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Le gastroentérologue et les microsatellites
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P. Laurent-Puig*
L’
analyse de la succession des nucléotides que
constitue l’ADN a permis de montrer que la
séquence d’un locus donné (segment de
séquence codante ou non) pouvait varier d’un individu
à l’autre au sein d’une même espèce. La transmission
de ces variations se fait de manière mendélienne au
cours des générations. Deux types de polymorphisme
sont décrits : les polymorphismes de restriction, les
polymorphismes de répétition.
• Le premier groupe est cara c t é risé par la présence
d’une va ri ation nu cléotidique entraînant la modifi c ation de la carte de re s t riction du segment d’ADN,
c’est-à-dire la possibilité pour une enzyme de re s t ri ction de couper ou de ne pas couper l’ADN double brin.
Figure 1a. Génotypage d’un individu pour un locus microsatellite polymorphe. Le locus
est amplifié à l’aide des amorces A et B. On distingue alors les deux allèles, l’un d’ori gine maternelle (allèle M), et l’autre d’origine paternelle (allèle P), par une taille diffé rente liée à la variation du nombre de copies de la séquence répétée (Ici, 15 et 19 répé titions du dinucléotide CA). Cette variation conduit dans notre exemple à un allèle M de
100 nucléotides et un allèle P de 108 nucléotides.
• Le second groupe est caractérisé par la variabilité du nombre
de copies de séquences répétées en tandem au niveau d’un
locus. Deux types de séquences répétées sont polymorphes : les
minisatellites et les microsatellites.
Cette distinction repose sur une longueur différente
du motif de la séquence répétée. En effet, dans le
premier cas, il s’agit d’un motif de plus d’une dizaine de nucléotides ; dans le second, il s’agit de moins
de 5 nucléotides. Le plus généralement, il s’agit de séquences
dinucléotidiques de type (CA)n/(GT)n répétées. L’intérêt de ces
séquences de type microsatellite est qu’elles sont très polymorphes, abondantes et uniformément réparties sur l’ensemble
du génome. En effet, le nombre de copies du motif répété pour
un locus donné varie de façon fréquente au niveau de la population ; le nombre moyen de séquences dinucléotidiques répétées
polymorphes est probablement supérieur à 100 000 sur l’ensemble du génome humain et plus de 6 000 sont identifiées à ce
jour. La séquence systématique du génome a permis de montrer
une fréquence de ces séquences répétées tous les 100 000
nu cléotides. La cara c t é risation du polymorphisme de ces
séquences microsatellites se fait facilement par PCR à l’aide
d’amorces spécifiques flanquantes (figure 1).
* Service de chirurgie digestive, générale et oncologique,
hôpital Laennec, Paris.
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Figure 1b. Gel d’électrophorèse permettant de mettre en évidence le poly morphisme de taille. Le produit d’amplification est déposé dans un gel.
L’ADN migre en fonction de sa taille dans un champ électrique. Les
deux allèles sont alors séparés et mis en évidence par coloration.
Cette simplicité a permis la généra l i s ation de leur
utilisation en biologie moléculaire. Si La Lettre
de l’hépato-gastroentéro l ogue m’a demandé de
fa i re cette description des locus micro s atellites,
c’est que l’utilisation de ces marq u e u rs de polymorphisme
dans le cancer du côlon a permis de découvrir un nouve a u
mécanisme de carc i n ogenèse colorectale et présente un intérêt
pour le clinicien.
La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 3 - juin 1998
Figure 2a. Caractérisation des pertes alléliques à l’aide du typage des
loci microsatellites. L’allèle paternel a été perdu dans les cellules tumo rales, traduisant la perte du segment chromosomique portant cet allèle.
Figure 2b. Mise en évidence de l’existence d’un phénomène d’instabilité
des loci microsatellites dans l’ADN de certaines tumeurs coliques par
défaut de réparation des mésappariements de l’ADN. Les nouveaux
allèles sont appelés M’ M’’ P’. Ces altérations sont présentes dans 15 %
des cancers du côlon.
Initialement, la comparaison après amplification du profil de ces
locus au niveau de l’ADN lymphocytaire et de l’ADN provenant des cellules tumorales coliques d’un même malade avait
pour but de caractériser les pertes alléliques de l’ADN tumoral
(figure 2a).
A cette occasion, dans quelques cas, au lieu de mettre en évidence des pertes d’allèles, des gains d’un ou de plusieurs allèles
ont été mis en évidence dans l’ADN provenant de cellules
tumorales coliques par comparaison à de l’ADN lymphocytaire
(figure 2b). Ces gains d’allèles ont été expliqués par un défaut
du système de réparation des mésappariements de l’ADN de
certaines tumeurs coliques. En effet, lors de la phase de réplication de l’ADN qui précède la division de la cellule, l’ADN polymérase commet des erreurs particulièrement fréquentes au
niveau de ces courtes séquences répétées. Normalement, il existe des mécanismes de réparation de ces erreurs. Lorsqu’ils sont
altérés dans les cellules tumorales, ces erreurs ne sont plus corrigées et le nombre de répétitions des séquences microsatellites
va rapidement diverger au cours de la prolifération cellulaire qui
caractérise le cancer.
Ce phénotype tumoral est appelé RER+ pour :
“REplicative ERror”. Il est intéressant de noter que
la quasi-totalité des cancers coliques survenant dans
le cadre d’un syndrome HNPCC, ou syndrome de Lynch, ont
tous ce phénotype RER+. Cela est dû à la présence d’une altération constitutionnelle (présente dans toutes les cellules d’un
individu) d’un des gènes intervenant dans la réparation de ces
mésappariements. La caractérisation du phénotype RER+ de
certaines tumeurs apporte des éléments permettant de suspecter
l’existence d’une prédisposition génétique au cancer colorectal,
en particulier quand les critères diagnostiques cliniques ne sont
pas complètement réunis pour proposer un diagnostic génétique
LISTE DES ANNONCEURS
ASTRA FRANCE (MOPRAL), p. 74
BEAUFOUR (FORLAX), pp. 118-119
GLAXO WELLCOME (AZANTAC), excart
HOECHST HOUDE (LANZOR), p. 136
MARTIN JOHNSON (TITANOREINE), p. 133
ROCHE (ROFERON), p. 83
SYNTHELABO (INIPOMP), p. 106
Imprimé en France - Point 44 - 93100 Montreuil - Dépôt légal 2e trimestre 1998.
Les articles publiés dans La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue le sont
sous la seule responsabilité de leurs auteurs.
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 3 - juin 1998
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