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Réunion préparée avec Monique Bouzigues
1. Étymologie / Définitions
2. Notions / Concepts :
Un héritage grec dual (ataraxie vs apathie)
Une notion difficile à penser
3. Questions / Discussion :
4. En guise de conclusion
3 questions, 20 mn environ par question.
Étymologie et définitions
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Étymologie :
Paix est un mot du X e siècle d’abord avec « s » puis avec « x » au XI e siècle.
Du latin pax, paix ; pacis, paisible.

Définitions :
Petit Larousse :
i.
ii.
iii.
iv.
v.
Situation d'un pays qui n'est pas en guerre.
Cessation des hostilités; traité mettant fin à l'état de guerre.
État de concorde, d'accord entre les membres d'un groupe, d'une nation. Vivre en
paix avec ses voisins. Faire la paix : se réconcilier.
Tranquillité, quiétude exempte de bruit, d'agitation, de désordre. La paix de la nature,
des bois.
Tranquillité, sérénité de l'esprit. Avoir la conscience en paix.
Dictionnaire de philosophie Godin :
i.
ii.
iii.
iv.
v.
Absence de guerre
Situation d’un pays qui ne subit pas ou ne fait pas la guerre.
Fin de la guerre (traité de paix, signer la paix)
Dans la vie privée (familiale et personnelle), état de repos et de tranquillité.
Au sens moral, tranquillité de l’âme.
Notions /concepts / Prise de vue
1. La philosophie grecque pense la paix morale comme l’absence de douleur corporelle (aponia) et comme
la tranquillité de l’esprit (ataraxia chez les épicuriens, apathia chez les stoïciens) :
•
Ataraxie (ataraxia) / absence d’agitation :
 Chez Démocrite (v460 v370 av JC) : c’est la tranquillité de l’âme qui résulte de la modération des
plaisirs et de l’harmonie de l’existence chez celui qui laisse le monde à tous ses troubles.
 Epicure (342-270 av JC) : reprend le mot pour désigner l’absence de souffrance corporelle et de
trouble de l’âme. L’ataraxie est la fin même de la sagesse épicurienne.
•
Apathie (apathia) / insensibilité :
Chez les sceptiques et les stoïciens, c’est la disposition de celui qui par, discipline
intérieure, s’est rendu indifférent aux affects, et plus particulièrement à la douleur et aux
craintes. Dans ce cadre moral, l’apathie est une sagesse qui représente l’analogue de
l’ataraxie épicurienne.
D’où un héritage conceptuel dual / Paix : absence d’agitation ou insensibilité ?
2. La paix, une notion difficile à penser ?
La réflexion théorique concernant la violence et la guerre est plus nourrie que celle qui prend la paix pour objet :
•
L’absence de tout conflit signifie-t-il l’absence de toute violence, de toute hostilité, ou même de tout
affrontement ?
•
En d’autres termes, la paix exclut-elle les conflits idéologiques ainsi que les luttes et les rivalités
économiques ?
•
La véritable « tranquillité sociale » peut-elle être obtenue au prix d’une répression des puissances vitales ?
•
La représentation individuelle de la paix (état de sérénité qu’aucune passion ne vient troubler) ne pourraitelle donc pas servir de modèle à la paix publique ?
•
Ne faut-il pas plutôt penser la paix en termes d’équilibre des forces et de rapports de puissance qu’en
termes d’apaisement généralisé ?
•
De ce fait, la paix n’impliquerait-elle pas nécessairement l’autorité ?
•
Y aurait-il des conflits, des guerres justes ?
•
La raison peut-elle dans certains cas justifier la violence ?
•
Toute paix est-elle bonne ? / Faudrait-il tolérer l’intolérable ?
•
Le pacifisme : vertu ou idéologie ?
Si la paix est difficile à établir, l’idée de paix n’est-elle pas également délicate à penser ?
QUESTIONS
1.
Paix intérieure : sagesse ou indifférence ?
2.
La paix exclut-elle les conflits ?
3.
La paix est-elle une fin en soi ?
1.
Paix intérieure : sagesse ou indifférence ?
Animation Monique Bouzigues
L’indifférence est-elle l’absence de différences ou de préférences ?
L’indifférence ne débouche-t-elle sur le nihilisme ?
La sagesse est-elle de l’indifférence ?
Sinon qu’est-ce qu’être sage ?
Si sagesse et indifférence débouchent sur une certaine paix intérieure, celle-ci n’est-elle
pas de nature différente selon son origine ?
1. Paix intérieure : sagesse ou indifférence ?
1. Indifférence ?
L’indifférence n’est-elle pas l’absence de préférences et non l’absence de différences ?
Pour l’indifférent, si tout n’est pas le même (identique), tout ne revient-il pas au même ?
Si , comme on dit, tout m’est égal, n’est pas parce que pour moi tout se vaut ?
Mais, si tout se vaut, c’est donc que rien ne vaut.
C’est d’où l’on peut penser que l’indifférence totale débouche sur le nihilisme.
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Etre indifférent, n’est-ce pas être neutre pour rester en paix ?
Mais si l’indifférence revient au nihilisme « rien ne vaut si tout se vaut »,
comment l’indifférence pourrait-elle valoir quelque chose ?
2. Sagesse ?
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La sagesse ne se reconnaît-elle pas à une certaine sérénité reflet elle aussi d’une certaine
paix intérieure ?
Si, depuis l’antiquité, la sagesse est le but de la philosophie, les Grecs distinguaient :
 le sagesse théorique ou contemplative (sophia ) , celle où la philosophie peut conduire,
 de la sagesse pratique (phronésis) , qui paraît davantage une question de tempérament.
« Pour moi, j'aime la vie » disait Montaigne. C'est en quoi il était sage : parce qu'il
n'attendait pas que la vie soit aimable (facile, agréable, ni même réussie) pour l'aimer.
Mais qui pourrait prétendre que l'on puisse aimer absolument la vie, quelle qu’elle soit ?
N'est-ce pas en effet lorsque nous ne l’aimons pas complètement, qu’ afin de conserver une
certaine sérénité, nous avons besoin de philosopher pour tendre vers la sagesse (sophia) ?
Ou peut peut être plus encore vers : « …une certaine joie, une certaine liberté, une certaine
éternité » comme dit ACS.
Etre sage n’est-ce pas parvenir d’une façon ou d’une autre à aimer la vie telle qu’elle est ?
Mais la vraie sagesse n’est-elle pas un état toujours approximatif et instable ?
« N’avons-nous pas tous nos moments de sagesse quand l’amour et la vérité nous suffisent.
Et de folie, quand ils nous déchirent ou nous font défaut » dit CS
Si la sagesse tout comme l’indifférence permettent d’accéder à une certaine paix intérieure, cette
paix n’est-elle pas néanmoins de nature différente selon son origine :
• reconnaissance des valeurs et acceptation de la souffrances débouchant sur la joie d’aimer pour l’une
• négation des valeurs et refus de la souffrance débouchant sur le nihilisme pour l’autre ?
2. La paix exclut-elle les conflits ?
Le conflit ne serait-il pas donné ?
Le conflit ne serait-il pas dans la nature des choses ?
La paix ne faudrait-il pas la faire ?
Si oui, pourquoi, comment ?
2. La paix exclut-elle les conflits ?
1. Le conflit n’est-il pas donné ?
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Les animaux sauvages par leur comportement n’en apportent-ils pas la preuve ?
D’une façon générale, le conflit, la lutte pour la vie sans altruisme ne sont-ils pas la loi de la
nature ?
Par extension aux humains, l’ego, son besoin d’affirmation, la peur de manquer n’en sont-ils pas
aussi l’illustration ?
Selon l’analyse et la terminologie d’ACS, le conflit ne serait-il pas inhérent à l’enchaînement
descendant des primats (1) ?
La précarité de la paix, le fait que le conflit tende toujours à ressurgir ne montre-t-il pas qu’il
est donné ?
Si le conflit est quelque part naturel et/ou inné, ne peut-on pas penser qu’il est donné ?
2. La paix, ne faut-il pas la faire ?

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Tant intérieurement qu’à l’égard d’autrui, la paix n’est-elle pas toujours à construire ?
La paix intérieure n’est-elle pas, comme la sagesse elle-même, toujours approximative et
instable, toujours en construction en dialectique entre :
 L’amour de la vie et des autres tels qu’ils sont, comme en vacuité d’ego, en Agapè, ce
vers quoi tendent les valeurs et/ou la morale (autrement dit, selon la hiérarchie
ascendante des primautés d’ACS (1))
 Et l’amour de soi égocentré sur son propre intérêt, sa peur de manquer ou de perdre
son acquis (autrement dit, selon l’enchaînement descendant des primats d’ACS (1))
N’en n’est-il pas de même de la paix avec autrui (ou en collectivité) :
 Aussi bien lorsque la paix est voulue en corolaire de la paix intérieure en extension
 Que lorsqu’elle est imposée par le statut quo des parties ou pour le respect de l’ordre
public en application de la loi ?
(1) : voir diapo suivante
Dès lors qu’elle procèderait du dépassement de l'ego vers l'acceptation d'autrui soit par
amour librement consenti (sagesse), soit par morale humaniste, soit enfin par simple
application de la loi, la paix n’est-elle éminemment précaire, toujours à faire ?
Si la paix reste toujours à faire, n’est-ce pas la preuve que la paix n'exclut pas les conflits ?
La hiérarchie des ordres d’André Comte-Sponville
Primautés et primats /Angélisme et barbarie
Enchaînement
descendant
des primats
Ce qui est
objectivement
le plus important
dans un
enchaînement
descendant de
détermination.
Le primat est
explicatif : c’est
l’ordre des causes
et de la
connaissance.
C’est ce qui sert
à comprendre.
L’amour
C’est l’ordre de l’éthique. C’est ce qui éclaire la morale.
C’est la valeur suprême de « l’esprit ».
L’ordre de la morale
C’est l’ordre où l’on se pose la question du bien et du mal.
C’est l’ensemble de nos devoirs : des règles que l’on se fixe soi-même.
Hiérarchie
ascendante
des primautés
Ce qui vaut le plus,
subjectivement,
dans une hiérarchie
ascendante
d’évaluations.
L’ordre juridico-politique
C’est l’ordre des
valeurs et des fins,
qui tend au
meilleur ou au
plus élevé.
C’est l’ordre où l’on se pose la question du légal et de l’illégal.
C’est l’ordre des lois de la vie en société.
C’est ce qui sert à
juger et à agir.
C’est parce que nous ne sommes pas ‘‘tout amour’’ que nous avons besoin d’une morale.
C’est parce que nous manquons de moralité que nous avons besoin de lois.
L’ordre de l’Economie, des sciences et des technologies
C’est l’ordre où l’on se pose la question du vrai et du faux, du possible et de l’impossible.
C’est l’ordre de la « matière »; de la vérité par excellence.
La dialectique (primat de la matière ou de la vérité/primauté de l’esprit ou des valeurs) vaut aussi bien à titre individuel que collectif.
On ne passe du primat à la primauté qu’à la condition de le vouloir : c’est le mouvement ascendant du désir.
Chaque ordre a sa logique propre : confondre les ordres entre eux est donc ridicule.
Pour expliquer un ordre donné, on doit faire appel aux ordres inférieurs.
Pour juger un ordre donné, on doit faire appel aux ordres supérieurs.
La dialectique valeur / vérité s’exerce ainsi de proche en proche.
Soumettre un ordre donné, avec ses valeurs propres, à un ordre inférieur : renoncer à la primauté, c’est de la barbarie.
Prétendre annuler ou déstructurer un ordre donné au nom d’un ordre supérieur : oublier le primat, c’est de l’angélisme.
Principales références : Le capitalisme est-il moral ? / Dictionnaire philosophique (primats et primautés) d’André Comte-Sponville
Diapositive réalisée par JP.Colin et validée par A.Comte-Sponville
3. La paix est-elle une fin en soi ?
Pacifique et pacifiste est-ce la même chose ?
Le pacifisme : vertu ou idéologie ?
Toute paix est-elle bonne ?
Doit-on tolérer l’intolérable ?
La paix est-elle un fin ou un moyen ?
3. La paix est-elle une fin en soi ?
1. Pacifique?
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Etre doux, c’est être pacifique. Etre pacifique, ce n’est donc pas une opinion, c’est plutôt une
aptitude ou une vertu.
Toutefois, cela n’implique pas nécessairement que toute paix soit bonne, ni même acceptable.
Etre pacifique, c’est désirer la paix, mais pas à n’importe quel prix et sans s’interdire donc
absolument la violence, le conflit voire la guerre.
C’est notamment la position de Spinoza (1632 / 1677) : « La guerre ne doit être entreprise
qu’en vue de la paix, et d’une paix qui soit celle non de la servitude mais d’une population libre ».
Etre pacifique est une vertu. C’est faire de la paix son but.
Cela ne prouve pas, hélas, que la paix suffise toujours comme moyen.
2. Pacifiste?
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Etre pacifiste c’est une opinion, une doctrine ou une idéologie qui juge que la guerre ou le conflit
ne saurait être justifiée par rien. Ce n’est donc pas une vertu.
Pour le pacifiste, la paix, en toutes circonstances, vaut mieux.
La paix est non seulement un but, mais un moyen; l’unique moyen. Pour le pacifiste, la paix est
donc une fin en soi.
Ce qui revient à dire que le pacifiste est prêt à tolérer l’intolérable si la non-violence en tant
qu’action ne suffit pas.
Tout comme le bellicisme, le pacifisme est une idéologie.
Si le bellicisme est de la barbarie, le pacifisme pour qui la paix est
une fin en soi, n’est-il pas de l’angélisme?
Toute paix n’est pas forcément bonne ni même acceptable.
Qui pourrait prétendre qu’il faudrait tolérer l’intolérable ?
N’est-ce pas pourtant ce à quoi s’expose le pacifiste pour qui la paix est une fin en soi ?
Si la paix est une fin, comment pourrait-elle être aussi l’unique moyen, c’est-à-dire une fin en soi ?
« La guerre est donnée; la paix il faut la faire.
C’est ce qui donne raison aux pacifiques,
sans donner tort aux militaires. »
André Comte-Sponville
*
* *
« S’il faut appeler paix l’esclavage, la barbarie ou
l’isolement, il n’est rien pour les hommes de si
lamentable que la paix »
disait Spinoza
Mais que pourrait-il y avoir de meilleur que la paix
si elle va avec l’amour, la justice et la liberté ?
Prochaines réunions
Maison des Savoirs (Agde) de 18h30 à 20h :
• « Paix » mardi 14 décembre
• « Respect »
mardi 11 janvier
•
« Différence »
•
« Démocratie » mardi 15 mars (exceptionnellement 3 em mardi du mois)
•
« Sciences »
mardi 8 février
mardi 12 avril
Médiathèque A. Malraux (Béziers) de 19 à 21h :
« La mort : dernier ou grand voyage ? »
mercredi 23 février
Toutes les informations et documents sont disponibles sur :
http://www.cafe-philo.eu/
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