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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 3, mai-juin 2007
Dossier
thématique
ment été observé que les employés et
la population adulte résidant à proxi-
mité d’usines slovaques fabriquant
des PCB présentent des concen-
trations de PCB dans le sang trois
fois supérieures à celles de sujets
vivant dans des zones non polluées
(7 300 ± 871 versus 2 045 ± 147 ng/g
de lipides sériques) [8, 9]. Les
populations fortement exposées à la
pollution véhiculée à la fois par l’air
et l’eau présentent des taux d’hor-
mones thyroïdiennes circulantes
anormalement faibles et des taux
élevés de TSH (10). De plus, une
augmentation du volume thyroïdien
a été constatée chez 5 % des sujets
contaminés par les PCB (conta-
mination supérieure à 3 000 ng/g
de lipides sériques) [9]. Des effets
délétères des PCB sur la fonction
thyroïdienne ont été retrouvés dans
une cohorte de 320 enfants âgés
de 7 à 10 ans, vivant à proximité
d’usines d’incinération de déchets
(11). Ces différentes études notent
l’existence d’une corrélation entre
l’exposition aux PCB et une hypo-
thyroïdie primitive dans des popula-
tions vivant près de sites d’émission
de PCB. Toutefois, des corrélations
entre présence de PCB dans le sang
et dysfonctionnement thyroïdien
ont également été observées dans
des populations demeurant dans les
zones septentrionales de la planète,
très éloignées des sites de production
de polluants (12). La contamination
par les PCB des Inuits canadiens ou
des riverains suédois et finlandais de
la mer Baltique est due à la consom-
mation de poissons riches en graisse
(12-14). En effet, de par leur faible
biodégradabilité et leur hydrophobi-
cité, les PCB s’accumulent le long
de la chaîne alimentaire dans les
tissus lipidiques des prédateurs. Les
PCB ingérés par les mères se retrou-
vent en concentration importante
dans le sang du cordon ombilical
(14, 15) et le lait maternel (16, 17).
Une étude menée chez des nouveau-
nés de la région de Fukuoka, ville
côtière du Japon, a récemment révélé
l’existence d’une contamination par
des PCB chez des enfants souffrant
d’une hypothyroïdie congénitale
et d’un crétinisme (17). Une forte
exposition périnatale aux PCB peut
donc, en provoquant une hypothy-
roïdie, avoir des retentissements
sur le développement physique et
psychomoteur des enfants.
Dioxine
Les polychlorodibenzo-p-dioxines
(PCDD) sont des composés aroma-
tiques tricycliques chlorés à deux
atomes d’oxygène, appelés couram-
ment dioxines (figure 1). La plus
toxique des dioxines est la 2,3,7,8-
tétrachlorodibenzo-p-dioxine
(TCDD), surnommée dioxine de
Seveso en référence à la catastrophe
italienne. On inclut également dans
la famille des dioxines les polychlo-
rodibenzo-furanes (PCDF), ou plus
simplement furanes, qui se diffé-
rencient des PCDD par la présence
d’un seul atome d’oxygène dans le
cycle central entouré de deux cycles
benzéniques (figure 1). Les dioxines
sont des résidus d’une combustion
incomplète se produisant à très haute
température lors de productions
industrielles ou de l’incinération de
déchets. Ces polluants sont extrême-
ment persistants et bio-accumulables.
La demi-vie biologique de la TCDD
est d’environ 9,6 ans chez la femme
et 6,5 ans chez l’homme (18).
Comme pour les PCB, les études
expérimentales ont montré que les
dioxines induisent chez l’animal une
hypothyroïdie. À titre d’exemple, on
peut citer les travaux de N. Nishi-
mura et al., démontrant que l’ad-
ministration d’une seule dose de
TCDD (1 à 4 μg/kg) provoque chez
le rat une réduction des taux plas-
matiques de T4 totale et libre, ainsi
qu’une augmentation de la TSH
circulante qui s’accompagne d’une
hyperplasie de la glande thyroïde
(19). Les rattes transmettent la
contamination à leur progéniture
par le biais du passage de la TCDD
à travers la barrière placentaire
et celle de la glande mammaire.
Cependant, il a été observé que
seule la lactation induit une hypo-
thyroïdie primitive chez les rats
nouveau-nés (20).
Quelques publications ont relevé
l’impact des dioxines sur la fonc-
tion thyroïdienne humaine, notam-
ment une large étude réalisée sur
1 429 vétérans américains fortement
exposés au TCDD lors de l’épandage
de l’ “agent orange” durant la guerre
du Vietnam, qui a fait état d’une
élévation significative de leur taux
de TSH plasmatique (21). La TCDD
est aussi tenue pour responsable de
la baisse de la T3 chez des hommes
qui pulvérisent un herbicide conte-
nant cette dioxine sur les champs
australiens (22). Les dioxines n’em-
pruntent pas uniquement les voies
aériennes comme c’est le cas lors
d’une manipulation professionnelle
de produits ou chez les individus
vivant à proximité d’un incinérateur
de déchets ménagers. La contamina-
tion par les dioxines et les furanes
se produit également par ingestion
(23). Les taux de TCDD mesurés
chez les consommateurs de poissons
de la mer Baltique sont équivalents
aux niveaux d’exposition relevés
lors de l’accident de Seveso (environ
110 pg/g de lipide) [13]. Toutefois,
il n’a pas été rapporté à ce jour de
dysfonctionnement thyroïdien dû à
la consommation d’aliments pollués
par ce type de xénobiotique. De
même, plusieurs travaux ont montré
que la contamination périnatale par
des PCDD, véhiculée par le sang
maternel ou le lait, semble avoir peu
d’incidence sur l’équilibre thyroïdien
des nouveau-nés (15, 18, 24). En
revanche, une étude japonaise très
récente, réalisée sur 34 nourrissons,
a révélé que l’exposition périnatale
aux PCDF est corrélée à l’apparition
d’une hypothyroïdie congénitale ou
d’un crétinisme (17). Ces données
renforcent l’idée selon laquelle les
dioxines et les polychlorodibenzo-
furanes perturbent l’homéostasie
thyroïdienne. Elles sont à rapprocher
des effets secondaires connus de
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