Perspectives de l`économie mondiale Avril 2017 Avant-propos

Perspectives
de l’économie mondiale
Avril 2017
Un nouvel élan?
Études économiques et financières
FONDS MONÉTAIRE INTERNATIONAL
Distribution préliminaire
Avant-propos, résumé analytique et chapitre 1
Fonds monétaire international | Avril 2017 ii
D es nouvelles économiques systématique-
ment bonnes depuis l’été 2016 commencent
à signaler une amélioration des perspectives
mondiales. L’expansion économique que
nous attendons depuis quelque temps semble se maté-
rialiser : le rapport sur les Perspectives de l’économie mon-
diale (PEM) relève la projection de la croissance mon-
diale pour 2017 à 3,5 %, contre 3,4 % récemment.
Notre prévision pour la croissance mondiale en 2018
reste la même, à 3,6 %. L’accélération de la croissance
attendue en 2017 et en 2018 est généralisée, bien que la
croissance reste timide dans beaucoup de pays avancés et
que les pays exportateurs de produits de base continuent
d’avoir des dicultés.
Cependant, la révision à la hausse de notre prévision
pour 2017 est modeste, et la croissance potentielle à
plus long terme reste modérée dans le monde entier par
rapport aux dernières décennies, surtout dans les pays
avancés. Par ailleurs, si la croissance pourrait être supé-
rieure aux attentes à court terme, des risques considé-
rables continuent d’assombrir les perspectives à moyen
terme et pourraient en fait avoir augmenté depuis notre
dernière prévision. La reprise qui prend forme reste vul-
nérable à une série de risques, qui sont décrits dans le
chapitre 1 du présent rapport.
L’adoption de mesures protectionnistes, qui entraîne-
rait une guerre commerciale, constitue une menace im-
portante. Principalement dans les pays avancés, plusieurs
facteurs — une croissance économique plus faible de-
puis la reprise de 2010–11 qui a suivi la crise nancière
mondiale, une croissance encore plus faible des revenus
médians et des dérèglements structurels des marchés du
travail — ont suscité un appui politique à des stratégies
à somme nulle qui pourraient mettre à mal les relations
commerciales internationales, de même que la coopéra-
tion multilatérale de manière plus générale.
Une approche de la politique économique interna-
tionale qui repose sur la collaboration entre les pays a
pris racine après la Seconde Guerre mondiale et s’est
développée sur le plan de sa portée et de son étendue
géographique. Cette évolution n’a pas toujours été fa-
cile, comme en témoigne une série de crises nancières
et monétaires au cours des dernières décennies, mais
l’économie mondiale a bien résisté jusqu’à présent.
Cette résilience s’est traduite par une accélération no-
table de la croissance dans un certain nombre de pays
émergents et de pays en développement, dont certains
sont devenus des pays à revenu élevé. Le chapitre 2
du présent rapport examine diérents aspects de cette
hausse de leur revenu.
La croissance s’est poursuivie aussi dans les pays plus
riches, mais avec des gains de revenu moins impression-
nants au cours des dix dernières années que pendant les
décennies précédentes, et certainement moins impres-
sionnants que ceux des pays émergents et des pays en
développement. Il n’est donc pas surprenant que les opi-
nions concernant les eets du commerce international
sur l’emploi et les salaires, mesurées par des enquêtes re-
connues, sont généralement plus positives dans les pays
plus pauvres.
Ces observations sont peut-être moins liées aux
écarts globaux de croissance entre les pays riches et les
pays pauvres qu’au fait que la croissance dans les pays
riches n’a pas vraiment proté aux groupes de la po-
pulation se situant aux échelons inférieurs de la distri-
bution des revenus au cours des dernières décennies.
Les inégalités restent considérables dans les pays plus
pauvres, mais comme les possibilités de rattrapage et
d’accélération de la croissance y sont plus élevées si les
politiques appropriées sont menées, ces pays ont pu re-
hausser sensiblement le revenu de leurs citoyens, même
les plus pauvres. Le commerce international a large-
ment contribué à cette réussite.
L’évolution mondiale des inégalités est liée au com-
merce mais tient beaucoup, et plus dans bon nombre
de pays, aux changements technologiques, pour au-
tant que l’on puisse séparer conceptuellement le progrès
technologique (qui facilite le commerce) du commerce
lui-même (qui propage le savoir-faire technologique).
Le chapitre 3 du présent rapport explore comment les
forces de la technologie et du commerce ont eu ten-
dance à réduire la part du travail dans le revenu national
de beaucoup de pays. Une baisse de la part du travail
dans le PIB pourrait, en théorie, être une réaction ano-
dine à une tendance économique qui relève les revenus
réels des travailleurs, par exemple une croissance rapide
AVANT-PROPOS
PERSPECTIVES DE L’ÉCONOMIE MONDIALE : UN NOUVEL ÉLAN?
de la productivité qui prote au capital encore plus
qu’au travail. Cependant, lorsqu’une baisse de la part
du travail coïncide avec une stagnation des revenus mé-
dians et une détérioration de la distribution des revenus,
comme ce fut le cas dans un certain nombre de pays
avancés, il peut s’ensuivre des pressions politiques pous-
sant à démanteler l’intégration économique avec les par-
tenaires commerciaux.
Céder à ces pressions reviendrait à s’automutiler, car
il en résulterait une hausse des prix pour les consom-
mateurs et les entreprises, une baisse de la productivité
et donc une diminution du revenu réel global pour les
ménages. Les pays devraient plutôt mettre en œuvre
une politique commerciale qui cadre avec une produc-
tivité maximale, en la complétant par d’autres mesures
qui distribuent mieux les gains du commerce extérieur
à l’intérieur du pays, qui améliorent les compétences
et l’adaptabilité de la population active, et qui adoucis-
sent l’ajustement pour ceux qui sourent de la néces-
sité d’une réaectation économique. Malheureusement,
ils trouvent souvent qu’il est plus dicile d’apporter ces
améliorations internes que de restreindre le commerce.
Mais ils doivent se rendre compte que les gains que
cette approche pourrait signier pour certains groupes
à l’intérieur du pays seront réalisés aux dépens d’autres
groupes au sein du pays, en plus des partenaires com-
merciaux étrangers. Même les gains sectoriels qui ré-
sultent d’une réduction de l’intégration économique
internationale disparaissent, et les pertes s’aggravent,
lorsque les partenaires commerciaux usent de représailles
en nature.
Les dirigeants doivent plutôt travailler avec ardeur
pour investir dans leur économie, en particulier dans la
population, pour la rendre plus résiliente à une série de
changements structurels potentiels et actuels, notam-
ment les modalités uctuantes de la mondialisation.
Parmi les réformes utiles gurent les politiques actives
du marché du travail, une plus grande progressivité de
l’impôt, des investissements plus ecaces dans l’éduca-
tion, ainsi que des adaptations des marchés du logement
et du crédit qui facilitent la mobilité des travailleurs.
Bon nombre de ces mesures non seulement adoucis-
sent l’ajustement économique, mais rehaussent aussi la
production potentielle à plus long terme. Elles sont des
composantes essentielles de l’ensemble des mesures mo-
nétaires, budgétaires, structurelles et nancières qui ren-
forceront et garantiront la reprise à terme.
L’économie mondiale semble monter en puissance :
nous pourrions nous trouver à un tournant. Mais alors
même que la situation s’améliore, le système des rela-
tions économiques internationales qui a été établi après
la Seconde Guerre mondiale est mis fortement sous
pression en dépit des avantages globaux qu’il a apportés,
et précisément parce que la croissance et les ajustements
économiques qui en ont résulté ont trop souvent si-
gnié des gains et des coûts inégaux au sein des pays. Il
convient de s’attaquer de front à ces disparités an d’as-
surer la stabilité d’un système commercial ouvert qui re-
pose sur la collaboration et prote à tous.
Maurice Obstfeld
Conseiller économique
iii Fonds monétaire international | Avril 2017
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
Fonds monétaire international | Avril 2017 iv
Les marchés financiers sont porteurs et la reprise cyclique
longtemps attendue dans l’industrie manufacturière et
le commerce est en cours, si bien que la croissance mon-
diale devrait passer de 3,1 % en 2016 à 3,5 % en 2017
et à 3,6 % en 2018, soit légèrement au-dessus des pré-
visions de l’édition d’octobre 2016 des Perspectives de
l’économie mondiale (PEM). Mais des obstacles struc-
turels restrictifs continuent de freiner la reprise, et le solde
des aléas qui influent sur la croissance reste orienté à la
baisse, surtout à moyen terme. Étant donné la persistance
des problèmes structurels, tels qu’une croissance faible de
la productivité et des inégalités de revenu prononcées, la
pression monte dans les pays avancés pour que soient me-
nées des politiques de repli sur soi. Cette pression menace
l’intégration économique mondiale et l’ordre économique
mondial reposant sur la coopération qui ont été bien utiles
à l’économie mondiale, surtout aux pays émergents et aux
pays en développement. Dans ce contexte, les politiques
économiques ont un rôle important à jouer pour éviter les
risques de dégradation et assurer la reprise. Sur le front in-
térieur, il s’agit de soutenir la demande et de réparer les bi-
lans là où c’est nécessaire et possible; d’accroître la produc-
tivité, l’offre de main-d’œuvre et l’investissement grâce à
des réformes structurelles et à des mesures budgétaires pro-
pices à l’offre; de moderniser les infrastructures publiques
et d’aider les personnes qui ont été déplacées par des trans-
formations structurelles telles que les progrès technolo-
giques et la mondialisation. Par ailleurs, dans beaucoup
de pays, il est nécessaire de mettre en place des stratégies
crédibles pour placer la dette publique sur une trajectoire
viable. Pour de nombreux pays émergents et pays en déve-
loppement, il reste essentiel de s’ajuster à la baisse des re-
cettes tirées des produits de base et de s’attaquer aux fac-
teurs de vulnérabilité financière. Il est nécessaire aussi
de relancer l’action multilatérale pour régler des pro-
blèmes communs dans une économie mondiale intégrée.
L’économie mondiale est montée en puissance au
quatrième trimestre de2016, et cette dynamique devrait
persister. Selon les estimations, la croissance mondiale
devrait passer de 3,1% en2016 à 3,5% en2017 et à
3,6% en2018.
L’activité devrait s’accélérer sensiblement dans les pays
émergents et les pays en développement, parce que la
situation dans les pays exportateurs de produits de base
qui font face à des dicultés macroéconomiques de-
vrait s’améliorer progressivement, grâce au redressement
partiel des prix des produits de base, tandis que la crois-
sance devrait rester vigoureuse en Chine et dans beau-
coup d’autres pays importateurs de produits de base.
Dans les pays avancés, le redressement s’explique princi-
palement par une accélération de la croissance attendue
aux États-Unis, où l’activité a été freinée en2016 par un
ajustement des stocks et la faiblesse de l’investissement.
Les révisions des prévisions de la croissance mondiale
pour2017 et2018 depuis l’édition d’octobre2016 des
PEM sont mineures de manière générale, mais elles sont
notables pour certains pays et groupes de pays. Compte
tenu de l’expansion plus vigoureuse que prévu au
deuxième semestre de2016, un rebond plus marqué est
attendu dans les pays avancés. Par ailleurs, s’il est prévu
que la croissance s’accélère sensiblement pour le groupe
des pays émergents et des pays en développement, une
activité plus faible que prévu dans certains grands pays
entraîne de légères révisions à la baisse des perspectives
de croissance du groupe pour2017.
En ce qui concerne les pays avancés, la croissance
prévue est révisée à la hausse aux États-Unis, en raison
de l’assouplissement attendu de la politique budgé-
taire et d’un regain de confiance, en particulier après
les élections de novembre, qui, s’il persiste, renfor-
cera la dynamique cyclique. Les perspectives se sont
améliorées aussi pour l’Europe et le Japon, sur la base
d’un redressement cyclique de l’industrie manufactu-
rière et du commerce à l’échelle mondiale qui a dé-
buté au deuxième semestre de2016.
Les révisions à la baisse des prévisions de croissance
pour les pays émergents et les pays en développement
résultent d’une détérioration des perspectives dans
plusieurs grands pays, surtout en Amérique latine et
au Moyen-Orient, en raison de la poursuite de l’ajus-
tement à la détérioration de leurs termes de l’échange
ces dernières années, des baisses de la production de
pétrole et de facteurs idiosyncratiques. Les prévisions
de croissance pour2017 et2018 ont été révisées à la
hausse pour la Chine, du fait de mesures de relance
plus vigoureuses que prévu, ainsi que pour la Russie,
PERSPECTIVES DE L’ÉCONOMIE MONDIALE : UN NOUVEL ÉLAN?
où l’activité semble avoir atteint son niveau le plus bas
et où la hausse des prix du pétrole favorise la reprise.
Depuis les élections américaines, les anticipations d’un
relâchement de la politique budgétaire aux États-Unis ont
contribué à raermir le dollar et à faire monter les taux
d’intérêt du Trésor américain, ce qui relève les rendements
ailleurs aussi. L’état d’esprit des opérateurs de marché est
généralement positif, avec des gains notables sur les mar-
chés d’actions tant dans les pays avancés que dans les pays
émergents. L’accélération de l’activité et les anticipations
d’un aermissement de la demande mondiale, conjuguées
aux réductions de l’ore de pétrole qui ont été convenues,
ont contribué à une remontée des prix des produits de
base, après les creux observés au début de2016.
L’ination globale monte dans les pays avancés en
raison de la hausse des prix des produits de base, mais
l’ination hors alimentation et énergie reste modérée et
hétérogène (ce qui cadre avec la diversité des écarts de
production). L’ination hors alimentation et énergie s’est
peu améliorée où elle avait été la plus faible (par exemple
au Japon et dans certaines parties de la zone euro).
L’ination globale s’est accélérée aussi dans beaucoup de
pays émergents et de pays en développement en raison
de la hausse des prix des produits de base, mais, dans un
certain nombre de cas, elle a reculé, car les répercussions
des dépréciations monétaires importantes de2015 et du
début de2016 continuent de s’estomper.
Cependant, le solde des aléas qui inuent sur la crois-
sance reste orienté à la baisse, surtout à moyen terme,
étant donné l’incertitude qui entoure de manière généra-
lisée les politiques économiques. L’état d’esprit positif des
opérateurs de marché implique qu’il existe aujourd’hui
des chances plus tangibles de révision à la hausse à court
terme, mais, étant donné les sources d’incertitude qui
sont examinées ci-dessous, une hausse brutale de l’aver-
sion pour le risque est possible. Les aléas qui inuent sur
la croissance à moyen terme semblent plus clairement né-
gatifs, d’autant que les mesures de relance aux États-Unis
et en Chine devront être réduites ou annulées à terme
an d’éviter une dynamique budgétaire insoutenable. De
manière plus générale, les risques de dégradation tiennent
à plusieurs facteurs:
Un mouvement de repli sur soi, y compris des mesures
protectionnistes, avec un ralentissement de la croissance
mondiale en raison de la diminution des échanges com-
merciaux et des flux d’investissement internationaux.
Un relèvement des taux d’intérêt plus rapide que
prévu aux États-Unis, qui pourrait provoquer un
durcissement plus rapide des conditions financières
mondiales et une forte appréciation du dollar, avec des
répercussions négatives pour les pays vulnérables.
Un démantèlement agressif de la réglementation fi-
nancière, qui pourrait provoquer une prise de risque
excessive et accroître la probabilité de crises financières
futures.
Un durcissement des conditions financières dans les
pays émergents, rendu plus probable par l’augmenta-
tion de la vulnérabilité du système financier chinois
due à la croissance rapide du crédit et la fragilité persis-
tante des bilans dans d’autres pays émergents.
Des chaînes d’interactions négatives entre une de-
mande faible, une inflation basse, des bilans fragiles et
une croissance de la productivité anémique dans cer-
tains pays avancés où l’excédent de capacités est élevé.
Des facteurs non économiques, notamment des ten-
sions géopolitiques, des désaccords politiques inté-
rieurs, une gouvernance médiocre et la corruption, des
événements climatiques extrêmes, ainsi que le terro-
risme et des problèmes de sécurité.
Ces risques sont liés les uns aux autres et peuvent se
renforcer mutuellement. Par exemple, un mouvement de
repli sur soi pourrait aller de pair avec une montée des
tensions géopolitiques et une augmentation de l’aversion
pour le risque à l’échelle mondiale; des chocs non écono-
miques peuvent peser directement sur l’activité écono-
mique et nuire à la conance et à l’état d’esprit des opé-
rateurs de marché; et un durcissement plus rapide que
prévu des conditions nancières mondiales ou l’adoption
de mesures protectionnistes dans les pays avancés pour-
rait encourager les sorties de capitaux en Chine.
Les choix de politique économique seront donc cru-
ciaux pour orienter les perspectives et réduire les risques.
Les priorités en matière de gestion macroéconomique
de la demande sont de plus en plus diérenciées, étant
donné la diversité des positions conjoncturelles. Dans les
pays où il existe un excédent de capacités de production
et où l’ination hors alimentation et énergie reste faible,
il demeure nécessaire de soutenir la demande, notam-
ment pour éviter des eets d’hystérèse pernicieux. Dans
les pays où la production est proche de son potentiel ou
y est supérieure, la politique budgétaire doit avoir pour
objectif de renforcer les systèmes de protection sociale et
d’accroître la production potentielle. Par ailleurs, dans de
nombreux pays, il est nécessaire de mettre en place des
stratégies crédibles pour placer la dette publique sur une
trajectoire viable.
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