Cancer du sein et travail

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Analyse des difficultés rencontrées
lors de la reprise du travail après un
cancer: spécificités du cancer du sein
Cancer du sein et reprise du travail
25 septembre 2012
SMTOIF
David Asselain
Introduction
Plan cancer 2009-2013 :
– Faciliter le maintien dans l’emploi et la réinsertion
professionnelle après un cancer
Etude de la DREES 2004* :
– 67% de personnes en emploi 2 ans après un cancer
– 9% déclarent avoir subi des attitudes discriminatoires
– Diminution des ressources et difficultés économiques
Peu d’études en France à ce sujet :
– Etude Quinton Fantoni 2010**
*Enquête de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques: « La vie deux
ans après le cancer »
** « Factors related to return to work by women with breast cancer in northern France »
Etude Institut Curie et SMTOIF :
– Base de notre étude
– Appel à projets de l’INCa
– 402 salariés ayant eu un cancer diagnostiqué en 2005
et 2006 dont 145 femmes ayant eu un cancer du sein,
suivis par 82 médecins volontaires de la SMTOIF
Recueil des données via auto-questionnaires
– Conditions de travail
Modalités du retour au travail
–
–
–
–
Impact de la maladie sur l’emploi
Parcours professionnel du salarié
Vie quotidienne et état de santé général
Parcours thérapeutique
Etude Institut Curie et SMTOIF (résultats):
– 402 salariés
– 27% continuent à travailler pendant les traitements
– 79% travaillent à nouveau 2 ans après le diagnostic
– 20% ont un sentiment de pénalisation
– 29% anxiété et 6% dépression (vs 10% et 3%)
– 50% aménagements de poste (horaires ++)
– 22% ont eu une visite de pré-reprise
– Peu de contacts entre médecine de soin et médecine du
travail (8%)
Notre analyse est centrée sur les cas de
cancer du sein car:
– groupe plus homogène (/tous cancers)
– 36% de la population de l’étude initiale (loin devant prostate
10%)
– Le plus fréquent dans la population en âge de travailler
(épidémiologie)
– Relativement bon pronostic
– Traitements contraignants et conséquences spécifiques
Objectifs :
– Mieux évaluer les difficultés rencontrées par les salariées
atteintes d’un cancer du sein lors de la reprise du travail
afin de pouvoir les anticiper
– Mettre en évidence des spécificités du cancer du sein par
rapport aux autres types de cancers
– Proposer des mesures permettant de faciliter la reprise du
travail
Analyse statistique :
– Analyse descriptive : distribution, courbes de KaplanMeier
– Analyse en Composantes Multiples : typologie des
difficultés rencontrées
– Recherche de facteurs prédictifs de difficultés :
différences de proportions entre les groupes définis
par l’ACM (test du 2)
– Recherche des spécificités du cancer du sein :
constitution de 3 groupes : femmes/cancer du sein,
femmes/autres cancers, hommes/autres cancers (test
du 2)
Résultats et Discussion
Taux de réponse global  90%
402 questionnaires envoyés
par les médecins du travail
319 QS 1(79%)
(questionnaire salarié n°1)
adressés à des personnes
ayant repris le travail
12 QS 2 (3%)
(questionnaire salarié n°2)
adressés à des personnes
n’ayant pas repris le travail
286 QS1 reçus
(taux de réponse = 89,65%)
11 QS2 reçus
(taux de réponse = 91,66%)
71 cas (18%) sans envoi de
questionnaire salarié, dont :
29 décès (40,85%)
17 retraités (23,94%)
82 médecins volontaires ont participé, 66% des situations
renseignées par des médecins en services autonomes.
122 femmes atteintes de cancer du sein ont
repris le travail sur 145
Résultats descriptifs (cancer du sein) :
– Age moyen: 51 ans
– 76% travaillent dans des entreprises de plus de 200 salariés, 81%
dans le secteur privé
– 77% ont plus de 10 ans d’ancienneté
CSP
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
ouvriers
employés
cadre moyen
cadre supérieur
autres
– Durée d’arrêt : médiane à
10 mois
– Taux de reprise : 84%
– Forte association entre
reprise tardive et
chimiothérapie p<0.001
Traitements reçus
100%
90%
– Les traitements reçus :
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Chirurgie
Radiothérapie
Chimiothérapie
Hormonothérapie
Sur le plan professionnel / MdT :
– Seulement 24% des salariées ont été vues en visite de préreprise
– 50% des salariées jugées aptes sans réserves, 50% aptes
avec aménagement (horaires ++) ou autre poste
– 50% trouvent leur travail fatigant et 64% stressant
– 19% se disent pénalisées

16% ont vu leurs responsabilités diminuer
 11% ont été rétrogradées
 9% se sont vu refuser une promotion
– 23% ont dit parvenir moins bien qu’avant à réaliser leur travail
1.0
Résultats de l’Analyse en Composante
Multiple :
PROJECTION DES CRITERES OUTCOME
Gr1
Gr4
str_non
1.
2.
3.
fat_non
Rétrogradation
refus de promotion
moins de responsabilité
Continuer le même travail_non
Mauvaise intégration
(vu par la MDT)
0.0
trsom_non
fatpv_non
anxscore_<11
medoc_non
depscore_<11
Plus fatiguable
integrmdt_oui
sq39bis.f_non
sq43bis.f_non
Dépressif
Psychotropes
Troubles du sommeil
cont_oui
Travail stressant
-0.5
Dim 2 (12.52%)
0.5
S’estime pénalisé par la maladie
Anxieux
Travail fatigant
Gr2
Gr3
-0.5
0.0
0.5
1.0
Dim 1 (23.32%)
1.5
2.0
– Permet de projeter les individus sur ce plan et de les repérer en
fonction de leurs coordonnées
•
Gr4
Gr1
Gr3
Gr2
Gr1 «les pénalisés» : plutôt
dépressifs, travail pas particulièrement
stressant ni fatigant, sentiment de
frustration. Non reconnaissance de leur
travail.
• Gr2 «les anxieux et fatigués» : travail
fatigant et stressant, score HAD élevé,
troubles du sommeil. Ils font de
nombreux efforts mais ont du mal à faire
ce qu’on leur demande.
• Gr3 «les courageux mais fatigués» :
travail fatigant et stressant mais bonne
intégration dans l’entreprise.
• Gr4 «les adaptés» : bonne intégration
dans l’entreprise, pas de stress ni de
fatigue.
– On peut considérer que les groupes 1 et 2 rassemblent les salariées
les plus en difficulté (répartition équilibrée entre les 4 groupes)
Facteurs prédictifs de difficultés à la reprise
Sentiment d'être accepté par les autres
p = 0,0077
Groupe 4 (N=30)
Groupe 3 (N=29)
oui
non
Groupe 2 (N=32)
Groupe 1 (N=31)
0,00%
10,00%
20,00%
30,00%
40,00%
50,00%
60,00%
70,00%
Tendances (non significatives):
– Age : les salariées des groupes 1 et 2 sont plus jeunes
– Absence > 1 an : 36% dans le groupe 1 (vs 10 à 30%)
– Traitement par chimiothérapie : 68% dans groupe 1 (vs 47 à
50%)
– CSP : 68% d’employées dans groupe 1 (vs 41 à 53%)
Manque de puissance statistique ?
Spécificités du cancer du sein (par rapport
aux autres cancers) :
– Comparaison de 3 groupes :
Cancers du
sein
(n=122)
Autres cancers
féminins
(n=60)
Cancers
masculins
(n=104)
p
Chimiothérapie
53%
33%
42%
0,03
Absence > 6 mois
62%
43%
32%
0,0002
Traitement ADP
46%
40%
28%
0,02
Soutien psychologique
35%
22%
20%
0,02
Gêne dans les
mouvements
34%
10%
12%
<0,0001
Troubles mémoire /
Concentration
44%
28%
23%
0,02
– Autres résultats significatifs :

Âge : femmes plus jeunes
 CSP : plus d’employées chez les femmes
 Moins de responsabilités d’encadrement chez les femmes
Inégalités hommes/femmes dans le monde du travail…
Etudes internationales :
– Taux de reprise après un cancer du sein : 80-85%
– Délai d’absence en Europe : 10-12 mois (plus court en Amérique
du nord)
– Concernant les facteurs susceptibles d’influencer la qualité de la
reprise du travail on retrouve :

La chimiothérapie et les séquelles liées au traitement
 Les exigences du poste (physiques, mentales ou organisationnelles)
 Le sentiment de discrimination du fait de la maladie
– Mais aussi :

Comorbidités
 Tempérament optimiste ou pessimiste
 Niveau de rémunération
 Qualité de l’information donnée par l’équipe soignante concernant la
reprise du travail
Remarques par rapport à notre étude :
– Biais de sélection ? Possible, minimiserait les difficultés ?
– On peut regretter a posteriori de ne pas avoir investigué la
situation professionnelle antérieure des salariées
– Etude de l’impact de la visite de pré-reprise: difficile sur le
plan statistique du fait du faible nombre de salariées
concernées.
Conclusion et Perspectives
Si 84% des salariées reprennent le travail après un cancer du
sein, la moitié d’entre elles rencontre des difficultés lors de la
reprise
Ces difficultés pourraient être mieux anticipées en fonction de
facteurs médicaux mais également psychologiques et
socioprofessionnels
Certains de ces facteurs prédictifs de difficultés
professionnelles sont retrouvés plus fréquemment chez les
femmes ayant eu un cancer du sein et doivent être évalués
lors de la visite de pré reprise ou de reprise
Vers des recommandations :
MIEUX ANTICIPER
– Rendre disponible l’information pour les patientes le plus tôt
possible dans le parcours thérapeutique (internet, brochures,
score d’aptitude à la reprise…)
– Sensibiliser les équipes soignantes à la place de la reprise
du travail dans le parcours thérapeutique
– Promouvoir un partenariat entre médecine de soin, médecin
conseil de l’AM et Médecin du travail notamment pour
favoriser la visite de pré-reprise
Rôle du médecin du travail :
– Evaluer et anticiper au mieux le risque de difficultés
– Informer le milieu professionnel
– Préparer puis accompagner la reprise
– Aménager le poste si besoin et réévaluer les aménagements
– Un suivi attentif
Remerciements
Service d’Epidémiologie et de Biostatistique de l’Institut Curie :
B.Asselain, N.Le Peltier, L. Belin.
Société de Médecine du travail Ouest Ile-de-France (SMTOIF) :
M.F.Bourrillon, S. Le Bideau, H. Stakowski,
et l’ensemble des médecins volontaires
Projet soutenu par l’INCa et l’ARC
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