Janvier 2011 - 1 - Les autorités françaises saluent la consultation

Janvier 2011
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REPONSE DES AUTORITES FRANÇAISES A LA CONSULTATION DE LA COMMISSION EUROPEENNE
EN VUE DE NOUVELLES MESURES DENCADREMENT DES AGENCES DE NOTATION DE CREDIT
Les autorités françaises saluent la consultation publique lancée par la Commission européenne le
5 novembre 2010. Cette consultation doit permettre d’évaluer le cadre européen de régulation et
de supervision des agences de notation de crédit, tel qu’il résulte du règlement n°1060/2009 et du
règlement adopté par le Parlement européen le 15 décembre 2010.
Les autorités françaises soutiennent cette initiative et souhaitent qu’un règlement
complémentaire aborde les aspects de la régulation des agences de notation de crédit qui ne
sont pas traités par la réglementation actuelle. Il ne s’agit pas de multiplier les règles et les
obligations pesant sur les agences de notation, ni de revenir sur les aspects déjà traités dans les
règlements en vigueur ou en cours de publication. En revanche, pour éviter toute possibilité
d’arbitrage réglementaire entre les principales places financières et pour s’assurer de la bonne
cohérence des législations au plan international, il convient d’apporter des compléments à la
réglementation européenne des agences de notation.
Ces compléments sont nécessaires au respect des engagements du G20 depuis le sommet de
Washington de novembre 2008, visant à ne laisser aucune institution, aucun produit ni
aucun marché en dehors du champ de la régulation. Ils sont par ailleurs nécessaires pour
mettre en œuvre les principes proposés par le Conseil de stabilité financière (CSF-FSB) et
endossé par le G20 de Séoul en novembre 2010.
***
Dans cette perspective, les principales observations que souhaitent faire les autorités françaises
sont les suivantes :
la dépendance règlementaire aux notations externes doit être réduite, notamment par le
biais des normes techniques des trois autorités européennes de supervision, au premier rang
desquelles l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), en limitant les références
à ces notations dont les effets sont automatiques, en renforçant les capacités internes de
notations et les obligations de diligences internes ainsi qu’en préservant les mesures
alternatives de la qualité de crédit, comme celles des assureurs-crédit ;
pour réduire la concentration du marché, les notations préliminaires de produits financiers
complexes doivent être mises en concurrence ; la proposition d’une fondation
européenne de notation mérite d’être étudiée, à la double condition que l’intervention
financière des Etats-membres soit limitée et que le droit commun s’applique à une telle entité
pour garantir tant sa crédibilité et que son indépendance ;
concernant les notations souveraines, un encadrement minimal de la publication des
notations, après la clôture des marchés, et une transparence accrue des méthodologies et
des études sont souhaitables ;
la responsabilité des agences en cas de faute ou de négligence caractérisée des agences
de notation doit être précisée au niveau européen, tant pour les notations sollicitées que
non sollicitées, et les clauses exonératoires de responsabilité interdites.
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1. Remarques générales :
Bien que cette question soit à la frontière entre le champ de la régulation des agences de
notation et d’autres réglementations financière, l’articulation entre les règlements sur les
agences de notation et les autres réglementations financières est un aspect essentiel du
cadre de régulation et de supervision des agences de notation. D’un côté, il s’agit de
rechercher la plus grande cohérence : il convient notamment d’éviter toute contradiction entre
l’objectif de réduction de la dépendance aux notations de crédit et la mise en œuvre du cadre
prudentiel de Bâle ou de la directive Solvabilité II. D’un autre côté, l’objectif de stimulation de
la concurrence ne sera pas atteint si une approche uniforme est retenue pour l’ensemble des
différentes méthodes d’appréciation de la qualité du crédit : à cet égard, le statut d’organisme
externe d’évaluation de crédit (OEEC) ne doit pas être réservé aux agences de notation de crédit,
sauf à se priver d’une mesure alternative de la qualité du crédit (cf. infra point 2).
Par ailleurs, la qualification des analystes, qui n’est pas directement abordée par la
consultation, est un sujet central, au centre de certaines des questions posées, notamment en ce
qui concerne les notations souveraines. Un système de certification professionnelle par un
organisme indépendant pourrait être proposé, au niveau international (par exemple sous l’égide
de l’Organisation internationale des commissions de valeurs mobilières - OICV), reconnu par les
autorités européennes, afin de garantir un niveau de connaissance des techniques et des pratiques
de marché uniforme et afin de tenir compte de certaines spécificités nationales et sectorielles
(règles comptables et présentation des bilans). La fonction de responsable de la conformité,
fonction clé en matière de respect des obligations prévues par le cadre réglementaire, pourrait
également faire l’objet d’une certification professionnelle.
De même, la question plus générale des moyens humains, notamment des ratios
d’analyses et/ou notations produites par analyste, devrait faire l’objet d’une normalisation.
Dans ce domaine, des normes techniques pourraient être coordonnées avec les prescriptions
relatives aux capacités internes de notation des acteurs de marché, dont les autorités françaises
soutiennent le renforcement (cf. infra, point 2). Il est en effet nécessaire de prévoir une évolution
parallèle des exigences relatives aux notations de crédit produites par les agences de notation (ci-
après « notations externes ») et des exigences relatives aux notations produites par les acteurs de
marché (« notations internes ») pour assurer une qualité uniforme des notations.
Sur ces différentes questions, il serait légitime que l’AEMF et les deux autres autorités
européennes de supervision édictent des normes techniques contraignantes.
1. Réduction de la dépendance réglementaire vis-à-vis des notations externes
(questions 1 à 15)
Comme le préconise les principes du CSF endossés par le G20 à Séoul en novembre
dernier, il convient d’éliminer les effets mécaniques et procycliques induits par l’utilisation
des notations externes. A cet égard, les références réglementaires aux normes internationales
(comptables, prudentielles) ne devraient plus, à l’avenir, renvoyer aux seules notations externes.
Les références réglementaires devraient privilégier la notion d’évaluation appropriée du risque
de crédit sans faire référence à une mesure particulière de ce risque. Les références directes aux
notations externes, comme en matière d’OPCVM monétaires, doivent être corrigées dans
les recommandations ou normes techniques que l’AEMF sera chargée de prendre. A cet égard, il
est particulièrement important que les banques centrales veillent à ne pas utiliser de façon
prédominante ou exclusive les notations externes et s’appuient de façon privilégiée sur leur
dispositif interne d’évaluation du risque de crédit.
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Plus généralement, toutes les références réglementaires qui impliquent en pratique un
comportement financier « mécanique », comme en matière de gestion d’actifs, doivent être
répertoriées et faire l’objet d’une évaluation et, le cas échéant, d’une correction. A défaut de
suppression de ces références réglementaires aux effets « automatiques », les autorités françaises
sont favorables à ce que les « trigger clauses » soient systématiquement communiquées aux
superviseurs. Les autorités françaises sont également favorables à ce que des clauses de
« flexibilité » permettant aux investisseurs de conserver temporairement des titres dont la
notation s’est dégradée, à condition d’un encadrement approprié garantissant in fine la protection
des épargnants. Les autorités françaises soulignent la nécessité d’un bilan coûts/avantages
approfondi avant toute mesure d’interdiction d’investir en fonction du niveau de recours aux
notations externes.
Pour renforcer les capacités internes d’évaluation du risque de crédit, des normes techniques
doivent être prévues par l’AEMF en matière de ratio d’analyses par analystes, de comparabilité
des notations internes, de validation des modèles internes, lorsqu’ils existent, par les instances de
gestion des risques, de renforcement des diligences internes (due diligence) au sein des
différentes catégories d’acteurs de marché et enfin d’implication des organes de gouvernance
dans le contrôle du système de notation interne. L’AEMF pourrait également proposer des
normes techniques pour limiter la part des portefeuilles d’actifs pour lesquels les gestionnaires
sont autorisés à ne recourir qu’à une notation externe, afin d’encourager le développement des
notations internes. De même, des normes de l’AEMF pourrait prévoir des obligations de
vérification de la performance des notations internes par les superviseurs nationaux, en
prévoyant par exemple des comparaisons entre les notations et l’évolution de la qualité de crédit
constatée pour un panier de référence composé de contreparties significatives ou représentatives
de différentes classes d’actifs.
Le renforcement des capacités internes de notation ne doit cependant pas aboutir à une
pure substitution de notations internes aux notations externes, impossible en pratique et
contraire à l’objectif recherché de réduire la dépendance aux notations. Les notations
externes restent utiles et permettent aux superviseurs nationaux de contrôler la pertinence des
systèmes de notations internes mis en place par les établissements bancaires pour le calcul de
leurs fonds propres réglementaires. De même, les établissements bancaires vérifient
régulièrement la cohérence de leurs évaluations internes du risque de crédit avec les notations
produites par les agences de notation. A cet égard, le renforcement des capacités internes de
notation doit s’accompagner du renforcement parallèle du contrôle exercé par les superviseurs
sur les acteurs de marché.
Outre l’obstacle tenant à l’incapacité de certains émetteurs de développer leurs propres
capacités de notation, il convient de souligner le fait que seule une plus grande diversité
d’utilisation des notations de crédit permettra de réduire la dépendance aux notations.
De ce point de vue, il paraît indispensable de préserver la capacité des assureurs-crédit
présents dans plusieurs Etats membres à fournir leurs propres évaluations de la qualité de
crédit pour certains émetteurs (notamment les PME). L’activité de scoring des assureurs-
crédit justifie que ces acteurs continuent à bénéficier de la reconnaissance comme organisme
externe d’évaluation du crédit (OEEC-ECAI) sans pour autant être soumis à la régulation des
agences de notation de crédit. Une réglementation distincte et spécifique paraît souhaitable
concernant ce type d’évaluation de la qualité de crédit et ce type d’acteurs de marché. Les
autorités françaises soulignent par ailleurs que l’utilisation à des fins réglementaires des
notations fournies par les assureurs-crédit (qui diffèrent des scores) contribue à réduire la
dépendance aux notations externes, le renforcement de la diversité des appréciations du risque de
crédit et, s’agissant des scores payés par l’utilisateur, de diversifier les modèles de rémunération
des mesures de la qualité du crédit (cf. infra point 4 et 6).
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Les autorités françaises soulignent que certaines propositions évoquées dans la
consultation pourraient avoir des effets contre-productifs.
Ainsi, la proposition obligeant un émetteur à utiliser au minimum deux notations
externes pour le calcul des exigences en fonds propres pourrait aboutir à renforcer le caractère
oligopolistique du marché. Concernant l’utilisation de méthodes alternatives, comme des
indicateurs de marché (spreads de CDS, prix obligataires), leur utilisation ne paraît pas
compatible avec le caractère non régulé du marché des CDS ni avec l’objectif de réduire les
effets procycliques des notations de crédit, sauf à les intégrer dans des indices synthétiques qui
seraient produits et diffusés par une ou des autorités indépendantes. Il paraît nécessaire d’éviter
toute référence à des produits dérivés de crédit dans l’évaluation de la qualité de crédit d’un
émetteur, en particulier souverain, que ce soit pour la notation ou dans la publication par une
agence de notation de mesures alternatives (notations implicites déduites de données de marché).
Ces publications accréditent en effet l’idée que de tels dérivés de crédit sont des mesures
valables de la qualité de crédit des émetteurs, quand bien même les marchés concernés sont très
peu liquides et structurellement déséquilibrés. D’autres mesures de la qualité de crédit pourraient
être envisagées, par exemple par identification par le superviseur des actifs qui présentent à la
fois une rentabilité élevée et une notation (interne ou externe) élevée1.
Un autre exemple concerne les mesures d’application de la directive « Solvabilité II »,
actuellement en cours de discussion et pour lesquelles les services de la Commission
européenne ont formulé un certain nombre de propositions visant à réduire la dépendance aux
notations externes dans la réglementation prudentielle du secteur de l’assurance. L’une de ces
propositions envisage de recourir aux ratios de solvabilité (solvency ratios) comme méthode par
défaut dans certains modules de risque de la formule standard : les autorités françaises
considèrent que cette méthode comporte plus d’inconvénients que d’avantages et risquerait
d’avoir des effets pro-cycliques beaucoup plus importants que l’utilisation de notations externes
du fait de l’utilisation de données datées. D’une manière générale, s’agissant des approches
retenues dans la directive sur les exigences en fonds propres (CRD) et dans le cadre de la
directive solvabilité II (Quantitative Impact Study – QIS 5), il semble prématuré, notamment
compte tenu du fait que les résultats du QIS 5 ne seront connus qu’en avril 2011, de se fonder sur
ces travaux pour la régulation des agences de notation.
Ces propositions méritent donc de faire l’objet d’un bilan coûts/avantages plus précis
avant d’être intégrées à un projet de règlement.
Enfin, les autorités françaises ne considère pas opportun de prévoir une obligation de
notation interne des émissions souveraines pour toutes les institutions financières : une telle
approche n’est pas réaliste et semble difficilement compatible avec l’impératif de qualification
des analystes (cf. supra). Il convient de rappeler qu’un grand nombre d’établissements bancaires,
étant de petite taille, ne seraient pas en mesure de constituer des équipes d’analystes et de
développer des systèmes de collecte de données suffisamment étoffés leur permettant de
produire des analyses sur les titres souverains complètes.
2. Notations souveraines (questions 16 à 22) :
Les autorités françaises considèrent que les spécificités des notations souveraines
doivent être prises en compte sans pour autant qu’un traitement préférentiel soit réservé
aux émetteurs souverains. A cet égard, la mise en place d’une échelle de notation spécifique ne
paraît pas nécessaire. Toutefois, comme le rappelle la consultation, les notations souveraines
1 Une telle approche aurait permis de détecter certains produits complexes « suspects » qui présentaient, avant la crise, à la fois
une notation avantageuse et une forte rentabilité alors que ces deux caractéristiques sont généralement incompatibles.
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présentent la particularité de reposer pour une large part sur des informations dans le domaine
public (rapports d’Article IV du Fonds monétaire international, rapport de l’Organisation de
coopération et de développement économiques, rapport de la Banque des règlements
internationaux etc.). En outre, les produits de dette souveraine relèvent d’une méthodologie
spécifique et font plus largement appel que les autres catégories de notation à une appréciation
qualitative du risque de crédit, comme le FMI l’a relevé dans son dernier Rapport sur la stabilité
financière mondiale. Enfin, les modifications de notations souveraines ont un effet
particulièrement procyclique en période de stress compte tenu du caractère structurant de la dette
souveraine pour les marchés obligataires.
Dans ce contexte, il paraît souhaitable de tenir compte du fait que les titres souverains
fournissent une référence indispensable au fonctionnement même du marché obligataire.
Cette caractéristique, qui correspond à la fourniture d’un bien public, doit être prise en
compte dans le degré de transparence exigé des agences de notation pour les notations
souveraines. Afin de s’assurer du niveau de qualification et d’expérience des notateurs de titres
souverains, la transparence sur les méthodologies de notation souveraine pourrait être renforcée.
Les agences devraient publier gratuitement leurs rapports de recherche afin que les analyses qui
ont mené aux notations puissent être examinées et évaluées par le marché. L’ensemble des
émetteurs souverains devraient bénéficier de notations non rémunérées, ce qui permettrait
de limiter les risques de pression des émetteurs sur les agences de notation. La révision des
notations devrait être plus régulière et de fréquence semestrielle, pour uniformiser les pratiques
et accroître la comparabilité des notations.
Par ailleurs, le calendrier de publication et d’actualisation des notations gagnerait à
être plus prévisible pour éviter les effets de déstabilisation des marchés observés
récemment. A cet égard, pour l’ensemble des catégories de notation, il conviendrait d’étudier la
possibilité de prévoir une publication et une actualisation des notations à échéance fixe, en
dehors des heures d’ouverture des marchés. Cette prévisibilité accrue de l’évolution des
notations permettrait de réduire les risques de déstabilisation des marchés et d’accoutumance aux
notations de crédit. Il conviendrait d’étudier la possibilité d’une publication des notations à
échéance fixe, par exemple le dimanche en début de journée (heure d’Europe continentale)
lorsque l’ensemble des marchés européens, américains et asiatiques sont fermés pour garantir
une bonne coordination entre les principales places financières et éviter d’avantager les
investisseurs capables d’agir sur l’ensemble des marchés mondiaux. Il convient d’évaluer les
inconvénients de ce type de mesure, comme le risque « d’engorgement » des marchés en cas de
diffusion simultanée des notations souveraines. En tout état de cause, la transparence accrue sur
les méthodologies et les analyses des agences ne doit pas aboutir à une ingérence qui aboutirait à
uniformiser et à « automatiser » les notations souveraines, ce qui comporterait le risque
d’éliminer progressivement toute appréciation qualitative des notations.
Enfin, certaines mesures envisagées présentent plus d’inconvénients que d’avantages.
Ainsi, un délai de publication de 72h spécifique aux émetteurs souverains risquerait de
discréditer les notations souveraines et d’accréditer l’idée de pressions des émetteurs sur les
agences. Par ailleurs, un tel allongement présenterait un risque accru de fuites d’information
privilégiée. Une durée plus courte, par exemple 24h, paraît préférable.
3. Concurrence dans l’industrie de la notation (questions 23 à 30) :
Les autorités françaises partagent le constat de la concentration excessive de l’industrie de la
notation. Bien que cette situation résulte de l’accumulation d’un capital de réputation et d’une
forte crédibilité par les agences de notations qui dominent actuellement le marché, il convient de
stimuler la concurrence.
La proposition de la Commission européenne de prévoir, comme dans la
réglementation américaine, un dispositif spécifique de mise en concurrence des notations
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