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s'envenima avec l'affaire des couvents d' Argovie, le rappel des jésuites à Lucerne (1844), les expéditions des
Corps francs, la guerre du Sonderbund. Dans les années 1840 et surtout après la fondation de l'Etat fédéral
en 1848, elle conduisit à l'isolation sociale et culturelle mi-volontaire mi-imposée des catholiques
conservateurs ("retrait dans le ghetto") et à un renouveau du confessionnalisme de part et d'autre. Les
barricades dressées contre l'esprit du temps trouvèrent leur expression idéologique dans la montée rapide de
l'ultramontanisme dans la seconde moitié du siècle et la mise à l'écart des catholiques libéraux dans l'Eglise.
Dans les cantons conservateurs, en majorité agraires, l'ultramontanisme alla de pair avec un sous-
développement économique, éducatif et culturel. La polarisation sur la bourgeoisie urbaine, protestante,
libérale et tournée vers l'industrie se manifesta par un Kulturkampf d'abord sourd, puis aigu après Vatican I
(1869-1870). Cette lutte se déclara avec des degrés d'intensité variable selon les cantons; il arriva assez
fréquemment (Saint-Gall, Argovie) que ceux qui la menaient appartinssent au camp catholique libéral. Tandis
que ce dernier perdait son aile radicale en 1873 (lorsque l'Eglise catholique-chrétienne se sépara de Rome) et
se trouva dès lors affaibli, le Kulturkampf intensifia la formation de deux blocs. Il est vrai que des interactions
se manifestèrent comme de tout temps. Les catholiques conservateurs se servirent de moyens modernes tels
que la presse, l'association ou le parti pour propager leurs idées conservatrices. A l'inverse, la pensée
fédéraliste et, après le Kulturkampf, la renonciation au projet d'imposer aux catholiques des solutions
radicales (au sens politique du terme) touchant au statut juridique de leur Eglise, furent adoptées par
l'ensemble de la société.
Comme dans d'autres pays, une contre- ou sous-société vit le jour, qui produisit ses propres institutions pour
presque tous les aspects de la vie sociale et privée en usant de façon très moderne des libertés garanties par
la Constitution fédérale de 1848. On vit naître un milieu spécifiquement catholique, qui exerçait sur les siens
une forte pression conformiste et suivait rigoureusement les préceptes de l'Eglise en matière morale et
religieuse, tout en se fermant à l'extérieur comme un bloc compact et sûr de lui. Un réseau d'associations fort
diverses fut créé, comme en Allemagne et en Hollande: Société des étudiants suisses (SES) (1841), des
artisans (Gesellenverein, oeuvre Kolping; 1853), association Pie IX (1857), Mission intérieure (1863), Caritas
(1901). Ce réseau se regroupa dans les deux organisations faîtières de l'Association populaire catholique
suisse (1905) et de la Ligue suisse de femmes catholiques (1912), ainsi que dans la Fédération des
travailleurs chrétiens-sociaux fondée en 1919. L'édifice se révéla si résistant que l'Action catholique lancée en
1922 par Pie XI ne réussit pas à s'imposer en Suisse alémanique en dépit des recommandations épiscopales.
Ajoutons que cet entrelacs de sociétés catholiques comprenait également deux organisations de jeunesse, le
Blauring et la Jungwacht, nées sur le modèle du mouvement de jeunesse allemand de l'entre-deux-guerres,
ainsi que la section catholique du scoutisme. Il était complété dans le domaine de la communication par une
presse catholique, dans celui de l'éducation par des gymnases souvent dirigés par de nouvelles
congrégations et par l'université catholique de Fribourg fondée en 1889, sur le plan politique, enfin par le
parti conservateur populaire créé en 1912, l'actuel Parti démocrate-chrétien (PDC). D'importantes initiatives,
inspirées de la doctrine sociale de l'Eglise, firent partie intégrante de ce catholicisme politique (Mouvement
chrétien-social).
L'intégration politique -- mais non culturelle, ni intellectuelle -- des conservateurs catholiques dans l'Etat
fédéral commença avec la reconquête du pouvoir dans les anciens cantons du Sonderbund, après une brève
parenthèse radicale, et avec l'élection du premier conseiller fédéral sorti de leurs rangs (1891). Elle déboucha
sur l'alliance bourgeoise qui se forma dans le contexte de la Première Guerre mondiale, de la grève générale
de 1918 et de la lutte défensive contre le socialisme. La contre-société catholique atteignit son sommet, du
point de vue organisation et société close, dans l'entre-deux-guerres, comme le montrent les Journées
catholiques cantonales et fédérales.
Auteur(e): Franz Xaver Bischof / WW
3 - Vatican II et développements récents
En Suisse comme dans les autres Etats industrialisés, le développement rapide de l'économie et de la société