La médecine pénitentiaire et la prise en charge des patients en fin de vie : entretien avec le Dr Yvain Auger, UHSI de la Pitié-Salpêtrière
Centre national de ressources (http://www.spfv.fr/)
Dans notre expérience, concernant les patients les plus graves, en fin de vie, obtenir un
aménagement de peine en urgence, comme obtenir une place dans une unité de soins palliatifs, ne
pose pas de gros problème.
Les choses sont plus compliquées lorsqu?un patient présente un état de santé « durablement
incompatible avec la détention », justifiant un aménagement de peine pour raison médicale, sans
que son pronostic vital soit engagé à court terme. Il s?agira par exemple d?un patient porteur d?un
cancer, en cours de chimiothérapie, avec une altération de l?état général, ou d?une personne
démente.
Les procédures peuvent être longues, en fonction de la gravité de la condamnation.
Surtout, il y a un important problème social : les juges ne libéreront pas, c?est heureux, un patient
ne pouvant bénéficier d?un hébergement adapté. Si le patient n?a pas de logement, pas de revenus,
pas de famille? Organiser la prise en charge hors de la prison devient compliqué, et cela retarde
l?obtention de l?aménagement de peine.
Dans l?Unité Hospitalière Sécurisée Interrégionale (UHSI) que vous
dirigez, rencontrez-vous des patients en fin de vie et en soins palliatifs qui
n'ont pas pu bénéficier d'une suspension de peine ? Comment votre
équipe s'organise-t-elle alors pour s'occuper de ces patients ? Dans un tel
contexte, comment se passe pour vous et votre équipe l?application de la
loi dite Leonetti du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la
fin de vie ?
Je n?ai pas souvenir d?un patient qui, en fin de vie, se soit vu refuser une suspension de peine.
Pour autant, nous avons dû, pour de rares patients, entrer dans une démarche de soins palliatifs à
l?UHSI, en attendant une libération qui tarde. Soit pour des patients condamnés à de lourdes peines,
soit parce que le patient, sans attaches à l?extérieur, a tardé à demander une suspension de peine.
Dans ces situations, médecins, équipe soignante de l?UHSI, équipe mobile de soins palliatifs
interviennent auprès du patient à l?UHSI, comme dans tout autre service de notre hôpital, avec
cependant un accès au patient plus compliqué du fait des contraintes pénitentiaires.
Quand il y a une famille, des amis, leur présence au chevet du malade n?est pas possible dans une
UHSI comme elle le serait dans un autre service, a fortiori comme à domicile.
Ces situations doivent donc rester l?exception.
Selon vous, en quoi la situation de ces patients pourrait-elle être
améliorée ?
Encore une fois, nous rencontrons peu de problèmes pour les patients en fin de vie.
Cependant, quelques points pourraient être améliorés pour nos malades les plus graves, pouvant
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