PRIX LEENAARDS 2011 POUR LA PROMOTION DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ETUDE DES MYSTERIEUX MECANISMES DE DIVISION ET DE DIFFERENTIATION DES CHLAMYDIAE Certaines chlamydiae sont d’une grande importance médicale étant des agents de pneumonies, de stérilité, de fausses couches ou de cécité. Cependant, malgré les progrès de la science, le mécanisme permettant à ces bactéries de se multiplier reste largement méconnu. En effet, une protéine appelée FtsZ et essentielle à la division, est présente chez toutes les espèces bactériennes, sauf chez les chlamydiae. De plus, les chlamydiae présentent un cycle de vie très particulier qui comporte deux stades de développement, un stade infectieux et un stade réplicatif, capable de se diviser. Le but du projet de recherche proposé par le Dr Greub et le Prof. Viollier est d’élucider les mécanismes impliqués dans la division des chlamydiae et dans leur différentiation. Outre l’apport de connaissances fondamentales, ce projet pourrait permettre la découverte de nouvelles cibles thérapeutiques. Importance médicale des chlamydiae Les chlamydiae sont des bactéries qui, comme les virus, ne se multiplient qu’au sein de cellules. L’ordre des Chlamydiales comprend de nombreuses espèces dont certaines sont d’une grande importance médicale étant des agents de pneumonie, de stérilité, de fausses couches ou de cécité. Par exemple, Chlamydia trachomatis représente au niveau mondial la 1ère cause de cécité, avec plus de 8 millions de personnes touchées. Travaillant sur ces bactéries strictement intracellulaires depuis 10 ans, le groupe du Docteur Greub a récemment pu identifier le rôle joué dans la fausse couche par une de ces bactéries appelée Waddlia. Waddlia, un excellent modèle pour étudier la biologie des chlamydiae A Lausanne, le groupe du Dr Greub a établi toutes les conditions requises à l’étude de cette bactérie : techniques de culture cellulaire permettant la croissance logarithmique de cette bactérie et méthodes de marquage spécifique de la bactérie à l’aide d’anticorps. L’ensemble de son génome à été déterminé et les différents stades de sa différentiation ont été étudiés. Comme les autres chlamydiae, et contrairement aux autres bactéries, Waddlia présente un cycle de vie très particulier, qui comporte deux stades de développement : un stade infectieux, permettant à la bactérie d’entrer dans la cellule et un stade réplicatif, au cours duquel elle se divise. Ainsi, Waddlia représente un excellent modèle pour étudier la division et la différentiation des chlamydiae. Le mystérieux mécanisme permettant la multiplication des chlamydiae. Malgré les progrès de la science, le mécanisme permettant à Waddlia et autres chlamydiae de se multiplier reste largement méconnu. En effet, une protéine (appelée FtsZ), essentielle à la division et présente chez toutes les autres espèces bactériennes, est absente chez les chlamydiae. L’absence de cette protéine chez les chlamydiae est d’autant plus étonnante que même les chloroplastes (des organelles présentes chez les plantes vertes et permettant la photosynthèse) se divisent grâce à la protéine FtsZ. Elucider les mystérieux mécanismes impliqués dans la division des chlamydiae et dans leur différentiation constitue donc l’objectif du projet proposé par le Dr Greub et le Prof. Viollier. Les protéines impliquées de la division cellulaire Chez les bactéries classiques, comme Escherichia coli, la protéine FtsZ permet la division en organisant les processus provoquant la constriction de la paroi au milieu de la bactérie. Chez les chlamydiae, il se pourrait qu’une autre protéine (MreB) joue ce rôle, d’une manière similaire à ce qui se passe chez les mammifères, champignons et autre organismes supérieurs. En utilisant diverses approches pharmacologiques, biochimiques et de biologie cellulaire, le rôle de la protéine MreB et de ses partenaires sera exploré. Par ailleurs, d’autres protéines potentiellement impliquées dans la division des chlamydiae seront étudiées en testant leur fonction à l’intérieur d’autres espèces bactériennes dont Caulobacter. Depuis plus de 11 ans, le Prof. Viollier étudie en effet la division et la différentiation de cette bactérie Gram négative qui, comme les chlamydiae, présente deux stades de développement, un stade réplicatif et un stade permettant la colonisation de nouvelles niches écologiques. De manière intéressante, chez Caulobacter, les protéines FtsZ et MreB paraissent toutes deux impliquées dans la réorganisation de la paroi au milieu de la bactérie au moment de la division. Si le rôle de la protéine MreB dans la division se confirme, cela pourrait être le reflet d’un stade de transition dans l’évolution des processus de division. De nouvelles stratégies thérapeutiques Le projet bénéficiera des compétences complémentaires de deux chercheurs, spécialistes respectivement des chlamydiae, pour le groupe du Dr Greub de l’Université de Lausanne, et de la division et différentiation bactérienne, pour le groupe du Prof. Viollier de l’Université de Genève. Outre l’apport de connaissances fondamentales sur la compartimentalisation, division et différentiation des chlamydiae, ce projet pourrait permettre une réelle avancée médicale, en ouvrant des pistes au développement de nouvelles stratégies thérapeutiques. La plupart des antibiotiques utilisés de nos jours pour combattre les agents infectieux ont en effet comme cible les mécanismes impliqués dans la division bactérienne. De plus, dans un monde où l’utilisation excessive d’antibiotiques renforce la résistance des bactéries à la plupart des traitements disponibles, l’identification de nouvelles stratégies thérapeutiques pourrait se révéler cruciale. Biographies Dr Gilbert Greub Maître d’enseignement et de recherche (MER) et Privat-Docent Institut de microbiologie et Service des maladies infectieuses, Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et Université de Lausanne (UNIL) Tél. : + 41 (0)21 314 49 79 - Email : [email protected] Originaire de Neuchâtel, Gilbert Greub a étudié la médecine à l’Université de Genève, où il a obtenu en 1992 le Diplôme fédéral de médecin. Il acquiert ensuite successivement les titres de spécialiste FMH en médecine interne, spécialiste FAMH en microbiologie médicale et spécialiste FMH en maladies infectieuses. Docteur en médecine et Docteur ès sciences, il effectue un séjour à l’Université de la Méditerranée à Marseille, durant lequel il se spécialise dans le domaine des bactéries intracellulaires. A son retour en Suisse, il rejoint l’Institut de microbiologie de l’Université de Lausanne (UNIL). Outre une activité de direction du laboratoire de parasitologie diagnostique et de co-direction du laboratoire de bactériologie médicale du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), il participe également aux consultations d’infectiologie en qualité de médecin-adjoint du Service des maladies infectieuses. Il enseigne la bactériologie médicale aux étudiants en médecine et aux étudiants en biologie de l’Université de Lausanne. Il a développé un programme de recherche visant d’une part à mieux comprendre la biologie et le rôle pathogène des chlamydiae et bactéries apparentées et d’autre part à identifier de nouveaux agents pathogènes, notamment des agents de pneumonie et de fausses couches. Lauréat du prix de la Société européenne de microbiologie et maladies infectieuses en 2006, du prix Viollier décerné par la Société suisse de médecine interne en mai 2010 et du prix de la fondation Naef en janvier 2011, il bénéficie également d’une bourse « bridge-relève » de la Fondation Leenaards depuis 2007. Prof. Patrick Viollier Professeur associé Département de microbiologie et médecine moléculaire, Faculté de médecine, Université de Genève Tél. : + 41 (0)22 379 41 75 - Email : [email protected] D’origine bâloise, Patrick Viollier a étudié la biologie moléculaire au Biozentrum de l’Université de Bâle dès 1989. En 1994, il effectue son diplôme en génétique bactérienne dans le laboratoire de Werner Arber. Il obtient son doctorat en 1999 en étudiant la différentiation des bactéries filamenteuses du genre Streptomyces au Biozentrum de Bâle puis continue ses études sur la différentiation et sur la division bactérienne à l’occasion d’un postdoctorat effectué de 2000 à 2004 à la « Stanford University School of Medicine » (États-Unis). Il reçoit le « Förderungspreis » 2002 de la Société Suisse de microbiologie pour son travail postdoctoral. En 2004, il est nommé professeur assistant au « Case Western Reserve University School of Medicine » (Cleveland, États-Unis) où il découvre de nouveaux mécanismes moléculaires impliqués à la fois dans la division et la différentiation de Caulobacter crescentus. Depuis son retour en Suisse en 2009, il continue sa recherche moléculaire et génétique avec Caulobacter en tant que professeur associé de la Faculté de médecine de l’Université de Genève.