Militer voie Prophete (sws)

publicité
MILITER
SUR LA VOIE DU PROPHETE
BEN HALIMA ABDERRAOUF
LE FIGUIER
Copyright Le Figuier
ISBN 2-912213-02-9
INTRODUCTION
1 Le but de ce livre
Louange à Allah, notre créateur et maître, et prière et salut sur notre
bien-aimé Prophète Mohammed.
Le but de ce livre est de déduire de la vie du Prophète, prière et salut
sur lui, la manière de faire avancer l'Islam. J'entends par là l'effort pour
former et construire l'Islam dans la vie. Ceci est une chose fondamentale pour
comprendre comment l'Islam peut entrer dans notre vie au niveau de l'individu
et de la société. Allah n'a pas révélé l'Islam entier dès le début, mais a
étalé sa construction sur vingt-trois ans. Il n'est pas possible de pratiquer
la religion entière d'un coup, mais il faut évoluer sur son chemin, trouver
son rythme et avancer étape par étape. Par où commencer? Comment avancer? Il
est difficile de trouver la réponse à ces questions dans le Coran, les Hadiths
ou la jurisprudence (Fiqh). Elle est par contre étalée au grand jour dans la
vie du Prophète, prière et salut sur lui. Notons en plus que le Coran et le
Hadith ne peuvent être correctement compris que dans leur contexte qui est la
vie du Prophète, prière et salut sur lui, et qu'à la lumière de cette dernière
ils prennent une autre dimension, voire un autre sens. Le récit suivant
illustre le but de ce livre.
Un jour, Omar Ibn Alkhattab, qu'Allah l'agrée, alors qu'il était calife,
était très tourmenté. Il envoya appeler Abdallah Ibn Âabbas, qu'Allah l'agrée,
et le questionna: "Comment se fait-il que cette communauté se divisera alors
qu'elle a une religion, un Prophète, un livre et une qibla (direction de
prière)?". Il répondit: "Ô Calife, quand le Coran a été révélé nous étions
présents, nous avons su pourquoi il était descendu, nous avons su
l'interpréter et l'appliquer là ou il fallait. Mais des gens vont venir, ils
liront le Coran sans connaître les circonstances de sa révélation, chacun
l'interprétera et l'expliquera à sa manière, ils se diviseront, ils se
disputeront et ils s'entretueront".
Bien que ce livre ne soit pas un récit de la vie du Prophète, prière et
salut sur lui, le lecteur non initié à sa vie peut tout à fait comprendre ce
livre car il contient la chronologie des évènements majeurs et l'analyse
détaillée de plusieurs d'entre eux. Mais je conseille à tous ceux qui veulent
apprendre l'Islam et aller plus loin que les strictes obligations, de
commencer par lire la vie du Prophète, prière et salut sur lui, entièrement et
en détail. Pour cela, le livre de référence est la sira (biographie du
Prophète) d'Ibn Hichèm, qui n'est pas à ce jour traduite en français, mais que
je compte traduire bientôt in cha Allah.
2. Plan
La vie du Prophète, prière et salut sur lui, se divise en deux grandes
périodes, sous-divisées en deux autres parties:
1. Treize ans de vie à la Mecque:
a) Trois ans de prêche en secret.
b) Dix ans de prêche en public.
2. Dix ans de vie à Médine:
a) Cinq ans de guerre sainte défensive.
b) Cinq ans de guerre sainte offensive.
PREMIER CHAPITRE
LE PRECHE EN SECRET
1 La prophétie
Le Prophète Mohammed, prière et salut sur lui, alors âgé de quarante
ans, reçut pour la première fois la révélation dans la grotte de Hira où
souvent il se retirait pour méditer. L'ange Jibril, que la paix soit sur lui,
lui révéla les premiers versets de la sourate Âalaq (96/1-5) lui ordonnant de
lire au nom du Seigneur, Créateur et Bienfaiteur. Le Prophète prit peur et ne
sut ce qui lui arrivait. Ensuite, Allah lui révéla le premier paragraphe de
sourate Alqalam (68/1-4) lui affirmant qu'il n'était pas un possédé, qu'il
aurait une récompense jamais interrompue et qu'il était d'une moralité
imminente. Il rentra chez lui et s'enveloppa d'une couverture. Jibril revint
et continua la révélation avec les premiers paragraphes des sourates Al
Mozzammil (73/1-9) et Al Moddathir (74/1-6) contenant deux ordres d'Allah:
lève-toi la nuit (pour prier) et lève-toi et avertis. Dans une des premières
apparitions au Prophète, prière et salut sur lui, Jibril lui enseigna les
ablutions et la prière de deux rakâats. Ainsi, la prière existait depuis le
début de la révélation alors que les cinq prières n'ont été obligatoires qu'à
partir de la dixième année de l'Islam, lors de l'ascension du Prophète au
ciel. Puis Allah révéla la sourate Fètiha et la révélation s'est interrompue
pendant six mois; elle reprit enfin sans interruption avec la sourate Dhouha
(le matin).
2 Les premiers musulmans
Les premiers à croire à la prophétie de Mohammed, prière et salut sur
lui, sont:
- Sa femme Khadija. Elle l'a accompagné chez son cousin Waraqa qui était
monothéiste et connaissait les anciens livres. Il a aussitôt cru au Prophète,
prière et salut sur lui, mais il est mort peu après.
- Son esclave et fils adoptif Zèyd.
- Son cousin et futur gendre Ali Ibn Abou Talib.
- Son meilleur ami Abou Bakr Siddiq. Il a tout de suite commencé à
prêcher autour de lui. En deux jours, onze personnes l'ont suivi dont les dix
grands sahabas (compagnons) hormis lui-même, Omar et Ali: Othmane Ibn Affane,
Abderrahmane Ibn Awf, Zoubeyr Ibn Âawwam, Talha, Abou Oubeyda Ibn Aljarrah,
Saâd Ibn Abou Waqqaç et Saîid Ibn Zèyd, qu'Allah les agrée. Notons que la
plupart en ce temps étaient des adolescents. Abou Bakr joua aussi un grand
rôle en affranchissant les esclaves musulmans, hommes ou femmes, dont Bilèl.
3 Les premiers fondements de la religion
L'Islam, parfait le jour où Allah révéla: [Aujourd'hui, j'ai parachevé
pour vous votre religion] (5/3), fut construit progressivement durant vingttrois années. Les deux premiers enseignements principaux furent:
- la foi dont les piliers les plus importants sont la foi en Allah et le
jour dernier, puis la foi en les prophètes.
- la morale qui comprend toutes les règles de bon comportement.
Nous allons donc étudier comment les sahabas, les premiers convertis,
ont acquis ces deux qualités de base. Le Coran se divise en sourates
mecquoises (révélées à la Mecque, donc dans la période que nous étudions) et
médinoises (révélées à Médine, donc plus tard).
4 La foi en Allah
a) Méditation sur les créatures
Allah nous enseigne (et a enseigné aux sahabas) la foi en nous invitant
d'abord à méditer sur le monde visible. Ainsi, dans le Coran mecquois, Allah
nous décrit plusieurs fois et en des styles différents les créatures
familières; à commencer par nous-mêmes, puis notre nourriture, les plantes,
les animaux, la pluie, les mers, les rivières, les montagnes, la terre, le
ciel, la lune, le soleil et les étoiles. Allah nous invite à contempler et
méditer sur ces créatures pour prendre conscience de sa puissance, de sa
sagesse et de ses bienfaits envers nous. Il nous explique que tout ce qui nous
sert ou nous plait, tout ce qui nous attire ou nous effraye ne sont que des
créatures. Elles n'ont donc pas de valeur par elles-mêmes, et c'est vers Allah
que ces sentiments doivent se diriger. C'est lui qu'il faut remercier,
espérer, craindre, vénérer et adorer.
Quel profit, quel enseignement pratique devons-nous tirer de la lecture
de ces versets, dont le Coran foisonne? Allah veut de nous une prise de
conscience, que nous apprenions à regarder et à raisonner autrement, à
dépasser le stade des créatures et reconnaître l'action du créateur derrière.
Citons quelques exemples.
Allah dit: [Que l'homme regarde sa nourriture, nous avons fait descendre
l'eau du ciel, puis nous avons fait fendre la terre, et nous y avons fait
pousser des grains, des vignes et des légumes, des oliviers et des palmiers,
des jardins touffus, des fruits et des herbages, ce sont des bienfaits pour
vous et vos bêtes] (80/24-32). Allah nous demande de regarder notre
nourriture. Qui ne regarde pas sa nourriture? Le but n'est pas simplement de
regarder mais de réfléchir. Qui réfléchit sur sa nourriture? Pendant le temps
que nous passons à manger, combien de temps méditons-nous sur les bienfaits et
la puissance d'Allah très visibles à travers cette nourriture? Voici la foi
demandée qu'Allah a enseigné aux sahabas. Avant de leur enseigner que telle
nourriture est licite ou illicite, Allah leur a appris à prendre conscience
que lui a créé cette nourriture, à ressentir la puissance et les bienfaits
d'Allah à travers cette nourriture et à accroître leur foi et leur amour pour
Allah tout en mangeant. Car le simple fait de ressentir qu'Allah nous a donné
cette nourriture, modifie notre comportement, nous inspire le respect de la
nourriture, nous incite à partager cette nourriture avec les pauvres, nous
retient de l'acquérir en faisant du tort aux gens...
Allah dit: [N'ont-ils donc pas observé le ciel au-dessus d'eux, comment
nous l'avons bâti et embelli et comment il est sans fissures?] (50/6). Qui
donc ne voit pas le ciel? Peut-être le voyons-nous cent fois par jour. Mais
sur ces cent fois, combien de fois pensons-nous à la grandeur d'Allah? C'est
cette prise de conscience qu'Allah veut de nous. Il nous exhorte dans le
Coran: [Ne voyez-vous pas?], [Ne comprenez-vous pas?], [N'entendez-vous pas?].
Souvent Allah critique les inconscients: [Ils ont des coeurs avec lesquels ils
ne comprennent pas, ils ont des yeux avec lesquels ils ne voient pas, ils ont
des oreilles avec lesquelles ils n'entendent pas, ceux-là sont comme les
bestiaux, même plus égarés encore, ceux-là sont les inconscients] (7/179).
La foi qu'Allah nous demande n'est pas simplement de croire à son
existence, car cette foi-là même Satan la possède. La foi est combien nous
nous attachons à Allah, combien nous l'aimons, le craignons, combien nous le
vénérons. Acquérir la foi consiste à sortir de son coeur la valeur des
créatures pour ne garder que la valeur d'Allah. Pour cela le premier pas est
de prendre conscience que toutes les créatures auxquelles nous sommes attachés
ne sont que des créatures et que c'est à Allah qu'il faut s'attacher.
b) Allah nous observe
La deuxième chose qu'Allah nous enseigne dans le Coran pour avoir la foi
demandée est qu'il connait toutes ces créatures, qu'il les voit et les entend
toutes en même temps, et qu'il nous voit et connait notre extérieur et notre
intérieur mieux que nous-même. Dans plusieurs passages Allah nous développe sa
science: [N'as-tu pas vu qu'Allah connait ce qu'il y a dans les cieux et dans
la terre. Dès que trois parlent secrètement entre eux il est leur quatrième,
ou cinq il est leur sixième, ou moins ou plus il est avec eux où qu'ils
soient. Puis il les informera de ce qu'ils ont fait le jour dernier.
Certainement, Allah connait tout] (58/7). Combien de fois Allah nous dit-il
qu'il sait ce que nous faisons? Mais dans combien de nos actions sommes-nous
conscients qu'Allah nous observe? Combien de minutes dans la journée sentonsnous qu'Allah connait nos pensées intimes?
Comprenons que ces versets ne représentaient pas pour les sahabas une
simple récitation ou des connaissances, sans plus, mais leurs vies, leurs
coeurs et leurs esprits ont été forgés par ces versets. Appliquer ce verset
consiste à ressentir qu'Allah nous écoute dès que nous allons prononcer une
parole, et qu'il connaît notre intention derrière chaque mot prononcé? Nous
devons alors penser comment Allah nous rappelera ces paroles le jour dernier.
Avant d'enseigner aux sahabas ce qu'un musulman doit dire et ne pas dire,
Allah leur a inculqué la certitude qu'il entend ce qu'ils disent et connait ce
qu'ils cachent. Si nous prenons conscience de cela, nous ne pouvons plus
insulter, mentir, blesser par la parole ou dire ce que nous savons
naturellement être mal.
Pour cela aussi le Coran fut révélé tout doucement au début pour leur
donner le temps de pratiquer, et ensuite le rythme s'accélérait. Supposons par
exemple qu'on décide d'appliquer le verset [Que l'homme regarde sa
nourriture], peut-être faudra-t-il un an d'entraînement avant d'acquérir le
réflexe de penser aux bienfaits d'Allah et à sa puissance dès que nous voyons
notre nourriture. Mais ensuite appliquer un autre verset [Ne voient-ils pas le
ciel...] sera beaucoup plus rapide. Jusqu'à ce qu'on puisse assimiler les
versets en temps réel au fur et à mesure qu'ils sont révélés.
c) Allah contrôle tout
La troisième chose qu'Allah nous enseigne pour acquérir cette foi est
que toutes les créatures sont sous son contrôle total. Rien ne se fait sans sa
science, rien ne se fait sans sa volonté. Ainsi Allah nous dit en détail que
c'est lui qui fait descendre la pluie et contrôle le cycle de l'eau, qui fait
pousser les plantes, qui partage les biens et nourrit toutes les créatures
vivantes, qui maintient les oiseaux dans le ciel, qui enrichit et appauvrit
qui il veut, qui donne les enfants garçons ou filles à qui il veut, qui donne
la vie et la mort, qui donne ou enlève le royaume, qui fait venir le jour et
la nuit, qui maintient les cieux et la terre... [Et pas une feuille ne tombe
qu'il ne sache] (6/59), rien n'échappe à sa volonté, à son ordre.
En prenant conscience du contrôle total et absolu d'Allah sur ses
créatures, nous ne sommes plus influencés par elles. Avec cette foi, nous ne
sommes plus fiers de nos richesses ou désespérés par la pauvreté, nous n'avons
plus la certitude dans notre force et inversement nous ne sommes plus effrayés
par celle de nos adversaires. Dans chaque évènement et dans chaque situation
nos coeurs, nos pensées et nos réflexes s'orientent vers Allah, en patience
dans le mal et en marque de gratitude pour le bien. Nous cherchons simplement
ce qu'Allah attend de nous dans cette situation, en sachant que c'est une
épreuve, et que pour la réussir et en avoir le bénéfice dans cette vie et dans
l'au-delà il suffit et il faut se soumettre à la volonté d'Allah. Il n'y a
donc pas lieu dans une bonne situation d'exalter sa joie et de tout faire pour
l'obtenir (moyens illicites), tout comme il est inutile de se lamenter d'une
situation difficile et de tout faire pour l'éviter (rester dans le licite),
car ces situations sont créées et contrôlées par Allah. Il faut plutôt
chercher son obéissance et fuir sa désobéissance et là seulement réside le
succès dans ce monde et dans l'au-delà.
Le but de ce livre n'est pas de développer "le sujet de la foi" mais
comment l'Islam s'est construit. Cette précision est nécessaire car la plupart
des musulmans sont inconscients du sens de la foi et croient que reconnaître
l'existence d'Allah suffit. Pour comprendre l'effort du Prophète, prière et
salut sur lui, il est très important de comprendre les tous premiers pas. Si
nous ratons le départ, nos efforts pour imiter les sahabas dans les autres
étapes seront vains. Il ne faut pas se précipiter pour arriver aux résultats
"concrets", mais s'assurer toujours que nous sommes sur la bonne voie. Pour
ceux qui veulent approfondir le sujet de la foi, et avoir une méthode pratique
d'acquisition de la foi, j'y ai consacré un livre: "La voie spirituelle:
méthode pratique".
5. La foi dans le jour dernier
Le deuxième pilier important de la foi est le jour dernier. C'est le
second thème très abondant dans le Coran mecquois: Allah nous raconte et nous
répète en détail la fin du monde, le jour dernier, l'Enfer et le Paradis. Le
but de ce pilier de la foi est de placer l'au-delà devant nous et le bas monde
(donya) derrière. Notre avenir, comprenons-le, n'est pas ce qui se passera
après un an ou vingt, mais il débute par la mort et la tombe, il continue le
jour dernier, et il finit au Paradis ou en Enfer, qu'Allah nous préserve de
l'Enfer. Quand nous nous levons le matin, notre souci ne doit pas se réduire à
notre déjeûner, nos commissions et comment passer une belle journée. Notre
pensée première doit être la préparation de notre mort, de notre situation
dans notre tombe et de notre rencontre avec Allah; que faire pour se
rapprocher du Paradis et s'éloigner de l'Enfer? Nous devons avoir la mentalité
d'un voyageur qui loin de rechercher le luxe pendant son voyage, n'a qu'un
souci, arriver au but, à destination, et se contente du minimum pendant son
périple.
6. La foi dans les prophètes
Le troisième pilier de la foi très abondant dans le Coran mecquois est
les récits des prophètes. L'enseignement principal de ces histoires est que la
voie du succès est celle des prophètes. En tous temps, les croyants qui ont
suivi les prophètes ont été sauvés et aidés par Allah dans ce monde et dans
l'au-delà, alors que ceux qui les ont reniés ont perdu dans les deux mondes
malgré tous leurs moyens matériels. Dans toutes les histoires, les prophètes
et les croyants sont passés par des épreuves et les apparences n'étaient pas
en leur faveur dans un premier temps, mais Allah ne les abandonne jamais et la
finalité est toujours pour les pieux.
La voie du succès est celle des prophètes, mais Allah ne détaille pas
encore cette voie. Dans le Coran, les prophètes prêchent l'unicité d'Allah et
son adoration. Parfois sont évoqués la prière, le jeûne, l'aumône et des
règles morales, mais le message reste général: le succès n'est pas par le
matériel, par les plaisirs, la richesse et la puissance, par les causes menant
à la richesse (commerce, argent, agriculture...) ni par les causes menant à la
puissance (royaume, armées, nombre, force physique); le succès est uniquement
dans la foi en Allah et son adoration. Les histoires des prophètes contiennent
aussi d'autres enseignements exposés au ch2 §3.a.
7. Les valeurs morales
Depuis le début, l'Islam a encouragé le bien au sens général et
découragé le mal, bien que les lois n'ont été établies qu'à Médine. Le Coran
mecquois encourage l'aumône (notamment en nourriture), la bonté avec les
proches, surtout les parents, puis envers l'orphelin et les pauvres,
l'affranchissement des esclaves. Il incite à dire la vérité, à tenir ses
engagements, à la justice, au pardon, à répondre au mal par le bien, à peser
et mesurer généreusement dans le commerce, à aider les personnes en
difficulté... Le Coran mecquois interdit l'injustice, surtout envers les
faibles tels que les orphelins, les pauvres et les femmes, de tuer (notamment
les nouveaux-nés), de voler (surtout les biens de l'orphelin), l'orgueil et le
mépris des autres, la médisance, de rapporter les paroles en vue de diviser,
le faux témoignage...
Une loi anté-islamique, confirmée par l'Islam dès la période mecquoise,
est la punition de l'homicide: la famille du mort a le choix entre tuer le
coupable, ou accepter une rançon (de l'ordre de cent chameaux à l'époque).
L'adultère aussi est proscrit depuis la périodes mecquoise. Cet acte
était déjà considéré chez les arabes comme très immoral. C'était une grande
honte d'être un fils illégitime (né d'un adultère). L'excès de jalousie (mais
aussi la pauvreté) conduisait parfois les arabes à enterrer leurs nouveau-nées
vivantes (par crainte qu'elles ne commettent l'adultère ce qui serait la honte
pour leurs pères)! Cependant les règles du voile, de la mixité et la punition
de l'adultère n'ont été établies que longtemps après.
Evidemment tout ce qui avait trait à l'idolatrie était interdit comme la
consommation des bêtes égorgées au nom des idoles.
8. Importance de la foi et de la morale
L'Islam n'a pas commencé par les obligations (prière, jeûne, voile...),
les interdictions (alcool, jeux de hasard, usure...), les lois (punitions,
divorce, héritage, transactions...) ni les connaissances pointues. Loin de
nous d'autoriser les interdits ou de laisser les obligations, mais autant au
niveau individuel ou social, si nous voulons progresser dans l'Islam nous
devons commencer là où les sahabas ont commencé: l'enseignement de la foi et
du bon comportement.
Sans une foi solide, l'adoration ne prend pas son vrai sens: à quoi sert
d'apprendre les moindres détails de la prière et les polémiques des savants
anciens et contemporains à leur sujet si nous ne sommes pas concentrés dans la
prière? C'est sans doute passer à côté du but. Que veut dire se prosterner à
Allah, symbole de la soumission totale, lui dire que c'est notre créateur et
bienfaiteur le parfait et le très-haut, alors qu'au fond de notre coeur nous
sentons le besoin, la dépendance et la crainte des créatures? Pour cela Allah
n'a pas occupé les esprits des sahabas par les aspects physiques et
extérieurs, mais il a dirigé toute leur énergie pour purifier leurs coeurs des
créatures.
La moralité est liée à la foi. Qu'est-ce qui empêche la foi de
progresser sinon l'orgueil et l'amour du bas monde? Qu'est ce qui empêche
l'amour entre musulmans et les bonnes manières sinon l'orgueil et l'amour du
bas monde? Donner de soi-même pour les autres et répondre au mal par le bien
sont parmi les actions qui font le plus fortifier la foi.
Ensuite l'Islam n'a pas progressé en préceptes religieux ni en nombre
d'adeptes jusqu'à ce que la foi ait été pure et que l'amour entre musulmans,
et l'amour du bien pour les non musulmans, aient été sincères. Admirons, le
lendemain de l'émigration à Médine, comment les médinois ont partagé leurs
maisons et leurs biens avec les mecquois, certains voulaient même partager
leurs femmes (rappelons la jalousie disproportionnée des arabes), et ceci avec
amour et sans le moindre regret ou arrière-pensée. Qui peut aujourd'hui
accueillir une famille chez lui et partager son salaire avec elle? Très peu de
gens. C'est cela que nous devons apprendre et enseigner. Si nous incitons par
exemple un débutant dans l'Islam à faire absolument les cinq prières à l'heure
et la prière du vendredi. Une semaine plus tard, il est licencié de son
travail, deux mois plus tard il est à la rue avec sa famille. Sommes-nous
capables, après l'avoir incité à faire cela, de partager avec lui ce que nous
avons? A-t-il la foi pour faire face à sa situation sans faiblir ni regretter?
Si la réponse est non, nous sommes donc incapables d'assumer les conséquences
de nos actes, et nous devons nous questionner sur leur validité.
Ensuite la moralité permet de présenter un modèle de société aux gens
que nous prêchons. La solution de la plupart des problèmes familiaux, sociaux,
économiques et politiques réside tout simplement dans le comportement moral.
Personne au monde ne peut critiquer la bonté, la justice et le respect des
autres, tout le monde est attiré par ces valeurs. Le danger de présenter
l'Islam uniquement par ses lois, interdictions, obligations, et parfois la
polémique entre théologiens, c'est de se heurter à un mur d'incompréhension,
et par là-même, d'éloigner les gens de la religion.
9. Activités des sahabas
Comment les sahabas ont-ils appris la foi et le bon comportement?
a) Cercles d'instruction
D'abord ils s'asseyaient durant des heures avec le Prophète, prière et
salut sur lui, dans la maison d'un compagnon nommé Arqam. Le Coran était le
pilier de leur enseignement, et nous-mêmes, qui essayons de suivre leur voie,
devons les imiter et concentrer un grand effort sur le Coran (même traduit,
bien qu'il n'a absolument pas la même valeur). Nous avons déjà vu la foi et la
morale dans le Coran, et nous étudierons plus loin les thèmes abordés dans
cette première période de la révélation du Coran.
b) Prières la nuit
Ensuite ils passaient environ la moitié de la nuit en prières, à lire le
Coran ou en invocations. Ceci était obligatoire pour le Prophète, prière et
salut sur lui, et les sahabas au début de l'Islam, puis a été modifié pour les
sahabas après l'Hégire (l'émigration à Médine); cependant même à Médine la
quasi-totalité des sahabas le pratiquaient. Donc l'apprentissage de la foi
nécessite beaucoup de temps pour que notre esprit et notre coeur s'orientent
uniquement vers Allah en oubliant les créatures, les cinq prières à elles
seules ne suffisent pas pour apprendre la concentration et le vrai goût de la
prière.
c) Mise en pratique
Ensuite leur comportement prenait la coloration des valeurs morales et
de la foi acquise (voir paragraphes 4, 5 et 6).
d) Prêche
Enfin les sahabas prêchaient autour d'eux. Que prêchaient-ils? La foi et
la morale. Ils expliquaient la parole de lè ilèhè illa Allah: tout ce que vous
aimez, toutes les choses auxquelles vous vous attachez n'ont pas de valeur;
c'est Allah que vous devez aimer et vénérer. C'est une parole très puissante,
une vérité éclatante que personne ne peut réfuter logiquement.
Celui qui est attaché aux créatures, son orgueil va rejeter de toutes
ses forces cette parole et rechercher tous les moyens pour la combattre tout
en connaissant qu'elle est vraie. Il craint cette parole car justement il sait
qu'elle est vraie et il comprend qu'elle représente la fin de son système de
pensée et qu'elle va rendre puérile et désuette son échelle de valeurs. Son
orgueil n'a plus lieu d'exister, son autorité sur les gens et les biens et
même sur sa personne n'est plus justifiée car la soumission à Allah est la
seule vérité. Comment lui expliquer qu'en renonçant à son orgueil, sa liberté
et sa façon de comprendre la réussite et qu'en plaçant son amour et sa
confiance dans son créateur, il va tout gagner? On ne peut que lui répéter:
reconnais qu'il n'y a de divinité qu'Allah et tu gagneras. Ainsi, le Prophète,
prière et salut sur lui, et les sahabas répétaient inlassablement le même
prêche aux mêmes gens; ces derniers le refusaient et augmentaient de colère et
de méchanceté.
D'autre part, celui qui désire la vérité et le bien, même s'il est
encore attaché à des envies, des habitudes ou des contraintes matérielles, va
être attiré par cette parole, cette foi et cette religion. Il va s'apercevoir
qu'il existe une chose infiniment plus précieuse que les plaisirs auxquels il
s'adonne: Allah; et qu'en allant vers lui il a tout à gagner. Normalement, il
est très difficile de laisser ses habitudes, mais il suffit de les lâcher et
de tenir à Allah pour trouver le bonheur et la joie intérieure, pour trouver
la facilité, le plaisir de pratiquer et de subir tous les sacrifices pour
Allah. Ceci explique le changement profond, total et immédiat des nouveaux
convertis. Ceux qui les invitaient à l'Islam possédaient la foi dans sa pureté
et sa profondeur et avaient effectivement trouvé le bonheur le plus intense
qui existe: connaître Allah, l'aimer et se rapprocher de lui. Les nouveaux
convertis à leur tour prenaient la foi avec cette pureté et cette profondeur.
On comprend donc le gouffre qui se creusera et le conflit qui éclatera
entre croyants et mécréants dès que le prêche se fera en public. D'un côté,
les mécréants, refusant la vérité évidente, n'ont de solution pour préserver
leur situation sociale et empêcher la nouvelle religion de progresser que la
manière forte. De l'autre, les sahabas redoublaient de pitié, de prières et de
prêche pour eux. A leur tour, les mécréants redoublaient de rage et de
méchanceté. Certains étaient enfin touchés et se convertissaient. D'autres
sont morts dans leur mécréance en combattant les musulmans ou par des fléaux
envoyés par Allah. La plupart se convertirent à la prise de la Mecque devant
la puissance spirituelle et matérielle des musulmans (ch4 §3.c).
En plus de cette parole "lè ilèhè illa Allah", les sahabas annonçaient
le jour dernier et tout ce qui en découle, présentaient le modèle moral à la
société et critiquaient les pratiques immorales de l'époque.
Par cet exposé, j'ai voulu sensibiliser le lecteur à la puissance de ce
prêche. Le premier impact est sur le prêcheur: sa foi et son souci pour les
gens augmentent au fur et à mesure qu'il parle et qu'il milite. Ensuite la
vérité apparaît en évidence pour la personne qui écoute. Enfin, la séduction
s'opère directement si cette dernière recherche le bien et la vérité. Dans le
cas contraire, si la personne refuse la vérité et préfère garder son mode de
vie et ses privilèges, le prêche enclenche la fureur et l'indignation. Il est
évident dans la vie du Prophète, prière et salut sur lui, et des compagnons
que le prêche était le moteur de leur vie. Qu'est-ce qui les poussait à
avancer, à se sacrifier, réfléchir, se soucier, pleurer devant Allah sinon la
peine et la pitié pour les gens qui vont en Enfer? Il n'est certainement pas
impossible d'adorer Allah sans prêcher, mais on ne peut se considérer sur le
chemin de l'Islam et du Prophète, prière et salut sur lui, que si on est
engagé pour l'Islam. C'est cet engagement qui oriente la vie. C'est cet
engagement qui nous distingue de la société de consommation, la société dont
le but est la vie d'ici bas.
C'est aussi cet engagement qui va nous faire évoluer dans l'Islam. En
effet, une fois engagés, Allah nous éprouve. Réussir, c'est ne pas délaisser
les ordres d'Allah face à ces épreuves. Là, notre foi augmente. Puis survient
une autre épreuve et ainsi de suite. Alors que si nous ne nous sommes pas
engagés, face à une épreuve, nous faisons ce qui nous arrange, nous
désobéissons ou renonçons aux bonnes oeuvres, notre foi n'augmente pas et donc
nous n'évoluons pas.
e) Créer l'environnement propice
En conclusion de ce qui précède, il faut pour acquérir la foi créer
"l'ambiance de la foi" puis l'élargir pour qu'elle englobe la majorité de
notre vie.
- D'abord entre pratiquants, discuter de la foi, étudier le Coran, se
motiver pour l'Islam.
- Ensuite chacun consacre du temps pour prier Allah, l'évoquer et
l'implorer.
- Puis quand nous rencontrons d'autres personnes, leur expliquer, les
inviter et les motiver pour la foi et la religion.
- Enfin, en mangeant, en marchant, en travaillant, méditer sur Allah et
sur ses créatures.
Notons en plus qu'Allah a interdit d'assister aux discussions des
mécréants contredisant le foi et raillant l'Islam car si on écoute on est
nécessairement touché.
f) Le groupe
Uniquement au sein d'un groupe uni par la foi pouvons-nous développer
ces qualités. Isolés, personne ne nous aide quand nous sommes motivés et
personne ne nous encourage quand nous faiblissons. Tôt ou tard, la personne
isolée succombera à Satan. Au mieux, elle stagnera dans un état qu'elle croit
élevé mais qui n'est qu'illusion. Le groupe se forme par le prêche. A partir
de deux personnes, nous pouvons créer l'ambiance de la foi entre nous. Ensuite
l'apprentissage
de
la
foi
et
de
l'amour
se
fait
collectivement.
L'élargissement du groupe se fait par le prêche. Il faut toutefois savoir que
l'augmentation du nombre ne se fait pas automatiquement: il appartient à Allah
seul de décider de la guidée des gens. Les réactions, positives ou négatives,
que nous rencontrons dans notre prêche sont des épreuves pour nous éduquer.
Les premières années de l'Islam nous enseignent aussi qu'une des raisons
majeures pour sortir la valeur des créatures de nos coeurs est de vivre avec
les pauvres et de partager avec eux. La plupart des premiers musulmans étaient
des pauvres, des jeunes rejetés de leurs familles ou des esclaves affranchis.
Ils étaient presque en permanence avec le Prophète, prière et salut sur lui.
Les mécréants par fierté et orgueil refusaient de s'asseoir avec le Prophète à
cause de leur présence. De tous temps, les premiers à suivre les prophètes
étaient les pauvres. A ce moment-là, puisque nous partageons avec eux la même
foi et la même religion, nous devons aussi partager nos moyens matériels si
nous sommes véridiques. Cette étape est incontournable pour suivre les sahabas
dans leur foi et dans leur voie. Si nous voulons pratiquer l'Islam sans
déranger nos privilèges et notre confort, nous allons tomber dans un
formalisme qui nous privera de l'essence et de la magnificence de l'Islam.
g) Sacrifice et patience
Enfin à travers les épreuves et les sacrifices, en faisant preuve de
patience et d'endurance, Allah a accru leur foi et forgé leurs qualités. Ceci
sera détaillé au prochain chapitre: "Le prêche en public".
10. Pourquoi le prêche en secret
Le prêche a existé du début à la fin de la vie du Prophète, prière et
salut sur lui, mais sa forme a changé selon les quatre périodes citées dans
l'introduction. Au début, le prêche était secret, les musulmans parlaient à
leurs amis en lesquels ils avaient confiance et qui soit se convertissaient,
soit gardaient le secret. La raison est que les musulmans étaient peu nombreux
et que, s'ils étaient découverts, ils auraient pu être exterminés et ça aurait
été la fin de la religion. Les musulmans n'avaient pas peur de la mort et ne
détestaient pas le martyre, mais il n'était pas dans l'intérêt de l'Islam que
les musulmans meurent. Une autre raison est que les tous nouveaux convertis
n'étaient peut-être pas prêts à affronter les rudes épreuves. Ils ont ainsi pu
avoir un répit pour se préparer en concentrant leurs efforts sur la foi
uniquement. Après trois ans, quand les musulmans avaient atteint le nombre de
trente-huit, Allah ordonna de prêcher en public (ce n'est pas le nombre précis
d'années ou de musulmans qui est déterminant).
DEUXIEME CHAPITRE
LE PRECHE PUBLIC
1. La réaction des mécréants
Abou Lèhèb, oncle paternel du Prophète, prière et salut sur lui, frère
du chef de la Mecque Abou Talib, fils de l'ancien glorieux chef de la Mecque
Abdelmottalib, déclara tout de suite son opposition à la prophétie de son
neveu, non parce qu'il n'y croyait pas, mais parce qu'elle entravait ses
ambitions de pouvoir. Abou Jahl, membre d'une famille concurrente à celle du
Prophète, devint aussi l'ennemi acharné de l'Islam. La majorité des nobles et
des dirigeants prirent la même position et s'unirent pour combattre l'Islam
par tous les moyens. Certains sympathisaient avec la nouvelle religion mais,
par crainte de représailles, restèrent discrets sur leurs sentiments.
Après une période d'étonnement (voir Coran 38/7) et de prise de
conscience de la nouvelle religion, les adversaires de l'Islam commencèrent
par se moquer du Prophète, prière et salut sur lui, (Coran 25/41) et de ses
suiveurs (Coran 46/11). Puis ils critiquèrent l'unicité de Dieu (Coran 38/5),
la vie après la mort (Coran 36/78) et tout ce qui leur semblait critiquable
dans la nouvelle religion et ses adeptes (Coran 21/3). Puis ils proposèrent au
Prophète, prière et salut sur lui, le pouvoir, la royauté, la richesse et les
femmes contre l'abandon de sa mission. Il dit sa célèbre parole: "Même s'ils
plaçaient la lune dans ma main droite et le soleil dans ma main gauche, je ne
laisserais pas cette mission (il s'agit du prêche et non de l'Islam) jusqu'à
ce qu'Allah la fasse triompher ou que je périsse pour sa cause". Cette
citation illustre l'importance capitale du prêche et de l'engagement pour la
cause de la religion, valeurs perdues dans l'Islam traditionnel. Ils lui
proposèrent aussi d'adorer son Dieu un temps et qu'il adore les leurs un
temps. Il refusa encore (Coran 109) et ils lui demandèrent des miracles (Coran
6/111). Tout en leur rappelant que le Coran suffit comme miracle, Allah exauça
leur demande en fendant la lune en deux devant leurs yeux (Coran 54/1). Il
refusèrent obstinément de reconnaître la véracité du miracle et du message
prophétique et Allah leur refusa tout autre miracle de cette envergure.
Ensuite, ils se concertèrent, et, après une réflexion "profonde", décidèrent
de traiter le Prophète, prière et salut sur lui, de magicien (Coran 74/18-25).
Enfin ils passèrent à la manière forte (Coran 28/2-3). Année après année, la
brutalité et la torture des mécréants sur les musulmans s'intensifiaient.
2. La position des musulmans
Les musulmans poursuivaient leurs activités avec plus d'ardeur dans des
conditions plus difficiles: réunions secrètes dans la maison de Arqam, prières
la nuit, prêche et bon comportement.
En plus, ils prêchaient publiquement l'Islam aux individus, dans les
lieux publics surtout le marché et les "clubs" autour de la Kaâba où se
réunissaient les différents groupes des mecquois. Ce prêche redoublait
l'énergie et la motivation des musulmans, tandis que la haine et la rage des
mécréants s'accroissaient d'autant.
Quant au bon comportement, les musulmans unis par leur foi, affrontant
les mêmes difficultés, étaient entièrement solidaires. Lorsque des gens
démunis (esclaves, pauvres ou jeunes rejetés de leurs familles) embrassaient à
l'Islam, le Prophète, prière et paix sur lui, les recueillait et les plaçait
chez des musulmans plus aisés.
En ce qui concerne leur comportement vis à vis des mécréants, Allah a
ordonné aux musulmans de "baisser les mains", c'est-à-dire de ne pas
répliquer. La seule "réaction" autorisée était l'émigration quand la situation
devenait insupportable. Allah a une sagesse infinie dans ses décisions, mais
nous allons essayer de dégager de façon non exhaustive quatre bonnes raisons à
cet ordre divin:
a) Education des musulmans
Tout d'abord, cette période était une éducation pour les musulmans. Il
est facile de dire que nous n'accordons pas de "valeur" aux créatures et que
l'au-delà est notre seul but, mais quand il faut sacrifier, la vérité crue
apparaît. Si nous avons du mal à supporter une épreuve c'est que notre foi
n'est pas encore pure. Pour se redonner de l'énergie spirituelle, les sahabas
retrouvaient le Prophète, prière et salut sur lui, et les croyants, se
rappelaient de la vie après la mort, priaient et imploraient Allah, en un mot,
ils rebaignaient dans l'ambiance de la foi. Ainsi, le moral remontait et les
sahabas étaient prêts à affronter l'épreuve du lendemain, chaque jour plus
dure. Ainsi jour après jour, mois après mois, année après année, la foi des
musulmans se forgeait jusqu'à atteindre le niveau requis par Allah pour leur
accorder son amour et son aide.
Dans l'hypothèse où les musulmans auraient répliqué, le désir de se
défendre et de se venger aurait enflammé leurs coeurs. Il ne serait plus alors
question d'augmenter sa foi puisqu'on n'essaye plus de supporter et de
comprimer ses passions pour Allah.
b) La pitié pour les mécréants
Deuxièmement, cette attitude a permis aux musulmans d'apprendre à avoir
pitié et à désirer le bien pour les mécréants. En effet, il est trop facile de
prétendre qu'on veut le bien pour l'humanité et qu'on est vraiment désolé pour
les gens qui vont en Enfer. Mais ce souci sera-t-il toujours plus fort que nos
préoccupations personnelles, surtout si ces mêmes personnes dont nous avons
pitié dépensent toutes leurs énergies pour nous combattre? Pour cela, les
musulmans supportaient sans répliquer, répétaient inlassablement leur prêche
et priaient pour la guidée et le salut de leurs tortionnaires. N'est-il pas
plus intelligent et plus proche de la religion d'Allah et de la voie du
Prophète, prière et salut sur lui, de prier pour leur guidée que de prier pour
leur destruction? Satan ne suffit-il pas pour emmener les gens en Enfer pour
que nous l'aidions avec nos prières? Le but du Prophète, prière et salut sur
lui, et de tous les prophètes est la guidée des gens, et la première condition
pour accomplir cette mission est de désirer du fond du coeur le bien pour tous
les gens quels qu'ils soient. Ainsi les sahabas ont appris à désirer le bien,
à avoir plus de pitié et d'amour pour les mécréants que ces derniers n'avaient
de haine et de rage contre eux.
Dans l'hypothèse contraire où les sahabas auraient riposté, la vengeance
et la haine remplacent le pardon et l'amour.
c) La guidée des mécréants
Un troisième fruit de cette période est la guidée des mécréants. Le
résultat du prêche est rarement immédiat. On ne peut exiger que les gens
reconnaissent la vérité et la suivent du premier coup. Certains, rares,
suivent dès le départ et malgré toutes les difficultés. Pour la plupart, il
faut fournir un effort de longue haleine. Répéter inlassablement le message,
donner constamment l'exemple et garder toujours son coeur pur, transforme les
mentalités les plus ancrées, réveille les esprits les plus têtus et attendrit
les coeurs les plus endurcis. Répondre au mal par le bien est une des armes
les plus puissantes pour changer le mépris en respect et la haine en amitié.
Allah nous enseigne la manière de prêcher: [La bonne action et la mauvaise ne
sont pas pareilles. Repousse (le mal) par ce qui est meilleur; et voilà que
celui avec qui tu avais une animosité (ton ennemi) devient tel un ami
chaleureux] (41/34).
Si par contre nous répondons au mal par le mal, qu'est-ce qui nous
distingue des autres? Cette manière de propager l'Islam que nous enseigne
notre Prophète est beaucoup plus efficace que la manière forte.
d) La préservation de la religion
Enfin, patienter sans répliquer était la seule attitude qui permette de
préserver la religion. Au début, à la Mecque, les musulmans étaient largement
minoritaires et une chose est étonnante dans cette période: pourquoi les
mécréants s'évertuaient-ils à torturer les musulmans et à combattre l'Islam
par tous les moyens alors qu'il leur suffisait de tuer quiconque se déclarait
musulman? Oumeya Ibn Khalaf (grand mécréant mort à Badr) torturait Bilal
jusqu'à lui dire: "Nous sommes las de te torturer et tu n'en as pas encore
assez?!". La décision d'assassiner le Prophète, prière et salut sur lui, ne
fut prise que treize années après la première révélation. Il y a bien eu
quelques tentatives isolées comme celle de Omar Ibn Khattab, qu'Allah l'agrée,
avant sa conversion, mais la détermination collective ne vit le jour que la
veille de l'émigration. Les dirigeants mécréants se réunirent, réfléchirent
profondément et décidèrent d'un commun accord que la seule solution consistait
à tuer le Prophète, prière et salut sur lui, en faisant participer un membre
de chaque tribu à son assassinat pour rendre impossible toute représaille.
Dans cette situation extrême, Allah autorisa et même ordonna aux musulmans
d'émigrer.
Dans l'hypothèse où les musulmans auraient riposté, il est évident que
la confrontation se serait aggravée et aurait abouti à une tuerie qui aurait
laissé peu de survivants parmi les musulmans. L'Islam serait alors devenu une
religion interdite pendant une génération au moins et on aurait gardé le
souvenir amer de révolutionnaires qui veulent s'imposer par la force.
Nous n'oublions pas l'intervention divine dans ce rapport de force, les
musulmans ne comptent pas et ne triomphent pas par leurs propres moyens, la
victoire est accordée par Allah seul. Mais puisque dans cette période Allah
avait interdit toute intervention armée, on ne peut obtenir son secours et son
assistance en lui désobéissant. Allah n'a-t-il pas retiré son aide à la
bataille d'Ouhoud pour une faute beaucoup moins grave (Coran 3/152)? Sachons
que dans la vie du Prophète et dans l'effort pour la religion, l'effort est la
règle et les miracles sont l'exception. Nous ne pouvons pas négliger les
efforts et compter sur les miracles. C'est en dépensant toute notre énergie et
tous nos moyens à la manière qu'Allah nous indique que nous obtenons
l'assistance d'Allah. Allah pouvait donner la domination aux musulmans, mais
il voulait leur offrir les qualités spirituelles et non la suprématie
matérielle.
3. Le Coran, principal soutien des musulmans
Dans cette période difficile et cruciale le Coran descendait abondamment
(60% de la totalité du Coran) pour soutenir et diriger les musulmans et pour
prêcher les mécréants. Nous avons déjà expliqué que, dans la période de prêche
en secret, avant les confrontations publiques, le Coran traitait surtout de la
foi et la moralité. En plus de ces deux qualités, l'ordre de patienter revient
très souvent. Plusieurs fois aussi, Allah recommande de pardonner, de ne pas
faire attention aux ignorants, de ne pas s'accrocher avec eux et de répondre
au mal par le bien. A cela se rajoutent les thèmes suivants:
a) Récits des prophètes précédents.
Ces histoires affermissent le Prophète, prière et salut sur lui, et les
compagnons en leur informant que les prophètes et leurs suiveurs sont tous
passés par le même chemin, et que la victoire finale appartient aux croyants.
Le but aussi est de leur donner l'exemple à suivre et leur enseigner la foi et
la pratique de la religion à travers les histoires vraies des héros de
l'humanité. Dans les histoires des prophètes, le Coran ne nous enseigne pas la
manière de prier ou de jeûner, mais surtout la manière de prêcher. Donc le but
de ces histoires n'est pas simplement culturel, mais elles sont le guide des
sahabas dans leur vie quotidienne. Pour cela il est nécessaire de ressentir
l'atmosphère qui régnait à la Mecque pour comprendre l'étendue et la portée de
ces histoires. Mieux encore, une personne engagée dans la cause religieuse et
luttant sur la voie des sahabas se sent directement concernée par ces
histoires et en tire tous les jours une énergie et des enseignements nouveaux.
b) Discussions avec les idolâtres.
La quasi-totalité des arguments des mécréants, de leurs exigences et de
leurs railleries sont repris dans le Coran. De très nombreux passages (comme
dans les sourates Tour et Isra), même plusieurs sourates (telles Ikhlass,
Massad, Kafiroune, Kaouthar, Maâoune, Houmaza, Dhouha, Naba et Noun) répondent
aux dires des mécréants et reprennent parfois leurs paroles. Fréquemment,
Allah démonte leurs arguments, il les appelle à la raison, il les ridiculise,
il les prêche, il les menace, il console le Prophète, prière et salut sur lui,
et enfin il lui promet la victoire dans ce monde et dans l'au-delà.
Malheureusement nous ne pouvons pas citer toutes ces discussions, le lecteur
devra se rapporter à l'explication du Coran d'Ibn Kathir (bientôt traduite en
français par moi-même inchallah). Notons seulement que ces passages sont très
nombreux et que la connaissance de l'évènement et du contexte permet de les
apprécier beaucoup plus et montre à quel point le Coran guidait les sahabas de
près.
c) Les évènements importants
Le Coran évoque certains évènements importants qui sont d'excellents
points de repère pour situer les sourates dans le temps. En effet nous
connaissons l'ordre de révélation des sourates les unes par rapport aux autres
(il est indiqué dans la plupart des Corans au début de chaque sourate). Notons
toutefois que la date de révélation d'une sourate indique la date du début de
la révélation de cette sourate, car elles sont souvent révélées en plusieurs
fois, et d'autres sourates peuvent être commencées avant que les précédentes
ne soient complètes, Jibril indiquant à chaque fois au Prophète, prière et
salut sur lui, à quel endroit de quelle sourate il faut placer les nouveaux
versets. Comme de temps en temps un évènement important et historiquement
connu est évoqué dans le Coran, nous pouvons situer parfaitement la date de
révélation de la sourate correspondante et approximativement celle des
sourates intermédiaires. Citons parmi ces évènements: le début du prêche
public, la fente de la lune, l'affaire des versets sataniques marquant le
retour de la première émigration en Ethiopie, la rencontre avec les djinns
suite à la visite de Taif, le voyage nocturne à Jérusalem et l'ascension
postérieure aux décès d'Abou Talib et Khadija et marquant ainsi le début des
cinq prières. Nous allons reprendre ces évènements dans le paragraphe suivant.
d) Le ton du Coran évolue
L'encouragement et l'incitation à la patience se font de plus en plus
forts pour les croyants, les menaces et la ridiculisation des mécréants de
plus en plus sévères. Comparons par exemple la première grande sourate révélée
à la Mecque: Al Aâraf avec la dernière: Al Âankabout (l'araignée).
Les sujets traités dans Al Aâraf sont dans l'ordre: la véracité de la
révélation, prêcher les gens, l'au-delà, les bienfaits d'Allah, Adam avec
Ibliss, l'homme sur terre, la religion interdit le mal et ordonne le bien, les
communautés et les messagers, les mécréants, la mort et les comptes, l'Enfer
et le Paradis, invitation à la foi, les bienfaits d'Allah, Nouh, Houd, Salih,
Lout, Chouâayb (paix sur eux), moralité de ces histoires, Moussa (la première
grande religion et grande communauté de croyants, c'est le début d'une ère
nouvelle), annonce du Prophète, prière et salut sur lui, par Moussa et
mondialité de son message (si tôt!), les générations après Moussa, l'unicité
et la foi dans le monde des âmes, le polythéisme et la mécréance, demande des
mécréants sur la date du jour dernier (c'est la seule allusion dans cette
sourate aux évènements courants) et enfin ridiculisation des idoles. Que de
découvertes et d'enseignements pour les sahabas! Nous sentons bien qu'il
s'agit d'une formation de base pour les sahabas: Allah leur raconte l'histoire
de l'humanité et la conclusion à en tirer. Le Coran n'évoque pas encore les
problèmes avec les mécréants.
Les sujets traités dans Al Âankabout sont dans l'ordre: l'épreuve des
croyants, la perte des mécréants, l'effort, désobéir aux parents pour tenir à
la foi, les épreuves, les mécréants incitent les musulmans à suivre leur voie,
destruction du peuple de Nouh, Ibrahim et ses fils, destruction des peuples de
Lout, Chouâayb, Âad, Thamoud, Firâaoun, Hamane, Qaroun, l'exemple de
l'araignée: ceux qui prennent des maîtres (patrons et protecteurs) autres
qu'Allah sont comme une araignée fabriquant une toile, accomplir la prière,
prêcher les gens du livre de la meilleure manière, la véracité du Prophète,
prière et salut sur lui, le miracle du Coran, les mécréants demandent la
punition d'Allah, l'émigration, patience et confiance en Allah, Allah le
bienfaiteur et créateur, donne la vie et la mort, la vie d'ici est un jeu, les
gens renient les bienfaits d'Allah, le bienfait particulier aux mecquois: la
Kaâba qui fait leur valeur, perte des mécréants et guidée de ceux qui font
l'effort pour Allah. Nous voyons que cette sourate est révélée en pleine
confrontation entre croyants et mécréants.
4. Chronologie des principaux évènements
Le calendrier commence l'année de l'Hégire (émigration à Médine), donc
l'Islam commence en -13.
a) -13 : Début
Moddathir et Fatiha.
de
la
prophétie,
sourates
Alaq,
Qalam,
Mozzammil,
b) -10 : Début du prêche public, sourate Massad.
c) -9 : Islam de Omar et Hamza suite au sacrifice impressionnant d'Abou
Bakr, qu'Allah les agrée. Les musulmans sont considérablement renforcés mais
sont toujours minoritaires et persécutés. Le Prophète, prière et salut sur
lui, refuse les propositions des mécréants. Après une concertation et une
réflexion très profonde, les nobles mecquois décident de considérer Mohammed
comme un magicien.
d) Vers -8 : Séparation de la lune suite à la demande des mécréants,
sourate Qamar (la lune). Devant leur incrédulité et leur mauvaise foi, Allah
ne leur accordera plus de miracles de cette ampleur.
d) Vers -7 : Martyre sous la torture de Soumèya et de son mari Yèssir,
sous les yeux du Prophète, prière et salut sur lui, qui leur annonce le
Paradis. Les mécréants s'acharnent sur les faibles musulmans tels Ammar Ibn
Yèssir, Bilèl, Souhayb, Abdallah Ibn Massâoud et Khabbèb Ibn Alaratt.
e) -7 : Première émigration en Abyssinie (Ethiopie) des plus affligés
suite aux tortures insupportables (treize personnes). Le roi Najachi (Négus),
chrétien croyant et juste les accueille et les protège. Il embrassera l'Islam
en l'an 6 après l'Hégire.
f) -6 : Boycottage des musulmans par les mecquois: les musulmans sont
isolés dans un quartier: toute transaction ou mariage est interdit avec eux.
C'est une épreuve très dure pour les musulmans qui se retrouvent à manger des
bêtes mortes et des ordures pour survivre; elle dure deux ou trois ans.
g) -5 : Affaire des versets sataniques: Satan fait croire aux mécréants
que le Prophète, prière et salut sur lui, reconnaît leurs idoles. Ils se
prosternent alors avec lui. La nouvelle court qu'ils sont rentrés dans l'Islam
et les musulmans reviennent d'Ethiopie. Sourate Najm (L'étoile). Avec les
musulmans, vient une délégation d'une trentaine de chrétiens d'Ethiopie. Après
avoir discuté avec le Prophète, prière et salut sur lui, ils embrassent
l'Islam: sourate Qaças (Les histoires). Comme l'état des musulmans empire,
deuxième émigration en Ethiopie (quatre-vingt personnes); ils ne rejoindront
le Prophète prière et salut sur lui que six années après son émigration à
Médine.
h) -3 : Année de tristesse: le Prophète, prière et salut sur lui, est
profondément affligé de la mort de son oncle et père adoptif Abou Talib. Il
était le chef de la Mecque et protégeait son neveu mais refusa d'adhérer à sa
religion jusqu'à son dernier soupir, bien qu'il connaissait sa véracité. Abou
Jahl lui succède au pouvoir et le Prophète, prière et salut sur lui, est
durement malmené. Mort aussi, trente-cinq jours plus tôt, de son épouse
Khadija qui le soutenait financièrement et surtout moralement, après qu'Allah
lui ait annoncé le Paradis. Le Prophète, prière et salut sur lui, se remarie
avec Sawda et Aïcha.
Pour consoler le Prophète, prière et salut sur lui, et les musulmans,
Allah le comble en l'emmenant à Jérusalem pour diriger la prière de tous les
messagers. Puis il l'élève dans les cieux où il rencontre les plus importants
prophètes, il lui montre le Paradis et l'Enfer, et le rapproche de lui à un
endroit où aucune créature ne peut accéder. Là, il lui donne les cinq prières
pour lui et sa communauté (sourate Isra, le voyage nocturne).
Devant le blocage de la situation à la Mecque, le Prophète, prière et
salut sur lui, essaye d'exporter le message. Expédition à Taif avec son fils
adoptif Zèyd d'où il est sauvagement chassé: il formule ensuite sa célèbre
plainte où il expose sa faiblesse à Allah, puis refuse la destruction de Taif
qu'Allah lui propose et prie pour la guidée de leurs descendants. A son retour
à la Mecque, il rencontre les djinns qui embrassent l'Islam et vont prêcher
leur peuple (sourate Djinns). D'autres rencontres auront lieu avec les djinns.
Il profite du pèlerinage annuel à la Kaâba pour faire le tour des
délégations de pèlerins des tribus et leur exposer son message. Les idolâtres,
surtout Abou Lahab, font aussi le tour des tribus pour les prévenir contre le
Prophète, prière et salut sur lui. Aucune réponse positive jusqu'à la
rencontre des médinois. Les pèlerins de retour chez eux préviennent leurs
tribus contre le Prophète, prière et salut sur lui. Quelques personnes dans
quelques tribus embrassent l'Islam, parmi eux: Abou Dharr Alghifari et Toufayl
Ibn Amr Addawsi qui sera la cause de la conversion d'Abou Hourayra.
i) -2 : Fin du blocus contre les musulmans suite à l'indignation de
quatre nobles sympathisants de l'Islam. Première rencontre des médinois qui
n'hésitent pas un instant à suivre le Prophète, prière et salut sur lui. Ils
reconnaissent en lui le prophète annoncé par les juifs.
13 médinois reviennent l'année suivante et prêtent serment de suivre
l'Islam: c'est le premier serment de Aqaba. Le Prophète, prière et salut sur
lui, envoie Moçâab Ibn Ôumèyr enseigner et prêcher à Médine, où l'Islam se
propage rapidement et les musulmans commencent à prier la prière du vendredi.
Le pèlerinage suivant, soixante-quinze médinois (dont deux femmes) prêtent
serment au Prophète, prière et salut sur lui, de suivre l'Islam et de
combattre pour sa défense (avant que le combat ne soit autorisé). Le Prophète
ordonne aux musulmans de partir à Médine et reste lui-même en dernier avec
Abou Bakr et Ali.
j) 0 : Les mécréants craignant le développement de l'Islam à Médine
décident en présence d'Ibliss de tuer le Prophète. Mais Allah les aveugle et
le Prophète, prière et salut sur lui, passe devant eux.
TROISIEME CHAPITRE
LA GUERRE DEFENSIVE
1. Les musulmans au moment de l'Hégire
Quatre-vingt-trois personnes ont émigré de la Mecque à Médine. Un nombre
très limité à l'issue de treize années de sacrifices impressionnants. Mais il
faut rajouter:
- Les musulmans morts à la Mecque.
- Les musulmans retenus à la Mecque par les mécréants. En proie aux
persécutions des idolâtres, ils subiront les pires traitements.
- Les musulmans émigrés en Ethiopie.
- Quelques musulmans éparpillés dans diverses tribus; ils rejoindront
Médine petit à petit.
- Enfin les musulmans de Médine. A l'arrivée du Prophète, prière et
salut sur lui, il y avait au moins un musulman dans chaque famille. Rapidement
tous les arabes de Médine embrassèrent l'Islam sauf quelques uns devenus
mounafiqine (font semblant d'embrasser l'Islam, on les appelle hypocrites); à
leur tête était Abdallah Ibn Oubèy Ibn Sèloul. Peu de juifs embrassèrent
l'Islam.
2. La mosquée
A son arrivée à Médine, la première action du Prophète (avec
l'inspiration divine) fut la construction de la mosquée. Il y participa luimême et disposa ses demeures autour de la mosquée. Cette mosquée remplaça la
maison d'Arqam à la Mecque. La mosquée était vivante 24h/24. On apprenait la
foi, le Coran et l'Islam pendant des heures. Imaginez l'université des
illettrés. Assis en position de tachahhoud, à même le sol, en cercles
concentriques, immobiles comme s'ils portaient des oiseaux sur la tête, les
sahabas étaient emportés par les paroles du Prophète et croyaient voir de
leurs yeux le Paradis et l'Enfer. Pour apprendre les 60% de Coran révélés à la
Mecque, combien a-t-il fallu écouter et répéter les paroles divines? Chacun
apprenait puis enseignait ce qu'il avait appris. Pas un musulman ne se
dérobait à l'enseignement. Ensuite, le jour comme la nuit, ils consacraient
des heures pour prier, lire le Coran, évoquer et implorer Allah. Les prières
obligatoires dépassaient le plus souvent vingt minutes ou une demi-heure.
Puis chacun passait des heures chez lui pour enseigner à sa femme et ses
enfants. Les femmes venaient à la mosquée pour les prières du vendredi, du
sobh et du icha (car il faisait noir, et elles n'étaient pas vues, notamment à
la mosquée où les rangs des femmes étaient tout simplement derrière ceux des
hommes et des enfants). Parfois, elles se réunissaient pour entendre un
discours du Prophète, prière et salut sur lui. Elles apprenaient aussi entre
elles, surtout des femmes du Prophète. Toutefois, l'essentiel de leur
enseignement leur était dispensé par leurs maris dans leurs maisons, et cela
fait partie du bel Islam. Les enfants allaient à la mosquée et discutaient
entre eux de la religion, mais l'essentiel de leur éducation venait de leurs
parents.
Le Prophète, prière et salut sur lui, n'a pas laissé le temps aux
sahabas de s'occuper pleinement de leur vie privée. Ils ont pu consacrer un
maximum de temps à la religion en réduisant leurs besoins matériels à la
nécessité. Quelques sahabas (les gens de Soffa) ne travaillaient pas du tout
et étaient en permanence à la mosquée pour apprendre et pour servir le
Prophète, prière et salut sur lui, mais la majorité travaillaient. Donc pour
suivre leur exemple, il faut s'organiser pour donner son droit à chaque
composante de notre vie: le travail, la famille, la pratique et l'effort de la
religion. Ensuite, tout en conservant son équilibre, il faut évoluer soi-même
et faire évoluer sa famille de manière à diminuer la part de ce bas monde dans
notre vie et augmenter celle de la religion.
3. La fraternité entre mouhajirins et ançars
La deuxième action entreprise par le Prophète, prière et salut sur lui,
fut la restructuration économique et sociale des mouhajirins (émigrants de la
Mecque). A chacun, fut affecté un frère (de foi) des habitants de Médine pour
partager ses biens, s'intégrer et démarrer une vie nouvelle, car la plupart
des mouhajirins avaient émigré les mains vides. Ce furent des scènes
impressionnantes de fraternité et d'amour de la part des ançars (alliés,
musulmans de Médine qui se sont alliés à l'Islam), résultant d'un long effort
de purification intérieure. Au début, ces frères héritaient entre eux au lieu
de leurs familles, mais l'année suivante cette règle fut abrogée et l'héritage
retourna aux familles.
On peut se demander, en combien de temps les ançars vont-ils apprendre
la religion et avoir le niveau de foi et les qualités des mouhajirins, fruits
de treize années d'effort? Bien qu'ils n'atteindront pas leur niveau, les
ançars vont apprendre vite, car la différence c'est qu'ils ont un modèle à
suivre. La progression des pionniers défrichant la voie est toujours lente et
difficile, mais une fois la route tracée, il est plus facile de la suivre.
Pour cela nous constatons le développement très lent de l'Islam en son début
pour acquérir la base, et nous verrons par la suite son avancée
impressionnante. En voyant les résultats grandioses à la fin, nous comprenons
la raison du travail long et difficile au début. Mais si, par malheur, cette
sagesse nous échappe, nous serons leurrés par la quête de résultats immédiats
et palpables et nous serons voués à l'échec.
La compagnie des pieux et des connaisseurs de la religion est une des
causes principales pour apprendre la foi et évoluer dans l'Islam. Côtoyer un
homme pur et pieux donne une motivation et une compréhension qu'il est dur
d'acquérir dans les livres. Il est frappant de voir comment les sahabas
étaient presque en permanence autour du Prophète, prière et paix sur lui. Tout
en tenant compagnie aux hommes pieux, leur amour et leur respect est
nécessaire. Par cet amour et ce respect nous pouvons acquérir les qualités
intérieures de cette personne et profiter de la profondeur de sa science. Les
exemples d'amour et de dévouement des compagnons pour le Prophète sont
innombrables et parfois nous semblent exagérés: à chaque fois que le Prophète
crachait, un compagnon attrapait son crachat au vol et le passait sur son
visage et son corps!
4. Le pacte avec les juifs
A son arrivée à Médine, le Prophète, prière et salut sur lui, devint
naturellement le chef de Médine, annulant le projet d'unification de Médine
sous l'autorité de Abdallah Ibn Oubèy Ibn Sèloul qui devint alors chef des
mounafiqines. Or il y avait dans la ville trois tribus juives alliées à l'une
ou l'autre des deux tribus arabes de Médine (Aws et Khazraj). Il fallait donc
tout de suite préciser le nouveau code de relations. Le Prophète conclut un
pacte avec toutes les parties concernées. Ses principaux articles sont:
- Le Prophète, prière et salut sur lui, est le chef de Médine.
- Les musulmans forment une unité politique et militaire et ne peuvent
établir aucun lien indépendamment du groupe.
- Les musulmans et les juifs pratiquent librement leurs religions et
leurs vies économiques. Ils ne doivent pas se combattre ni se trahir.
- Un différend entre un musulman et un juif sera jugé par le Prophète,
prière et salut sur lui. Un différend entre juifs sera tranché entre eux à
moins qu'ils ne préfèrent le soumettre au Prophète.
- Si Médine est attaquée par un ennemi extérieur, musulmans et juifs
doivent le combattre ensemble.
Les juifs acceptèrent le pacte mais n'ont jamais eu l'intention de
respecter leurs engagements et de vivre en paix avec les musulmans. Ils ont
toujours haï la nouvelle religion, ils discutèrent avec le Prophète, prière et
salut sur lui, pour renier sa prophétie, puis essayèrent plusieurs fois de le
tuer et de trahir les musulmans. Au fur et à mesure de leurs trahisons, les
musulmans les ont combattus, battus, exilés et même exterminés pour la grande
trahison des ahzab (coalisés) que l'on verra plus tard in cha Allah. Les cent
cinquante versets au début de Baqara furent révélés dans cette période pour
décrire les juifs et leurs discussions avec le Prophète.
5. Pourquoi la guerre défensive
La différence entre la situation actuelle et celle de la Mecque est que
Médine est une ville sous autorité musulmane. Comme tout état souverain, les
musulmans ont formé une armée prête à répondre à toute aggression. Le
changement est radical par rapport à la Mecque où toute riposte par la force
était interdite (voir ch2 §2). Devons-nous maintenant prendre le modèle de
Médine ou celui de la Mecque? La religion est aujourd'hui complète, et les
obligations individuelles incombent à chacun. On ne peut se croire dans une
période semblable à celle de la Mecque et négliger les obligations. Mais les
ordres divins que seul l'état est en mesure d'appliquer ne peuvent être
envisagés par des individus. On ne peut, par exemple, en France, attraper un
voleur et lui couper la main, bien qu'Allah nous ordonne: [Le voleur et la
voleuse, à tous deux coupez la main] (5/38), car cet ordre s'adresse au
législateur et au juge et non au citoyen ordinaire. De même, le jihad ou toute
intervention par la force est une affaire d'état et ne peut être entrepris par
des individus.
Durant les premières années à Médine, les musulmans n'abordaient pas les
autres tribus pour leur proposer soit d'embrasser l'Islam, soit de payer la
jizya (impôt du non musulman dans un état islamique en échange de sa sécurité)
soit de combattre, comme le prouve le pacte avec les juifs. La raison était
double: les musulmans étaient militairement faibles et leur foi et leur
pratique de l'Islam était encore en formation. Les Médinois venaient juste de
se convertir et la religion était très incomplète (cinq piliers, code civil,
code de la famille, code pénal...). Donc la société musulmane ne pouvait pas
encore présenter aux autres tribus et au monde un modèle complet.
6. La législation
a) Stabiliser la société et cultiver la foi
Les trois premières actions du Prophète, prière et salut sur lui, dès
son arrivée (citées ci-dessus) visaient à deux choses: stabiliser la société
et accroître la foi. Du début à la fin de sa mission, le Prophète, prière et
salut sur lui, a toujours dans la mesure du possible évité les soubresauts et
pris les décisions qui stabilisent la société. Cette règle prévaut tant au
niveau interne: mettre les musulmans à leur aise et veiller à leur bonne
entente, qu'au niveau externe: positions modérées et prudentes vis-à-vis des
non musulmans. L'Islam évolue mieux dans une période calme que dans une
période agitée. La confrontation (avec l'extérieur) et la révolution (à
l'intérieur) sont inévitables mais il faut les laisser venir toutes seules et
non les provoquer, et profiter de l'accalmie pour se préparer aux épreuves qui
ne tarderont pas à venir. Voici deux exemples illustrant bien ce principe:
- L'interdiction de l'alcool eut lieu en trois étapes et ne fut
promulguée que la quatrième année de l'Hégire. A chaque fois, des évènements
ou des demandes des sahabas provoquaient les décisions. L'interdiction est
venue après que l'affaire fut bien mûre. Dans le Coran, Allah en a expliqué la
raison: Satan essaye d'éloigner les musulmans d'Allah (de l'évocation, dhikr,
et de la prière) et de provoquer l'inimité et la haine (Coran 5/91). Par sa
sagesse infinie, Allah leur a laissé quatre années (sans compter les treize de
la Mecque) pour constater l'incompatibilté de l'alcool avec leur foi, et pour
que leur foi soit plus forte que le plaisir. Ils n'eurent alors aucune
difficulté à arrêter de boire et à détester l'alcool (certains ne buvaient pas
avant l'Islam, d'autres avaient arrêté avant l'interdiction). Alors qu'on peut
facilement imaginer le choc qui aurait eu lieu si le Prophète, prière et salut
sur lui, annonçait l'interdiction de l'alcool à son arrivée à Médine.
Il en est de même pour toutes les lois: la foi poussant à la morale, au
fur et à mesure que la foi augmentait les sahabas ont senti le besoin de
nouvelles lois. Alors que si on décrète des lois que les gens n'ont pas
voulues, et que leur foi ne les pousse pas à aimer et appliquer, on provoque
un sentiment de frustration et de contrainte, qui engendre une situation de
malaise puis une réaction de rejet de cette loi puis de cette religion. C'est
en cultivant la foi que les gens développent l'amour d'Allah et du bien et
détestent d'eux-mêmes ce qui est connu pour être mauvais et nuisible à
l'individu et la société.
En effet, tout ce qu'Allah a interdit dans l'Islam est nuisible et
repoussé d'un coeur sain, et seul un coeur malade l'approuve et le désire.
Citons l'exemple de ce jeune qui vint demander au Prophète, prière et salut
sur
lui,
l'autorisation
de
commettre
l'adultère.
Il
lui
répondit:
"l'approuves-tu pour ta mère, ta soeur, ta femme ou ta tante?" A chaque fois
le jeune était indigné et disait non. Le Prophète lui dit: "la femme que tu
désires est aussi la mère, la soeur, l'épouse ou la tante de quelqu'un", et le
jeune fut convaincu.
- Le Prophète, prière et salut sur lui, n'a presque jamais provoqué de
guerre. En temps de paix, l'Islam se propage car c'est la vérité éclatante et
l'idolatrie ou toute autre fausse religion régresse. A chaque fois, les
mécréants se sentant perdus, recouraient à la manière forte et les musulmans
étaient en plein droit de réagir. La totalité des batailles avec les arabes et
les juifs ont été provoquées par les non musulmans, à l'exception de la
dernière année de la vie du Prophète qui sera traitée plus bas. La situation
des romains chrétiens auxquels le Prophète, prière et salut sur lui, a envoyé
trois armées (Mo'ta, Tèbouk et Oussama) est différente: le Cham (Syrie,
Jordanie, Liban et Palestine) était une terre arabe occupée et écrasée par les
Romains, il fallait écarter ces derniers pour convertir les arabes.
b) Les trois grandes sourates
Dans l'ordre, Baqara (La vache), Nissa (Les femmes) et Maida (La table
servie), ces trois grandes sourates contiennent l'essentiel de la législation.
Nous invitons le lecteur à lire ces sourates et à constater l'évolution de la
législation d'une sourate à l'autre. Remarquons la modification de plusieurs
lois (abrogé ou mansoukh), leur ordre chronologique et le contexte où chacune
fut établie.
L'exemple le plus clair est celui de l'alcool où les trois versets de
son interdiction progressive sont respectivement dans les trois sourates
(2/219 4/43 5/90). Mais d'autres lois de la Baqara ou de Nissa sont modifiées
dans Maida ou dans d'autres sourates. Allah dans son infinie sagesse a
conservé la trace de ce changement dans le Coran pour nous faire comprendre la
nécessaire progressivité de l'introduction de l'Islam dans la vie. Par
exemple, dans Nissa, Allah dit que si deux personnes commettent l'adultère
maltraitez-les, et s'ils se repentent laissez-les (4/16). Cette punition de
l'adultère est étrangement légère, mais elle sera abrogée par l'ordre de
lapider les mariés et de fouetter les célibataires dans sourate Nour.
Nous allons suivre la chronologie des différentes lois au fur et à
mesure des évènements.
Notons aussi dans ces trois sourates l'évolution du ton avec les juifs
et les mounafiqines. Allah les invite avec sagesse dans Baqara: [Ô enfants
d'Israël, rappelez-vous mon bienfait dont je vous ai comblés et tenez vos
engagements vis à vis de moi, je tiendra les miens] (2/40), puis il les somme
sévèrement dans Nissa: [Ô vous à qui on a donné le livre, croyez à ce que nous
avons fait descendre, en confirmation de ce que vous aviez déjà, avant que
nous effacions des visages et que nous les retournions sens devant derrière,
ou que nous les maudissions comme nous avons maudit les gens du Sabbat
(transformés en singes et porcs)] (4/47), puis il les insulte ouvertement dans
Maida: [Ceux qu'Allah a maudit, qui ont encouru sa colère et dont il a fait
des singes et des porcs et qui ont adoré le taroute (diable ou idole, il
s'agit ici du veau d'or), ceux-là ont la pire des places et sont les plus
égarés du droit chemin] (4/60).
Les autres grandes sourates médinoises (Ali Imrane, Tawba, Anfal, Ahzab)
et plusieurs petites sont toutes liées aux batailles, nous en parlerons par la
suite.
c) Les droits de la femme et le voile
L'une des premières préoccupations de la législation fut l'organisation
de la famille, notamment les droits de la femme. D'abord l'Islam a aboli des
pratiques inhumaines telles l'héritage des femmes de leur père et considérer
sa femme comme sa propre mère (ne plus avoir de rapports avec elle sans
toutefois divorcer). Puis il a réorganisé le divorce de manière à protéger la
famille et le mariage. La société musulmane est basée sur la famille puis sur
la fraternité musulmane sans racisme, régionalisme ou sexisme, alors que la
société antéislamique était basée sur le tribalisme et sur la domination
totale des femmes par les hommes.
Enfin, il a institué les règles d'héritage. L'année trois, un musulman
mourut à la bataille d'Ouhoud et laissa une femme et deux filles. Comme la
femme n'héritait pas, toutes trois n'avaient pas droit à l'héritage qui revint
au frère du martyr. La veuve vint se plaindre au Prophète, prière et salut sur
lui, et le Coran ne tarda pas à réparer cette injustice: [Voici ce qu'Allah
vous enjoint au sujet de vos enfants: au fils, une part équivalente à celle de
deux filles. S'il n'y a que des filles, deux ou plus, à elles alors les deux
tiers de ce que le défunt laisse. Et s'il n'y en a qu'une, à elle alors la
moitié] puis [Et à elles (vos épouses) un quart de ce que vous laissez si vous
n'avez pas d'enfant. Mais si vous avez un enfant, à elles alors le huitième]
(4/11-12). Et le Prophète, prière et salut sur lui, dit: "Aux filles les deux
tiers, à toi un huitième et le reste à son frère". Quelle révolution! Bien
plus que la loi, c'est la mentalité des hommes qui est révolue. L'Islam a
suscité et a ancré le respect de la femme dans le coeur des hommes. Plus tard,
d'autres lois ou recommandations ont continué dans ce sens, la plus touchante
est probablement les règles concernant les rapports conjugaux.
Après seulement, et longtemps après, l'année six, Allah a rendu
obligatoire le port du voile et la séparation des sexes, car le besoin s'est
fait sentir de protéger la famille et la femme. Nous voulons exposer dans ce
paragraphe la démarche qu'Allah a suivie avec les femmes: il leur a donné
beaucoup de droits, et surtout le respect. Car sans ce respect, les hommes
pourraient abuser de leur autorité sur les femmes quelles que soient les lois.
En premier lieu, les femmes ont pris conscience de la valeur de la famille et
de leurs maris. Elles ont su qu'elles n'étaient plus de simples objets dans
une société d'hommes, mais qu'elles tenaient un rôle essentiel au sein de la
famille et aux côtés de leurs maris. Ensuite, il était simple de leur
expliquer la nécessité du voile, puisque la féminité doit rester pour le
domaine privé et il ne convient pas de l'exposer publiquement. Ainsi, le
respect mutuel et la foi sont des éléments indispensables pour que le port du
voile ne soit pas mal interprété. Prêcher l'Islam en commençant par exiger le
voile est une maladresse, l'interlocuteur risque de ne pas comprendre le but
et le résultat sera médiocre voire négatif.
7. L'année 2
a) Le jeûne et la zakaat
Comme nous l'avons dit plus haut, la législation a toujours privilégié
la stabilité de la société et la fortification de la foi. En voici un autre
exemple: la zakaat, donnant un droit aux pauvres sur les biens des riches, et
le jeûne, purification du corps et de l'âme, furent prescrits dès la deuxième
année.
Notons aussi parmi les principaux évènements le changement de la Qibla
(direction de la prière) de Jérusalem vers la Mecque (Coran 2/144) et la venue
de la délégation de chrétiens d'Ethiopie. Ces soixante personnes ont
longuement discuté avec le Prophète, prière et salut sur lui, et Allah nous
rapporte ces discussions dans la première moitié de la sourate Ali Imrane.
b) Les épreuves et l'évolution de la foi
Allah a éprouvé continuellement et progressivement les musulmans, afin
qu'ils évoluent dans leur foi et leur pratique. Durant les dix années à Médine
il n'y avait presque pas de répit, on passait d'épreuve en épreuve. Dès que
les musulmans assimilèrent convenablement la religion et le nouveau rythme de
vie, le Prophète, prière et salut sur lui, commença à envoyer des groupes de
reconnaissance et d'espionnage, puis de prêche et de combat. Les premières
années, il y participait le plus souvent, puis il envoyait des détachements de
sahabas, ensuite il envoyait même plusieurs groupes en même temps. Environ
cent cinquante groupes de sept à trente milles personnes sont sortis de Médine
au cours des dix ans. C'était un énorme investissement de la société que de
préparer les montures et le ravitaillement pour traverser le désert, laisser
les occupations, soigner les blessés, prendre en charge les veuves et les
orphelins (les femmes ni les hommes ne restaient célibataires). Plus qu'un
investissement de la société, c'était son but de minimiser les besoins
terrestres pour consacrer le maximum de son énergie à apprendre, pratiquer et
répandre la religion d'Allah.
C'était vraiment une génération choisie par Allah pour recevoir sa
religion et la transmettre au monde et aux générations futures. Nous demandons
à Allah de nous mettre sur leur chemin. Même si nous n'atteindrons jamais leur
effort, le principal est de comprendre leur chemin et de vouloir le suivre.
Car si nous ne sommes pas dans leur chemin, nous nous égarons et ce malgré
tous nos efforts, qu'Allah nous en préserve.
Nous pouvons suivre dans le Coran l'évolution de leur foi:
- Au lendemain de l'Hégire (année 1), Allah les décrit: [Pour les
pauvres émigrés expulsés de leurs demeures et de leurs biens tandis qu'ils
recherchaient une grâce et un agrément d'Allah et qu'ils aidaient Allah et son
messager; ceux-là sont les véridiques. Et ceux qui habitaient déjà le pays et
avaient la foi, ils aiment ceux qui émigrent vers eux, et n'ont aucune
jalousie pour ce qu'ils (les émigrants) ont reçu et ils leur donnent en se
privant même quand ils ont besoin, et quiconque est protégé de sa propre
avarice, ceux-là sont les gagnants] (59/8). Ils ont donc un niveau de foi où
ils n'ont plus l'amour de la vie terrestre.
- Après la bataille de Badr (année 2), Allah enseigne: [Les vrais
croyants sont ceux dont les coeurs frémissent quand Allah est mentionné, quand
ses versets sont lus leur foi est augmentée et qui placent leur confiance en
leur Seigneur... ceux là sont les vrais croyants] (8/2-4). Maintenant, c'est
la vraie foi.
- Après la bataille d'Ouhoud (année 3), Allah raconte: [Ceux auxquels on
a dit: "Les gens se sont rassemblés contre vous, craignez-les". Cela augmenta
leur foi et ils dirent: "Allah nous suffit et il est le meilleur garant"]
(3/173). La foi augmente encore.
- Après la bataille des Ahzab (année 5), Allah révèle: [Et quand les
croyants virent les coalisés, ils dirent: "Voilà ce qu'Allah et son messager
nous avaient promis, et Allah et son messager disaient la vérité" Et cela ne
fit qu'augmenter leur foi et leur soumission] (33/22). La foi continue à
croître.
- Après le pacte de Houdèybia (année 6), Allah déclare: [C'est lui qui a
fait descendre la sérénité dans les coeurs des croyants pour qu'ils augmentent
de foi avec leur foi] (48/4). La foi ne cesse de se développer.
- Après la bataille de Tèbouk (année 9), Allah annonce: [Les touts
premiers des émigrants et des ançars et ceux qui les ont bien suivis Allah est
satisfait d'eux et ils l'agréent] (9/100). Ils ont alors obtenu l'agrément
d'Allah.
c) Bataille de Badr
Avant la bataille de Badr, il y eut plusieurs expéditions militaires et
quelques échanges de coups avec les Mecquois; Allah a ainsi préparé les
musulmans à la première grande bataille. Les musulmans étaient 314 et les
mécréants 950. La sourate Anfal (Le butin, 8) est presque entièrement
consacrée à cette bataille. En fait, Allah a mis dans Badr beaucoup de
facilités pour les musulmans:
- La participation n'était pas obligatoire au départ de Médine (car les
musulmans voulaient seulement intercepter la caravane) ni à la rencontre de
l'ennemi (car les médinois s'étaient seulement engagés à défendre le Prophète
à Médine).
- Allah a promis la victoire à l'avance et le Prophète, prière et salut
sur lui, a indiqué où tomberont les chefs des mécréants.
- Allah les a comblés de ses aides: sommeil reposant, pluie purifiante,
mille anges, terreur et aveuglement des mécréants par la poignée de sable
lancée par le Prophète.
- Le bilan prodigieux de la bataille: soixante-dix des pires mécréants
tués, soixante-dix autres prisonniers, huit martyrs musulmans, un butin
consistant et l'annonce du Paradis pour les participants à la bataille.
L'épreuve de Badr était l'entrée dans la bataille malgré les apparences
défavorables aux musulmans; une fois engagés, Allah a fait le reste. Inutile
de décrire l'euphorie des musulmans et l'affermissement de leur foi. Après
Badr, tous les musulmans étaient partants pour tout autre combat, Allah leur
envoya alors des épreuves différentes.
Notons qu'à l'issue du combat une légère dispute opposa les musulmans
pour le partage du butin (inutile de décrire le partage du butin avant
l'Islam). Dans la sourate Anfal, Allah les rappelle à la foi, l'obéissance et
la soumission, puis leur inculque la vraie foi: [Les (vrais) croyants sont
(uniquement) ceux dont les coeurs frémissent quand on mentionne Allah. Et
quand ses versets leur sont récités cela fait augmenter leur foi, et ils
placent leur confiance en leur seigneur] (8/2). Quel niveau de foi pour dixhuit mois d'Islam à Médine!
Du côté des mécréants, il y a aussi des changements en profondeur:
- Les grands ennemis de l'Islam sont morts: Abou jahl et Oumeya Ibn
Khalaf dans la bataille, Abou Lahab tombe malade et les rejoint peu après.
- Abou Sofiène devient chef de la Mecque: bien qu'il combatte les
musulmans, il n'a rien de la rage de ses prédécesseurs et interviendra
plusieurs fois pour éviter ou écourter un combat, jusqu'à sa conversion à la
prise de la Mecque.
- La presque totalité des Mecquois se convertiront avec ou avant Abou
Sofiène. Déjà, parmi les otages, plusieurs se convertissent.
8. L'année 3
a) Bataille des Bènou Qaynouqaâ
La victoire des musulmans à Badr inquiète les juifs. Une inquiétude qui
deviendra vite source de conflits. Ces juifs se moquèrent d'une femme
musulmane et la dévoilèrent. Un musulman se porta à son secours et tua le
juif. Ses amis tuèrent le musulman et la guerre fut déclarée. Le Prophète,
prière et salut sur lui, les assiégea durant quinze jours jusqu'à ce qu'ils se
rendent. Devant l'insistance de l'hypocrite Abdallah Ibn Oubèy Ibn Sèloul, le
Prophète les laissa sans les punir.
Un des chefs juifs, Kaâb Ibn Achraf, ne supporta pas la victoire des
musulmans à Badr. Il partit à la Mecque inciter les gens à combattre le
Prophète; puis il revint à Médine et se mit à se moquer des femmes musulmanes
en poésie. Le Prophète, prière et salut sur lui, envoya un commando pour le
tuer. Il ne s'agit pas là d'un acte terroriste mais de la sanction infligée à
une personne qui a trahi le pacte de paix dans l'unique but de provoquer la
guerre.
b) Bataille d'Ouhoud
Les mécréants Mecquois ont reçu un coup très dur à Badr et voulurent se
venger. L'année suivante, ils se préparèrent et vinrent à trois milles
attaquer Médine. Le Prophète, prière et salut sur lui, préféra la prudence et
se fortifier à l'intérieur de la ville pour mieux se défendre. Mais les jeunes
musulmans n'ayant pas assisté à Badr insistèrent pour combattre, et le
Prophète accepta. Il ne voulut pas demander aux juifs de l'aider comme convenu
pour défendre Médine.
Le chef des hypocrites, Abdallah Ibn Oubèy, se retira en route avec
d'autres hypocrites ou gens de peu de foi qui formaient le tiers de l'armée
musulmane (300/900) sous prétexte qu'il était préférable de rester à Médine.
La bataille tourna rapidement en faveur des musulmans. Les archers sur la
montagne abandonnèrent leurs positions pour prendre le butin, et les musulmans
furent pris à revers par Khalid Ibn Alwèlid et la cavalerie mecquoise. Satan
hurla que le Prophète, prière et salut sur lui, était mort et la plupart des
musulmans s'enfuirent. Ce fut alors une défaite amère pour les musulmans:
soixante-dix tués (vingt-deux parmi les mécréants), dont Hamza, qu'Allah
l'agrée, et de nombreux blessés dont le Prophète, prière et salut sur lui.
Le principal enseignement de la bataille est qu'Allah a enlevé son aide
pour une désobéissance même mineure. Pourtant, le Prophète était présent, les
sahabas étaient très pieux, et seule une minorité (quarante sur cinquante
archers) avait désobéi, mais la punition d'Allah fut générale. Donc Allah
n'accorde pas son aide (anges, intervention divine, victoire...) sans
conditions; Allah veut que nous l'adorons comme il l'exige, alors il nous aide
par sa puissance. Il ne veut pas que nous comptions sur nos moyens et n'exige
pas que notre force soit à la hauteur de celle de nos adversaires, mais il
veut de nous la foi et les bonnes actions.
La défaite eut aussi d'autres enseignements détaillés dans la sourate
Ali Imrane: les musulmans ne doivent pas fuir devant les ennemis puisqu'ils
veulent le martyre, ils ne doivent pas s'attrister pour leurs morts car ils
sont martyrs, ils ne doivent pas insister en donnant leur avis au Prophète,
lui doit continuer à prendre leurs avis, ils ne doivent pas convoiter le butin
mais la récompense d'Allah, leur désobéissance est la cause de la défaite et
non la ruse de leurs ennemis, Allah n'a pas manqué à sa promesse en enlevant
son aide, mais la défaite est due aux musulmans.
La défaite a aussi permis d'avoir un grand nombre de martyrs, car si les
musulmans sont toujours vainqueurs ils n'auront pas beaucoup de martyrs. En
fait, c'est seulement dans Ouhoud, Bir Maôouna (ci-dessous) et Mo'ta (année 7)
que les musulmans perdirent beaucoup d'hommes.
La bataille fut l'occasion de décréter les règles d'héritage;
nouveauté essentielle est l'héritage des femmes et l'égalité entre frères.
la
c) La tuerie de Bir Maâouna
Un arabe vint au Prophète, prière et salut sur lui, écouta son prêche,
n'accepta pas l'Islam mais ne le refusa pas non plus. Il proposa au Prophète
d'envoyer avec lui des musulmans pour prêcher sa tribu. Le Prophète envoya
avec lui soixante-dix ançars appelés les lecteurs du Coran: ils passaient leur
temps à lire et apprendre à la mosquée. Mais ils furent pris en traître et
tués jusqu'au dernier.
Peu de temps après, dans une affaire similaire, six sahabas sont morts.
Suite à ces deux incidents, le Prophète, prière et salut sur lui, n'envoya
plus de groupes pacifiques pour prêcher. Ces incidents illustrent l'ambiance
qui régnait dans l'Arabie et l'impossibilité de prêcher l'Islam publiquement
et pacifiquement. Pour cette raison, l'Islam s'est répandu lentement durant
ces premières années à Médine.
9. L'année 4
a) L'interdiction de l'alcool
Nous voyons à quel niveau de foi, de pratique et de sacrifice pour
l'Islam sont arrivés les musulmans au moment où Allah a interdit l'alcool. Les
musulmans ont immédiatement appliqué cet ordre, le vin coula dans les rues de
Médine, et ce fut la fin de ce fléau. Les jeux de hasard furent interdits en
même temps, les deux ordres sont dans sourate Maida (5/90). C'est à cette
période qu'Allah instaura la prière de la peur: comment prier à l'heure face à
des ennemis ou en plein combat. La prière était leur lien avec Allah et était
tellement puissante qu'elle ne pouvait être laissée en aucune circonstance.
b) Bataille des Bènou Nadhir
Ces juifs ont essayé de tuer le Prophète, prière et salut sur lui, mais
Jibril le prévint et la guerre fut déclarée. Après un siège ils se rendirent
et le Prophète les chassa de Médine. La sourate Hachr (le rassemblement, 59)
entière fut révélée à cette occasion.
10. L'année 5 : la bataille des coalisés (ahzab)
Les juifs à Médine, sentant augmenter la force des musulmans,
organisèrent un vaste complot pour les anéantir. Ils se rendirent à la Mecque
et proposèrent aux Mecquois de réunir toutes les tribus idolâtres pour
attaquer le Prophète, prière et salut sur lui, ensemble, tandis qu'eux le
trahiraient à l'intérieur de Médine. Quand le Prophète apprit l'arrivée de
cette très grande armée (cinq milles alors qu'ils étaient mille deux cents à
Médine) il se concerta avec les musulmans. Ils décidèrent de creuser un fossé,
de rester dans la ville et de ne pas affronter les ennemis. Après presque un
mois de siège très difficile (peur, faim et froid), Allah envoya un vent qui
désorganisa le campement des mécréants. Leur chef Abou Sofiène ordonna aux
coalisés de partir.
Les musulmans se retournèrent alors contre les juifs des Bènou Qouraydha
qui se rendirent après vingt-deux jours de siège. Allah jugea que leurs
combattants soient tués, leurs femmes et enfants deviennent esclaves des
musulmans et leurs biens partagés entre les musulmans. Salam Ibn Abou Haqiq,
un juif d'une autre tribu (Khaybar) avait aussi participé à l'organisation des
Ahzab; le Prophète, prière et salut sur lui, envoya un commando pour le tuer.
Cette bataille a été une très dure épreuve pour les musulmans: elle a
illustré la foi très solide des musulmans et l'a fortifiée encore plus, tout
ceci est détaillé dans la sourate Ahzab (Les coalisés, 33). Le résultat
géopolitique important de cette bataille était le changement du rapport de
forces en Arabie: plus aucune tribu n'avait les moyens d'attaquer ouvertement
les musulmans, à qui appartenait désormais l'initiative. Nous rentrons
maintenant dans la quatrième et dernière étape de la vie du Prophète, prière
et salut sur lui: la guerre offensive.
QUATRIEME CHAPITRE
LA GUERRE OFFENSIVE
1. L'année 6
a) Bataille des Bènou Mostalaq
Ces arabes s'étaient organisés pour combattre le Prophète, prière et
salut sur lui, mais celui-ci les devança, les combattit et triompha. Une fois
vaincus, ils embrassèrent l'Islam. Au retour, il y eut l'évènement du Ifk
(mensonge et calomnie): Aïcha, qu'Allah l'agrée, fut accusée d'adultère par
Abdallah Ibn Oubèy, et certains musulmans répétèrent et gonflèrent la
nouvelle, tandis que le doute perturba la plupart des musulmans, ainsi que le
Prophète et Abou Bakr. Un mois plus tard, Allah révéla l'innocence de Aïcha
dans la sourate Nour (La lumière). Ce fut l'occasion d'imposer le voile, de
codifier la mixité et d'établir la punition du faux témoignage.
b) La stratégie du Prophète, prière et salut sur lui
Maintenant, les musulmans sont très bien formés, la religion est presque
complète (il ne manque essentiellement que le pèlerinage), leur force
militaire leur permet de lancer des campagnes; quelle stratégie adopter?
Evidemment le but du Prophète, prière et salut sur lui, n'est pas de vivre
l'Islam tranquillement sans déranger les autres et sans être dérangé, mais
plutôt de répandre cette religion dans le monde entier et jusqu'à la fin des
temps.
La logique était de commencer par les arabes. La tête des arabes était
la Mecque: si elle accepte l'Islam, le reste suit, mais tant qu'elle ne
l'accepte pas les autres tribus restent réticentes. Le Prophète, prière et
salut sur lui, avait les moyens (et la légitimité) d'attaquer la Mecque et
d'élargir le territoire musulman en combattant tribu après tribu, mais il
préféra la sagesse. En effet, maintenant que les musulmans disposent d'une
force respectable, il s'agit de l'utiliser sagement et d'éviter tout faux pas.
Si les musulmans combattent la Mecque, combien de pertes y aurait-il des deux
côtés? Une fois les mecquois battus, nombre de soldats tués et leur économie
affaiblie, accepteront-ils l'Islam avec joie? Seront-ils prêts à suivre ses
enseignements et à combattre pour sa cause? Bien sûr, les mécréants ont
cherché toutes les occasions de massacrer les musulmans, mais ce n'est pas une
raison pour vouloir les massacrer.
Le Prophète, prière et salut sur lui (évidemment par la guidée d'Allah),
décida de faire la Omra (petit pèlerinage) avec les compagnons. Une manière
très puissante de prêcher les mecquois: venir en paix, en oubliant les
querelles, en glorifiant cette maison que les mecquois glorifient, en montrant
aux mecquois le comportement et la religion des musulmans, en ouvrant les
coeurs au pardon, à l'entente et au dialogue, en prouvant aux mecquois et aux
arabes que les musulmans ne veulent pas le mal. Quelle réponse magnifique aux
seize années de tortures et de combats dirigés par les mecquois!
c) Le pacte de Houdèybia
Le Prophète, prière et salut sur lui, partit avec mille quatre cents
hommes. Les mecquois étaient pris de court: d'un côté, ils ne pouvaient
admettre que les musulmans pénètrent à la Mecque et fassent leur Omra alors
que, l'année précédente, ils avaient rassemblé tous les arabes pour les
combattre. D'un autre côté ils n'avaient plus la force de combattre les
musulmans. Finalement, ils acceptèrent de conclure la paix avec les musulmans.
Les articles essentiels du pacte étaient:
- La paix est déclarée pour dix ans renouvelables entre la Mecque et
Médine.
- Toute tribu païenne peut entrer dans le pacte du côté de la Mecque et
toute tribu musulmane peut entrer dans le pacte du côté de Médine.
- Les musulmans pourront visiter la Kaâba à partir de l'année suivante.
- Un mecquois musulman émigrant à Médine sera rendu à la Mecque tandis
qu'un médinois idolâtre émigrant à la Mecque sera accueilli. Cet article
montre à quel point le Prophète tenait à conclure le pacte. Il accepta cette
injustice bien que les musulmans soient les plus forts. Mais cet article sera
abrogé par la suite (pour les femmes d'abord puis pour les hommes aussi) et
tout musulman aura le droit d'émigrer sans aucune gêne.
Rapidement, les autres tribus entrèrent dans le pacte d'un côté ou de
l'autre et la paix fut générale en Arabie.
d) Conséquences du pacte
Les sahabas eurent beaucoup de mal à accepter ce traité. Ils étaient
venus dans l'idée de visiter la Kaâba bien-aimée, les voici refoulés par des
païens par un pacte injuste. C'est encore une dure épreuve pleine
d'enseignements. Le principal est de renoncer à son élan et à son désir
d'aboutir au résultat concret alors qu'on en a les moyens, et de se priver et
se sacrifier pour faciliter aux autres la voie de l'Islam.
En apprenant la fausse nouvelle de l'assassinat de Othmane (parti
dialoguer avec les mecquois), les croyants prêtèrent serment au Prophète,
prière et salut sur lui, de combattre jusqu'à la mort (ou la victoire). Pour
cela, Allah déclara pour la première fois dans le Coran sa satisfaction des
sahabas. Dans toute la sourate Fèth (Ouverture, 48) on ressent presque la joie
d'Allah et son éloge pour le Prophète et les croyants.
Les arabes avant même l'Islam respectaient et honoraient les traités de
paix. Les musulmans pouvaient maintenant circuler librement dans toute
l'Arabie et annoncer le message de l'Islam sans être gênés. La foi de l'Islam,
sa justice, sa bonté, son système social, les miracles dans chaque bataille,
le Coran... les musulmans avaient de nombreux atouts pour convaincre les
païens. Durant les deux années qu'a duré le pacte, quiconque possédait un
minimum d'intelligence embrassa l'Islam; nous étudierons, par la suite,
l'évolution numérique des musulmans. En fait, la plus grande victoire des
musulmans était ce pacte.
e) Lettres aux pays voisins
Maintenant, le prêche fonctionne parmi les arabes et il est inutile de
précipiter les choses. Le Prophète, prière et salut sur lui, dès son retour à
Médine envoya des lettres à tous les gouverneurs et les rois autour de
l'Arabie pour les inviter à l'Islam. Ceci illustre bien la stratégie du
Prophète. Les musulmans annoncent au monde entier (du moins ce qu'ils peuvent)
l'arrivée de la nouvelle religion. Ils commencent par envoyer des lettres que
certains rois déchirent et jettent, mais prochainement ils viendront euxmêmes. On compte environ cent cinquante lettres envoyées dans cette période et
jusqu'à la mort du Prophète, prière et salut sur lui.
2. L'année 7
a) Bataille de Khaybar
A son retour de Houdèybia, le Prophète, prière et salut sur lui,
assiégea Khaybar, une tribu juive qui n'avait pas adhéré au pacte. Il prit
leurs forteresses une à une et conclut la jizya avec eux: ils passaient sous
l'autorité musulmane, gardaient leurs terres et donnaient aux musulmans une
part de leur récolte chaque année. Les juifs étaient incorrigibles pour leur
haine et leurs trahisons envers l'Islam alors qu'ils pouvaient très bien vivre
au sein des musulmans qui n'avaient jamais essayé de leur faire de mal.
b) Expansion rapide de l'Islam
Khalid Ibn Alwèlid, chef et héros de l'armée mecquoise, se convertit
publiquement à l'Islam. Avec lui, Amr Ibn Alâass, un autre héros de la Mecque,
se convertit. Ces conversions ébranlent la Mecque et fortifient les musulmans.
Des milliers d'autres personnes embrassent l'Islam. Le Prophète, prière et
salut sur lui, envoie des détachements pour prêcher dans plusieurs tribus
arabes. Le temps court en faveur des musulmans qui gagnent du terrain jour
après jour.
Le Prophète accomplit la Omra avec les musulmans qui avaient assisté au
pacte de Houdèybia. Les mecquois sortent de la ville pour ne pas voir les
musulmans.
Allah ordonna aux musulmans de divorcer les femmes idolâtres. Entre
autres, Omar Ibn Alkhattab divorça deux femmes païennes. Nous voyons combien
Allah a attendu que la foi et l'Islam se fortifient avant d'imposer aux
épouses le choix de l'Islam ou du divorce. Encore une fois, Allah nous
enseigne la pédagogie à suivre avec les femmes: il ne faut pas leur imposer ni
s'impatienter avec elles.
3. L'année 8
a) Bataille de Mo'ta
Les arabes rentrant dans l'Islam de plus en plus massivement, le
Prophète, prière et salut sur lui, décide d'envoyer une première armée aux
Romains en Syrie. Le gouverneur de cette région avait tué un coursier du
Prophète. Les musulmans se retrouvèrent à trois milles
contre deux cent
milles (cent milles romains et cent milles arabes chrétiens). Après un moment
d'hésitation, ils décidèrent de combattre leur ennemi en faisant confiance à
Allah. Les trois chefs désignés par le Prophète, prière et salut sur lui,
trouvèrent le martyre l'un après l'autre, puis les musulmans choisirent Khalid
Ibn Alwèlid à la tête de l'armée. Il mena une forte attaque contre les
romains; ces derniers reculèrent, et Khalid déclara la bataille terminée et
rentra avec le reste de l'armée.
Ceci est la première grande bataille en l'absence du Prophète. Le
Prophète, prière et salut sur lui, ne se contenta pas de transmettre la
religion aux sahabas afin qu'ils deviennent de bons pratiquants. Il leur
inculqua aussi comment prêcher et former les autres à leur tour, en un mot à
faire le même travail que lui-même (prophétie mise à part). Ainsi il les
consultait pour toute affaire que la révélation n'avait pas tranchée, il leur
confiait des responsabilités de manière à développer leur potentiel, il leur a
enseigné toute chose pour que sa mission ne s'éteigne pas avec lui, mais
qu'elle continue tant qu'existeront des musulmans.
b) Trahison des mecquois
Les mecquois trahirent le pacte de paix en tuant des musulmans d'une
certaine tribu. Ces derniers se plaignirent au Prophète, prière et salut sur
lui, qui décida d'attaquer la Mecque. Abou Sofiène se précipita à Médine pour
présenter ses excuses et réparer sa faute, mais le Prophète fit preuve
d'intransigeance: il ne lui parla pas et ne le regarda même pas. Nous verrons
la cause de cette dureté inhabituelle à la prise de la Mecque. Le Prophète,
prière et salut sur lui, demanda à tous les musulmans de se joindre à lui; une
armée de dix milles hommes, du jamais vu chez les arabes, marcha vers la
Mecque. Allah déclara la guerre dans la sourate Tawba (Le repentir 9). Entretemps, les mecquois n'avaient aucune nouvelle des musulmans et ne savaient
rien de ce qui se passait jusqu'à l'arrivée de l'armée aux portes de la ville.
c) La prise de la Mecque
Le Prophète, prière et salut sur lui, fit tout le possible pour que
l'opération se passe dans le calme et la paix. Il rapprocha Abou Sofiène (chef
de la Mecque) qui était venu demander pitié et le pressa d'embrasser l'Islam;
ce dernier écrasa son orgueil et dut se rendre à l'évidence que l'Islam était
la vérité. Puis il lui fit voir le défilé des forces musulmanes pour qu'il
convainque les mecquois de ne pas résister. Enfin, il lui dit d'informer les
siens de s'enfermer dans leurs maisons et aucun mal ne leur sera fait. Les
mecquois laissèrent les rues vides et les musulmans entrèrent dans la ville.
Ensuite le Prophète, prière et salut sur lui, employa tous les moyens
pour convertir les mecquois le plus facilement possible. Il ordonna aux
musulmans de passer la nuit en adoration ce qui ébahit les mecquois: où sont
les vengeances, les pillages et les viols des conquérants? Hind qui avait fait
tuer Hamza et avait essayé de manger son foie s'écria: "Je n'ai jamais vu
Allah si bien adoré!" et embrassa l'Islam. Puis le Prophète, prière et salut
sur lui, réunit les mecquois et leur demanda: "Que pensez-vous que je vais
faire de vous?". Ils répondirent: "Du bien car tu es un frère généreux fils
d'un frère généreux". Il déclara: "Je ne vous fais point de reproche, allez
vous êtes libres". Allahou akbar! Aucun reproche, aucune représaille! Les
mecquois embrassèrent l'Islam en masse!
Nous voyons le fruit des années de patience et de prières à la Mecque:
les musulmans n'avaient aucune rancune contre les mecquois et leur bonté a
finalement gagné leurs coeurs. Nous pouvons aussi nous demander pourquoi le
Prophète, prière et salut sur lui, voulait absolument conquérir la Mecque pour
ensuite laisser les gens partir librement. En fait le Prophète voulait mettre
la Mecque sous l'autorité de l'Islam pour que la religion apparaisse de
manière évidente aux gens, puisqu'il ne manquait rien aux mecquois pour se
convertir si ce n'était un restant d'orgueil de ses dirigeants. Il ne restait
plus qu'à les écarter pour que les gens voient l'Islam pur et l'embrassent en
masse.
Ce qui est frappant dans ces conversions c'est que, dès l'instant de
leurs conversions, les anciens idolâtres déclarent que leur haine immense
envers le Prophète et envers l'Islam s'est transformée en amour intense, et
qu'ils veulent expier leur passé en dépensant plus d'énergie et de biens pour
fortifier l'Islam qu'ils n'en avaient dépensé pour combattre l'Islam! C'est de
cette manière qu'il faut attirer les gens dans l'Islam: par la force de la
foi, la bonté et la vérité, en leur voulant toujours le bien jusqu'à ce que
leur orgueil cède face à cette religion magnifique.
Quelques notables mecquois fuirent la Mecque par crainte d'être tués
pour tout le mal qu'ils ont fait contre l'Islam. Le Prophète, prière et salut
sur lui, envoya les chercher et leur promit qu'aucune représaille ne sera à
craindre et, qu'au contraire, ils pouvaient bénéficier de la force et des
avantages de l'Islam. Ils retournèrent et se convertirent immédiatement ou peu
après, puis ils dépensèrent toute leur énergie pour racheter leurs fautes et
récupérer le temps perdu et devinrent à leur tour des héros de l'Islam.
d) Bataille de Hounèyn
Hèwèzin, une tribu du sud de l'Arabie, est venue combattre le Prophète,
prière et salut sur lui, avec quatre milles guerriers au moment de la prise de
la Mecque. Le Prophète les combattit avec douze milles hommes (les dix milles
du début avec deux milles de la Mecque). Les nouveaux convertis n'étaient pas
initiés à la foi et la confiance en Allah et certains pensèrent que la
victoire sera facile vu le rapport de force. Mais Allah ota son secours et les
musulmans fuirent en laissant le Prophète, prière et salut sur lui, avec
quelques musulmans face aux mécréants. Le Prophète continua d'avancer et fit
appeler les ançars jusqu'à ce que la bataille tourne en faveur des musulmans,
alors la majorité des musulmans revint.
La leçon est qu'Allah a enlevé son aide et a donné la défaite aux
musulmans parce que certains d'entre eux avaient placé leur confiance dans les
causes matérielles dont ils disposaient! Avec la bataille d'Ouhoud, nous
voyons deux conditions à l'aide d'Allah: la foi et la confiance en lui et
l'obéissance à ses ordres.
Les musulmans eurent un grand butin à la suite de cette bataille car les
Hèwèzins avaient amené toutes leurs familles et leurs biens pour s'empêcher de
fuir et se motiver dans la bataille. Mais voilà qu'ils embrassèrent tous
l'Islam. Le Prophète, prière et salut sur lui, leur rendit la liberté mais
garda leurs biens. Puis il les fit distribuer parmi les mecquois qui venaient
de se convertir alors qu'il ne donna rien aux médinois. Devant leur
étonnement, puisqu'ils avaient causé la victoire après la déroute générale, il
leur expliqua qu'il a utilisé ces miettes du bas monde pour intéresser des
convertis encore avides d'argent alors que les médinois rentrent chez eux avec
le Messager d'Allah. Moralité: les anciens musulmans qui ont sacrifié pour la
guidée des autres doivent continuer à sacrifier et à donner l'exemple jusqu'au
bout et se rabaisser pour les nouveaux et tout faire pour leur faciliter la
voie.
4. L'année 9
a) L'année des délégations
Quand la Mecque embrassa l'Islam, toutes les tribus arabes suivirent une
à une. La dernière fut Taif qui embrassa l'Islam juste après la bataille de
Tèbouk. Allah donna quatre mois de paix pour que les païens rentrent dans
l'Islam, après quoi la guerre sera ouverte contre tous les idolâtres et la
Mecque sera interdite aux non musulmans. Les quatre mois passés, le Prophète,
prière et salut sur lui, envoya des armées aux tribus restantes qui se
convertirent rapidement avec ou sans combat. Ceci est la seule période dans la
vie du Prophète où la guerre offensive proprement dite a été appliquée.
Comprenons bien dans quelles circonstances Allah a donné aux arabes le choix
entre l'Islam ou le sabre: l'Islam et les musulmans étaient à un tel niveau de
perfection et de puissance que l'idolatrie n'avait plus sa place parmi les
arabes. Celui qui n'a pas encore décidé de suivre l'Islam sera obligé face à
l'épée.
Pour enseigner l'Islam à ces nouvelles tribus, chacune envoyait une
délégation à Médine. Les délégations étaient chaleureusement accueillies par
les sahabas. Le Prophète, prière et salut sur lui, les envoyait dans un
quartier de Médine. Là, en deux ou trois semaines, ils apprenaient l'Islam et
devenaient d'excellents pratiquants. Puis le Prophète désignait un chef parmi
eux et les renvoyait dans leur tribu. Ils enseignaient alors l'Islam à leur
tribu.
Il est frappant de voir avec quelle rapidité l'Islam avec les qualités
et la pratique se répandait, alors qu'il s'était constitué avec une grande
lenteur. Le plus dur est de construire la fondation et de purifier les coeurs.
Quand un premier noyau avec des qualités solides est formé, il est plus facile
pour d'autres personnes de s'intégrer au groupe et d'acquérir ses qualités.
Notons que la législation continue à se faire avec la règle du liâan
(malédiction mutuelle entre époux, quand le mari découvre sa femme en état
d'adultère et n'a pas de témoins) dans sourate Nour (La lumière 24) et les
règles de politesse avec sourate Houjourate (Les pièces 49).
b) Bataille de Tèbouk
Les musulmans passaient d'épreuve en épreuve. Pas un temps ne s'écoulait
sans évènement dans la vie à Médine. Après un court moment de répit, Allah
leur envoyait une autre épreuve souvent différente et plus difficile jusqu'à
la dernière grande épreuve (avant la mort du Prophète) qui fut la bataille de
Tèbouk. Les difficultés étaient:
- La pauvreté des musulmans après une année de sécheresse.
- Les dattes étaient mûres.
- La chaleur était torride.
- La route était très longue et traversait le désert.
- L'ennemi (les Romains) était très nombreux, la bataille de Mo'ta avait
laissé un mauvais souvenir.
- Allah ordonna que tous les musulmans participent.
Les musulmans partirent à trente milles. Arrivés à Tèbouk, les chrétiens
préférèrent conclure la paix avec le Prophète, prière et salut sur lui, et lui
payer la taxe. Quatre-vingt hypocrites et trois musulmans n'ont pas participé
à la bataille. La sourate Tawba (Le repentir 9) couvre les évènements de cette
campagne; elle dévoile les hypocrites et les condamne à être hypocrites le
restant de leurs vies. Elle annonce le repentir des trois musulmans déserteurs
après une dure punition. Enfin, elle annonce la satisfaction d'Allah pour tous
les sahabas ayant participé à la campagne. Notons encore une fois que la
plupart de ces compagnons avaient moins d'un an dans l'Islam, mais le fait de
côtoyer le Prophète, prière et salut sur lui, et les anciens compagnons dans
la vie courante et dans les campagnes militaires leur permit d'acquérir très
rapidement une grande foi.
5. Année 10
a) Le pèlerinage d'adieu
A son retour de Tèbouk, le Prophète, prière et salut sur lui, annonça
qu'il allait accomplir le pèlerinage par la volonté d'Allah et invita tous les
musulmans à y participer. A ce moment, la totalité de la péninsule arabe était
musulmane. Cent vingt-quatre milles personnes (hommes, femmes et enfants)
assistèrent à cet évènement historique. Ce fut le seul pèlerinage du Prophète,
prière et salut sur lui, et la seule occasion d'enseigner aux gens le
pèlerinage. Le Prophète prononça le discours d'adieu du dhohr au maghrib, il
avait placé des hérauts pour répéter ses paroles. Il reprit les principaux
préceptes de l'Islam, annonça la fin de la jahiliya (période d'ignorance et de
barbarisme) et des pratiques païennes, annonça indirectement sa mort avant le
prochain pèlerinage, puis fit témoigner aux gens qu'il a accompli sa mission.
Enfin il leur passa la responsabilité de la religion en disant: "Que le
présent transmette à l'absent".
Le Prophète, prière et salut sur lui, a laissé une communauté croyante,
éduquée, unie et modèle pour l'humanité. Il ne leur restait plus qu'à porter
le message aux autres nations. Les musulmans comprirent que leur mission
n'était pas de pratiquer tranquillement et de vivre leur train-train
quotidien, mais de continuer dans la même ligne d'efforts et de sacrifices
pour transmettre ce trésor à l'humanité entière. En effet, la mission du
Prophète, prière et salut sur lui, telle qu'Allah l'annonce dans le Coran est
mondiale, elle va même jusqu'à la fin des temps puisqu'il ne vient plus de
prophète. Il est donc hors de question de laisser l'humanité dans son
égarement et de rester chez soi.
b) L'armée d'Oussama
Dans cette optique, le Prophète, prière et salut sur lui, dès son retour
à Médine, organisa une troisième armée contre les romains, cette fois pour la
Palestine. Il désigna comme chef d'armée Oussama fils de Zèyd, son ex-fils
adoptif mort à la tête de l'armée contre les romains dans la bataille de
Mo'ta. Oussama avait dix-sept ans en ce temps et avait participé à une seule
bataille: Hounèyn (il n'y a pas eu de guerre dans Tèbouk). Dans cette
expédition, Allah ne demanda pas à la totalité des musulmans de participer et
seulement trois milles hommes furent recrutés.
c) Mort du Prophète, prière et salut sur lui
Mais au moment du départ de l'armée, le Prophète, prière et salut sur
lui, mourut et l'armée resta quelques jours encore. Abou Bakr Assiddiq,
qu'Allah l'agrée, choisi comme calife commença son califat en envoyant cette
armée.
La mort du Prophète, prière et salut sur lui, fut l'épreuve la plus
difficile pour les sahabas et seul Abou Bakr, qu'Allah l'agrée, ne fut pas
ébranlé. Il rappela les autres sahabas à la réalité par sa citation célèbre:
"Quiconque adorait Mohammed, Mohammed est mort, et quiconque adorait Allah,
Allah est vivant et ne meurt pas, [Mohammed n'est qu'un messager, des
messagers avant lui sont passés; s'il mourait, donc, ou s'il était tué
retournerez-vous sur vos pas?] (3/144)"
Mais les sahabas ont su faire face à toutes les épreuves et ont continué
sur la voie du Prophète, prière et salut sur lui. Dix ans plus tard, les
musulmans mirent fin à l'empire perse et chassèrent les Romains de tout le
Cham (Syrie, Liban, Jordanie et Palestine) et l'Egypte. En l'an 99, les
musulmans pénétraient en Espagne après l'islamisation de tout le Maghreb. On
ne compte que dix milles tombes de sahabas à la Mecque et à Médine, tous les
autres sont morts dans la voie d'Allah en transmettant son message.
6. Récapitulation des évènements
An
-13
-10
-3
0
1
2
2
3
3
3
3
4
4
5
5
6
6
6
7
7
8
8
8
9
9
10
Evènement
Début de l'Islam
Prêche en public
Année de tristesse
Emigration
Jihad, divorce
Zakaat, jeûne
Badr
Bènou Qaynouqaâ
Ouhoud
Héritage
Bir Maâouna
Interdiction d'alcool
Bènou Nadhir
Ahzab
Bènou Qouraydha
Bènou Mostalaq
Voile, faux témoignage
Houdèybia
Khaybar
Omra
Mo'ta
Prise de la Mecque
Hounèyn
Tèbouk
Année des délégations
Pèlerinage d'adieu
Sourate
Âalaq
Massad
Isra
Musulmans
1
38
83 émigrants
Baqara
Baqara
Anfal
314
Ali Imrane
900
Nissa
70
Maida
Hachr
Ahzab
1200
Nour
Fèth
1400
Ahzab
1400
3000
10.000
12.000
Tawba
Houjourate
Nasr
30.000
124.000
10
10
Armée d'Oussama
3.000
Mort du Prophète, prière et salut sur lui
TABLE DES MATIERES
Introduction
1. Le but du livre
2. Plan
I Le prêche en secret
1.
2.
3.
4.
La révélation
Les premiers musulmans
Les premiers fondements de la religion
La foi en Allah
a) Méditation sur les créatures
b) Allah nous observe
c) Allah contrôle tout
5. La foi dans le jour dernier
6. La foi dans les prophètes
7. La morale
8. Importance de la foi et la morale
9. Activités des sahabas
a) Cercles d'instruction
b) Prières la nuit
c) Mise en pratique
d) Prêche
e) Créer l'environnement propice
f) Le groupe
g) Sacrifice et patience
10. Pourquoi le prêche en secret
II Le prêche en public
1. La réaction des mécréants
2. La position des musulmans
a) Education des musulmans
b) La pitié pour les mécréants
c) La guidée des mécréants
d) La préservation de la religion
3. Le Coran, principal soutien des musulmans
a) Récits des prophètes précédents.
b) Discussions avec les idolâtres.
c) Les évènements importants
d) Le ton du Coran évolue
4. Chronologie des principaux évènements
III La guerre défensive
1.
2.
3.
4.
5.
6.
Les musulmans au moment de l'Hégire
La mosquée
La fraternité entre mouhajirines et ançars
Le pacte avec les juifs
Pourquoi la guerre défensive
La législation
a) Stabiliser la vie et accroître la foi
b) Les trois grandes sourates
c) Les droits de la femme et le voile
7. Année 2
a) Le jeûne et la zakaat
b) Les épreuves et l'évolution de la foi
c) Bataille de Badr
8. Année 3
a) Bataille des Bènou Qaynouqaâ
b) Bataille d'Ouhoud
c) La tuerie de Bir Maâouna
9. Année 4
a) L'interdiction de l'alcool
b) Bataille des Bènou Nadhir
10. Année 5 : Bataille des coalisés
IV La guerre offensive
1. Année 6
a) Bataille des Bènou Mostalaq
b) La stratégie du Prophète, prière et salut sur lui
c) Le pacte de Houdèybia
d) Conséquences du pacte
e) Lettres aux pays voisins
2. Année 7
a) Bataille de Khaybar
b) Expansion rapide de l'Islam
3. Année 8
a) Bataille de Mo'ta
b) Trahison des mecquois
c) La prise de la Mecque
d) Bataille de Hounèyn
4. Année 9
a) L'année des délégations
b) Bataillle de Tèbouk
5. Année 10
a) Le pèlerinage d'adieu
b) L'armée de Oussama
c) Mort du Prophète, prière et salut sur lui
6. Récapitulation des évènements
BIBLIOGRAPHIE
Les versets coraniques sont extraits de la traduction de l'Arabie
Saoudite.
La biographie du prophète, prière et paix sur lui, provient pour
l'essentiel de la biographie d'Ibn Hichèm et de l'explication du Coran d'Ibn
Kèthir.
DU MÊME AUTEUR
LIVRES
L'économie dans l'Islam
Militer sur la voie du Prophète
La voie spirituelle: méthode pratique
Théorie de Darwin: le hasard impossible
Comment apprendre l'Islam
5 leçons de sourate Youssef et 5 conseils aux jeunes
Réussir sa vie familiale
12F
15F
15F
10F
(à paraître)
(à paraître)
(à paraître)
TRADUCTIONS
Hayat As-Sahabas, La Vie des Compagnons, de Mohammed Youssef Kandahlaoui: 70F
le tome, 40F le troisième
La sira (biographie du Prophète) d'Ibn Hichèm
(à paraître)
L'explication du Coran d'Ibn Kathir
(à paraître)
Ces livres sont à demander à l'association Le Figuier, 17 rue Renée
Gallot, 92230 Gennevilliers. Pour toute achat par correspondance, rajouter 15%
du prix total pour participation aux frais d'envoi pour une commande
inférieure à 200F, gratuit pour plus de 200F de commande, et libeller votre
chèque à Le Figuier.
Nom et domicile de l'imprimeur
Edition: janvier 1997
Dépôt légal: janvier 1997
Tout musulman doit militer pour avancer dans l'Islam et le faire avancer
dans la société. Mais de quelle manière? C'est là que les avis divergent et
que les militants musulmans se divisent. La réponse qu'apporte ce livre est:
uniquement comme l'a fait le Prophète, prière et paix sur lui. Nous ne pouvons
pas inventer une nouvelle méthode pour servir l'Islam, mais nous devons
comprendre ce qu'a fait le Prophète pour le suivre.
Ce livre analyse la vie du Prophète, prière et paix sur lui, pour
déduire les règles pour militer dans l'Islam. Il est impératif de ne pas
sortir des règles prophétiques, car notre effort ne ferait pls partie de
l'Islam.
Quels sont les premiers enseignements que reçurent les sahabas? Quelles
étaient leurs activités entre eux et comment étaient leurs rapports avec les
non musulmans? Comment l'Islam et les musulmans ont-ils évolué durant les
vingt-trois ans de la mission de Mohammed, prière et paix sur lui? Quels
étaient les enseignements divins face à chaque situation? Voici les questions
auxquelles ce livre essaye de répondre.
Téléchargement