et ancien militant du PPF et de la Cagoule. Ce chasseur alpin trouvera une mort glorieuse en
Indochine en 1944, à la tête d’un commando opérant en territoire tenu par les Japonais.
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« Le scoop publié par Le Monde avait été en réalité l’un des coups les plus politiques réussis
par les services secrets français dans le cadre de l’opération Méduse, grâce à une fuite
savamment orchestrée (voir « Atlas médusé – Le contre-espionnage français face aux menées
des Collaborateurs en Afrique du Nord », par A. Naxagore, Paris, 1946).
Dans le chaos du Grand Déménagement, de nombreux militaires, fonctionnaires et officiels
français proches de la Cagoule, du PPF et autres RNP s’étaient retrouvés, volens nolens, en
Afrique du Nord. Dans les derniers mois de 1940, Simon Sabiani, proche de Doriot et grande
figure de la vie politique marseillaise – dans la mesure où le Milieu marseillais était un des
acteurs de cette vie politique – avait fait passer en AFN quelques-uns de ses hommes de
confiance. Son but ? Rallier à la cause du NEF les proches et sympathisants des partis
collaborateurs, à des fins de renseignement et de sabotage. Ces hommes et leurs contacts en
AFN formaient ce que Sabiani, avec quelque grandiloquence, avait baptisé réseau Atlas.
Bien loin des fantasmes de Doriot, rêvant d’un coup de poignard dans le dos fatal à l’effort de
guerre du gouvernement Reynaud, l’action du réseau Atlas eut tout au plus l’effet d’une
écharde. La faute au faible nombre de “contacts” que l’on avait pu convaincre de faire partie
du réseau (par rapport à ce qu’avait rêvé Doriot), à l’amateurisme de ceux qui avaient accepté
de trahir et à un manque de moyens flagrant – mais aussi à l’action des services secrets
français.
Le contre-espionnage n’avait cependant découvert l’existence du réseau Atlas qu’au milieu de
1941. Après une longue enquête, une grande partie des membres actifs du réseau furent
identifiés. Le commandant Pierre de Froment fut chargé de mener l’opération Méduse (dont la
tête, portée par Persée, figea le géant Atlas) afin de démanteler le réseau et, mieux encore, de
retourner ses membres.
Après plusieurs mois d’observation, la phase active de Méduse fut déclenchée au début de
1942, dans la plus grande discrétion, afin de ménager le moral de la population et des troupes.
De plus, le gouvernement français désirait s’épargner une affaire publique avec pression
médiatique et procès, comme, aux Etats-Unis, l’affaire du réseau d’espionnage allemand de
Frederick Duquesne, qui avait fait les gros titres de la presse américaine en décembre 1941.
Un certain nombre de membres d’Atlas furent retournés (assez pour pouvoir faire croire à
Doriot et à l’Abwehr que le réseau était toujours viable), mais l’on vit aussi une sorte
d’épidémie d’accidents de la route ou d’entrainement, et autres rixes finissant mal dans des
lupanars… C’est ainsi que Jean Fossati périt dans un accident de voiture en mars 1942.
Albert Beugras faillit être écrasé par un tramway algérois à la suite d’une stupide bousculade
au début de mai 1942. Peu après, il fut discrètement arrêté et mis au secret pendant plusieurs
jours. « Une offre qu’il ne pouvait pas refuser » d’un consortium des services français et
américains fit de lui un agent double (et même triple). Il montra de réelles aptitudes pour ce
difficile métier, jusqu’à ce qu’un passant distrait le pousse sur les rails du tramway – on
n’échappe pas à son destin – à Marseille cette fois, quelque temps après la libération de la
ville. On spécule encore volontiers sur la nationalité du distrait : Allemand ? Américain ?
Français – et de quel bord ?
Le retournement du chef d’Atlas en Tunisie, Henri Queyrat, en juillet 1942, fut un coup de
maître. En le manipulant au moment de l’opération Torche, le contre-espionnage français
réussit à asseoir la crédibilité d’Atlas auprès de l’Abwehr, jetant les bases des futures
opérations d’intoxication des services de renseignements allemands.
L’opération Méduse continua toute l’année 1942, dans un souci de recensement de
personnalités politiques et officiers susceptibles d’avoir sympathisé avec « l’équipe Laval ».