Le développement de l’économie sociale au sein du mouvement communautaire québécois : les logiques d’action des organismes adoptant des pratiques marchandes Par Jean-Vincent Bergeron-Gaudin Candidat à la maîtrise en travail social Sous la direction de Lucie Dumais et Gérald Larose Université du Québec à Montréal International Student Conference on the Social Economy Concordia University, Montréal, 1 juin 2010 PLAN DE LA COMMUNICATION 1. UN BREF SURVOL DU MOUVEMENT COMMUNAUTAIRE QUÉBÉCOIS 2. L’HISTOIRE RÉCENTE DE L’ÉCONOMIE SOCIALE AU QUÉBEC 3. L’APPARITION DE SERVICES DE PROXIMITÉ DE TYPE HYBRIDE 4. PRÉSENTATION DE LA QUESTION DE RECHERCHE 5. QUELQUES HYPOTHÈSES 6. UNE ÉBAUCHE DU CADRE THÉORIQUE LE MOUVEMENT COMMUNAUTAIRE QUÉBÉCOIS : UN BREF HISTORIQUE Une histoire étroitement liée à la reconfiguration de l’État québécois au début des années 1960 Une évolution marquée par différentes générations de groupes communautaires 1. Les comités citoyens (1965-1975); accent mis sur la revendication, forme de contre-pouvoir 2. Les groupes populaires (1976-1985); mise sur pied de services collectifs autogérés 3. Les groupes de livraison de services et de développement économique communautaire (1986-1995); premiers rapprochements avec les institutions publiques, extension du champ d’intervention à l’économique 4. Consolidation du partenariat et de la concertation (1996-2002); intégration aux services publics, entre autres dans le domaine de la santé et des services sociaux … une juxtaposition plutôt qu’une sédimentation L’ÉCONOMIE SOCIALE AU QUÉBEC : QUELQUES FAITS MARQUANTS Au tournant des années 1980, la montée du militantisme économique, symbolisée par la création des Corporations de développement économique communautaire (CDEC) à Montréal; En 1995, la réactualisation de la notion d’économie sociale par le mouvement des femmes (Marche pour du pain et des roses); En 1997, l’institutionnalisation de l’économie sociale dans la foulée du Sommet sur l’économie et l’emploi, la définition alors adoptée se base sur des valeurs (services aux membres et à la collectivité, autonomie de gestion, démocratie, primauté de la personne sur le travail, prise en charge individuelle et collective); En 2002, l’adoption de la politique de reconnaissance de l’action communautaire … aujourd’hui, le gouvernement québécois tend à considérer l’économie sociale et l’action communautaire de façon indépendante, réservant à la première le champ de l’économique et à la seconde le champ du politique VERS DE NOUVELLES CONFIGURATIONS ORGANISATIONNELLES Le regain d’intérêt pour l’économie sociale au Québec a créé une nouvelle conjoncture au sein du mouvement communautaire québécois, ce qui a influencé les pratiques des groupes sur le terrain Même si certains acteurs de l’action communautaire refusent d’être associés à l’économie sociale, principalement pour des raisons identitaire et financière… … d’autres s’en sont rapprochés de façon significative au cours des dernières années, notamment dans les secteurs du loisir, de la radio et de la culture Ce contexte a donné lieu à l’émergence de services de proximité de type hybride, qui concilient à la fois une mission traditionnelle d’organisme communautaire et une nouvelle mission d’entreprise communautaire Mais comment se transforment ces organismes communautaires qui font le saut sur le marché? PROJET DE RECHERCHE Question de recherche de départ : « Comment les organismes communautaires ayant adopté des pratiques marchandes intègrent-ils cette nouvelle dimension économique à leur mission? » « How do community organizations with market pratices integrate this new economical dimension to their mission? » Des exemples concrets de groupes ayant adopté des pratiques marchandes : - un organisme pour la famille qui initie un comptoir vestimentaire - un groupe de cuisine collective qui met sur pied un service de traiteur - un organisme de coopération internationale qui ouvre un café Ce qui nous intéresse, ce sont en fait les organismes communautaires qui prennent un virage marchand en augmentant de façon significative le volume de leurs activités économiques autonomes… QUELQUES HYPOTHÈSES En faisant leur entrée sur le marché, les organismes communautaires sont appelés à emprunter certains traits plus propres aux entreprises : - une plus forte structuration organisationnelle; - une professionnalisation des postes; - une montée en importance des salariés par rapport aux membres; - une plus forte hiérarchisation. Le développement de l’économie sociale a en fait créé un nouvel interface qui peut faciliter le transfert des pratiques entrepreneuriales du secteur privé au secteur associatif Mais jusqu’à quel point les organismes sont-ils prêts à s’adapter aux exigences du marché? CADRE THÉORIQUE : UNE ÉBAUCHE Une sociologie des associations qui s’inspire de la sociologie des organisations, dont les principaux éléments sont : - la contingence, c’est-à-dire l’importance des pressions extérieures par exemple les modes de financement, le degré de participation au marché; - le sociotechnique, qui renvoie aux comportements d’adaptation face aux problèmes des structures et des conditions de travail; - le stratégique, qui fait référence aux rapports de pouvoir à l’interne et à l’externe; - le culturel, soit tout ce qui a trait à la culture de l’association et à son identité collective. Notre objectif est d’identifier les principales logiques d’action des organismes communautaires qui prennent un virage marchand, mais surtout, d’étudier l’agencement entre ces différentes logiques Nous supposons en effet que le virage marchand de ces organismes ne se résume pas à une simple marchandisation, mais constitue un processus de transformation organisationnelle complexe dans lequel la logique identitaire joue un rôle fondamental