élever les enfants, et de la
pédagogie,
dont,
dit-il
à
cette
époque,
« la
définition
est
encore
si mal assurée ». La
préface et
l'introduction
de l'ouvrage sont
pour-
tant
prometteurs : « L'objectif de la
pédagogie
est de chercher les
lois
des
phénomènes
qui se
manifestent
et agissent
dans
l'éducation,
phéno-
mènes
déduits de prémisses déterminées : le
but
assigné à l'éducation et
l'action
de
trois
facteurs
conditionnant l'éducation, l'éducateur,
le
sujet,
le milieu. »
(Cellérier,
1910.)
Et il
ajoute, parlant toujours de
l'utilité
de la science
pédagogique
: « Elle apporte de
l'ordre
et de
la
clarté
là
,
sans
elle,
ne
peut
régner
que
la
confusion
;
elle
permet
de prévoir
dans
une
certaine
mesure
quels seront, à conditions
éga-
les, les
résultats
de
telle
méthode,
de tel
procédé
d'éducation. »
(Idem.)
On
s'oriente
bien
vers la notion de science de l'éducation,
c'est-à-dire
vers
l'idée
d'une
analyse
scientifi-
que
des
faits
d'éducation. La
brèche
dans
les
conceptions
uniquement
philosophiques
et
pure-
ment
historiques
est
ainsi
ouverte.
Un
texte
de
Paul
Lapie,
écrit
en
1915
dans
La
science
française,
le
confirme
clairement :
«
Les
grandes
lignes de la science de l'éduca-
tion
sont tracées. Elle
s'efforce
d'emprunter
ses
méthodes
aux sciences positives. Les
théories
pédagogiques
étaient
tirées
soit
des
hypothèses
métaphysiques,
soit
des
romans
littéraires,
soit
des
plans
politiques.
Elles se présentent aujour-
d'hui
comme
des
corollaires
des
lois
de la
psychologie
et de la sociologie. »
A
ce
niveau
de notre analyse on notera
trois
éléments
essentiels
pour
bien
comprendre
Gaston
Mialaret
a été
professeur
et
directeur
de
l'Institut
des sciences de
l'éducation
à l'Université de
Caen
(France).
Il a aussi
enseigné
à l'Université
du
Québec
et a été
expert-consultant
de
l'Unesco,
des
Nations
Unies,
du
Conseil
de
l'Europe
et
de
l'Organisation
des États
américains.
Il a
publié
une
quinzaine
d'ouvrages,
traduits
dans
une
dizaine de
langues
différentes.
152 Gaston
Mialaret
l'évolution
de la notion : on en est
encore
à la
notion
de science au
singulier;
on
commence
à
accepter
l'idée
de la
possibilité
d'étudier les
faits
éducatifs
d'une
manière
scientifique
;
cette
nouvelle science a des
relations
privilégiées
avec
la psychologie et la
sociologie.
C'est
en 1912 que la
mutation
s'opère.
Depuis
1906,
Edouard
Claparède,
médecin
puis
psychologue,
dirigeait
à
l'Université
de
Genève
un
séminaire de psychologie
pédagogique
;
c'est
au
cours de ces séances de
travail
qu'il est
amené
à
lire
Rousseau
et à forger un
nouveau
concept
:
celui
des « sciences de l'éducation »,
le mot « sciences » étant explicitement
utilisé
au
pluriel.
C'est
ainsi
que le 21 octobre 1912
(pour
la
première
fois
à notre connaissance),
est créé un
Institut
de sciences de l'éducation.
L'expression
este et
nous
allons
voir, au
cours
des
années,
comment
elle
s'est
enrichie.
A
ses
débuts,
l'extension
du concept ne
recouvrait que la psychologie, la
sociologie,
l'histoire
et la philosophie de l'éducation. Il a
fallu
attendre une
réflexion
plus
approfondie
sur
la notion d'éducation
pour
voir le concept
s'enrichir
et devenir ce qu'il est
aujourd'hui.
Les
extensions
du
concept
d'éducation
Le
concept d'éducation a
perdu
la
simplicité
relative
qu'il
avait
jadis
;
limitée
à une période
réduite de la vie (la période
scolaire
en
général),
ne s'adressant qu'à une action sur
l'individu
(principalement une action sur
l'intelligence)
et à l'apprentissage, la notion
d'éducation
a, au cours du dernier demi-siècle,
littéralement
explosé.
On
peut relever
trois
types au
moins
d'ex-
tension :
La
première
extension porte sur l'âge des
sujets
auxquels
s'applique l'éducation. Limitée
jadis
à une période
allant
globalement
de six à
douze
ans,
l'éducation
commence
à la naissance
et se poursuit tout au long de la vie. Le
développement
de l'éducation
dite
« présco-
laire
»,
d'un
côté, l'éducation
permanente,
de
l'autre, en
témoignent
;
on
assiste
même,
main-
tenant,
avec les «
universités
du
troisième âge »,
à
une extension qui
nous
conduit
presque
jusqu'aux
limites
de la
mort.
Il est évident que
la
compréhension
du concept d'éducation
n'est
pas
la
même
à ces différentes,périodes de notre
vie.
La
seconde
extension de la notion
d'éduca-
tion
est
celle
qui
nous
conduit à la notion de ce
que
les sociologues ont appelé «
l'école
paral-
lèle
».
Nous
savons
maintenant
que
l'institu-
tion
scolaire
n'est
plus la
seule
source du savoir
ou
des savoirs.
L'enfant
et l'adolescent
appren-
nent
beaucoup
de choses en
dehors
de
l'école
et
acquièrent
une
très
riche expérience
ainsi
que
des
savoirs
diversifiés.
Certains auteurs ont
voulu
essayer de préciser les
pourcentages
rela-
tifs
des connaissances acquises à
l'école
et de
celles
acquises
ailleurs.
L'important
est de
savoir que ces éducations
différentes
ne sont
pas
tout à
fait
de
même
nature,
quels
que
soient
les points
communs
qui
peuvent
exister
entre
elles.
Ici
encore,
une étude
approfondie
de
cette
situation
devrait
prendre
en considération
les
problématiques
et les méthodologies
diffé-
rentes qui ont cours
dans
chacun
des
domaines.
Notre
dernier demi-siècle
assiste
aussi à
une
autre extension :
celle
des
domaines.
de
l'éducation. A l'éducation,
très
souvent
limitée
aux
processus
intellectuels
(le «
fort
en
thème
»
opposé
péjorativement au «
fort
en gym »),
s'est
substituée la notion de
formation
de tous
les aspects de la personnalité de
l'élève
:
intel-
lectuels,
affectifs,
sociaux,
moteurs.
Il en est
découlé
une
prise
de conscience de
l'impor-
tance
de toutes les
disciplines
et de
l'égale
dignité
de toutes les matières. La
conséquence
en
est,
pour
prendre
l'exemple
de la
France,
la
variété
des « baccalauréats » ou des
examens
de
fin du
cycle
secondaire. Il est aussi bien
évident
que
les analyses
scientifiques
d'enseigne-
ments
tels
que la
littérature,
le dessin ou
l'éducation
physique
ne rencontrent pas exacte-
ment
les
mêmes
problèmes
méthodologiques.
Une
autre modification est
apparue
à la
suite
de
travaux
divers, en
particulier
de
ceux
des
psychologues de la vie
sociale.
Le
modèle
classique de Socrate enseignant à
l'esclave
de
Ménon
ou le
modèle
du
maître
enseignant à un
groupe
d'élèves ne sont plus les
seuls
que
considèrent aussi bien les
chercheurs
que les
praticiens. Des
formes
nouvelles d'action
péda-
gogique
sont
apparues
:
travail
par
groupe,
tutorat,
individualisation
du
travail
(dont
l'en-
seignement
assisté
par ordinateur constitue une
excellente
illustration),
etc.
On
peut dire aussi que, lorsqu'on parle
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