La recherche sur le contexte pianistique s’articule autour de trois volets :
a) une présentation, par ordre chronologique, des pianistes que connaissait le
compositeur pendant ses années berlinoises, orientée vers les caractéristiques de
leur jeu, en soulignant celles qui sont plus proches de sa propre vision de
l’interprétation. Cette présentation est fondée sur une multitude de sources
primaires, notamment un corpus de lettres du compositeur jusqu’ici quasi inconnu
1
,
ses articles dans la revue athénienne Moussiki Zoe (Vie Musicale)
2
, ainsi qu’une série
d’entretiens menés auprès des élèves des interprètes de son cercle
3
– et dans un cas
auprès de l’interprète même
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. Sont aussi mentionnés les concerts dont nous avons la
preuve qu’il les avait entendus, ou, à défaut, ceux auxquels il a fort probablement
assisté. Nous complétons cette partie par une sélection d’enregistrements
historiques des pianistes en question, qui privilégie le répertoire contemporain de
l’époque et permet au lecteur d’avoir un aperçu représentatif de leur art.
b) une mise en relation de la vision de Skalkottas sur l’interprétation pianistique avec
celle des pianistes de son cercle (Dimitri Mitropoulos, Claudio Arrau, Artur Schnabel,
Eduard Erdmann, Eduard Steuermann), sur la base de leurs écrits respectifs. Les
positions de Skalkottas prennent tout leur sens à travers la confrontation avec celles
de ses contemporains ; nous avons rapproché les propos des uns et des autres, ce
qui laisse apparaître une grande continuité dans le fil de la pensée, souvent
étonnante. Dans ce milieu de compositeurs
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et interprètes, nous « invitons » aussi
Theodor W. Adorno, dont la Théorie de la reproduction musicale
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, fruit de sa
1
Ces lettres sont adressées à l’administrateur et au directeur du Conservatoire d’Athènes. Elles se
trouvent aux archives du Conservatoire.
2
Skalkottas était le correspondant de la revue à Berlin. Moussiki Zoe était publiée en 1930-1931.
3
Il s’agit des élèves du pianiste Antonis Skokos.
4
La pianiste et pédagogue Polyxeni Mathéy, fondatrice d’une école de danse et d’eurythmie
(Athènes, 1938) qui porte son nom.
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Des propos de Schoenberg et Krenek sur l’interprétation font partie du corpus des textes utilisés.
6
Theodor W. ADORNO, Towards a Theory of Musical Reproduction, edited by Henri Lonitz translated
by Wieland Hoban, Polity Press, Cambridge Malden MA 2006. Première édition en allemand : Zu einer
theorie der misikalischen Reproduktion: Aufzeichnungen, ein Entwurf und Zwei Schemata by
T. W. Adorno © Surkamp Verlag, Frankfurt am Main, 2001.