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Fernandez a montré sur 4 études de cohortes et 8 études cas
témoins un RR de 0,63 (IC : 0,45-0,87) [3].
Franceshi sur une méta-analyse, a montré un effet protecteur
avec diminution du risque dans 3 études de cohortes et 5
études cas contrôle parmi 11 [3, 14].
Paganini-Hill [15] montre au travers des résultats d'une cohorte
de 7701 femmes suivies pendant quatorze ans, une diminution
significative des cancers colorectaux chez les utilisatrices
d’oestrogènes, plus prononcée si l’utilisation est récente. Le
risque ne semble pas être différent suivant les doses utilisées,
ni la voie d’administration d’oestrogènes conjugués équins.
La mortalité par cancers colorectaux est également diminuée
mais d’une manière non significative [1].
• Protection des adénomes colorectaux
Potter et al. [16] comparent 174 femmes ménopausées traitées
ayant des polypes colorectaux avec 289 témoins à colonoscopie
normale et 183 autres témoins, parmi la population. Ils
retrouvent un Odds ratio, respectivement, de 0,39 (95% IC,
0,23-0,67) et de 0,61 (95% IC, 0,34-1,07) et ceci après 5 ans
de traitement hormonal.
Peipins et al. [17] montrent une diminution significative du
risque d’adénomes colorectaux chez les femmes ménopausées,
traitées versus non traitées (OR = 0,39 : 95% IC, 0,15-0,97).
Dans cette étude, le diagnostic était porté par colonoscopie
sur 74 cas contre 137 témoins.
Chen et al. [18], dans une étude rétrospective trouve une
moindre incidence des adénomes colorectaux chez les femmes
traitées versus non traitées (OR = 0,57, 95% IC, 0,35-0,94).
Cette protection paraît corrélée à la durée d’utilisation. Au-
delà de cinq ans de traitement, l’odds ratio est de 0,49 (95%
IC, 0,25-0,97).
MECANISME D’ACTION PROTECTEUR
La plupart des études épidémiologiques semblent accorder
un rôle favorable aux oestrogènes sur l’incidence et la mortalité
de la pathologie maligne colorectale. Mais, aucune étude n’est
menée avec des oestrogènes administrés par voie transdermique
ou percutanée.
Le mécanisme protecteur du cancer colo-rectal est lié
principalement à l’action anti-néoplasique des oestrogènes.
La muqueuse colique saine et les tumeurs coliques possèdent
des récepteurs aux hormones stéroïdiennes dont les récepteurs
aux oestrogènes [6, 10]. De ce fait, ces derniers diminuent la
croissance des cellules néoplasiques coliques et inhibent la
multiplication des cellules du côlon. In vitro, la croissance de
lignée d'adénocarcinomes coliques humains est inhibée par
l’oestradiol [10].
Un autre mécanisme protecteur est représenté par l’action des
oestrogènes sur un gène récepteur des oestrogènes qui possède
un rôle suppresseur de la tumeur.
Le mécanisme de l’action préventive est aussi lié à l’impact
des oestrogènes sur la synthèse et l’excrétion de la bile et,
plus particulièrement, à la diminution de la concentration des
acides biliaires au niveau du côlon. L’effet protecteur des
oestrogènes sur la muqueuse colique pourrait s'exercer par
une modification du métabolisme biliaire. Les acides biliaires
secondaires sont connus pour avoir une action carcinogène,
initiatrice et promotrice, au niveau de la muqueuse colique
[6, 10]. Les oestrogènes diminuent la synthèse et l’excrétion
des acides biliaires secondaires [10]. Les patients atteints d'un
cancer colique présentent une augmentation de l’excrétion
fécale des acides biliaires [6, 10]. Ce mécanisme protecteur
n'est probablement pas exclusif car l’absorption des acides
biliaires s’effectue préférentiellement au niveau du côlon
droit. Or il n’est pas démontré que l’effet protecteur des
oestrogènes s’exerce principalement au niveau du côlon droit
[7-10].
Les oestrogènes entraînent alors une réduction du risque
d’environ 40% par diminution des acides biliaires au niveau
du côlon [1, 3, 14].
Une régulation intracrine par la muqueuse colique de l’action
des oestrogènes est probable. La prolifération cellulaire de
certaines lignées de cancers coliques est inversement associée
à l’activité de la 17 bêta-hydroxystéroïde déshydrogénase
[10]. Cette dernière est également régulée par les progestatifs.
En fin, les oestrogènes réduisent la concentration sérique de
l’IGF 1, qui est un agent mitogène. Elles entraîneraient une
hyperméthylation de la région promotrice du gène RE qui
entraîne la régulation de croissance muqueuse (le gène RE
joue un rôle suppresseur de la tumeur) [8-10].
En conclusion, les oestrogènes semblent réduire de 20 à 30%
le risque de cancers colorectaux [6, 10]. Ils seraient également
protecteurs sur les états précancéreux représentés par les
polypes adénomateux colorectaux. Bien que différentes
hypothèses expérimentales argumentent cet effet protecteur,
d’autres études épidémiologiques sont nécessaires.
Le traitement hormonal oestroprogestatif pourrait être utilisé
chez les femmes ayant un antécédent personnel de cancer du
côlon [7-10].
Les femmes souhaitant un traitement hormonal
oestroprogestatif et leur médecin doivent considérer cette
probable protection dans les risques et bénéfices
carcinologiques liés à l’utilisation d’hormones exogènes à la
ménopause.
CONCLUSION
Au total, la contraception offre de nombreux avantages [7-
10]. Certes, le principal reste celui de la prévention des
grossesses non désirées, et notamment des grossesses extra-
utérines. Mais les autres bénéfices méritent d’être mieux
connus des femmes et du corps médical, notamment la
prévention du cancer du côlon et du rectum, ce qui ne peut
que retentir favorablement sur l’observance de la contraception
orale. Les bénéfices non contraceptifs de la contraception
Contraception et cancer colorectal H. BOUFETTAL et coll.