La Lettre du Cancérologue • Vol. XVIII - n° 3 - mars 2009 | 135
Résumé
L’incidence des cancers chez l’adolescent et le jeune adulte en France est évaluée à 700 nouveaux cas par an chez
les 15-19 ans et à 1 000 nouveaux cas par an chez les 20-24 ans. Leur épidémiologie est différente de celle des
enfants et des adultes. Les patients de 15-19 ans présentent 80 % de tumeurs rencontrées dans la population
pédiatrique, et 20 % de tumeurs de type “adulte”, ce pourcentage augmentant significativement après 20 ans.
Quatre pathologies ont leur pic d’incidence dans cette population : les tumeurs d’Ewing, les ostéosarcomes, la
maladie de Hodgkin, et les tumeurs germinales gonadiques. La survie de cette population n’a pas augmenté, depuis
les années 1970, comme a augmenté la survie des enfants et des adultes atteints de cancer. Et les adolescents/
jeunes adultes de plus de 15 ans gardent une survie inférieure à celle des enfants de moins de 15 ans traités
pour les mêmes pathologies.
Mots-clés
Adolescents/
jeunes adultes
Cancer
Survie
Épidémiologie
Highlights
The incidence of cancer in
teenagers and young adults is
estimated around 700 cases per
year between 15 and 19 years
and 1000 new cases between
20 and 24 years. The epidemi-
ology is different compared to
children and adults. Patients
between 15 and 19 years
develop in 80% of the cases
pediatric tumor but this rate
decreases significantly after
the age of 20 for a higher
proportion of adult cancers.
The four more frequent cancers
observed in this population are:
Ewing sarcoma, osteosarcoma,
Hodgkin disease and germ cell
tumors of the gonads. From the
seventies, survival rate in this
population has not increased
compared to the survival gain
observed during the same
period for cancer in children
and adults. Adolescents of more
than 15 and young adults still
have a poorer outcome than
children under 15 treated for
the same cancers.
Keywords
Adolescents/young adults
Cancer
Survival
Epidemiology
L’épidémiologie des tumeurs rencontrées change
entre les tranches d’âge 15-19 ans et 20-24 ans.
Chez les patients de 15-19 ans, les tumeurs les plus
fréquentes sont les lymphomes (24,8 % des cas),
alors que, chez les 20-24 ans, il s’agit des tumeurs
de type “adulte” (33,3 %) [tableau I]. Il faut souli-
gner que, par rapport à la population pédiatrique,
ces tumeurs de type adulte représentent environ
20 % des cancers rencontrés chez les adolescents
de 15-19 ans.
Tableau I. Types de cancer chez les 15-19 ans et les
20-24 ans.
15-19 ans 20-24 ans
Lymphomes 24,8 % 22,5 %
Tumeurs type “adulte”
dont mélanome
cancer thyroïdien
21,5 %
7,4 %
4,7 %
33,3 %
10,9 %
6,7 %
Tumeurs germinales 13,3 % 20,1 %
Leucémies 12,5 % 9,1 %
Tumeurs du système nerveux
central
10,2 % 6,3 %
Tumeurs osseuses 9,8 % 3 %
Sarcomes des tissus mous 7,2 % 5,9 %
Aux États-Unis, le Programme d’épidémiologie et
de surveillance du National Cancer Institute (NCI)
entre 1975 et 2001 (Surveillance, Epidemiology
and End Results [SEER]) a permis de retrouver une
incidence de 203 cas par million et par an chez les
15-19 ans, de 352 cas par million et par an chez les
20-24 ans et de 547 cas par million et par an chez
les 25-29 ans (4), avec une même répartition dans
le type de tumeurs rencontrées qu’en France et la
même émergence des tumeurs de type adulte chez
les 15-19 ans (26 % des diagnostics), s’accentuant
encore plus nettement dans la population des
20-29 ans (41 %) [5].
Quatre pathologies ont leur pic d’incidence chez les
adolescents/jeunes adultes : les ostéosarcomes et
les tumeurs d’Ewing chez les 15-19 ans, la maladie
de Hodgkin et les tumeurs germinales gonadiques
chez les 20-29 ans (6).
Évolution de l’incidence
en Europe
De 1978 à 1997, en France, la variation annuelle de
l’incidence a été de + 0,4 % pour les 15-19 ans et de
+ 1,7 % pour les 20-24 ans (3). Au Sud des Pays-Bas,
il y a eu une tendance à l’augmentation annuelle
des taux d’incidence standardisés de 3,6 % sur la
période 1973-1999. Quant au Nord de l’Angleterre,
l’augmentation des taux d’incidence standardisés
entre 1979 et 1997 a été de 1,6 % (3).
Dans l’étude européenne de 1970 à 1999 (projet
ACCIS), on notait une augmentation annuelle de
l’incidence de 1,5 % chez les 15-19 ans, avec augmen-
tation notable des carcinomes, lymphomes, tumeurs
germinales, alors que l’augmentation annuelle de
l’incidence chez les enfants de moins de 15 ans était
de 1 % (7).
Survie des adolescents
et des jeunes adultes atteints
de cancer
Dans l’étude française de E. Desandes, la survie
globale à 5 ans des adolescents de 15-19 ans était
de 69,1 % (IC
95
= 66,4-71,8), et celle des adultes
jeunes de 20-24 ans de 74,5 % (IC
95
= 72,3-76,7).
Entre 1978 et 1997, l’évolution de la survie à 5 ans
chez les 15-24 ans en France a été la suivante :
62 % en 1978-1982, 66 % en 1983-1987, 73,2 %
en 1988-1992 et 80,2 % en 1993-1997, avec une
augmentation comparable en Angleterre et aux
Pays-Bas (3).
Aux États-Unis, le programme SEER a montré,
entre 1975 et 1997, une amélioration de la survie
à 5 ans de 1,5 % par an en moyenne pour toutes
les tranches d’âge, sauf celle des 15-24 ans, pour
laquelle cette augmentation annuelle a été inférieure
à 0,5 %, et celle des 24-34 ans, pour laquelle il n’y
pas eu d’augmentation (8).
Par rapport aux enfants – lorsqu’ils sont traités
pour des pathologies semblables –, les adolescents
de 15-19 ans ont un moins bon pronostic, que ce soit
en Europe ou aux États-Unis, comme le montre le
tableau II (9).