Controverses modernes sur les instruments de politique monétaire

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Controverses modernes sur
les instruments de politique
monétaire: un point de vue
post-keynésien
Marc Lavoie
Université d’Ottawa
Proverbe cambridgien


« Les grandes théories sont comme un lièvre
pris en chasse; si vous restez au même
endroit ou presque au même endroit, vous
pouvez être certain qu’il reviendra vers
vous ». D.H. Robertson 1956
« Highbrow opinion is like a hunted hare; if
you stand in the same place or nearly in the
same place it can be relied upon to come
round to you in circle. »
Objectif: remettre les pendules
à l’heure


Comprendre la mise en œuvre de la politique
monétaire.
Ceci va nous aider à mieux comprendre les
implications des interventions publiques,
notamment celles des banques centrales et
leurs prétendues injections de liquidités, en
ces temps de crise finanicière.
Mon hypothèse de départ



Les banques centrales conduisent leurs opérations
essentiellement comme elles le faisaient autrefois, et
comme elles l’ont toujours fait, en fixant un taux d’intérêt
directeur.
Les procédures de certaines banques centrales sont
maintenant particulièrement transparentes, relativement
au passé et relativement à celles des autres banques
centrales. Ces banques centrales sont notamment celles
du Canada, de l’Australie, et de la Suède.
Les procédures de d’autres banques centrales sont
moins transparentes, par exemple la FED et la BCE;
elles sont recouvertes par un voile; mais leur logique est
similaire.
Deux points de vue sur la cible
opérationnelle de la banque
centrale

La cible opérationnelle est le taux d’intérêt, sous le
contrôle de la banque centrale




Point de vue des banques centrales autrefois
Point de vue de la Commission Radcliffe 1958
Point de vue des banques centrales aujourd’hui
La cible opérationnelle est la masse monétaire, avec
l’aide des opérations d’open market



Point de vue de nombreux universitaires (anglo-saxons)
Point de vue des monétaristes
En partie adopté par les gens des banques centrales dans
les années 1975-1990
Plan




Une perspective historique des débats entre
banquiers centraux et universitaires
Le fonctionnement des banques centrales
contemporaines (notamment la Banque du
Canada)
Explications microéconomiques qui justifient
le choix du taux directeur comme cible
opérationnel
Implications pour la crise financière actuelle
Deux ennemis qui s’affrontent
depuis des temps immémoriaux

« Deux attitudes s’opposent quant aux conditions dans
lesquelles s’ajustent l’offre et la demande de monnaie.
Pour les uns (quantitativistes et Keynes) la quantité de
monnaie est fixée par le système bancaire de façon
indépendante …. Pour les autres (Banking school et
Wicksell), les banquiers ne fixent pas une quantité,
mais un prix. Le système bancaire adopte un taux (ou
ensemble de taux) sur le marché monétaire et il prête
ensuite tout ce que les emprunteurs demandent à
condition qu’ils offrent des garanties suffisantes ».
Jacques Le Bourva 1959
Une complication additionnelle

Certains auteurs peuvent se trouver dans
deux camps à la fois. C’est souvent le cas
des grands auteurs:



Wicksell (qui prétend conserver la Théorie
quantitative, tout en la remettant en cause)
Keynes (qui prétend remettre en cause la Théorie
quantitative, tout en la modifiant à peine)
Donc il est difficile ou même impossible de
faire des classifications étanches
Keynes, un friedmanien avant l’heure



« Nous sommes tous keynésiens maintenant » dit Friedman, à
l’apogée du modèle IS/LM.
C’est que, comme le dit Kaldor (1982), la théorie monétaire de
Keynes 1936 est « une modification de la théorie quantitative de
la monnaie, et non son abandon ».
Keynes 1930, malgré ses innovations, est un « quantitativiste »
 Il critique ceux qui font des taux d’intérêt la cible opérationnelle;
 Il approuve le multiplicateur de monnaie de C.A. Phillips (1920),
qui va devenir la référence des manuels;
 Il prône l’utilisation d’instruments quantitatifs pour la conduite de
la politique monétaire: les opérations d’open market et les
changements aux taux de réserves obligatoires, instruments
pourtant seulement prônés par les Américains et la Fed à
l’époque.
Qui a écrit ceci et quand ?



« La théorie quantitative de la monnaie agonise. Les critiques
banales acceptées depuis longtemps par tous, concernent
l’instabilité des vitesses de circulation ….La critique fondamentale
s’appuie sur la détermination de la masse monétaire. Il est essentiel
à la solidité de la position quantitativiste que la quantité de monnaie
soit une variable indépendante du revenu national et de la
conjoncture, une cause sans cause. Il faut donc soutenir que les
banquiers fixent le montant du stock monétaire par un acte
souverain, dans le secret de leur olympe. C’est précisément cette
condition de la théorie quantitative qui n’est plus admise en
France aujourd’hui: la Banking school et Wicksell triomphent ».
Jacques Le Bourva 1962:
L’endogénéité de l’offre de monnaie
Théorie quantitative de la monnaie (Universitaires)
contre
la Commission Radcliffe 1959 (Banque centrale)




Théorie quantitative
Contrôle de l’offre de
monnaie banque centrale,
en particulier les réserves
Vitesse de circulation et
multiplicateur de monnaie
quasi constants

Causalité monnaie vers
prix




Commission Radcliffe
La banque centrale contrôle les
taux d’intérêt, et très mal l’offre
de monnaie
La vitesse de circulation est
instable (substituts): Concept
de « general liquidity »
La politique monétaire n’a
qu’un effet modéré sur le taux
d’inflation, qui dépend de
nombreux autres facteurs
Contrôle du crédit ?
Les années 1960-1970




Malgré ce qu’en dit Le Bourva en 1962, la théorie quantitative de
la monnaie et les objectifs quantitatifs de taux de croissance de
monnaie semblent graduellement emporter l’adhésion des
universitaires.
Le point de vue Radcliffe est fortement critiqué, jugé dépassé:
« Il existe encore des gens dont les idées n’évoluent pas….
Leurs opinions sont embaumées dans le Comité Radcliffe, l’une
des opérations les plus stériles de tous les temps » (Samuelson
1969)
Le monétarisme de Milton Friedman avance, porté par les
centaines de pages de statistiques de Friedman et Schwarz, puis
triomphe, grâce à sa version augmentée de la courbe de Phillips.
Le monétarisme est aussi porté par les pressions politiques.
Les pressions politiques sur la
théorie économique

« This will involve coming clean about how
compromises with the first Thatcher government,
during the monetary base control debate of the very
early 1980s, had the unfortunate effect, albeit with a
lag, of clouding the Bank’s thinking about the
feasible role of open market operations in the
framework for setting interest rates … In separate
acts of folly a quarter of a century ago, the monetary
authorities sought to hide the fact that they were
setting rates »

Paul Tucker, Bank of England Quarterly Bulletin, 2004.
Les universitaires anglosaxons et leurs manuels




Pour eux, les choses sont très simples
Les opérations d’open-market permettent de
contrôler les réserves des banques
Via le multiplicateur de dépôts, la banque centrale
contrôle l’offre de monnaie (ce qui rend
opérationnelle une politique monétaire basée sur la
théorie quantitative de la monnaie)
L’offre de monnaie détermine le taux d’inflation des
prix (selon la plupart des auteurs)
Conduite de la politique monétaire par les
quantités ou par les taux ? Un point de vue
éclectique

En accord avec le modèle IS/LM keynésien
dominant, la proposition de Poole (1970) concernant
le choix de la cible opérationnelle optimale semble
acceptable à tous:



Si la courbe IS est la plus instable, la mise en œuvre de la
politique monétaire doit se faire par l’offre de monnaie
Si la courbe LM est la plus instable (la demande de
monnaie est instable), la mise en œuvre de la politique
monétaire optimale se fait par les taux d’intérêt.
Or, les travaux de Friedman semblent démontrer
que la vitesse de circulation est relativement stable.
Poole 1970
Taux
d’intérêt
LM
LM
IS
IT
i
IT
IS
A
MT
IT
Output
Investissement instable:
La monnaie banque centrale
est l’instrument préférable (MT)
Output moins variable
A = IT
MT
Output
La demande de monnaie est instable:
Le taux d’intérêt est l’instrument
préférable (IT)
Pas de variabilité dans l’output
Conduite de la politique monétaire par les
quantités ou par les taux ? Un second point de
vue éclectique




Les auteurs français rejettent initialement les mécanismes
« monétaristes » anglo-saxons pour la France.
C’est la distinction « économie de marché, économie
d’endettement », ou encore « économie de découverts,
économie de fonds propres » (Maarek, Lévy-Garboua,
Renversez).
L’économie de marché, ce sont les Etats-Unis et les autres pays
anglo-saxons, où le modèle monétariste avec mise en œuvre de
la politique monétaire se fait par les quantités.
L’économie d’endettement, c’est la France, où le contrôle par les
quantités ne peut s’appliquer, car les banques sont constamment
en déficit de monnaie banque centrale. L’offre de monnaie y est
endogène, et répond à la demande. La mise en œuvre de la
politique monétaire doit se faire par les taux. Wicksell et les
auteurs autrichiens triomphent, avec leur taux d’intérêt naturel.
Le triomphe monétariste provoque
la réaction post-keynésienne



Jusqu’en 1970, et même 1980, la théorie monétaire de
l’école keynésienne de Cambridge n’est pas claire. Son
exposé le plus définitif est celui de Robinson 1956,
L’Accumulation du capital.
Avant 1970, les principales critiques de la théorie
quantitative porte sur l’instabilité de la demande de
monnaie, ou sur l’instabilité du multiplicateur de
monnaie. C’est encore le cas de Kaldor 1958, lors de sa
présentation à Radcliffe, et aussi du comité Radcliffe luimême. C’est aussi la critique de Minsky 1957, un
keynésien.
Après 1970, la critique porte sur la question plus
essentielle de la causalité inversée.
Les causalités inversées:
Trois groupes d’auteurs



Des économistes de la Réserve Fédérale (Holmes 1969,
Lombra, Torto, Kaufman, Feige+McGee)
Les économistes post-keynésiens
 Cramp 1970, Kaldor 1970 et 1980, Robinson 1970
 Davidson et Weintraub 1973, Moore 1979
Les iconoclastes: Le Bourva 1959 et 1962, F.A. Lutz 1971,
C.A.E. Goodhart 1975




L’offre de monnaie n’est pas indépendante, elle est déterminée
par la demande
Les prêts font les dépôts, les dépôts font les réserves (le diviseur
de crédit)
Les taux d’intérêt courts sont la variable exogène
La causalité prix/monnaie est inversée
L’apogée du monétarisme strict :
1975-1982

Bien que les économistes des banques centrales
restent persuadés que les taux d’intérêt restent les
seules cibles opérationnelles pertinentes, et que
l’offre de monnaie est essentiellement endogène,
sous la pression des économistes universitaires qui
les encensent, ils mettent en pratique les recettes
monétaristes de Friedman:



Abandon (apparent) des cibles de taux d’intérêt
Adoption par l’ensemble des banques centrales de cibles
de taux de croissance de la masse monétaire, M1, M2, ou
M3 selon le cas
Adoption par la Fed, en 1979-1982, de cibles de taux de
croissance des réserves fournies par des opérations
d’open-market (non-borrowed reserves)
L’échec du monétarisme strict
(Contrôle de l’inflation par la fixation du taux de
croissance de la masse monétaire)




Certaines banques centrales ne parviennent pas à
rencontrer les objectifs de cibles de masse monétaire.
Les autres banques centrales y parviennent, mais alors
le taux de croissance de la masse monétaire n’est plus
corrélé avec le taux d’inflation des prix.
Les banquiers centraux jugent que M1 les a
abandonnés, et non qu’ils ont abandonné le
monétarisme strict.
Ironiquement, les universitaires français
commencent à adopter les descriptions des manuels
anglo-saxons au moment même (les années 1980 et
1990) où les banques centrales abandonnent le
monétarisme strict.
Les causes de l’échec selon
l’orthodoxie


Le consensus à cette époque est que la demande
de monnaie et le multiplicateur de monnaie sont trop
instables, qu’il y a trop d’innovations financières
pour pouvoir contrôler utilement quelque agrégat
monétaire que ce soit (aussi le point de vue des
post-keynésiens structuralistes, à la Minsky et à la
Rousseas; c’est aussi un retour à Radcliffe).
Selon le modèle de Poole 1970, puisque LM est
instable, il faut abandonner la conduite de la
politique monétaire par les quantités et revenir à la
conduite de la politique monétaire par les taux, qui
était autrefois celle de toutes les banques centrales.
Les divergences présentes:
Les raisons qui justifient la mise en œuvre de
la politique monétaire par les taux d’intérêt


Pour la majorité des économistes, orthodoxes ou
hétérodoxes, c’est l’analyse de Poole 1970 basée
sur la macro IS/LM.
Pour les économistes proches des banques
centrales, c’est une analyse microéconomique, liée
aux opérations journalières et routinières de la
banque centrale, qui justifie que le taux d’intérêt
constitue le principal instrument d’intervention, et
aussi la nécessité du rôle de prêteur de dernier
recours de la banque centrale.
La microéconomie qui justifie la mise
en œuvre de la politique monétaire
par les taux d’intérêt



Certains économistes des banques centrales
(Bindseil 2004 BCE, Clinton 1991 BdC,
Lombra 1974 et Whitesell 2003 Fed)
Certains post-keynésiens: Eichner 1985,
Wray 1998 et les néo-chartalistes
Des institutionnalistes: Fullwiler 2003 et
2006)
La microéconomie qui justifie la mise
en œuvre de la politique monétaire
par les taux d’intérêt



Les interventions des banques centrales sont avant tout
« défensives ». Elles ont pour objectif de compenser les flux de
paiements entre la banque centrale et le secteur bancaire
Ces flux proviennent: a) des taxes perçues et des dépenses du
gouvernement; b) des interventions sur le marché des changes;
c) des achats ou vente de titres d’état, ou le remboursement de
titres venant à échéance.
Sans ces interventions défensives, les réserves des banques
subiraient d’énormes mouvements de jour en jour, ou d’heure en
heure. Les taux interbancaires subiraient d’incroyables
fluctuations, sans que ceci ait un quelconque lien avec l’activité
économique au niveau macroéconomique.
Le dispositif opérationnel permettant d’éviter
des fluctuations démesurées du taux
interbancaire




Interventions défensives régulières (opérations principales de
refinancement et opérations de réglage fin).
Mise en place d’un système de réserves obligatoires: « Le
système de réserves obligatoires a pour objet de stabiliser les
taux d’intérêt du marché monétaire et de créer (ou d’accentuer)
un déficit structurel de liquidités au sein du système bancaire »
BCE 2006.
Accès aux facilités permanentes (prêts et dépôts – le corridor).
Sans au moins l’une de ces trois procédures, les taux
interbancaires auraient de jour en jour des fluctuations allant de
zéro à un chiffre astronomique (45%, 75%, etc.)
La Réserve fédérale agit exactement comme la
banque centrale d’une économie
d’endettement

“L’objectif principal des opérations d’open market de la Fed n’a
jamais été d’augmenter ou de réduire les réserves pour modifier
l’offre de monnaie, mais plutôt de maintenir l’intégrité du système de
paiements en fournissant la quantité appropriée de monnaie banque
centrale afin d’atteindre le taux interbancaire ciblé”. Fullwiler (2003)

“The primary objective of the Desk’s open market operations has
never been to ‘increase/decrease reserves to provide for
expansion/contraction of the money supply’ but rather to maintain
the integrity of the payments system through provision of sufficient
quantities of Fed balances such that the targeted funds rate is
achieved”.
Et c’est pareil pour la BCE !


‘The logic of the ECB’s liquidity management ... can be summarised
very roughly as follows: The ECB attempts to provide liquidity
through its open market operations in a way that, after taking into
account the effects of autonomous liquidity factors, counter-parties
can fulfil their reserve requirements as an average over the reserve
maintenance period. If the ECB provides more (less) liquidity than
this benchmark, counterparties will use on aggregate the deposit
(marginal lending) facility’ Bindseil and Seitz 2001
Autrement dit, quand la BCE estime mal la demande nette de
liquidités, celle nécessaire pour rencontrer les exigences de
réserves obligatoires et la demande de monnaie banque centrale
des particuliers, donc quand la BCE ne fournit pas la bonne quantité
de monnaie banque centrale à travers ses opérations principales de
refinancement, les banques sont invitées à utiliser les ‘facilités
permanentes’.
Conséquences des proverbes
cambridgiens

« La conduite de la politique monétaire, en théorie
et en pratique, en particulier le choix d’une cible
opérationnelle, est revenue à ce que les
économistes considéraient comme adéquat il y a
100 ans, c’est-à-dire cibler les taux d’intérêt
courts ». Ulrich Bindseil 2004, BCE et
anciennement de la Bundesbank

« Today’s views and practice on monetary policy
implementation and in particular on the choice of the
operational target have returned to what economists
considered adequate 100 years ago, namely to
target short-term interest rates »
Un exemple que je connais bien:
La Banque du Canada






Aucune exigence de réserves obligatoires
Aucune restriction, outre les actifs en garantie, sur les facilités
d’emprunt à la banque centrale
Système de transfert de paiements de grande valeur (STPGV)
électronique (chambre de compensation)
 En temps réel (règlement final et irrévocable)
 Net (chaque participant dispose d’une limite de crédit): besoin
d’encaisses faibles
Système de tunnel (ou de corridor): taux prêteur et emprunteur
symétriques autour du taux de financement cible à un jour
Chaque banque connaît sa position de règlement en fin de
journée avec certitude
La Banque du Canada connaît aussi avec certitude sa position
vis-à-vis le système bancaire en fin de journée
Les opérations de la Banque du Canada




La Banque du Canada fixe un taux de financement
cible à un jour (8 annonces à dates fixes par
année): c’est le taux directeur.
Les banques commerciales ont une demande
d’encaisses de règlement égale à zéro à chaque
jour (sauf crise)
La Banque vise une offre d’encaisses de règlements
égale à zéro à chaque jour(dans les faits, le montant
demandé est légèrement supérieur à zéro, 25$
millions pour des transactions de 180$ milliards
chaque jour)
Pour ce faire, elle neutralise tout flux ou reflux
provenant du secteur public ou des réserves de
change (cf. les nouveaux chartalistes, Wray, Mosler)
Le système de corridor de la
Banque du Canada
Taux de financement à un jour
(Taux interbancaire)
Taux d’escompte
= TC+25pts
Taux cible TC = 2,25%
Taux sur les dépôts
= TC-25pts
- (déficit)
0 + (surplus)
Encaisses
de règlement
Des actions défensives

Pour ramener les encaisses de règlement à zéro, la
Banque transfère les dépôts du gouvernement vers
les banques (pour fournir des encaisses), ou vers la
banque centrale (pour retirer des liquidités)


ou alors, plus rarement, elle intervient sur le marché des
cessions de titres en cours de journée, mais ces
interventions sont neutralisées en fin de journée
Ces actions quantitatives sont purement
défensives. La Banque n’intervient que pour
ramener l’offre d’encaisses à zéro, et non (sauf
exception, dans le cas de cessions de titres) pour
influencer les taux d’intérêt.
Contribuable payant ses impôts
Banque de Montréal (BMO)
STPGV
Actif
Passif
Actif
Encaisses
STPGV
- 60 0000 $
Dépôts du
contribuable
- 60 000 $
Passif
Encaisses STPGV de
BMO
-60 000 $
Encaisses STPGV de
la Banque du Canada
+ 60 000 $
Banque du Canada
Actif
Passif et valeur nette
Encaisses STPGV + 60 000 $
Dépôts du gouvernement fédéral
+ 60 000 $
Conséquences du paiement des taxes sur
les encaisses de règlement des banques



Les paiements d’impôts des contribuables vont faire
diminuer les encaisses de règlement; le solde de
règlement (de l’ensemble des banques) est négatif
La BMO, en solde STPGV négatif, ne trouvera
aucune banque en contrepartie (une banque ayant
un solde STPGV positif).
Le taux de financement à un jour va avoir tendance
à grimper, au-dessus de la cible de 2,25 %, car la
BMO va devoir emprunter auprès de la Banque du
Canada à 2,50 %.
Neutralisation



La Banque du Canada doit donc “neutraliser”
l’impact de ses opérations de paiement sur les
soldes STPGV.
C’est ce qu’on appelle la gestion des encaisses de
règlement, ou encore la régulation des encaisses.
Celle-ci se fait par des transferts de fonds, dans
ce cas, entre le compte de dépôt du gouvernment
auprès de la banque centrale vers le compte de
dépôt du gouvernement auprès des banques.
Impact d’un transfert de fonds du gouvernement
Banque de Montréal (BMO)
STPGV
Actif
Passif
Actif
Encaisses
STPGV
+ 60 0000 $
Dépôts du
gouvernement
+ 60 000 $
Passif
Encaisses STPGV de
BMO
+60 000 $
Encaisses STPGV de
la Banque du Canada
- 60 000 $
Banque du Canada
Actif
Passif et valeur nette
Encaisses STPGV - 60 000 $
Dépôts du gouvernement fédéral
- 60 000 $
Effet net, après “neutralisation”
Banque de Montréal (BMO)
STPGV
Actif
Passif
Actif
Encaisses
STPGV
- 60 0000 $
Dépôts du
contribuable
- 60 000 $
Encaisses STPGV de
BMO
0$
Encaisses
STPGV
+ 60 0000 $
Dépôts du
gouvernement
+ 60 000 $
Encaisses STPGV de
la Banque du Canada
0$
Passif
Banque du Canada
Actif
Passif et valeur nette
Encaisses STPGV 0 $
Dépôts du gouvernement fédéral
0$
La crise financière actuelle: liens
avec le système opérationnel



« A key financial stability concern is to ensure that
the central bank can meet increases in demand for
reserves ….[This] may be needed to avoid a
banking system panic having systemic effects: as
part of our responsabilies for providing the
economy’s final settlement asset, we need to be
prepared to expand our balance sheet when
commercial banks might otherwise be under
pressure to contract theirs »
Tucker, Banque d’Angleterre, 2004
Cf. Thornton 1802, Bagehot 1873
Les bilans en fin de journée (18h30)
Banques débitrices vs banques créditrices
Banque de Montréal (BMO)
Banque Toronto Dominion TD)
Actif
Actif
Passif
Encaisses
STPGV
+40$ M
Dépôts du
vendeur
+40$ M
Prêts à un
acheteur
+40$ M
Passif
Encaisses
STPGV
-40$ M
STPGV
Actif
Passif et valeur nette
Encaisses STPGV de TD
+40$ M
Encaisses STPGV de BMO
-40$ M
Les banques ne veulent plus
se prêter de fonds entre elles





Un des aspects de la crise actuelle c’est la méfiance des
banques commerciales les unes envers les autres.
Deux solutions immédiates possibles:
A) Les banques débitrices dans le système de compensation
empruntent des fonds à la banque centrale.
B) La banque centrale inonde de liquidités le marché monétaire,
afin qu’aucune banque commerciale ne se trouve en situation
débitrice.
Dans les deux cas, le taux d’intérêt à un jour va rester autour de
2,50% (en B, les banques préfèrent toucher 2% sur des dépôts
sûrs à la banque centrale, plutôt que prêter leurs excédents
d’encaisses de règlement aux autres banques à 2,50%).
Solution A: Les bilans après règlement (à 20h)
Banque de Montréal (BMO)
Banque Toronto Dominion (TD)
Actif
Passif
Actif
Passif
Prêts à un
acheteur
+40$ M
Emprunt auprès
de la Banque du
Canada
+40$ M
Dépôt auprès de
la Banque du
Canada
+40$ M
Dépôts du
vendeur
+40$ M
Encaisses
STPGV 0 $
Encaisses
STPGV 0 $
Banque du Canada
Actif
Passif et valeur nette
Prêt à la BMO +40$ M
Au taux de 2,50 %
Dépôt de TD +40$ M
Au taux de 2,00 %
Solution B: Injection de liquidités
Banque de Montréal (BMO)
Banque Toronto Dominion TD)
Actif
Passif
Actif
Passif
Prêts à un
acheteur
+40$ M
Dépôts du
gouvernement
canadien
+40$ M
Dépôt auprès de
la Banque du
Canada
+40$ M
Dépôts du
vendeur
+40$ M
Encaisses
STPGV 0 $
Encaisses
STPGV 0 $
Banque du Canada
Actif
Passif et valeur nette
Dépôt de TD +40$ M
Dépôt du gouvernement -40$ M
Les plans de sauvetage




Le gouvernement américain a annoncé qu’il
achèterait pour 700$ milliards d’actifs pourris.
Le gouvernement canadien va faire de même, pour
une valeur de 25$ milliards (certains disent que la
somme nécessaire pourrait avoisiner les 200$
milliards), par l’intermédiaire d’une agence paragouvernementale.
S’agit-il d’injections de liquidités? Oui et non!
On abuse du terme « liquidités ».
La neutralisation des
injections






L’agence achète pour 25$ milliards de dollars de prêts
hypothécaires (ou d’actifs adossés à des hypothèques).
Comment finance-t’elle cet achat ? Par un prêt du
gouvernement.
Mais où le gouvernement va-t’il se procurer l’argent ? En
émettant des obligations à long terme.
Qui va acheter ces obligations ? La Banque du Canada.
Mais alors, la Banque du Canada va-t’elle créer pour 25 milliards
de monnaie ? Pas du tout, car celle-ci va simultanément vendre
aux banques pour 25 milliards de titres émis par le
gouvernement, afin de neutraliser l’effet de l’achat des
hypothèques pourries sur les encaisses de règlement.
Ainsi, à la fin de ce tour de passe-passe, les banques
canadiennes auront à leur bilan 25 milliards de prêts
hypothécaires illiquides en moins, et 25 milliards de bons du
Trésor liquides en plus, ce qui va augmenter leur capacité à
transiger, sans pour autant injecter de la monnaie.
La neutralisation du plan de sauvetage
Banques commerciales
Gouvernement et agences
Actif
Actif
Passif
Prêts
hypothécaires
pourris
+25$ M
Obligations
+25$ M
Passif
Prêts
hypothécaires
pourris
-25$ M
Bons du Trésor
+25$ M
Banque centrale
Actif
Obligations +25$ M
Bons du Trésor – 25$ M
Passif et valeur nette
Conclusion
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La compréhension du système de paiements
et de compensation permet de mieux
comprendre pourquoi les banques centrales
se donnent un taux d’intérêt pour objectif.
Elle permet aussi de mieux comprendre ce
que les gouvernements et les banques
centrales tentent de faire pour sauver le
système financier, en attendant d’annoncer
des mesures à plus long terme.
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