SY N D R O M E S PA R K I N S O N I E N S du sujet âgé Maladie à corps de Lewy diffus Sommaire • • • • • • Introduction Épidémiologie Physiopathologie Tableau clinique Diagnostic Prise en soin 2 Introduction • Individualisation récente (1996) de la maladie à corps de Lewy – Maintenant considérée comme appartenant à la même famille que la maladie de Parkinson • 2e cause de démence – 5 fois moins fréquente que la 1e, la maladie d’Alzheimer • Synucléinopathie – Appartient aux synucléinopathies comme la maladie de Parkinson – Les corps de Lewy sont des agrégats d’alphasynucléine anormale Retour au sommaire 3 Introduction • Particularités cliniques : association de troubles cognitifs, comportementaux et moteurs – Démence ou possible trouble cognitif léger (avant la perte d’autonomie), dont la présentation est un peu différente de celle de la MA (de type cortico-sous-corticale) – Syndrome parkinsonien, ressemblant à celui d’une maladie de Parkinson – Troubles du sommeil et hallucinations précoces – Grandes fluctuations de l’état cognitif et moteur • Évolution particulièrement grave et parfois rapide vers une dépendance et des complications Retour au sommaire 4 Epidémiologie • Peu de données • Incidence – – – – En France 112/100 00 sujets par an selon l’étude PAQUID * L’incidence augmente avec l’âge Pas de prédominance de sexe Pas de facteur de risque • Prévalence – 0,7% pour les sujets de plus de 65 ans – 5% pour les sujets de plus de 75 ans ** – 15% des démences sur les études de démences avec confirmation anatomo-pathologique du diagnostic *Perez et al. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2010; 81: 742-6 ** Rahkonen et al. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2003; 74: 720-4 Retour au sommaire 5 Physiopathologie • Lésions anatomopathologiques – Macroscopie : atrophie cérébrale corticale et sous-corticale, à prédominance parfois frontale et/ou occipitale – Microscopie : les corps de Lewy • Anomalie intracellulaire caractéristique mais non spécifique Lésions typiques de la maladie d’Alzheimer associées dans plus de la moitié des cas Retour au sommaire 6 Physiopathologie • Corps de Lewy (1) – Structure • Corps sphérique intracellulaires (dans les neurones et les cellules gliales), fixant l’hématéine éosine, entourés d’un halo clair, caractéristiques des synucléinopathies • Dépôts d’ubiquitine au centre • Agrégats fibrillaires d’α-synucléine en périphérie Retour au sommaire 7 Physiopathologie • Corps de Lewy (2) – Topographie des corps de Lewy • Dans la maladie à corps de Lewy – D’abord dans le cortex limbique – Puis extension dans le cortex associatif et le locus coeruleus – Très souvent associés à des lésions de type maladie d’Alzheimer, voire des lésions vasculaires chez le sujet âgé • Dans la maladie de Parkinson – D’abord dans le locus niger associés à un dysfonctionnement dopaminergique – Puis extension dans le cortex en cas d’évolution vers des troubles cognitifs Retour au sommaire 8 Physiopathologie • Corps de Lewy (3) – Mécanisme de formation non identifié – Associés à une perte de neurones • Déficits cognitifs , troubles comportementaux et/ou moteurs selon la topographie de la perte neuronale – Associés à des anomalies neurochimiques • Déficit en dopamine • Déficit en acétylcholine plus marqué que dans la maladie d’Alzheimer Retour au sommaire 9 Tableau clinique • Troubles cognitifs – Atteinte progressive des fonctions cognitives dominée par des troubles attentionnels – Troubles fluctuants dans la journée ou d’un jour à l’autre • Autres signes – Troubles comportementaux • Hallucinations visuelles précoces – Syndrome parkinsonien • Ralentissement et troubles de la marche, chutes – Troubles du comportement en sommeil paradoxal (TCSP) – Syndrome dysautonomique • Hypotension orthostatique • Malaises , voire pertes de connaissance Retour au sommaire 10 Tableau clinique Troubles cognitifs • Troubles de mémoire au second plan, mais plainte de mémoire possible – Trouble de l’encodage et du rappel de l’information stockée – Pas de trouble du stockage comme dans la maladie d’Alzheimer • Troubles de l’attention, de la flexibilité, de la planification, responsables d’un syndrome dysexécutif • Ralentissement de la vitesse de traitement avec lenteur des réponses • Trouble de l’initiation verbale • Fluctuations des performances – D’un jour à l’autre ou dans la même journée – Épisodes de léthargie et moments de confusion Retour au sommaire 11 Tableau clinique Troubles cognitifs • Troubles visuo-spatiaux et visuo-perceptifs précoces et sévères (1) – Troubles du sommeil et hallucinations précoces – Grandes fluctuations de l’état cognitif et moteur – Par exemple, le patient s’assied à côté des chaises, a des difficultés à repérer les aliments dans l’assiette – Difficultés à la reproduction de dessins : dessin du MMS, test de l’horloge, dessin du cube, etc. Retour au sommaire 12 Tableau clinique Troubles cognitifs • Troubles visuo-spatiaux (visuo-constructifs) précoces et sévères (2) Exemple : Test de l’horloge précocement anormal Retour au sommaire 13 Tableau clinique Troubles psychiques • Hallucinations visuelles fréquentes, précoces – Non spécifiques mais leur précocité caractérise la maladie (vision de petits personnages, d’animaux, etc.) – Devenant parfois menaçantes au fil de l’évolution, avec absence de critique par le malade et modification du comportement – Parfois hallucinations auditives ou sensitives • Idées délirantes parfois associées avec des thèmes de préjudice (vol, empoisonnement, etc.) • État dépressif fréquent Retour au sommaire 14 Tableau clinique Troubles du comportement Focus Les hallucinations dans la maladie à corps de Lewy • Fréquentes (75% des cas) et précoces • Surtout visuelles – Parfois auditives ou sensitives • Complexes, menaçantes, associées à un délire avec troubles du comportement • À toute heure de la journée – Parfois déclenchées par la prise d’un médicament ayant un effet anticholinergique Retour au sommaire 15 Tableau clinique Syndrome parkinsonien (1) • De type akinéto-rigide souvent bilatéral et à prédominance axiale (tremblement rare) – Dès le début de l’évolution dans la moitié des cas – Présent dans 70% des cas au cours de l’évolution • Aggravation rapide et sévère après la prise de neuroleptiques même à dose faible – Perte rapide de la marche Retour au sommaire 16 Tableau clinique Syndrome parkinsonien (2) • Les signes – Ralentissement moteur (bradykinésie) • Lenteur des gestes et des déplacements – Posture voûtée avec instabilité lors des déplacements – Chutes répétée aux mécanismes multiples • • • • • Syndrome parkinsonien Troubles de l’équilibre Hypotension orthostatique Troubles de l’attention Malaises ou syncopes – Myoclonies parfois Retour au sommaire 17 Tableau clinique Troubles du sommeil : TCSP • Définition : troubles du comportement en sommeil paradoxal – Activité complexe parfois violente mettant en action les rêves pendant la phase de sommeil paradoxal (sommeil avec rêves ou sensation de rêve éveillé) • Signes associés – Sommeil souvent fragmenté avec réveils intra sommeil – Somnolence diurne fréquente • Survenue souvent des années avant les autres troubles • Aggravation en cas de traitement par les antidépresseurs (IRS) Symptôme très évocateur d’une synucléinopathie (comme dans la maladie de Parkinson) Retour au sommaire 18 Tableau clinique Syndrome dysautonomique • Conséquence d’une atteinte du système nerveux sympathique et parasympathique • Hypotension orthostatique – Définition = chute de ≥ 20 mm Hg pour la tension artérielle systolique, ou/et 10 mm Hg pour la diastolique, dans les 3 mn après le lever – Malaises et chutes, entraînant de fréquents passages aux urgences • Troubles urinaires – Impériosité, voire incontinence – Parfois rétention urinaire • Dysfonctionnement érectile entraînant une impuissance • Troubles de la sudation Retour au sommaire 19 Évolution clinique • Évolution globalement plus sévère que dans la maladie d’Alzheimer, car cognitive, comportementale et motrice – Dépendance et grabatisation plus rapides – Durée de la maladie de 4-8 ans • Complications – – – – – Chutes avec complications traumatiques Troubles psycho-comportementaux sévères Dysphagie responsable de pneumopathies d’inhalation Dénutrition et déshydratation Complications thromboemboliques (phlébites et embolie pulmonaire) Retour au sommaire 20 Comment faire le diagnostic ? • Consultation mémoire ou consultation auprès d’un neurologue ou d’un gériatre – Reconstitution de l’histoire de la maladie (anamnèse) avec les proches – Examen clinique et évaluation cognitive – Critères diagnostiques de Mac Keith 2005 • Bilan neuropsychologique souvent nécessaire • Imagerie cérébrale indispensable par IRM – TDM si contre-indication à l’IRM – Scintigraphie au Datscan® seulement si absence de syndrome parkinsonien clinique • Autres examens souvent nécessaires Retour au sommaire 21 Comment faire le diagnostic ? Critères de Mac Keith 2005* (1) • • • • Critères essentiels Critères centraux Critères compatibles Critères d’exclusion *Mac Keith et al. Neurology 2005 / De nouveaux critères permettant le diagnostic prédémentiels devraient être disponibles prochainement – déjà signifié dans le DSM 5 À noter - Faible sensibilité des critères diagnostiques - Confirmation anatomopathologique du diagnostic dans ≈ 50% des cas seulement Retour au sommaire 22 Comment faire le diagnostic ? Critères de Mac Keith 2005 (2) • Critères essentiels – Démence dégénérative caractérisée par un déclin cognitif progressif, d’intensité suffisante pour retentir sur la vie sociale et professionnelle et perturbant la vie quotidienne • Présence d’au moins deux critères centraux – Fluctuation des troubles cognitifs avec présence de troubles de l’attention – Hallucinations visuelles précoces (40-75% cas) – Syndrome parkinsonien akinéto-rigide à prédominance axiale (6070% des cas) Retour au sommaire 23 Comment faire le diagnostic ? Critères de Mac Keith 2005 (3) • Critères évocateurs – Sensibilité sévère aux neuroleptiques – Troubles du comportement en sommeil paradoxal (valeur prédictive) – Anomalies du DAT scan Retour au sommaire 24 Comment faire le diagnostic ? Critères de Mac Keith 2005 (4) • Critères compatibles – – – – – – – – – Chutes et syncopes Pertes de connaissance Dysautonomie Autres hallucinations Idées délirantes Dépression Préservation des structures temporales en TDM ou IRM Hypoperfusion postérieure en TEP/SPECT Ondes lentes temporales à l’EEG Retour au sommaire 25 Comment faire le diagnostic ? Critères de Mac Keith 2005 (5) • Critères d’exclusion – Maladie cérébro-vasculaire évidente selon des critères cliniques et d’imagerie – Autres désordres physiques ou cérébraux suffisants pour expliquer la clinique – Signes parkinsoniens tardifs • Critères chronologiques d’apparition des symptômes – La démence est initiale et précoce, survenant moins d’un an après le syndrome parkinsonien – à la différence de la maladie de Parkinson où la démence survient plus tardivement, toujours au moins un an après le début des troubles moteurs Retour au sommaire 26 Comment faire le diagnostic ? Imagerie cérébrale (1) • IRM • TEMP au DaTSCAN™ Pour en savoir plus, voir focus sur le DaTSCAN™ – Diminution précoce de la fixation du traceur au niveau du striatum (putamen puis noyau caudé) comme dans la maladie de Parkinson Normal (tête du noyau caudé + putamen) Hémi-Parkinson droit (atteinte putaminale gauche) Maladie de Parkinson Maladie de Parkinson établie évoluée (atteinte bilatérale) Retour au sommaire 27 Comment faire le diagnostic ? Imagerie cérébrale (Focus) Focus TEMP au DaTSCAN™ • Examen d’imagerie nucléaire réservé à un usage hospitalier Avis de la commission de la transparence de la HAS, 14 mars 2007 – Utilisation d’un traceur radioactif (ioflupane, analogue de la cocaïne) se fixant sur les récepteurs dopaminergiques présynaptiques cérébraux (DaTSCAN™) – Localisation préférentielle des récepteurs dopaminergiques présynaptiques dans le striatum, structure cérébrale particulièrement touchée par le processus dégénératif des syndromes parkinsoniens • Indiqué en cas de suspicion de pathologie liée au système dopaminergique et en présence de signes cliniques ne permettant pas de conclure – Différencier une maladie de Parkinson d’un tremblement essentiel – Différencier une maladie à corps de Lewy d’une maladie d'Alzheimer Retour au sommaire 28 Comment faire le diagnostic ? Imagerie cérébrale (Focus) Focus TEMP au DaTSCAN™ Image normale caractérisée par deux aires symétriques en forme de croissant d’égale intensité correspondant aux 2 striatums Retour au sommaire 29 Comment faire le diagnostic ? Imagerie cérébrale (3) • TEP-scan – Tomodensitométrie par émission de positions, utilisant comme traceur le FDG (FluoroDeoxyGlucose) (imagerie fonctionnelle) – Permet de différencier une maladie à corps de Lewy d’une maladie d’Alzheimer en cas de présentation clinique atypique, mais non recommandé en pratique en France – Hypométabolisme occipital très évocateur bien qu’assez rare Retour au sommaire 30 Comment faire le diagnostic ? Autres examens complémentaires • EEG sans intérêt – Ondes lentes dans les régions temporales • Biomarqueurs du LCR, seulement pour différencier la MCL de la MA dans certains cas – Augmentation modérée du peptide Aβ1-42 – Protéines tau et (P)tau normales • Scintigraphie myocardique à la MIBG – Indication exceptionnelle – Diminution de la fixation du marqueur MIBG reflétant l’atteinte du système sympathique au niveau du myocarde Retour au sommaire 31 Comment faire le diagnostic ? Écarter une maladie d’Alzheimer • Signes en faveur d’une maladie à corps de Lewy plutôt qu’une maladie d’Alzheimer – – – – – – – Chutes répétées et syndrome parkinsonien précoce Hallucinations visuelles précoces Épisodes confusionnels Fluctuations attentionnelles et motrices TCSP Troubles visuo-spatiaux précoces et sévères Déficit mnésique de type trouble de l’encodage et/ou du rappel (non hippocampique) Retour au sommaire 32 Comment faire le diagnostic ? Écarter une maladie de Parkinson • Signes en faveur d’une maladie à corps de Lewy plutôt qu’une maladie de Parkinson – Chronologie des troubles • Précocité des troubles cognitifs dans l’histoire clinique – – – – Syndrome parkinsonien moins sévère et souvent bilatéral Absence de tremblement DOPA-sensibilité du syndrome parkinsonien plus faible Fluctuations motrices et non motrices marquées À noter Imagerie cérébrale et principes de prise en charge similaires dans les 2 affections Retour au sommaire 33 Prise en soin • Association de traitements médicamenteux et d’une prise en soin non médicamenteuse – Traitement pharmacologique corrigeant la déficience en dopamine – Prise en soin atténuant les autres symptômes (médicamenteuse et non médicamenteuse) – Traitement optimisé des comorbidités et des complications • Organisation de la prise en soin Retour au sommaire 34 Traitements médicamenteux (1) • Traitement du syndrome parkinsonien par la L-Dopa – Petite dose (300 mg/j) de manière progressive – Contre-indication aux agonistes dopaminergiques mais efficacité modeste – Attention à l’hypotension orthostatique et aux hallucinations • Traitement des troubles cognitifs par la rivastigmine – Bénéfice cognitif modeste (revue Cochrane 2012) – Pas d’AMM en France dans cette indication • Traitement des troubles du comportement – Éviter si possible le recours aux psychotropes (neuroleptiques+++) • Traitement de l’hypotension orthostatique – Bas de contention – +/- midodrine si nécessaire Retour au sommaire 35 Traitements médicamenteux (2) • Traitement du syndrome dépressif majeur – Antidépresseur de type inhibiteur de recapture de sérotonine (IRS) par exemple, escilatopram • Traitement des hallucinations/délire/agitation – Inhibiteur d’acétylcholinestérase (rivastigmine) – Si échec de la rivastigmine et hallucinations mal tolérées, clozapine à petite dose (≤ 25mg/j) ou quétiapine • Traitement de l’anxiété ou des troubles du sommeil par alprazolam – Traitement des TCSP par alprazolam le soir (environ 10mg/j) ou clonazépam (O,5 à 2mg) Retour au sommaire 36 Prise en soins non médicamenteuse (1) • Prise en charge des troubles de l’équilibre et de la marche par kinésithérapie – Prévention des chutes et de la grabatisation, notamment à l’occasion d’une pathologie intercurrente +/- hospitalisation • En cas de dépendance pour les soins de base, soins infirmiers à domicile et ergothérapie en structure Retour au sommaire 37 Prise en soins non médicamenteuse (2) • Prise en charge de la dysarthrie avec difficultés de communication par orthophonie • Prise en charge des troubles de la déglutition par orthophonie et diététique – Détection des troubles par l’orthophoniste – Adaptation des textures avec le/la diététicien/ne • Prise en charge des troubles cognitifs par orthophonie et stimulation cognitive de groupe – Optimisation cognitive avec une orthophoniste – Et/ou stimulation cognitive en groupe Retour au sommaire 38 Prise en soins non médicamenteuse (3) • Prise en charge des troubles du comportement comme dans la maladie d’Alzheimer – Évaluation des troubles en équipe pluridisciplinaire (recherche de facteurs déclenchants, etc.) – Stratégies comportementales pour éviter l’apparition des troubles – Si nécessaire, hospitalisation en unité cognitivo-comportementale (UCC) Retour au sommaire 39 Organisation de la prise en soins • • • • • Mise en place progressive d’aides à domicile Information, éducation et soutien des aidants Recours aux structures de répit Préparation de l’entrée en institution Prise en charge adaptée en institution À noter La prise en soins présente peu de spécificités par rapport à la maladie d’Alzheimer Retour au sommaire 40 Conclusion • La maladie à corps de Lewy est moins fréquente que la maladie d’Alzheimer et s’en distingue par des aspects cliniques et évolutifs • Le diagnostic de la maladie à corps de Lewy est essentiellement clinique et la prise en charge pluridisciplinaire • Vigilance particulière concernant une possible aggravation iatrogène en cas de traitement antipsychotique • Maladie à corps de Lewy et maladie de Parkinson sont 2 expressions cliniques différentes du même processus pathologique mais la maladie à corps de Lewy est plus grave et plus évolutive et les patients particulièrement fragiles Retour au sommaire 41