que l’épigénome des CSEh est particulièrement original,
en accord avec la notion plus ancienne d’une mise à plat
complète des modifications de la chromatine au cours du
développement embryonnaire précoce [19].
Les déterminants intrinsèques de la pluripotence sont
associés à des modifications épigénétiques majeures et
sont aussi importants pour activer un programme
d’expression génique spécifique des CSEh que pour répri-
mer des programmes de différenciation.
Déterminants extrinsèques
La culture à long terme des CSEh sous forme indifféren-
ciée et pluripotente nécessite certains facteurs de crois-
sance ou cytokines exogènes, notamment le bFGF.
D’autres facteurs indispensables sont apportés par les cel-
lules fibroblastiques de soutien. Des modifications mineu-
res des conditions de culture peuvent induire rapidement
la différenciation des CSEh. Ces facteurs extrinsèques
comprennent les interactions intercellulaires, des facteurs
diffusibles dans le milieu de culture et la matrice extra-
cellulaire.
Les CSEh poussent en colonies compactes et sont diffici-
les à cloner. Les contacts intercellulaires entre CSEh font
intervenir des gap junctions. Les CSEh expriment 18 des
20 connexines qui constituent les gap junctions, en parti-
culier les connexines 43 et 45. Cette forte expression se
traduit par une intense interconnexion entre les cellules
d’une colonie avec diffusion rapide de marqueurs intra-
cellulaires d’une cellule à une autre au sein de la colonie
[20]. De nombreuses voies de signalisation intracellulaires
sont impliquées dans le maintien de l’état indifférencié
des CSEh, notamment la voie TGFb/activin/nodal, per-
mettant une forte expression de SMAD2/3 [21]. Au
contraire, l’activation de la voie des BMP entraîne la dis-
parition d’Oct4 et induit la différenciation des CSEh. La
suppression des BMP par des antagonistes comme noggin
ou gremlin sécrétés par les fibroblastes de soutien est
nécessaire à la pluripotence [22]. Les membres de la
famille WNT semblent également importants, via la
dégradation de la bêta-catenin par la glycogène synthase
kinase-3. Bien que le principe de l’activation de la voie
WNT soit repris dans certains protocoles de culture des
CSEh, l’activation de cette voie de signalisation n’est pas
suffisante. Le rôle exact de la voie WNT reste discuté [23].
L’auto-renouvellement et la pluripotence des CSEh
dépendent d’une balance finement régulée entre des molé-
cules de signalisation nombreuses et variées, le rôle précis
de chacune restant à déterminer.
L’évaluation du caractère indifférencié et pluripotent des
CSEh peut se faire par la mise en évidence en immuno-
fluorescence d’un panel de marqueurs membranaires
comme les antigènes Stage-Specific antigens SSEA-3,
SSEA-4 (absents chez la souris chez laquelle on trouve
SSEA-1), les glycoprotéines tumor-recognition antigen
TRA-1-60 et TRA-1-81 (Ac monoclonaux dirigés contre
des protéoglycanes kératanes sulfates), Thy1, et des phos-
phatases alcalines ou ALPL (alkaline phosphatase
liver/bone/kidney). La présence du marqueur Oct4 est
mise en évidence par immunofluorescence ou par techni-
ques de biologie moléculaire. L’étude du caryotype des
CSEh est indispensable pour s’assurer du caractère non
transformé des cellules tout au long de la culture.
Potentialités et intérêt des CSEh
Les cellules souches embryonnaires représentent une
source abondante et renouvelable à l’infini de cellules
fonctionnelles pour de nombreuses applications en recher-
che fondamentale et en thérapeutique.
Les lignées de CSEh fournissent de nouveaux outils pour
l’étude des mécanismes moléculaires mis en jeu au cours
du développement humain normal, qui ne peuvent, pour
des raisons éthiques évidentes, être étudiés in utero. Elles
permettront de mieux appréhender la formation normale
des tissus à partir du stade embryonnaire, de comprendre
le développement des organes et également d’explorer
l’oncogenèse et le développement des tumeurs d’origine
embryonnaire.
En théorie, de par leur capacité d’auto-renouvellement, les
CSEh pourraient générer un nombre illimité de cellules
différenciées spécialisées, fournissant une source de cellu-
les très intéressante pour la thérapie cellulaire. Pluripo-
tence et prolifération sont deux propriétés précieuses pour
la production de cellules pour une médecine régénératrice.
A plus ou moins long terme, et sous réserve d’une modifi-
cation de la loi, les CSEh pourraient être utilisées en théra-
peutique pour traiter des pathologies aujourd’hui incura-
bles. En 2004 il était estimé qu’une application de thérapie
cellulaire à partir de CSEh mettrait cinq ans pour passer
du laboratoire à une utilisation clinique validée par des
essais cliniques [24]. La mise au point de conditions de
dérivation compatibles avec les bonnes pratiques de la
thérapie cellulaire est un préalable indispensable à cette
perspective. Les CSEh et leurs dérivés semblent avoir des
propriétés immunogéniques faibles in vivo [25]. Ce privi-
lège immun permet d’envisager les CSEh comme un
espoir pour les patients qui n’auraient pas de donneur
HLA compatible.
In vitro il a été montré que des CSEh pouvaient se diffé-
rencier en cellules fonctionnelles de nombreux tissus : cel-
lules hépatiques, pancréatiques, cardiaques, neuronales,
hématopoïétiques... Le diabète de type I représente une
des pathologies qui pourrait fortement bénéficier de la
thérapie de remplacement cellulaire. Chez le patient dia-
bétique, les îlots de Langerhans du pancréas sont détruits
Cellules souches embryonnaires humaines
Ann Biol Clin, vol. 66, n° 3, mai-juin 2008 245
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.