Pourquoi étudie-t-on la mésosphère? On peut se demander quel est

Pourquoi étudie-t-on la mésosphère?
On peut se demander quel est l'intérêt de faire de la recherche sur la physique et
la chimie de la mésosphère. Nous n'y vivons pas, et à l'heure actuelle aucun des
processus de la mésosphère ne semble menacer la vie terrestre, contrairement à
ce qui se passe dans la stratosphère avec le "trou d'ozone" .
Comme dans beaucoup de domaines scientifiques, l'étude de la mésosphère est
motivée par la recherche fondamentale - observer notre environnement, et
comprendre pourquoi il est tel que nous l'observons - et par la recherche appliquée
- dans le cas présent, rechercher les effets des activités humaines sur l'état de la
mésosphère, et en tirer des informations sur la manière dont nous modifions notre
environnement.
Recherche fondamentale
L'atmosphère "classique" à laquelle nous sommes habitués est composée de 78%
d'azote et de 21% d'oxygène - tous les autres gaz se partageant le pourcent
restant. Les mouvements de l'air sont des mouvements d'ensemble - les vents -
qui transportent toutes les molécules de la même manière, quelle que soit leur
formule chimique. La température varie relativement peu pendant la journée,
surtout lorsque l'on s'éloigne de la surface. On n'y trouve presque pas de
particules électriquement chargées (ions).
Par opposition, l'environnement spatial dans lequel évoluent les satellites est une
atmosphère extrêmement raréfiée, dont la composition est très variable dans le
temps et l'espace. Le principal phénomène de transport est la diffusion
moléculaire, qui a un effet différent sur les gaz selon leur masse moléculaire. A
cause de la densité très faible de l'air, la température change très vite entre le jour
et la nuit, et selon l'activité solaire. Une partie non négligeable des molécules sont
ionisées, c-à-d ont une charge électrique, et sont soumises de ce fait aux lois de la
physique des plasmas, complètement différentes des lois relatives aux gaz
neutres.
A bien des égards, la mésosphère est le lieu de transition entre ces deux
environnements complètement différents. Les processus physiques et chimiques
passent progressivement d'un régime à un autre, ce qui donne lieu à des
interactions complexes entre la dynamique (vents, turbulence, diffusion
moléculaire), la photochimie (ozone, composés hydrogénés, oxydes d'azote), et le
chauffage (absorption des ultra-violets, émission dans l'infrarouge). Ces
interactions sont d'une complexité comparable à celle de la troposphère dans
laquelle nous vivons, et nous sommes loin de les avoir toutes comprises.
La magnétosphère dévie les particules
chargées émises par le Soleil, et les
empêche de pénétrer jusque dans
l'atmosphère inférieure, sauf dans les
régions polaires, où les collisions entre
ces particules et l'air neutre de la
mésosphère provoquent
occasionnellement des aurores polaires.
Ces phénomènes lumineux spectaculaires sont un autre sujet de recherche, car
on comprend encore mal leur propagation et leurs effets (chauffage, réactions
chimiques) dans la mésosphère.
La recherche fondamentale est une fin en soi: elle est motivée par le désir de
mieux connaître et comprendre notre environnement. De plus, la recherche
appliquée est impossible sans recherche fondamentale.
Recherche appliquée
La mésosphère est importante pour l'étude de deux des grands problèmes étudiés
par l'aéronomie: le "trou d'ozone" dans la stratosphère (abordé ailleurs dans ce
site), qui dépend en partie de processus mésosphériques, et le changement global
du climat (appelé communément "effet de serre"), dont la mésosphère nous fournit
de premiers indices.
En ce qui concerne le "trou d'ozone", son intensité dépend beaucoup de la
circulation de l'air stratosphérique autour des pôles. Mais dans la stratosphère tout
entière, les vents sont entraînés par la dissipation des ondes de gravité qui a lieu
dans la mésosphère. Les ondes de gravité sont des oscillations verticales des
masses d'air, qui démarrent dans la troposphère, à cause du vent au-dessus des
montagnes et des orages. Ces ondes se propagent ensuite vers le haut, comme
des vagues se propagent sur la mer. Et de la même manière que les vagues se
brisent sur le rivage, les ondes de gravité se brisent dans la mésosphère, car la
densité de l'air y est trop faible pour permettre leur propagation. En se brisant,elles
provoquent des vents intenses, qui entraînent toute la circulation de l'air dans la
stratosphère.
L'une des conditions nécessaire à la prédiction de l'évolution du trou d'ozone est la
compréhension complètement des phénomènes dynamiques complexes de la
mésosphère. Cette compréhension est d'autant plus difficile que tous ces
phénomènes ondulatoires sont très variables dans le temps, tout comme la force
et l'amplitude des vagues sur la mer.
En ce qui concerne le changement global du climat, des séries de mesures prises
sur de longs intervalles de temps indiquent que la température mésosphérique
moyenne a diminué sensiblement ces cinquante dernières années, de plusieurs
dizaines de degrés. Cela est probablement dû à l'augmentation du dioxyde de
carbone (CO2) liée aux activités humaines. En effet, alors que le CO2 réchauffe
l'atmosphère inférieure par absorption du rayonnement infrarouge, dans la
mésosphère le CO2 émet du rayonnement infrarouge, dont la moitié s'echappe
vers le haut. Cette perte d'énergie cause une diminution de la température.
Ces perturbations ont des effets plus grands et plus rapides que dans la basse
atmosphère, encore une fois à cause de la densité plus faible de l'air dans la
mésosphère.
Ces changements peuvent être vus à
l'oeil nu, sous la forme des nuages
mésosphériques polaires. Ces nuages se
trouvent à très haute altitude: 80 km,
alors que les nuages habituels se
trouvent uniquement dans la troposphère.
Les nuages mésosphériques polaires
sont probablement composés de cristaux
de glace et apparaissent après le coucher
du Soleil, en lumière rasante.
Il faut des températures extrêmement basses pour condenser la vapeur d'eau aux
pressions très faibles de la mésosphère. Ces nuages sont de plus en plus souvent
visibles dans les pays nordiques: c'est un autre indice du changement global de
l'état thermique de notre atmosphère.
La très grande sensibilité de la mésosphère aux perturbations extérieures en fait
un lieu privilégié pour tester notre connaissance de la physique et de la chimie
atmosphérique, et pour nous prévenir des changements à venir dans la basse
atmosphère. Soit nous pourrons expliquer l'évolution climatique observée dans la
mésosphère, et nous serons plus confiants quant à la validité de nos prévisions de
l'effet des activités humaines sur le climat mondial. Soit (plus probablement) nous
ne pourrons pas expliquer complètement cette évolution, et nous serons forcés de
faire des progrès supplémentaires avant de faire totalement confiance aux
prévisions chiffrées liant l'accroissement des rejets de CO2 et le changement du
climat.
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