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J.
MeE
VOY
romain,
on
voit
saint
Augustin
associer
plus
d'une
fois
Platon
à
l'Égypte,
puisqu'en
plusieurs
endroits
de
son
De
Civitate Dei, il
fait
allusion
à
un
voyage
du
philosophe
athénien
dans
ce
pays
et
met
expli-
citement
en
rapport
cette visite supposée avec
la
sagesse des
Égyptiens
et
de
certains
Juifs
qui
vivaient,
selon lui,
parmi
eux
5.
Àpropos de
cette
ancienne
tradition,
les
historiens
et
les philologues
modernes
sont
fort
partagés.
En
effet,
beaucoup
d'entre
eux
ne
cachent
pas
leur
scepticisme,
en
raison
de
l'absence
de
tout
témoignage
antérieur
et
digne
de
foi
concernant
un
tel
voyage
de
Platon,
et
aussi
à
cause
du
récit
autobiographique
de
la
Septième Lettre,
où
l'auteur
nous
donne
une
information
abondante
et
précieuse
sur
ses
deux
voyages
en
Sicile,
mais
reste
silencieux
à
propos
de
l'Égypté.
D'emblée,
je
dois
dire
que
je
ne
puis
fournir
aucune
information
nouvelle
sur
cette
question
et
d'ailleurs
je
tiens
à
souligner
que
je
ne
cherche
nullement
à
prouver
que
Platon
a
fait
un
voyage
en
Égypte. Mon propos
est
plutôt
de
montrer
quelle
connaissance
il
avait
de ce
pays
fascinant
et
comment
il
a
mis
cette
connaissance
au
service de
ses
idéaux
philosophiques.
Je
m'attacherai
donc
aux
références
àl'Égypte qu'on
peut
trouver
dans
le
Timée
et
les
Lois,
ainsi
qu'à
la
sagesse
que
Platon
a
amassée
et
incor-
porée
dans
ces
deux
écrits
de
sa
vieillesse.
En
rapport
avec
ce
matériau
égyptien
qu'on
trouve
dans
le Timée
et
les Lois,
j'avancerai
également
5
6
Dictorum Memorabilium, VIII,
7,
3),
DIODORE
DE
SICILE (Bibliotheca, l, 96)
et
CLÉMENT D'ALEXANDRIE (Protrepticus,
VI,
70).
S.
AUGUSTIN,
De Civitate Dei, VIII,
9;
surPlaton et les Juifs en Égypte voir ibid,
VIII, 11. Beaucoup
de
Pères
de
l'Église croyaient que Platon dépendait des
prophètes
de
l'Ancien Testament, et, àtravers eux,
de
Moïse.
Saint Ambroise
s'appuie sur les récits
du
voyage
de
Platon en Égypte pour mettre le philosophe
athénien en rapport avec le prophète Jérémie, qui s'y exila à
la
suite
de
l'invasion
de
la Palestine par les Babyloniens. Saint Augustin abien vu qu'il y
avait
là
un anachronisme, mais
il
admet la possibilité
que
la religion juive ait pu
exercer une influence sur
le
fondateur
de
l'Académie. Sur tout cela, voir l'état
de
la question bien documenté
de
Paul
CIHOLAS,
Plato :the
Attic
Moses? Some
Patristic Reactions to Platonic Philosophy, in CW, 2
(1978-1979),
p.
217-225.
Ainsi, à
la
suite
de
Wilamowitz
et
de
Schubart,
A.E.
Taylor estime que les
observations relatives àl'Égypte dans les Lois «semblent être
de
première
main» (Plato. The
Man
and
his Work,
p.
4).
En revanche, Kerschensteiner
conclut son examen
des
anciens témoignages
et
des
opinons modernes sur une
note sceptique:
«So
wird schon durch das Schwanken der Überlieferung auch
die
agyptische Reise aIs sehr unwahrscheinlich erwiesen und in eine Reihe
gerückt mit den Nachrichten von den anderen Reisen,
die
sich um den festen
Kern der sizilischen Reise ansetzten und allmahlich fortwucherten, bis man
schlieBlich
Platon
die
ganze oikoumene bereisen
lieB»
(op.
cit.,
p.
50).