Apparition et évolution de la résistance bactérienne aux antibiotiques J.F. Guillot To cite this version: J.F. Guillot. Apparition et évolution de la résistance bactérienne aux antibiotiques. Annales de Recherches Vétérinaires, INRA Editions, 1989, 20 (1), pp.3-16. <hal-00901839> HAL Id: hal-00901839 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00901839 Submitted on 1 Jan 1989 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Article de Apparition et évolution de aux antibiotiques synthèse la résistance bactérienne J.F. Guillot INRA, Station de pathologie aviaire et de France parasitologie, CR de Tours-Nouzilly, 37300 Monnaie, (reçu le 28-4-1988, accepté le 7-6-1988) Résumé &horbar; L’utilisation thérapeutique croissante d’antibiotiques a conduit à l’émergence rapide de souches bactériennes multirésistantes. Les souches antibiorésistantes sont d’abord apparues en milieu hospitalier; récemment, leur rôle pathogénique dans certaines infections chez l’homme et l’animal et leur présence dans la flore digestive humaine ont été observés. De plus, des bactéries résistantes ont été isolées de l’environnement. antibiotiques - souches bactériennes antibiorésistantes - bactériologie Summary &horbar; Discovery and evolution of microbial resistance to antibiotics. Concomitant with has been the appearance of resistance bacteria which seem able to emerge as rapidly as new antibiotics are introduced. Although initially encountered in hospitals, resistant bacteria are now being detected as causes of human and animal infections and as colonizers of the gut. Moreover, resistant bacteria are isolated from the environment. antibiotic use antibioresistance - bacteriology - antibiotics Introduction Depuis leur découverte, les antibiotiques sont révélés très précieux dans la lutte contre les maladies d’origine bactérienne touchant l’homme et les animaux. En élevage, associés aux vaccinations et à une dustrialiser et c’est aussi chez le poulet qu’a été découverte une autre propriété des antibiotiques : l’effet promoteur de croissance. se amélioration des conditions hygiéniques, ils ont fortement contribué au développement de l’élevage dit «industriel». A cet égard les volailles sont intéressantes, car l’élevage avicole a été le premier à s’in- Mais le monde bactérien s’est adapté antibiotiques et cela s’est traduit par l’émergence de souches résistantes chez l’homme, chez les animaux et dans l’environnement. L’existence de ces bactéries résistantes a des conséquences sur la thérapeutique, la santé publique et l’hygiène de l’environnement. aux Evolution de la consommation des antibiotiques Découverte en 1928 par Fleming, concentrée et purifiée, par Chain et al. vers 1940, la pénicilline commença à être notablement utilisée en 1943 pour traiter les so,ldats des armées alliées. Entre 1941 et 1950, les premiers représentants des principales familles antibiotiques furent découverts : strepto- mycine, tyrothricine, chloramphénicol, tétracycline. Ces nouvelles molécules permirent d’élargir le spectre d’activité des antibiotiques et d’améliorer ainsi la lutte contre les maladies bactériennes. Depuis 1950, la liste des antibiotiques n’a cessé de s’allonger. Entre 1951 et 1959, période la plus féconde, 40 à 60 molécules nouvelles étaient décrites chaque année. Parallèlement à l’usage humain, l’utilisation de ces substances en médecine vétérinaire s’est rapidement développée. Dès 1950, les traitements et la prévention avec les tétracyclines, la streptomycine, les sulfamides et le chloramphénicol ont été pratiqués chez les animaux d’élevage. En 1946, Moore et al. découvrent chez le poulet l’effet promoteur de croissance de faibles doses de sulfamides et de streptomycine. Cet effet zootechniquement favorable a été retrouvé avec d’autres antibiotiques : tétracycline et antibiotiques polypeptidiques. Dès lors, l’incorporation d’antibiotiques à faible dose (de quelques ppm à quelques centaines) dans l’aliment destiné aux animaux de rente est devenue une pratique courante. Ces différents usages des antibio- tiques, thérapeutique et prophylactique chez l’humain, thérapeutique, prophylactique et zootechnique chez l’animal et les effets bénéfiques obtenus expliquent facilement l’augmentation constante de la consommation de ces substances (Fig. 1).). L’usage des antibiotiques en médecine est loin d’être négligeable I (Tableaux et 11). Environ 40% des antibiotiques produits sont utilisés chez les vétérinaire animaux. L’administration des tiques dans l’aliment correspond antibioessen- tiellement aux additifs promoteurs de croissance. Cet usage des antibiotiques chez les animaux et plus précisément celui des additifs promoteurs de croissance a préoccupé, dès les années 60, les médecins et l’opinion publique dans la mesure où les antibiotiques utilisés pourraient favoriser l’apparition de bactéries résistantes transmissibles à l’homme. Certains pays ont, malgré l’absence de preuves scientifiques précises sur les risques, envisagé une réglementation. En Grande-Bretagne, dès 1969, le rapport Swann assez théorique classe les antibiotiques promoteurs de croissance en 2 groupes, ceux utilisés en thérapeutique et les «non-thérapeutiques». Il vise à restreindre l’usage comme additifs d’antibiotiques utilisés en thérapeutique en préconisant l’autorisation de produits économiquement valables, de peu d’intérêt en thérapeutique humaine ou animale, ne gênant pas l’efficacité de la thérapeutique et ne sélectionnant pas de bactéries résistantes. L’application de ces mesures en 1971 s’est traduite par l’interdiction de la tétracycline en supplémentation. En 1972, un rapport similaire est publié aux Etats-Unis par la Food and Drug Administration (FDA) qui propose, en 1977, de bannir l’usage des pénicillines et restreindre celui des tétracyclines promoteurs de croissance. A ce jour, en raison de la complexité du problème, aucune décision n’a été prise (Frapde comme paolo et Rollins, 1984; Dupont 1987). En Suède, une et Steele, loi de 1986 interdit l’usage en tant qu’additifs de tous les antibiotiques thérapeutiques. depuis 1970 réglementation positive et des Dans le cadre de la CEE, (directive 70-524), existe avec annexes. une une liste Une commission de l’OMS, réunie à Brême en 1973, a essayé d’évaluer les risques pour la santé publique de l’antibiosupplémentation à but zootechnique et une hiérarchie des antibiotiques a ainsi été établie (Tableau III) qui a servi de base pour les modifications successives de la directive 70-524. Dès 1978, seuls des macrolides et des antibiotiques présentant un risque plus faible restaient autorisés. En France, où ces questions sont examinées par la Commission interministérielle et interprofessionnelle de l’alimentation animale créée en 1954, l’évolution de la législation a été similaire à celle de la CEE et actuellement (AM du 20/11/1987) restent seules autorisées, parmi les antibiotiques à usage humain : la spiramycine, la virginiamycine et la bacitracine. L’impact de ces mesures &horbar; qui visaient par la réglementation à restreindre l’usage des antibiotiques chez les animaux d’élevage = sur la consommation de ces molécules est difficile à apprécier. Braude, en 1978, rapporte que l’effet immédiat du rapport Swann a été, en Grande-Bretagne, de réduire «virtuellement» -de moitié la quantité d’antibio- tiques thérapeutiques utilisés comme additifs. ,Cependant à partir de 1974, leur usage s’est à nouveau accru pour atteindre, 1977, niveau équivalent à celui atteint dans les années précédant le en un rapport Swann. Apparition et principales étapes de l’antibiorésistance Travaillant sur la pénicilline, c’est dès 1940 que Abraham et Chain observent que des extraits de différentes bactéries sont capables de détruire la molécule. A cette époque la pénicilline n’avait pas encore été utilisée en thérapeutique. Une autre observation importante est faite par Mary Barber en 1949. Elle remarque que des staphylocoques résistant à la pénicilline perdent spontanément et à fréquence relativement élevée l’aptitude à produire une pénicillinase alors que la réversion de ces souches, restaurant la production de l’enzyme, n’a pas lieu. Les théories génétiques de l’époque, basées sur le schéma classique mutationsélection, n’étaient pas satisfaisantes pour interpréter un tel phénomène. Ultérieurement, l’utilisation thérapeutique croissante d’antibiotiques appartenant à des familles de plus en plus nombreuses conduisit, en particulier chez les entérobactéries, à l’émergence de souches bactériennes résistant à sieurs antibiotiques. plu- la résistance à Ce fut le cas au Japon, au début des années 50, où suite à l’introduction de la streptomycine, de la tétracycline et du chloramphénicol et à leur utilisation massive, des souches résistant à ces antibiotiques apparaissent. En 1955, Ochiai et Akiba observent, lors d’une épidémie de dysenterie bacillaire, que les Shigella responsables, initialement sensibles, sont devenues simultanément résistantes à la streptomycine, au chloramphénicol, à la tétracycline et aux sulfamides. La survenue chez ces souches de mutations simultanées est d’une probabilité tellement infime qu’elles ne pouvaient expliquer le phénomène apparu. Akiba (1960) émet alors l’hypothèse que la résistance multiple a été transférée aux Shigella dans l’intestin des malades par simple contact avec des Escherichia coli présents multirésistants. Le mélange des souches in vitro, suivi de l’acquisition de la résistance par les Shigella, permit de confirmer l’hypothèse. L’existence de bactéries multirésistantes fut aussi découverte chez les bactéries à Gram positif, notamment les staphylocoques. C’est chez les staphylocoques que l’on remarque que le traitement des bactéries avec des agents curants comme l’acriflavine pouvait entraîner l’élimination de la résistance. l’ampicilline (Tnl). Depuis plupart des pouvaient se transposer (Levy, 1982). Ces transposons qui prévalent sont largement distribués sur des plasmides différents et des espèces bactériennes distinctes. Importants dans cette date, il est apparu que la de résistance gènes l’évolution des bactéries, ils ne sont pas sans incidence sur l’épidémiologie de la résistance. Définition de la résistance aux antibio- tiques A travers ces étapes de l’antibiorésistance, il apparaît que les phénomènes de résistance ont été caractérisés aussi bien par des cliniciens que par des bactériologistes et des généticiens. Il n’existe donc pas une, mais plusieurs définitions de la résistance. Dès 1961, un comité d’experts réunis par l’OMS avait donné 2 définitions de la résistance bactérienne (Chabbert, 1982) : un germe est dit résistant quand la concentration d’antibiotique qu’il est capable de supporter est notablement plus élevée que la concentration qu’il est possible d’atteindre in vivo ; - duisit Novick (1963) à supposer que la résistance était associée à une structure une souche microbienne ou une bactérie sont aussi dites résistantes quand elles supportent une concentration d’antibiotique notablement plus élevée que celle qui inhibe le développement de la majorité des autres souches de la même espèce ou des individus de la même cul- extrachromosomique qu’il appela plasmi- ture. de. Ces 2 définitions bactériologiques de la résistance doivent être complétées par 2 autres : une clinique et une génétique. La définition clinique associe la notion de succès et d’échec clinique. En première approximation, une bactérie résistante est L’ensemble de ces observations multirésistance, transferts, La troisième cure - - con- étape historiquement importante fut, en 1974, la découverte par Hedges et Jacob que des gènes de résistance situés sur des plasmides étaient transposables. Le premier transposon portant un gène de résistance codait pour - une bactérie qui échappe au traitement, qui peut se manifester par un échec clinique. La définition génétique correspond à la présence de gènes de résistance sein de la bactérie, détectés par des techniques biophysiques et/ou génétiques. ce au Evolution de la résistance des bactéries aux antibiotiques sont mis à poser des problèmes thérapeutiques, lors d’infection, en raison de se leur antibiorésistance. Un bilan effectué par Duval et Soussy 1976 à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil révèle que, sur 7428 souches de bacilles à Gram négatif isolées, la fréquence de résistance variait de 15 à 60% environ pour les différents antibiotiques d’usage courant. Parmi ces bacilles à Gram négatif, certaines espèces en Enterobacter, Serratia, Providencia ou Pseudomonas aeruginosa sont nettement plus multirésistantes. Pour Serratia, par exemple, plus de 60% des souches isolées résistent à tous les anticomme Bactéries d’origine humaine L’émergence de bactéries résistant à la pénicilline au début de son usage thérapeutique était un événement assez rare. Dès que cet usage s’est généralisé, on a multiplier le nombre de souches résistantes et cela dans différents pays. vu se Hôpital C’est à l’hôpital que la pression de sélection par les antibiotiques est la plus forte et Finland observe, dès 1946, à l’hôpital de Boston, que la fréquence des souches de Staphylococcus aureus dont la concentration minimale inhibitrice (CMI) de pénicilline est comprise entre 0,04 ,ug/ml et 5 pg/ml décroît avec le temps. A partir de 1950, les staphylocoques isolés des infections hospitalières sont devenus majoritairement résistants à la pénicilline. Une telle évolution des staphylocoques est aussi observée vis-à-vis d’autres antibiotiques : les tétracyclines, la streptomycine, le chloramphénicol et l’érythomycine. Pour les bacilles à Gram négatif isolés à l’hôpital, une évolution aussi rapide s’est produite et des germes considérés comme faisant partie du microbisme hospitalier, telles les entérobactéries, Pseudomonas aeruginosa ou Acinetobacter, biotiques courants. Lorian et Atkinson, en 1987, ont analysé la résistance vis-à-vis de 16 antibiotiques de 10 millions de souches bactériennes d’origine hospitalière appartenant à 9 espèces isolées de 1971 à 1984 de tout le territoire des Etats-Unis. Quatrevingt-trois pour cent des souches de S . aureus résistent actuellement à la pénicilline, mais pas plus de 15% résistent aux autres antibiotiques, y compris les cépha- losporines. Cette étude globale révèle une certaistabilité de la résistance variant entre 10 et 30% selon les souches et les antibiotiques, avec dans certains cas une tendance à la diminution, excepté pour S . epidermis et S. faecalis. ne «Epidémies» à bactéries résistantes En dehors de cette évolution générale plus perceptible et préoccupante en milieu hospitalier, apparaissent épisodiquement des épidémies de bactéries résistantes. C’est ainsi que s’est développée, à partir de 1970, une épidémie de résistance à la gentamicine dans plusieurs hôpitaux français, qui concernait plusieurs espèces bactériennes (Witchitz et Chabbert, 1972). Hors du milieu hospitalier, des souches antibiorésistantes sont aussi rencontrées lors d’endémies ou d’épidémies de gonococcies depuis 1976 (Roberts et Falkow, 1977), de «diarrhées du voyageur» (Rudy et Murray, 1984), de shigelloses ou de salmonelloses survenant épisodiquement (Falkow, 1975; Ryder ef al., 1980; berg et al., 1984). Holm- Pression de sélection Elle n’est pas indispensable pour le maintien des bactéries résistantes dans les microflores de l’homme. Ainsi, l’homme sain peut héberger dans sa flore résistantes, téries en digestive des bactéries particulier des entérobac- (Datta, 1969; Falkow, 1975; Guinée et al., 1970). On constate d’ailleurs que la d’entérobactéries résistantes dans la flore est liée à la pression de sélection exercée par les antibiotiques selon le milieu dans lequel vivent les personnes étudiées : hôpital, milieu rural, milieu urbain (Linton, 1977; Pohl et Thomas, 1979; Talbot et al., 1980; Wells fréquence présentes et James, 1973). alors que celle des bactéries saprophytes de la flore digestive, notamment les entérobactéries, a été plus étudiée. Antibiorésistance de bactéries patho- gènes Parmi les descriptions récentes, Reece et Coloe en Australie (1985) observent que les souches de E. coli et de Salmonella isolées, entre 1978 et 1983, de cas pathologiques apparus chez des poulets de chair, des reproducteurs-chair et des pondeuses résistent fréquemment aux tétracyclines, aux sulfamides, à la streptomycine et à la furazolidone (Tableau IV). Les souches de S. aureus et de Pasteurella multocida provenant de ces mêmes élevages sont, elles aussi, assez fréquemment résistantes à la streptomycine, à la néomycine, à l’érythromycine et aux tétracyclines. Des résultats comparables ont été obtenus pour E. coli en Inde par Sarma et aL en 1981 et aux Etats-Unis par Blackburn et al. en 1984 pour la résistance de salmonelles isolées de poulets, de dindons, de veaux et de porcs. Généralement, les souches isolées de poulets sont plus fréquemment sensibles que celles isolées d’autres espèces animales. Bactéries d’origine animale. Cas des volailles Les résultats obtenus pendant la même période en Grande-Bretagne (Anonymous, 1980; Jackson, 1981) sur des souches d’E. coli isolées de produits C’est chez les animaux élevés de façon intensive que la proportion de bactéries pathologiques sont comparables, excepté la résistance plus faible aux tétracyclines. De plus, l’évolution de 1974 à 1977 résistantes, pathogènes ou saprophytes, est la plus élevée. Nous mettrons l’accent sur les phénomènes observés chez les volailles, qui restent le prototype de l’éle- montre que le pourcentage de souches augmente faiblement mais régulièrement avec le temps chez les dif- vage industriel. Peu d’enquêtes ont été réalisées sur la résistance des bactéries responsables d’incidents pathologiques chez les volailles et encore moins sur son évolution, férentes résistantes espèces animales (Tableau V). On peut aussi remarquer les niveaux plus faibles de résistance des souches d’E. coli d’origine aviaire, à l’exception de la tétracycline. En 1982, une diminution de la résistance à la tétracycline a été observée sur des souches d’E. coli d’origine comparable : 17,9% de résistantes à la tétracycline (Smith et Lovell, 1984). Cette tendance à la diminution de la résistance de bactéries pathogènes, observée aussi au Japon, serait liée, selon ces auteurs, à la réglementation de l’usage des antibiotiques comme additifs (Tagawa, 1981). Antibiorésistance des bactéries isolées d’animaux sains La très grande majorité des études effectuées concerne les entérobactéries, principalement E. coli, et occasionnellement des salmonelles isolées, dans l’élevage, de porteurs sains, au niveau des litières ou à l’abattoir. VI) Un travail de Linton (1977) (Tableau montre que les animaux d’élevage, élevés de façon intensive, hébergent dans leur flore digestive une plus forte proportion de bactéries antibiorésistantes, ce que les résultats de Kanai et al. (1983b) confirment pour les volailles. Différents auteurs (Chaslus-Dancla al., 1979; Kanai, 1983a; Pohl et al., 1980; Renault ef al., 1973) ont mis en évi- et dence une forte proportion d’E. coli essentiellement multirésistants aux antibiotiques présents dans la flore intestinale des volailles. Cette multirésistance concerne d’ailleurs les anti-infectieux utilisés en élevage depuis de nombreuses années : la streptomycine, la tétracycline et les sulfamides. Des résistances au chloramphénicol, à la kanamycine, à la néomycine et à l’ampicilline sont moins fréquentes et généralement associées aux résistances plus anciennes. Des ne sont de résistance à la gentamiciaussi apparus dans des élevages cas américains de dindons. Cette résistance concernait des E. coli isolés de la flore intestinale de dindonneaux, mais aussi des salmonelles, Salmonella arizonae ou S. thompson isolées des animaux, des oeufs ou de la litière (Dubel et al., 1982; Hirsch et al., 1983). La sélection et le maintien de ces bactéries résistantes dans les proportions observées résultent essentiellement de la pression de sélection exercée par les anti- biotiques utilisés en thérapeutique, en prévention et éventuellement en supplémentation. Les différents usages de ces molécules expliquent que les réglementations mises en oeuvre pour les additifs ne se soient pas traduites par une diminution spectaculaire de la résistance, car la thé- l’usage préventif pression de sélection (Dupont et Steele, 1987; Langlois et al., 1983; Linton, 1981; Walton, 1988). rapeutique et surtout maintiennent la Bactéries de l’environnement La résistance des bactéries isolées de l’environnement a été assez étudiée, en particulier pour celles de l’eau. La pression de sélection par les antibiotiques est faible, voire inexistante, dans l’environnement. Seul le traitement de maladies bactériennes des végétaux peut sélectionner des bactéries résistantes. proximité d’élevages augmentent la fréquence d’isolement de bactéries résistantes. Le support plasmidique de la résistance a été mis en évidence et dans certains cas, près de 20% des coliformes résistants hébergeaient des plasmides En revanche, l’environnement est contaminé par les bactéries résistantes hébergées par l’homme et les animaux, cette contamination étant principalement d’origine fécale. transférables. Il n’est donc pas surprenant de trouver des bactéries résistantes dans les eaux d’égouts, les effluents d’élevage, les eaux de rivières et des fleuves (Avignon et Lafont, 1985; Bell et al., 1983; Cooke, 1976; Grabow et Van Zyl, 1976; Kelch et Lee, 1978; Pohl et Thomas, 1979; Sizemore et Colwell, 1977). Pour les coliformes et les entérobactéries qui reflètent une contamination fécale, la proportion de bactéries résistantes peut varier de quelques pour cent à plus de 50% selon les lieux de prélèvements. Dans l’eau des rivières, en particulier, l’urbanisation et la de l’environnement ne représentent parfois qu’une faible proportion des bactéries Les bactéries d’intérêt agronomique, principalement Aeromonas, Pseudomonas et Vibrio, résistent aussi tiques. Même isolées, car aux antibiosi les bactéries résistantes présence est préoccupante, généralement multirésisantibiotiques et tolérantes aux cette elles sont tantes aux métaux lourds tels le cuivre, le zinc et le cadmium. plomb, le De plus, elles peuvent être disséminées dans la haute mer, puisque l’on a pu en retrouver à plus de 500 km des côtes, à plus de 8000 m de profondeur et dans les sédiments du plateau continental où elles peuvent survivre plusieurs années (Goyal et Adams, 1984; Sizemore et Col- well, 1977). Compte tenu de ces caracté- ristiques, il n’est donc pas surprenant d’en retrouver dans les eaux destinées à la boisson (Calomiris etal., 1984). Conclusion La consommation croissante d’antibioces molécules tiques reflète l’intérêt de pour traiter et prévenir les infections humaines et animales. L’évolution lente, progressive et préoccupante de nombreuses espèces bactériennes vers la résistance influe sur la thérapeutique et nécessite la recherche de molécules nouvelles. La contamination de l’environnement par des bactéries résistantes traduit l’impact à plus long terme de ces phénomènes. Une telle évolution des bactéries résistantes est très liée aux bases moléculaires et aux mécanismes de résistance qui conditionnent l’épidémiologie de l’antibiorésistance. Références Abraham E.P. & Chain E.B. (1940) An enzyme from bacteria able to destroy penicillin. Nature 146,837 Akiba T., Koyama K., lshiki Y., Kimura S. & Fukushima T. 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