European Union Institute for Security Stud
ies
5
D’autres domaines sont également importants à
développer tels que les projets d’infrastructure. Enfi n,
fournir des fi nancements pour les micros, petites et
moyennes entreprises (MPME) peut être d’une plus
grande aide pour relancer la consommation et em-
pêcher une grande partie de la population de basculer
dans la pauvreté et le besoin.
Mais peut-être le plus important pour l’Égypte est-il
de bâtir ses institutions politiques et administratives.
L’Europe peut apporter son expertise dans différents
domaines, comme l’organisation des élections,
l’établissement des partis politiques et les administra-
tions locales. Sur le plan économique, les fi nances
publiques se trouvent dans une situation requérant une
assistance fi nancière et technique afi n de combler le
défi cit et de mettre en place des mécanismes qui ga-
rantissent la soutenabilité. Il faut pour cela une grande
transparence et un meilleur accès à l’information,
donc une mise à niveau des bureaux de statistiques à
travers une aide fi nancière et technique.
Mais à plus court terme, la situation économique
du pays reste diffi cile. En témoignent la ferme-
ture d’usines, la chute des exportations, les pertes
d’emplois, les revendications sociales, etc. Dans tous
ces cas, l’intervention de l’État est nécessaire. Pour
trouver une solution, les recettes fi scales, les res-
sources provenant de la propriété de l’État et les em-
prunts seront toutefois limités. En effet, la baisse de
l’activité a eu (et aura encore) pour conséquence la
diminution des recettes provenant des impôts directs
et indirects. Les entreprises publiques sur lesquelles
l’État pourrait compter pour collecter des revenus sont
déjà confrontées à des diffi cultés fi nancières et so-
ciales. Les moyens fi nanciers de l’État risquent ainsi
de ne pas être en mesure de répondre aux aspirations
sociales et à l’urgence d’aides directes et indirectes
au secteur privé.
A ce sujet, les pays européens peuvent réduire cet
impact en fournissant au pays une aide fi nancière qui
aura pour effet immédiat de compenser la chute des
revenus de l’État. Mais l’aide peut également prendre
la forme d’une assistance technique et d’un transfert
du savoir-faire européen pour éviter au gouvernement
de transition de prendre des mesures qui risquent
d’être dommageables pour le pays. Cette aide devrait
même s’étendre à une aide humanitaire, la révolu-
tion ayant laissé des blessés graves pour lesquels les
pays européens peuvent fournir un traitement médical,
que ce soit sur place ou dans les hôpitaux européens,
le cas échéant.
Le budget de l’État pourrait également profi ter de la
réduction de la dette extérieure, dans la mesure où le
paiement de cette dette et de ses intérêts absorbe une
partie des ressources de l’État. La dette extérieure
de l’Égypte s’élève à 36 milliards de dollars (15% du
PIB). Or une partie de cette dette a servi à opprimer le
peuple égyptien, tandis qu’une autre partie a été dé-
tournée par Moubarak et ses clans. Une dette qui ne
sert pas les intérêts du peuple est une dette odieuse
qui doit être réduite. La responsabilité morale des
créanciers devrait les inciter à l’annuler au moins en
partie, une mesure qui serait largement appréciée car
elle rendrait plus tangible le sentiment de sympathie
formulé par les dirigeants occidentaux.
Les pays européens ont lancé des enquêtes pour
repérer les fonds détournés par les dictateurs égyp-
tiens et tunisiens déchus, et les placer sous surveil-
lance. Ces avoirs doivent être gelés et rendus aux
États spoliés. La Suisse et les États membres de
l’Union européenne ont affi ché leur bonne volonté,
l’une en gelant très rapidement les fonds, les autres
en lançant des enquêtes pour détecter les fonds ou en
demandant à leurs établissements fi nanciers de sur-
veiller avec une grande attention les mouvements de
fonds des personnalités égyptiennes « politiquement
exposées ». Toutefois, les procédures choisies pour-
raient traîner en longueur et leurs résultats demeurent
incertains.
La transition démocratique de l’Égypte et son engage-
ment sur la voie du développement seront sans aucun
doute durs et longs, ce qui en soi n’a rien d’anormal
après la chute d’un régime autoritaire. Cependant,
il faut éviter de laisser le pays bloqué dans ce que
certains appellent la transition indéfi nie (« the endless
transition »).
La responsabilité des opinions exprimées ici n’engagent que la responsabilité de leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la position de l’IESUE