Mise au point
Traitement inotrope
chez le patient
de réanimation
Xavier Monnet, Christian Richard, Jean-Louis Teboul
Service de réanimation médicale, CHU de Bicêtre, Université Paris 11, 78, rue du Général
Leclerc, 94 270 Le Kremlin-Bicêtre
Le traitement inotrope est le plus souvent justifié par la survenue d’un état de choc cardiogé-
nique afin de restaurer transitoirement la fonction contractile du ventricule gauche lors d’une
insuffisance cardiaque aiguë. Le traitement inotrope peut aussi être envisagé pour atteindre des
valeurs « supranormales » du transport en oxygène, dans le but de prévenir la survenue d’une
hypoxie tissulaire. Une telle attitude thérapeutique ne se justifie que dans la période péri-
opératoire pour des patients chirurgicaux à risque. Au niveau du cardiomyocyte, les agents
inotropes agissent soit par l’augmentation de la concentration intracytosolique en calcium, soit
par l’augmentation de la sensibilité des myofibrilles au calcium. La dobutamine, la dopamine
et l’adrénaline sont les inotropes les plus puissants. En plus de leur pouvoir inotrope positif, ces
substances vasoactives sont susceptibles de modifier la redistribution locorégionale du débit
sanguin lors des états de choc. L’importance de ce phénomène reste cependant mal définie, ce
qui souligne l’intérêt d’évaluer – au mieux au moyen d’outils de monitorage – l’effet de ces
substances sur l’hémodynamique systémique et l’oxygénation tissulaire.
Mots clés :traitement inotrope, réanimation, insuffisance cardiaque aiguë
Mécanismes d’action
pharmacologique
des inotropes
L’effet pharmacologique des agents
inotropes résulte soit de la stimulation
des récepteurs adrénergiques, soit de
l’inhibition de la phosphodiestérase
(PDE), soit de la sensibilisation des
myofibrilles au Ca
++
(figure 1)
.
Fixation sur les récepteurs
adrénergiques
des cardiomyocytes
C’est le mécanisme d’action des
agents inotropes agonistes adrénergi-
ques naturels (adrénaline, noradréna-
line et dopamine) et synthétiques
(dobutamine et dopexamine). Leur
fixation sur les récepteurs adrénergi-
ques des cardiomyocytes induit une
augmentation massive de la concen-
tration intracytosolique en Ca
++
.Le
Ca
++
se fixe sur le site spécifique de la
troponine C, induisant un change-
ment de conformation qui conduit à la
fixation de la tête de myosine sur le
filament d’actine. L’hydrolyse simul-
tanée d’une molécule d’ATP permet la
flexion du cou du filament de myosine
et, finalement, le raccourcissement de
l’appareil contractile. L’effet inotrope
des catécholamines résulte de leur
fixation sur les récepteurs adrénergi-
ques sarcolemmaux b
1
et a
1
.
Récepteurs b
1
adrénergiques
La fixation d’un agoniste sur les
récepteurs b
1
stimule la protéine Gs
qui active l’adényl cyclase. L’AMPc,
provenant de l’hydrolyse d’une molé-
cule d’ATP, active la protéine kinase
A. Celle-ci phosphoryle plusieurs
structures cellulaires : 1) les récep-
teurs à la ryanodine du réticulum sar-
coplasmique conduisant à l’extrusion
massive du Ca
++
du réticulum vers le
m
t
Tirés à part : J.-L. Teboul
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cytoplasme (figure 1) ; 2) les récepteurs sarcolemmaux
calciques de type L, entraînant l’intrusion de Ca
++
dans le
cytoplasme, ce qui participe de façon mineure à l’aug-
mentation de sa concentration cytoplasmique.
L’augmentation de la concentration de Ca
++
cytoplas-
mique active la calmoduline, qui permet la phosphoryla-
tion 1) de la chaîne légère de la myosine permettant une
augmentation de la sensibilité des myofilaments au Ca
++
,
2) du phospholamban et de l’échangeur Na
+
/Ca
++
. L’acti-
vation du phospholamban lève l’inhibition qu’il exerce
sur la SarcoEndoplasmic Réticulum Calcium ATPase
pump (SERCA). Celle-ci permet la recapture du Ca
++
par le
réticulum et participe donc à l’activité lusitrope.
Récepteurs
1
adrénergiques
Les récepteurs aadrénergiques sont surtout représen-
tés dans la paroi des vaisseaux. Au niveau cardiaque, de
moindre importance que celle des récepteurs b
1
, la stimu-
lation des récepteurs a
1
entraîne un effet inotrope. Quand
un agoniste fixe un récepteur a
1
, la protéine Gs stimule la
phospholipase C. Elle sépare le phosphatidyl inositol en
inositol triphosphate (IP
3
) et en 1,2-diacylglycerol. L’IP
3
stimule la sortie de Ca
++
du réticulum sarcoplasmique.
Inhibition de la phosphodiestérase (PDE)
Les inhibiteurs de la PDE (amrinone, milrinone et
enoximone) sont des agents inotropes dont l’effet provient,
comme pour les agonistes des récepteurs b
1
, d’une aug-
mentation de la concentration d’AMPc induisant une aug-
mentation massive de la concentration intracytosolique
en Ca
++
. Ces substances synthétiques inhibent l’isoforme
III de la PDE qui catalyse l’AMPc (figure 1). Puisque
l’AMPc participe à la recapture du Ca
++
par le réticulum
sarcoplasmique, les inhibiteurs de la PDE ont un effet
lusitrope positif. Enfin, l’augmentation du taux intracellu-
laire d’AMPc induit aussi une relaxation musculaire lisse
et une intense vasodilatation artérioveineuse.
Affinité du calcium pour les myofibrilles
L’augmentation de la sensibilité des myofibrilles au
Ca
++
a pour résultat une amélioration du couplage
excitation/contraction et un effet inotrope qui ne passe pas
par l’augmentation de la concentration intracytosolique
en Ca
++
(figure 1) dont le risque proarythmogène est le
corollaire. Plusieurs sensibilisateurs au Ca
++
ont été déve-
loppés, exerçant leur effet en se fixant sur des sites de la
troponine C propres à chacun. Néanmoins, seul le levosi-
bβ
sarcolemme
Agonistes βInhibiteurs de la PDE
Sensibilisateurs au Ca++
AMPc
Cytosol
AMP
AMP TnC
+
+
Ca++
PKa
Réticulum
sarcoplasmique
Ca++
Figure 1. Mécanismes d’action des différents inotropes à l’étage cellulaire. La fixation d’un agoniste sur les récepteurs b
adrénergiques entraîne la formation d’AMPc par l’adényl cyclase. L’AMPc active la protéine kinase A qui entraîne l’extrusion massive du
Ca
++
du réticulum sarcoplasmique vers le cytosol par les canaux à la ryanodine phosphorylés. Le Ca
++
se fixe sur la troponine C ce qui
entraîne in fine le raccourcissement de l’appareil contractile. Les inhibiteurs de la phosphodiestérase augmentent également le taux
d’AMPc intracellulaire en inhibant sa dégradation. Les sensibilisateurs au Ca
++
exercent leur effet inotrope en améliorant le couplage
excitation-contraction par une sensibilisation des myofibrilles au Ca
++
.
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mendan est actuellement utilisé chez l’homme. Il sensibi-
lise l’appareil contractile au Ca
++
en stabilisant le com-
plexe troponineC–Ca
++
.
Rationnel
pour l’utilisation des inotropes
chez le patient de réanimation
Utilisation des inotropes pour améliorer
la contractilité myocardique
Dans les situations où la fonction contractile du myo-
carde est diminuée, l’utilisation d’agents inotropes est
évidemment logique au plan pharmacologique. Cepen-
dant, son effet bénéfique sur la mortalité ou la morbidité
n’a jamais été démontré. Au demeurant, au cours de
l’insuffisance cardiaque chronique, l’administration au
long cours de la plupart des inotropes positifs augmente la
mortalité, et c’est au contraire le bénéfice d’agents inotro-
pes négatifs, les b-bloquants, qui est désormais bien établi
[1]. Ainsi, le recours aux inotropes est-il envisagé de façon
transitoire, lors d’épisodes aigus d’insuffisance cardiaque
échappant au traitement standard ou lorsqu’il existe un
choc cardiogénique.
Utilisation des inotropes
pour atteindre des niveaux supranormaux
de transport en oxygène (O
2
)
Ce concept de « maximalisation » du transport en O
2
repose sur le principe d’augmenter le débit cardiaque et le
transport en O
2
jusqu’à des niveaux supranormaux, afin
d’éviter l’apparition d’une dette en O
2
et d’une hypoxie
tissulaire [2]. Plusieurs études ont montré que, chez des
patients chirurgicaux à risque, l’utilisation dans la période
péri-opératoire de valeurs supranormales du transport en
O
2
comme objectifs thérapeutiques, améliorait la survie
[3-5]. Soulignons que des substances inotropes telles la
dobutamine, la dopamine, la dopexamine et l’adrénaline
avaient été utilisées dans ce but alors même que la
contractilité myocardique pouvait être normale [3-5]. En
revanche, chez les patients de réanimation souffrant d’une
défaillance circulatoire déjà installée, les essais randomi-
sés ont démontré que cette stratégie thérapeutique
n’apportait aucun bénéfice [6] ou entraînait même une
surmortalité [7], de sorte que cette attitude ne peut être
recommandée chez ce type de patients [8].
Effets hémodynamiques
des agents inotropes
Effets sur le débit cardiaque
Dobutamine et dopamine
La dobutamine est un mélange racémique d’un énan-
tiomère (+) aux effets agonistes b
1
et b
2
et d’un énantio-
mère (–) aux effets agonistes a
1
. La stimulation a
1
et b
1
a
pour résultat un effet chronotrope et inotrope positifs. La
dobutamine n’exerce pas d’effet vasculaire intrinsèque
parce que la vasoconstriction due à la stimulation a
1
est
contrebalancée par l’effet vasodilatateur b
2
-induit. À de
faibles débits d’administration (< 5 lg.kg
–1
.min
–1
), la
dopamine active les récepteurs D
1
des vaisseaux rénaux,
mésentériques, cérébraux et coronaires, et induit une
vasodilatation qui n’affecte pas la pression artérielle sys-
témique. À un débit supérieur (5-10 lg.kg
-1
.min
-1
), elle
stimule préférentiellement les récepteurs b
1
et augmente
l’inotropisme, la fréquence cardiaque et la pression arté-
rielle systolique. À des débits d’administration élevés
(10-20 lg.kg
-1
.min
-1
), la dopamine active préférentielle-
ment les récepteurs a
1
vasculaires et induit une vasocons-
triction artérielle et veineuse. Enfin, à des débits de perfu-
sion supérieurs, ses effets sont identiques à ceux de la
noradrénaline.
La dobutamine et la dopamine ont été comparées dans
le traitement de l’insuffisance cardiaque aiguë [9]. Alors
que la dobutamine augmentait le débit cardiaque et le
volume d’éjection systolique entre 2,5 et 10 lg.kg
–1
.mn
–1
,
la dopamine ne les augmentait que jusqu’à
4lg.kg
–1
.mn
–1
, probablement parce qu’une augmenta-
tion des résistances vasculaires survenait à des doses
supérieures. La dopamine, à l’inverse de la dobutamine,
augmente la précharge ventriculaire gauche [9]. Du fait de
son effet inotrope couplé à un effet de diminution de
précharge ventriculaire gauche, la dobutamine est la subs-
tance recommandée pour le traitement de l’insuffisance
cardiaque aiguë avec augmentation des pressions de rem-
plissage et avec pression artérielle normale ou peu dimi-
nuée [10]. En revanche, dès lors que la pression artérielle
est abaissée, l’adjonction de dopamine à la dobutamine
est recommandée [11].
Lors du choc septique avec forte réduction de la
contractilité myocardique, la dobutamine est l’agent ino-
trope de choix [12] car elle exerce un effet inotrope positif
supérieur à celui de la dopamine [13]. Cependant, la
dobutamine peut induire une diminution des résistances
vasculaires [14] qui justifie l’adjonction d’un vasopresseur
dans cette situation, où le tonus vasculaire est déjà pro-
fondément réduit. Concernant la dopamine, plusieurs étu-
des dans le choc septique, ont montré qu’elle pouvait
augmenter la pression artérielle par un effet à la fois sur le
débit cardiaque et sur le tonus artériel [15, 16] alors que
d’autres montraient, soit une augmentation prédominante
du débit cardiaque [17], soit un effet vasopresseur isolé
[18]. Ces discordances apparentes soulignent la grande
hétérogénéité de la réponse aux catécholamines lors du
choc septique, hétérogénéité justifiant une évaluation
individualisée de leurs effets avant et surtout pendant
l’emploi de ces substances chez ce type de patients.
Cette hétérogénéité pourrait résulter de la diminution
de la réponse myocardique à la stimulation adrénergique
lors du sepsis. Cette altération est due à une diminution
des taux intracellulaires d’AMPc [19], probablement par
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inhibition de l’adényl cyclase par la voie de la protéine Gi
[20]. Cette inhibition serait le fait, soit des substances
inflammatoires (TNF
a
,IL
1
), soit des catécholamines pré-
sentes en forte concentration lors du sepsis. Ce phéno-
mène vient s’ajouter au classique mécanisme de tachy-
phylaxie en rapport avec la diminution de la sensibilité et
du nombre des récepteurs b(down regulation) survenant
au bout de quelques heures à quelques jours d’adminis-
tration d’agents bagonistes [21].
Adrénaline et noradrénaline
La noradrénaline est un agoniste puissant des récep-
teurs aet b
1
n’ayant qu’une faible activité sur les récep-
teurs b
2
. Par son effet aadrénergique, elle induit une
vasoconstriction artérielle et veineuse intense et tend à
augmenter les pressions artérielles systolique et diastoli-
que, la postcharge ventriculaire gauche, le retour veineux
et la précharge cardiaque. Par son effet b
1
adrénergique,
elle tend à augmenter le volume d’éjection systolique, sauf
si l’élévation de postcharge ventriculaire gauche
l’emporte. L’effet chronotrope positif est contrebalancé
par la stimulation du baroréflexe résultant de la vasocons-
triction. Ainsi, le débit cardiaque est généralement assez
peu modifié par son administration.
Grâce à son effet astimulant, l’adrénaline entraîne une
vasoconstriction artérielle et veineuse. Si elle augmente la
pression artérielle systolique, son effet sur la pression
artérielle diastolique est partiellement contrebalancé par
la vasodilatation b
2
-induite. Par la stimulation cardiaque
b
1
, l’adrénaline augmente la fréquence cardiaque et l’ino-
tropisme. Ces effets, couplés à la veinoconstriction
a-induite qui accroît le retour veineux systémique, ren-
dent compte de la forte élévation du débit cardiaque
produite par l’adrénaline.
Dans les états septiques, la noradrénaline et l’adréna-
line sont surtout utilisées pour leurs effets avasoconstric-
teurs. Les effets de la noradrénaline sur le débit cardiaque
sont variables dans ces circonstances [15, 22], justifiant un
monitorage hémodynamique. L’adrénaline exerce un effet
inotrope positif lors du choc septique [23, 24] mais altère
de façon importante la perfusion splanchnique [25, 26] et
induit une acidose lactique [27], même si celle-ci ne
reflète pas seulement l’apparition d’un métabolisme ana-
érobie [28]. À cet égard, l’association de dobutamine et de
noradrénaline est supérieure à l’adrénaline en termes de
perfusion splanchnique au cours du choc septique, en
dépit d’effets similaires sur le débit cardiaque et la pression
systémique [25, 27, 29].
Dopexamine
La dopexamine active les récepteurs b
2
et dopaminer-
giques, sans effet aet avec un effet b
1
minime. Elle exerce
aussi son effet par une inhibition de la recapture de la
noradrénaline. Elle provoque une vasodilatation et un
effet inotrope positif. La combinaison de ces effets la rend
intéressante dans le traitement des exacerbations d’insuf-
fisance cardiaque chronique car elle augmente le débit
cardiaque sans altérer la pression artérielle et n’augmente
la fréquence cardiaque qu’à des doses élevées [30]. En
revanche, au cours du sepsis, son emploi n’est pas recom-
mandé en raison du risque d’aggravation de l’hypotension
artérielle.
Inhibiteurs de la phosphodiesterase (PDE)
Les inhibiteurs de la PDE ont un effet inotrope identi-
que à celui de la dobutamine et n’augmentent la fré-
quence cardiaque qu’à partir d’une forte posologie. Chez
les patients en insuffisance cardiaque, les inhibiteurs de la
PDE augmentent le débit cardiaque et le volume d’éjec-
tion systolique et diminuent modérément la pression arté-
rielle, confirmant leurs propriétés inotropes et vasodilata-
trices [31]. Parce qu’elles augmentent le taux
intracellulaire d’AMPc, ces substances exercent avec les
b-bloquants un effet synergique démontré dans l’insuffi-
sance cardiaque [32]. Cependant, les effets délétères de
leur administration au long cours et les résultats décevants
de l’étude Optime-CHF dans l’exacerbation des insuffi-
sances cardiaques chroniques [33] limitent leur indication
à l’attente de greffe cardiaque et aux exacerbations
d’insuffisance cardiaque chroniques échappant à un trai-
tement déjà maximal. Ces substances ne sont pas recom-
mandées dans le traitement du choc septique.
Sensibilisateurs au calcium
Le lévosimendan est l’unique représentant de cette
classe pharmacologique utilisé chez l’homme. Il exerce
ses effets inotropes positifs par le biais d’une sensibilisa-
tion des myofibrilles au Ca
++
, mais il entraîne aussi une
vasodilatation par un effet agoniste des canaux potassi-
ques ATP-dépendants. Il a été montré un bénéfice du
lévosimendan sur l’état hémodynamique et le taux de
survie, en comparaison avec la dobutamine, lorsque les
substances étaient administrées pendant une courte
période dans l’insuffisance cardiaque échappant au traite-
ment standard [34]. Dans le choc septique, une étude
randomisée a démontré le bénéfice sur la fonction ventri-
culaire gauche et le débit cardiaque à administrer le
lévosimendan lorsqu’il existe une dysfonction contractile
ne s’améliorant pas sous dobutamine [35]. Il est raisonna-
ble de supposer que l’effet pharmacologique du lévosi-
mendan est conservé dans le sepsis car ne passant pas par
la voie des b-récepteurs. Cependant, ses effets vasodilata-
teurs potentiels justifient son association à un vasopres-
seur dans ce contexte [35].
Effets sur le contenu artériel en O
2
Le but d’un traitement inotrope est in fine d’augmenter
le transport en O
2
vers les tissus. Or l’administration
d’agents inotropes a sur le contenu artériel en O
2
des effets
opposés. D’une part, l’amélioration de la contractilité
myocardique peut réduire la pression de filtration pulmo-
naire et le shunt intrapulmonaire. D’autre part, l’augmen-
mt, vol. 11, n° 4, juillet-août 2005 261
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tation du débit cardiaque peut entraîner une augmentation
de l’admission veineuse dont l’effet négatif sur l’oxygéna-
tion artérielle est cependant contrebalancé par l’augmen-
tation de la pression partielle veineuse en O
2
débit-
dépendante. Ainsi, malgré l’augmentation de l’admission
veineuse qu’elles induisent, la dopamine [36] comme la
dobutamine [37] n’entraînent finalement pas d’hypoxé-
mie. En conséquence, toute augmentation du débit cardia-
que sous inotrope se traduit par augmentation du transport
en O
2
.
Effets sur l’utilisation tissulaire en O
2
Pour réduire la dette en O
2
des tissus, un traitement
inotrope doit non seulement améliorer le transport artériel
en O
2
vers les tissus mais également assurer l’apport en O
2
vers les tissus les plus hypoxiques à travers la microcircu-
lation. Les effets vasomoteurs éventuels des inotropes sur
la microcirculation influencent cette propriété.
Choc cardiogénique
Dans cette circonstance, le débit cardiaque est redis-
tribué vers les organes privilégiés à forte extraction en O
2
.
Cependant, l’influence des effets vasoactifs des inotropes
sur cette redistribution reste spéculative, soulignant l’uti-
lité d’un monitorage de la perfusion et/ou de la fonction de
ces organes.
Choc septique
Effets sur la circulation splanchnique : malgré la dis-
cordance des résultats concernant les effets des agents
adrénergiques sur la circulation splanchnique lors du sep-
sis, on peut tirer quelques conclusions assez consensuel-
les. La dobutamine [27, 29, 38, 39] comme la dopexa-
mine [30] exercent probablement un effet bénéfique sur la
circulation splanchnique du fait de leurs propriétés b
2
vasodilatatrices [40]. Malgré l’effet vasodilatateur de la
stimulation des récepteurs dopaminergiques, la dopamine
a un effet plus délétère sur la perfusion muqueuse diges-
tive que la dobutamine [39] ou la noradrénaline [16].
Concernant l’adrénaline, plusieurs études ont montré un
débit splanchnique plus bas avec l’adrénaline qu’avec la
noradrénaline administrée seule [26] ou en combinaison
avec la dobutamine [25, 27, 29] pour des effets pourtant
similaires sur le débit systémique. Enfin, le lévosimendan
améliore aussi la perfusion muqueuse gastrique [35]. Au
vu de ces résultats, il semble raisonnable de préférer une
association de noradrénaline et de dobutamine à l’adré-
naline pour traiter la dysfonction myocardique lors du
sepsis.
Effets sur la circulation rénale : ces effets dépendent
beaucoup de l’effet vasopresseur systémique des inotro-
pes. Ainsi la noradrénaline, malgré un effet vasoconstric-
teur de l’artère glomérulaire afférente qui serait plutôt
délétère, augmente in fine le débit sanguin rénal et le débit
urinaire au cours du choc septique [18, 41], probablement
du fait de son action bénéfique sur la pression artérielle
moyenne, véritable pression motrice de perfusion rénale
[41]. La dopamine, à faible posologie, stimule théorique-
ment les récepteurs dopaminergiques rénaux. Cet effet
potentiel a naguère rendu populaire l’administration pres-
que systématique de faibles doses de dopamine chez les
patients de réanimation. Depuis la publication d’une
étude randomisée démontrant l’absence d’amélioration
du pronostic vital, y compris des patients en choc septique
[42], l’administration de dopamine dans ce seul but thé-
rapeutique n’est plus recommandée.
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