réarmer pour faire face et revenir à une neutralité politique avec des réglementations plus ou
moins accommodantes.
Pierre Manent conteste l’idée qui voudrait faire de la laïcité la solution à ce problème.
Personne, hors des islamistes, ne veut revenir sur la laïcité : l’Etat ne s’occupe pas des
communautés religieuses et vice versa. La laïcité sépare les commandements politiques des
commandements religieux. Certains pensent qu’une extension de la laïcité est nécessaire pour
assurer la séparation de la société (et non simplement de la politique) et de la religion. Dans
cette optique, pour assurer cette séparation, ils pensent qu’elle doit intervenir là où elle
n’intervenait pas : habits féminins, voile, nourriture dans les cantines, horaires dans les
piscines… C’est-à-dire dans une multitude d’éléments de la vie quotidienne qui n’étaient pas
concernés par la laïcité. Ce n’est pas la meilleure manière de poser le problème.
Bien sûr, certains problèmes posés par les mœurs musulmanes doivent être réglés par la loi,
car ils mettent en cause les principes-mêmes de la vie collective. Par exemple, la burka doit
être interdite dans l’espace public : en société on ne peut partager avec quelqu’un qui ne
montre pas son visage. De même pour la polygamie. Les libertés de conscience ou de
changement de religion doivent être garanties. Mais il s’agit là d’interventions au nom de la
société et non de la laïcité.
D’autres éléments ont aussi attiré le regard ces derniers temps. Pierre Manent ne voit aucune
raison valable pour que les repas des cantines ne proposent pas d’alternative au porc. Le port
du foulard dans les établissements publics a fait l’objet d’une loi, d’une bonne loi car elle
concernait les personnes qui avaient une position d’autorité. Mais pourquoi vouloir étendre
cette loi aux mères de famille qui accompagnent leurs enfants dans les sorties scolaires ?
Dans quelle direction s’engager ?
L’Islam pose donc un gros problème à la France. Et actuellement nous ne voyons guère de
solution pour sortir de ces difficultés.
Pierre Manent propose d’aller dans la direction de l’engagement collectif plutôt que dans celle
des droits individuels. Déjà membres de leur communauté, il faut aussi en faire les membres
de la France. Il faut offrir énergiquement aux Maghrébins l’option française (plutôt que
l’option européenne). Il serait mauvais de leur faciliter l’apprentissage de l’arabe plutôt que
de celui du français. Cela les enfermerait dans une incertitude radicale sur ce qu’ils sont et sur
l’espace dans lequel leur vie s’inscrit. Il nous faut rendre la société française plus accueillante
et les inciter à faire le choix de la France, c’est-à-dire à rompre leur dépendance de leurs pays
d’origine arabo-musulmans.
Mais cela ne saurait être efficace que dans le cadre d’un effectif musulman à peu près stable.
Une trop grande croissance ne pourrait amener qu’à une méfiance exacerbée des non-
musulmans et les musulmans auraient de moins en moins de raisons de s’intégrer à une
communauté de plus en plus désarmée.
Ne serait-ce pas seulement l’islam radical qui pose problème ?
Certes pendant longtemps, l’islam n’a pas posé de problèmes, et il est difficile de parler
actuellement de l’islam tout court, car il est très divers. N’est-ce donc pas plutôt l’islam
radical qui pose problème ?
D’un point de vue citoyen, le problème posé quotidiennement est l’installation de plus en plus
visible et contraignante des mœurs musulmanes : dans certains quartiers, on ne trouve plus
que des boutiques musulmanes, la télévision est celle du Maghreb, seuls les hommes occupent
tout l’espace public, le ramadan devient obligatoire. Il est bien difficile d’empêcher de tels
regroupements qui se font naturellement et qui sont interprétés comme : « les musulmans ne
veulent pas de nous ». La méfiance s’accroît encore. Ces phénomènes irréversibles ont leur
part de légitimité, mais il est normal que nous posions aussi, par exemple, la question de