2.1. L'exceptionnalisme américain5
L´exceptionnalisme américain fait référence à la conviction généralisée dans l'unicité,
l'immuabilité et la supériorité des principes fondateurs libéraux du pays, accompagnée par la
certitude que les États-Unis ont eu un destin spécial par rapport aux autres nations. C´est une
communauté consacrée aux principes des Lumières de la règle de la loi, la propriété privée,
le gouvernement représentatif, la liberté d´expression et de religion, et la liberté
commerciale. Cette singularité présente les États-Unis comme un modèle que les autres
nations doivent suivre. Ce sentiment de mission nationale a influencé les objectifs et le style
de la politique étrangère des USA6.
On compte deux façons d'orienter, de diriger, l´exceptionnalisme : d'une part, par le
parrainage d'une mission morale permettant de récréer la société internationale à l'image
propre des États-Unis, étant donné que la nation "doit transformer le monde anarchique et
conflictuel" en une communauté gérée par la loi qui a pour communs objectifs la sécurité, la
prospérité et le bien-être7. D'autre part, il convient de noter que l´exceptionnalisme suscite
une détermination de contrepoids pour préserver les valeurs et les institutions uniques des
États-Unis face à la corruption ou à la dilution qu'elles peuvent subir par le contact étranger.
C'est pourquoi, il est nécessaire de défendre les intérêts nationaux, la souveraineté et la
liberté d´action contre l´imposition des règles internationales et les institutions
supranationales8. Les moments-clés à faveur du soutien des organisations internationales se
sont manifestés après les deux Grandes Guerres lorsque les décideurs américains se sont
tournés vers les institutions internationales en vue de faire régner l´ordre mondial9. D'un autre
côté, le multilatéralisme américain pourrait être nuancé et limité par les institutions nationales
et par leur pouvoir écrasant.
5 Pour en savoir plus sur l´exceptionnalisme américain, cf. l'article de DEUDNEY Daniel & MEISER Jeffrey intitulé "American
Exceptionalism" présent dans COX Michael & STOKES Doug, US foreign policy, New York : Oxford University Press, 2nd ed, 2012, xvii,
p. 22-35.
6 DALLEK Robert, The American Style of Foreign Policy: Cultural Politics and Foreign Affairs, New-York : Knopf, 1983, p. xiv et
THORNE Christopher, “American Political Culture and the End of the Cold War”, dans Journal of American Studies, vol.26, Décembre
1992, p. 314-315 mentionné dans PATRICK Stewart & FORMAN Shepard, op. cit, p. 7.
7 RUGGIE John Gerard, Winning the Peace : America and world order in the new era, New-York : Columbia University Press, 1996, p.25
mentionné dans Ibid.
8 HATHAWAY James, “America, Defender of Democratic Legitimacy”, dans European Journal of International Law, vol. 11, 2000, p. 121-
123, mentionné dans Ibid.
9 IKENBERRY G. John, After Victory: Institutions, Strategic Restraint, and the Rebuilding of Order after Major Wars, Princeton : Princeton
University Press, 2000 mentionné dans Ibid., p. 8.