MINISTÈRE
DB
L'AGRICULTCR E
ADMINISTRATION DES EAUX ET
FORETS
COMMISSION
D'ÉTUDES
DES
ENNEMIS
DES
ARBRES,
DES
BOIS ABATTUS
ET DES
BOIS
MIS EN
ŒUVRE
Bulle
ti
n no
16
LES INSECTES NUISIBLES AUX PEUPLIERS
INSECTES ATTAQUANT LE BOIS
Les insectes qui s'attaquent au bois des peupliers sur pied
sont nuisibles à un triple point de vue : les galeries profondes
qu'ils creusent dans le tronc et les branches peuvent nuire au
développement de l'arbre, elles enlèvent au bois une partie de
sa valeur et favorisent la pénétration des maladies pernicieuses,
notamment du chancre (t).
Les dégâts sont surtout causés par des larves qu'on peut ré-
partir en deux groupes : les larves de Saperdes et de Cryptor-
rhynquu qui sont blanches et privées de pattes, et les chenilles
lignivores qui ont des pattes plus ou moins développées.
Les larves de Saperdes sont allongées et portent dorsalement
et ventralement des épaississements qui leur permettent d'avan-
cer ou de reculer dans les galeries. La larve du Cryptorrhynque
est de petite taille et présente une forme arquée.
(I) Consulter le Bulletin
no I
i
o Les maladies des
peupliers
o.
(Annates,
t.
IV,
fasc. I), p. 197.
72
LES INSECTES NUISIBLES AUX PEUPLIERS
Le groupe de chenilles lignivores comprend les Sésies, qui ont
des pattes peu développées, et dont plusieurs espèces sont nui-
sibles au peuplier, le Cossus, ou gros ver rouge, et la Zeuzère,
dont la chenille blanche piquetée de noir possède comme la pré-
cédente seize pattes bien développées.
Les dégâts de tous ces insectes se manifestent extérieurement
par le rejet de sciure imbibée de sève plus ou moins teintée, et
par des déformations plus ou moins accentuées de l'écorce ou
des renflements caractéristiques (petite Saperde, Sésies). Ces
dégâts sont encore accentués par le travail des Pics qui fouillent
à
coups de bec les galeries pour en extirper les larves, dont ils
se montrent très friands.
CARACTLRES DISTINCTIFS, ÉVOLUTION ET DÉGATS
La petite Saperde du Peuplier. —
La petite Saperde
(Comp-
sidia
populnea
L.) est un longicorne de 9 à 15 mm, au corps
noir couvert d'un duvet jaunâtre plus ou moins dense formant
sur la tête et le corselet deux bandes longitudinales claires, plus
une médiane moins distincte, et sur chaque élytre des taches
plus ou moins nettes au nombre de 3 à 5. Les antennes de
I I articles sont longues et annelées.
La petite Saperde s'installe principalement dans les tiges et
les branches de deux ans.
L'attaque se manifeste par un fer à cheval dessiné sur l'écorce
et par un renflement.
Le fer à cheval qui a sa courbure tournée vers le bas, est
creusé par les mandibules de la femelle au moment de la ponte.
L'oeuf est déposé dans une petite cavité creusée au bas du fer
à cheval; celui-ci donne à l'écorce une certaine élasticité et
réussit généralement à empêcher avant l'éclosion l'écrasement
de l'oeuf par la pression des tissus. La larve éclot au bout d'une
dizaine de jours et pénètre sous l'écorce où elle creuse une
galerie horizontale semi-circulaire autour du rameau, évacuant
par le trou de ponte la sciure résiduaire et ses excréments. C'est
alors que par suite de la réaction
de l'arbre se forme le renfle-
ment caractéristique bien connu.
LES INSECTES NUISIBLES AUX PEUPLIERS
73
La larve est blanc jaunâtre, elle atteint 6 à 8 mm en fin
d'été; en septembre-octobre, quelquefois seulement au printemps
suivant, elle arrive à la moelle et creuse une galerie axiale, qui
peut avoir 4 à 5 cm de long à la fin de la seconde année; c'est
dans cette galerie qu'elle se nymphose pour donner en mai-juin
de la troisième année l'adulte, qui sort de la galle par un trou
rond percé sur le côté du renflement.
Larve
(grossie
3
fois).
Insecte
parfait
(grossi
3
fois).
PETITE SAPERDE DU
PEUPLIER
(Compsidia populnea).
Les dégâts peuvent être très importants dans les pépinières et
les jeunes plantations, notamment quand la flèche est attaquée,
car celle-ci casse sous l'influence du vent. Les renflements peu-
vent être si rapprochés que les galeries larvaires se touchent;
malgré la cicatrisation l'arbre reste noueux et les plants atta-
qués ne donnent jamais de beaux sujets.
74
LES INSECTES NUISIBLES AUX PEUPLIERS
La petite Saperde est très abondante surtout sur les Trembles,
mais elle n'est pas rare sur les Peupliers cultivés.
La grande Saperde du Peuplier.
La grande Saperde, appelée
vulgairement « mulot »
(Saperda [Anaerea] carcharias
L.), est un
gros longicorne de
20
à 30 mm, couvert d'un duvet roussâtre
Larve
(grossie
2
fois).
46
Insecte
parfait
(grossi
2
fois).
GRANDE SAPERDE DU
PEUPLIER
(Saperda carcharias).
ou grisâtre, avec les antennes annelées, plus longues que le
corps chez le mâle, les élytres larges et profondément ponctués.
L'insecte parfait apparaît en juillet-août et se trouve jusqu'en
octobre; il se nourrit du parenchyme des feuilles et de l'écorce
tendre des jeunes tiges.
La ponte a lieu dans la partie basse du tronc à moins de
2
m de hauteur. S'il s'agit d'un arbre âgé, la femelle dépose ses
LES INSECTES NUISIBLES AUX PEUPLIERS
75
oeufs un à un dans les fissures de l'écorce; s'il s'agit d'un arbre
jeune, la femelle choisit un point où l'écorce est lisse, l'incise
avec ses mandibules et dépose son oeuf dans la blessure formée.
L'éclosion n'a lieu qu'au cours de l'été suivant : la petite larve
creuse une galerie sous l'écorce, puis s'enfonce horizontalement
dans les couches externes du bois et se dirige vers le coeur
qu'elle atteint pour l'hiver; elle descend ainsi jusqu'à la racine,
puis elle remonte en creusant la partie centrale de l'arbre. C'est
sur le trajet de cette galerie ascendante que la larve prépare
le trou de sortie de l'adulte; elle s'y nymphose en juin de la
seconde année, et donne l'adulte quinze jours plus tard. La
grande Saperde met donc au minimum trois ans pour se déve-
lopper.
C'est un des grands fléaux du peuplier, car la larve travaille
dans les couches profondes du bois et introduit de l'air et de
l'humidité dans le tronc des vieux arbres qui deviennent une
proie facile pour les organismes pathogènes. De plus le bois
de peuplier creusé de galeries perd toute valeur comme bois
d'oeuvre.
Le Cryptorrhynque.
— Le
Cryptorrhynchus lapathi
L. est un
charançon très bien caractérisé. Son rostre arqué, son corps
ramassé, long de 6 à 9 mm, et ses élytres brun noir avec le
tiers postérieur recouvert d'écailles blanches plus ou moins
rosées au moment de l'éclosion, permettent de le reconnaître
facilement.
L'insecte parfait apparaît en août; il ronge l'écorce des jeunes
rameaux, hiverne sous la mousse, dans les fentes des écorces,
les galeries larvaires ou sous des abris divers et en sort seule-
ment en mai pour s'accoupler. La femelle dépose ses oeufs, sou-
vent plusieurs ensemble, dans un petit trou creusé avec son
rostre sur les jeunes arbres, soit au voisinage des bourgeons, soit
dans les plaies d'élagage, les gerçures ou les blessures de l'écorce
et de préférence dans la partie basse de l'arbre. La larve n'éclot
qu'au printemps suivant, travaille dans le cambium puis pénètre
profondément dans le bois en creusant une galerie; extérieure-
ment le dégât se manifeste par le brunissement de l'écorce, par
des déformations superficielles ayant l'aspect de chancres, en
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