Charbonnier - Que peut la philosophie (couv)

SEUIL
L
’
ORDRE PHILOSOPHIQUE
L’ORDRE PHILOSOPHIQUE
Après plus d’un siècle d’enseignement obligatoire de la philosophie,
où en sommes-nous de la formation de l’« esprit critique », jugé
si précieux pour faire de chacun le citoyen d’une démocratie ?
Cette question n’est pas seulement pédagogique, elle concerne
l’existence même de la philosophie : la circulation des idées est
ce sans quoi la pensée n’existe pas – sinon comme archive. Une idée
reste lettre morte si elle n’est pas réactualisée par des individus
vivants et curieux. Dès lors, à quoi bon se féliciter d’une richesse
culturelle passée si n’est pas perpétuellement suscité un désir d’y
puiser des idées qui seront pensées à nouveaux frais pour une
situation donnée ?
La philosophie n’est pas une discipline érudite, abstraite et difficile
comme ont voulu le croire et le faire croire certains professeurs.
Elle est d’abord une pratique concrète et émancipatrice qu’il
s’agit de partager et de faire ensemble. Ainsi, il faut penser ces
conditions concrètes et effectives de la pensée philosophique (en
classe notamment) pour comprendre comment l’espoir politique
d’émancipation collective peut faire sens pour nous aujourd’hui.
On l’aurait presque oublié, mais l’Éducation nationale, jadis mieux
nommée par Condorcet « Instruction publique », est en son principe
un projet révolutionnaire. À travers la question singulière de la
place de la philosophie en son sein, et en s’instruisant des erreurs
passées et des illusions sur les fausses réussites, on perçoit tout ce
qu’il y a encore à penser et à faire si l’on veut véritablement être
le plus nombreux possible à penser le plus possible.
Sébastien Charbonnier est philosophe et professeur de philo-
sophie. Il est l’auteur de Deleuze pédagogue (2009).
www.seuil.com
Couverture: le Douanier Rousseau, Les Joueurs
de football, 1908 © The Bridgeman Art Library
ISBN 978.2.02.108577.8
Imprimé en France 01.2013 22 €
Sébastien Charbonnier
que peut la philosophie ?
Sébastien Charbonnier
SEUIL
que peut
la philosophie ?
Être le plus nombreux possible
à penser le plus possible
L’ORDRE PHILOSOPHIQUE
108577 Que peut philosophie-crg.indd 1,3 15/11/12 11:40

Introduction
La philosophie n’est pas un empire dans un empire . . 9
Un peu d’indisciplinarité ........................ 13
En ligne de mire de l’enquête : ce que philosopher veut
dire ....................................... 17
Que va-t-il se passer dans ce livre ? ............... 20
Remarques de méthode sur l’enquête .............. 24
PREMIÈRE PARTIE
Apprendre à philosopher aujourd’hui :
l’héritage mythologique
de l’enseignement de la philosophie
1. Situation de l’enseignement de la philosophie ..... 35
La suppression de la philosophie ?
Deux épisodes traumatisants et catalyseurs de la mytho-
logisation .................................. 36
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale : la démo-
cratisation refoulée .......................... 43
2. Fin de siècle : la possibilité d’une ouverture ? ..... 49
1973-2003 : L’âge des querelles et de la massification 49
L’« entre soi », ou le circuit fermé de l’institutionnali-
sation ..................................... 56
Le recrutement des professeurs : un peu d’air frais ? . . 62
DEUXIÈME PARTIE
Qui est concerné par l’enseignement
de la philosophie ?
Du public imaginaire (l’Homme)
au public réel (l’élève)
3. Le public (imaginaire) de l’humanisme abstrait . . 73
Les clameurs du démocratisme face à la réalité démo-
graphique .................................. 74
Un certain mépris pour le peuple ................. 81
Critique de la prétendue « difficulté » de la philosophie 85
Fenêtre I. La philosophie « hard » ................. 87
« La philosophie concerne l’intelligence » .......... 90
Misères du solipsisme pédagogique ............... 96
4. Que peut nous apprendre le refus d’enseigner la
philosophie au deuxième sexe ? ................. 101
Une exclusion inconséquente .................... 102
Exemple I. Les lycées professionnels sans philosophie 105
Appendice I
La métaphore du « couronnement » ................ 109
La notion de « profil » pour comprendre la loi de la
mythologisation ............................. 109

L’obsession du point fixe et ses dérivations scolaires :
quatre premiers profils ....................... 111
Fenêtre II. Les décorations de « Générale La Philo » . 117
Une haute opinion de soi : quatre autres profils ...... 119
Fenêtre III. La « maturité » : une invention de Twee-
deldee et Tweedeldum ....................... 122
Comment créer les conditions d’inefficience d’un
apprentissage ? .............................. 123
Fenêtre IV. La philosophie comme carnaval ........ 126
Neuvième et dernier profil ....................... 129
TROISIÈME PARTIE
À quoi joue l’enseignement de la philosophie ?
Modes pédagogiques de l’esprit de sérieux
5. Quelles sont les impasses de l’idée de « jeu
sérieux » ? .................................... 141
Délire d’importance et discours d’importance ....... 142
Jouer avec la culture sans scrupule : premier contact
avec l’hypolepse ............................ 147
La philosophie comme « jeu de langage » .......... 151
Fenêtre V. Cet obscur objet nommé philosophie ..... 154
Taxinomie de quelques jeux philosophiques ........ 156
Exemple II. L’absence de tout professeur .......... 162
Exemple II bis. Pourquoi se limiter à un corps unique ? 165
6. Comment les modes pédagogiques se sont-ils (elles)
succédé(e)s ? .................................. 169
Première règle du jeu : la répétition d’un savoir constitué
par d’autres ................................ 170
Deuxième règle du jeu : la rencontre d’un maître . . . . 172
Fenêtre VI. Le redoublement comme expérience de
dédoublement .............................. 176
Troisième règle du jeu : la confrontation directe aux
textes philosophiques ........................ 180
La règle zéro : la philosophie se donne ses propres
règles ..................................... 182
Exemple III. Les élèves trichent, paraît-il, dans les
devoirs-maison ............................. 184
QUATRIÈME PARTIE
La philosophie peut-elle demeurer critique
dans l’institution scolaire ?
7. Comment mettre une note à la liberté ? .......... 195
Les ressources critiques permanentes du matériau à
enseigner .................................. 196
Fenêtre VIII. L’évaluation qui « compte » : urgence et
rentabilité .................................. 199
Analyse d’un sophisme : « En notant les travaux des
élèves, on ne juge pas les personnes » ........... 202
La marchandisation de la note scolaire : un symptôme
significatif ................................. 206
Fenêtre IX. L’amour du « loisir de penser » chez les
élèves ..................................... 210
Exemple IV. De l’évaluation à la sélection-élimination 213
8. D’où viennent les amours philosophiques ? ....... 217
La canonisation pour lutter contre la « barbarie » . . . . 218
Trois propriétés du canon : sanctification, réification,
totalisation ................................. 220
Le destin paradoxal des philosophes canonisés ...... 224

Fenêtre X. La philosophie au musée ............... 231
Exemple V. La dommageable densité des textes philo-
sophiques .................................. 234
Appendice II
Qu’est-ce que la philosophie ? ..................... 237
La vulgarité de l’émancipation, ou le refus de la scission
préalable ................................... 239
Croire pouvoir émanciper l’autre : un pari fou ? . . . . . 247
Fenêtre XI. Le complexe de Cassandre comme symptôme
du délire de certitude ........................ 249
L’inconséquence : l’ennemi traqué par l’apprentissage
de la philosophie ............................ 250
Hypothèses directrices pour une philosophie pratiquée 257
Conclusion
Émancipation et institutionnalisation .............. 267
Quelles sont les conditions d’une action collective ? . 270
Distribuer les conditions essentielles du non-savoir . . 272
À qui s’adresse-t-on ? Dispensabilité de la philosophie 273
Index .......................................... 279