Comment poser en France l`indication de la vaccination contre l

publicité
Comment poser en France l’indication
de la vaccination contre l’encéphalite japonaise ?
O. Meunier, C. Hernandez & M. Bientz
Institut d’hygiène et de médecine préventive, Faculté de médecine, 4,rue Kirschleger, 67085 Strasbourg Cedex, France.
Tél :03 88 21 27 31. Fax :03 88 36 97 52.E-mail :[email protected]
Manuscrit n°2096. “Santé publique“.Reçu le 30 juillet 1999. Accepté le 14 décembre 1999.
Summary: What are the recommendations for Japanese encephalitis immunization in France?
Japanese encephalitis is a mosquito-borne viral disease occurring in rural and rice-growing areas of
Asia, where mosquitoes proliferate, transmitting the Flavivirus from viremic animals, mostly pigs, to
humans. Japanese encephalitis has recently spread to previously non-affected regions, leading to
serious outbreaks among non-immune populations. Although it has a high proportion of unsymp tomatic infection, clinical encephalitis is usually severe, resulting in a very high mortality rate, and
neurologic sequellae are common among survivors. Vaccines are used in several Asian countries.
One of these vaccines is now available to French travellers, but only in international vaccination
centres with an authorisation from the French drug agency (Agence française de sécurité sanitaire
des produits de santé). The aim of this paper is to clarify the recommendations for immunisation in
each country of the affected regions. The area can be divided into three epidemiological zones, with
tropical, subtropical and temperate characteristics. For the first two, vaccination is recommended
before a long stay in a rural area, especially during the rainy season; in temperate climates, out breaks occur in summer and autumn. However, local variations such as intensive rice-growing or
development of pig breeding may interfere with these patterns. Long-term visitors should consult a
local physician and prevention of mosquito bites is always recommended.
Japanese encephalitis
arbovirosis
vaccination
France
Europe
Résumé :
L’encéphalite japonaise est une arbovirose transmise par les piqûres de moustiques qui touche un
large territoire en Asie, où coexistent l’homme, le réservoir animal et le vecteur. La vaccination est
aujourd’hui un moyen de protéger les populations exposées contre les conséquences rares mais gra vissimes de l’infection. Elle est depuis peu disponible en France dans les Centres de vaccinations
internationales sous le régime de l’autorisation temporaire d’utilisation nominative, mais ses indica tions sont limitées par les conditions, la durée du séjour et la période de l’année concernée. Le pro pos de cet article est de rassembler les données épidémiologiques disponibles sur l’encéphalite japo naise pays par pays, afin d’apporter une aide à la décision vaccinale.
Introduction
D
epuis quelques mois, les demandes d’information à propos de l’encéphalite japonaise se multiplient dans les
centres de vaccinations internationales. La mise à disposition
du vaccin JEVAX® en France, par le biais d’une autorisation
temporaire d’utilisation (ATU) nominative, permet maintenant
de protéger les personnes se rendant en zone d’endémie.
Le médecin doit donc apprendre à poser l’indication de ce
vaccin. Si celle-ci peut se résumer sur la base d’un séjour de
longue durée (plus d’un mois), dans les zones rurales des
régions géographiques d’endémie, pendant la saison des pluies
(1, 2, 5, 6, 8, 12), cette définition reste très floue et nous avons
besoin de renseignements épidémiologiques plus précis pour
évaluer le risque de transmission du virus dans la région visitée. La durée du séjour n’est un facteur décisif que dans la
mesure où la multiplication des piqûres de moustique aug-
Bull Soc Pathol Exot, 2000, 93, 1, 41-45
encéphalite japonaise
arbovirose
vaccination
France
Europe
mente le risque statistique de contracter le virus; une seule
piqûre d’un moustique infecté peut bien entendu suffire à
transmettre la maladie.
C’est pour essayer de répondre à cette attente que nous
avons réuni les informations les plus exhaustives possibles,
mais malgré tout incomplètes, sur la situation endémique ou
épidémique de l’encéphalite japonaise dans les pays d’Asie
concernés ; nous intégrons notamment dans cet article les
données confiées par le Comité d’informations médicales
(CIMED), organisme à but non lucratif placé sous la tutelle
de la Direction des Français à l’étranger et des étrangers en
France (Ministère des affaires étrangères), collectées sur
place par des médecins à l’intention du corps médical français et périodiquement remises à jour, ainsi que les informations fournies par les logiciels Station EDISAN®
(système de documentation sanitaire pour centres de conseils
aux voyageurs).
41
O. Meunier, C. Hernandez & M. Bientz
Généralités
L
’encéphalite japonaise est une affection due à un Flavivi rus, transmise à l’homme par la piqûre de moustiques
vecteurs du genre Culex. Les hôtes de base du virus sont les
jeunes oiseaux sauvages vivant sur les étendues d’eau, dont la
virémie importante constitue une première amplification virale.
Le virus est ensuite transmis par l’intermédiaire des moustiques aux porcs, qui permettent une deuxième étape d’amplification et constituent un réservoir viral plus proche des
habitations humaines (2, 9, 10, 12, 14, 15). Ce cycle enzootique
explique la transmission à l’homme essentiellement en zone
rurale, pendant les périodes de fortes précipitations favorables
à la multiplication des moustiques (2, 10).
La zone géographique touchée par l’encéphalite japonaise comprend la Chine, la Corée, le Japon, le Sud-est asiatique, le souscontinent indien et probablement l’ensemble de la Nouvelle
Guinée ; les trente dernières années ont vu l’extension de la
maladie hors de la zone d’endémie classique, sous forme d’épidémies parmi des populations non immunisées (7, 10).
Les moustiques vecteurs piquent de la tombée du soir au
matin ; la piqûre, douloureuse, ne passe pas inaperçue (2). On
considère que 1 à 3% des moustiques sont porteurs du virus
en zone d’endémie (5, 7). L’infection n’est symptomatique
que dans 1 cas sur 50 à 1 cas sur 1000. Elle se manifeste sous
la forme d’une méningo-encéphalite fébrile évoluant dans
25 % des cas vers le décès du patient et responsable, chez 25
à 50 % des survivants, de séquelles neuro-psychiatriques plus
ou moins sévères (7, 10, 12). L’incubation serait d’une à deux
semaines (1, 12, 14).
En zone d’endémie classique, où le contact avec le virus se
fait précocement dans la vie de l’individu, la forme clinique de
la maladie s’observe essentiellement chez les jeunes enfants qui
constituent la population non immunisée, avec une incidence
annuelle de 10 à 100 pour 100000 habitants (7, 14). Les cas à
l’âge adulte s’observent davantage dans les territoires nouvellement touchés par le virus, parmi les voyageurs ou les
expatriés et dans les pays où la vaccination dans l’enfance,
systématique mais parfois non poursuivie à l’âge adulte,
repousse de plusieurs années le pic d’incidence de la maladie
(7, 10, 14).
dont le médecin pose l’indication vaccinale, remplit les formulaires d’ATU et commande le vaccin. Le délai maximum
pour l’obtention des doses est de 20 jours.
La primo-immunisation est assurée par trois injections souscutanées à J0, J7 et J30; la dernière dose doit être administrée
au moins 10 jours avant le départ pour assurer une réponse
immunitaire efficace avant le voyage et permettre de faire face
à une éventuelle manifestation allergique tardive (1, 5, 12).
Une injection de rappel doit être effectuée deux ans après (3)
(le service médical de l’ambassade de France assure dans certains pays - en Chine notamment - la vaccination des ressortissants français). La vaccination est possible chez l’enfant à
partir de 1 an mais, entre 1 et 3 ans, seule la moitié de la dose
doit être injectée (3).
Des réactions secondaires locales ont été signalées dans 1 à
30 % des cas et des réactions générales, selon les auteurs,
dans 1 à 20 % (3). Ces manifestations sont généralement
bénignes, mais des phénomènes allergiques allant de l’urticaire
au choc anaphylactique ont été décrits chez des patients
adultes (2, 7, 9, 14) initialement en Occident, puis en République de Corée et parmi les forces armées des États-Unis
d’Amérique stationnées au Japon (7). Ces réactions surviendraient dans 0,1 % des cas, jusqu’à dix jours après l’injection d’une dose vaccinante (5, 6), et pourraient être liées à la
gélatine utilisée pour stabiliser le vaccin (7) ; l’hypothèse selon
laquelle seuls certains lots de vaccins seraient concernés n’a
pas été à ce jour confirmée (3, 7). Ces doutes imposent de
repenser l’indication de la vaccination chez des patients aux
antécédents atopiques sévères, en mettant en balance les bénéfices et les risques liés au voyage (12).
Les contre-indications citées par le fabricant (The Research
Foundation for Microbial Diseases of Osaka University) sont
l’hypersensibilité prouvée ou suspectée à des protéines de
rongeurs ou d’origine neuronale et l’hypersensibilité au merthiolate (conservateur couramment utilisé dans l’industrie
pharmaceutique). Une réaction de type allergique à la suite
d’une injection est une contre-indication pour les injections
suivantes. Il n’est pas recommandé, en l’absence d’informations
sur l’innocuité du vaccin, de l’administrer aux enfants de
moins de un an ainsi qu’aux femmes enceintes ou allaitantes.
La vaccination
Indication de la vaccination contre
l’encéphalite japonaise pays par pays
P
L
lusieurs vaccins ont été élaborés en Asie contre l’encéphalite japonaise, généralement pour un usage limité aux
besoins nationaux : vaccins inactivés produits sur cerveaux de
souris le plus souvent, vaccins inactivés et vaccins vivants atténués produits sur cultures cellulaires en Chine par exemple (7,
9, 10, 14). D’autres, conçus notamment à partir de protéines
recombinantes ou de virus génétiquement modifiés, sont à
l’étude (10).
Seuls les vaccins de fabrication japonaise, dont l’efficacité a été
démontrée depuis plusieurs décennies par des enquêtes à
grande échelle en zone d’endémie (7, 14), sont distribués au
plan international. Le vaccin disponible en France est le vaccin BIKEN®, correspondant à la souche Nakayama, distribué sous la dénomination commerciale JEVAX® par Aventis
Pasteur MSD ; il n’a pas reçu l’Autorisation de mise sur le
marché en France, mais est disponible cependant dans le cadre
d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) nominative délivrée par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. À l’heure actuelle, la demande passe
obligatoirement par un centre de vaccinations internationales
42
es indications précises de la vaccination contre l’encéphalite japonaise sont difficiles à cerner, la zone de transmission de l’infection s’élargit, couvrant actuellement le
sous-continent indien, une partie du continent asiatique et
des archipels de l’Asie du Sud-est, et les données épidémiologiques locales sont souvent très fragmentaires. La maladie
évolue volontiers selon le mode de petites épidémies en période
des pluies ou de la mousson mais l’irrigation, notamment
pour la culture du riz, favorise la multiplication des moustiques à tout moment de l’année (4).
On peut néanmoins définir schématiquement trois zones géographiques différentes du point de vue épidémiologique (10,
11) (figure n° 1) :
- zone endémique : tropicale, elle se situe au sud du 15ème
parallèle nord. Les cas cliniques d’encéphalites y sont peu
nombreux, liés à la pullulation des vecteurs dans les rizières
au moment de la saison des pluies, qui constitue la période de
transmission ;
- zone endémo-épidémique : subtropicale, approximativement comprise entre le 15ème et le 23ème parallèles nord. La
Santé publique
Indication de la vaccination contre l’encéphalite japonaise en France
transmission se fait Figure 1.
Carte de la répartition géographique des zones d’épidémie et d’endémie de l’encéphalite japonaise.
toute l’année à un
Map of the geographical distribution of Japanese encephalitis endemic and epidemic areas.
faible niveau, auquel
peuvent se superposer de brutales épidémies, essentiellement
pendant la mousson
(d’avril à octobre
selon les régions) ;
- zone épidémique :
tempérée, au nord du
23ème parallèle. La
transmission est ici
s a i s o n n i è re (fin de
l’été - automne),
rythmée par les variations de température
qui conditionnent la
multiplication des
vecteurs et non plus
par le régime des
pluies.
Nous avons choisi
de détailler les données disponibles en
citant les pays
concernés par ordre
alphabétique, de
m a n i è re à faciliter
l’accès rapide à l’inzone endémo-épidémique, mais dont l’altitude moyenne est
f o rmation re c h e rchée par le lecteur. Il est cependant à
très élevée. Le risque de transmission semble faible et limité
noter que la modification du biotope peut localement
influencer la transmission de l’encéphalite japonaise (irrià de très petites zones situées au-dessous de 1 500 m d’altitude.
gation de nouvelles zones, augmentation du nombre de
- Brunei :
récoltes annuelles de riz, promotion de l’élevage porcin…)
zone endémique, mousson de novembre à mars mais trans(4, 7, 10, 11, 14, 15). Les indications ci-dessous concernant
mission possible toute l’année selon certains auteurs (3). Le
les périodes les plus propices à la contamination dans les
risque
d’encéphalite japonaise existe (deux cas décrits en 1994),
pays touchés ne dispensent donc nullement, pour des
comme
sur le reste de l’île de Bornéo partagée avec la Malaiséjours prolongés, de prendre, dès l’arrivée, un avis auprès
sie
et
l’Indonésie
(CIMED).
des médecins locaux ou des médecins des ambassades.
- Australie :
des cas ont été signalés dans les îles du détroit de Torrès, entre
le nord-est de l’Australie et la Nouvelle-Guinée (petite épidémie en avril 1995 avec deux décès rapportés ; deux autres cas
en mars 1998 recensés par l’Office international des épizooties) (7, 10 et CIMED). Les autorités locales surveillent l’extension éventuelle de la maladie, d’autant que des cas de
séroconversion ont été observés parmi les porcs “sentinelles”
de cette région (11).
- Bangladesh :
zone endémo-épidémique, mousson de fin mai à mi-octobre.
Ce pays fait partie des régions récemment touchées par l’expansion de l’encéphalite japonaise (première épidémie décrite
en 1977) (10). L’encéphalite japonaise n’était pas endémique
en 1996 dans cette région, mais les provinces indiennes voisines (Bengale occidental, Assam) sont actuellement très
concernées (7).
- Bhoutan :
zone endémo-épidémique, mousson de mai à octobre. Peu
de renseignements sont disponibles sur le risque d’encéphalite japonaise dans ce pays géographiquement situé dans la
Bull Soc Pathol Exot, 2000, 93, 1, 41-45
- Cambodge :
zone endémo-épidémique, mousson de mi-avril à mi-octobre.
Bien que géographiquement situé dans la zone d’endémoépidémie, le Cambodge ne connaîtrait que des cas rares et
sporadiques (10, CIMED).
- Chine :
• Centre et nord : zone épidémique, période de transmission
de mai-juin à septembre.
• Sud : zone endémo-épidémique, transmission maximale
d’avril-mai à octobre.
L’encéphalite japonaise touche toutes les zones rurales de la
Chine situées au-dessous de 1500 à 2000 mètres d’altitude ;
123 000 cas ont été diagnostiqués entre 1986 et 1990 selon
l’OMS, des programmes vaccinaux de masse ont dû être entrepris (7). La vaccination doit être recommandée pour des séjours
prolongés, ou comportant des déplacements en zone rurale,
particulièrement dans la région de Shanghai ; elle peut être
pratiquée pour les résidents au printemps au cabinet médical
de l’ambassade de France à Pékin (CIMED). En revanche,
les séjours touristiques se limitant aux zones urbaines, même
en période de transmission, ne constituent pas une indication
vaccinale.
43
O. Meunier, C. Hernandez & M. Bientz
• Hong Kong : zone endémo-épidémique ; mousson de mai à
octobre (3). En 1996, Hong Kong était considéré comme
indemne d’encéphalite japonaise; depuis, de rares cas ont été
décrits dans les Nouveaux Territoires (3).
- Corée du Sud - Corée du Nord :
zone épidémique ; risque de transmission en été et en automne
(juillet-octobre) (3). Peu de données épidémiologiques sont
disponibles pour la Corée du Nord. Les cas cliniques d’encéphalite japonaise en Corée du Sud sont en régression à la suite
du programme de vaccination systématique de la population
(1 à 2 cas cliniques annuels décrits, essentiellement en zone
rurale, en été) (7, CIMED).
- Inde :
• Nord : zone endémo-épidémique, maximum de transmission de juillet à décembre.
• Sud : zone endémique, période de transmission correspondant à la mousson (de juin à décembre selon les États) (4).
Longtemps sporadique uniquement dans l’Inde du Sud, l’encéphalite japonaise a étendu son territoire au début des années
70, touchant particulièrement les populations du nord et du
nord-est (2, 4, 10). Bien que l’ensemble du pays soit actuellement concerné, 7 États enregistrent à eux seuls 95 % des cas
déclarés (données EDISAN®) :
• dans le nord-est: Assam, Bengale occidental (20 % à 25 %
des cas nationaux), Chandigarh et Uttar Pradesh, avec un
risque de transmission maximal de juillet à décembre.
• dans le sud: Andhra Pradesh (transmission de septembre à
décembre), Karnataka (août-décembre) et Tamil Nadu (septembre-décembre) (4).
On signale actuellement 3 000 à 4 000 cas annuels (10), avec de
fréquentes épidémies localisées, généralement rurales et au
contact du réservoir animal, bien que des cas urbains aient
été occasionnellement décrits dans les États de Goa et du
Manipur. L’incidence de la maladie reste cependant négligeable parmi les touristes, limitant l’indication vaccinale aux
séjours prolongés et aux déplacements en zones rurales.
- Indonésie :
zone endémique; mousson de novembre à mars, mais transmission possible toute l’année selon certains auteurs (3). Les cas
d’encéphalite japonaise sont rares, de l’ordre de 160 par an, et
concernent essentiellement la région de Djakarta et les îles
non islamisées, telles que Bali, où l’élevage de porcs est commun (10, 11) ; la plupart des cas décrits chez les voyageurs
occidentaux proviennent aussi de ces régions. La séroprévalence parmi les populations locales varie de 20 à 90 % selon
les îles, atteignant un maximum dans l’ouest du territoire
(Sumatra, Java, Bali, Kalimantan), mais l’extrême est de l’Indonésie n’est actuellement plus épargné (un cas clinique signalé
en Irian Jaya) (13).
- Japon :
zone épidémique ; risque de transmission en été et en automne
(10), soit de juin à septembre, sauf pour les îles Ryuku (sud de
l’archipel): d’avril à octobre (3). L’encéphalite japonaise est
devenue rare grâce à la vaccination systématique de la population (moins d’une centaine de cas annuels) (7, 10, 14). Le
risque de contracter la maladie à Tokyo, dans les grandes villes
ou à proximité est très faible.
- Laos :
zone endémo-épidémique ; mousson de mai à octobre.
Bien que géographiquement situé dans la zone d’endémoépidémie, le Laos, comme le Cambodge, n’est touché que de
44
manière sporadique par l’encéphalite japonaise (10). De rares
cas ont ainsi été décrits dans la province de Vientiane.
- Malaisie :
zone endémique; climat chaud et humide permettant apparemment la transmission du virus toute l’année (3, 14). Moins
de cent cas sont décrits habituellement par an (34 en 1993)
(10), mais le CSR (Communicable Disease Surveillance and
Response) a signalé très récemment une épidémie ayant débuté
en octobre 1998 et touchant essentiellement des éleveurs de
porcs. Le nombre de cas suspectés d’encéphalite japonaise se
porterait à 247, dont 93 mortels. À ce jour, le diagnostic d’encéphalite japonaise serait assuré pour 42 cas, mais la présence
conjointe dans cette épidémie d’un nouveau Paramyxovirus
(virus Nipah) proche du virus Hendra a été confirmée par le
CDC.
- Mongolie :
Des cas autochtones ont été décrits dans ce pays, très au nord
de la zone classique d’endémie, à partir de 1986 (10). La vaccination ne semble cependant pas indiquée pour d’éventuels
touristes.
- Myanmar (Birmanie) :
essentiellement en zone endémo-épidémique ; mousson de mai
à octobre (14). L’encéphalite japonaise est rare en Birmanie et
ne concernerait que l’Etat de Shan, à l’est du pays (14).
- Népal :
zone endémo-épidémique; mousson de juin à septembre. Le
risque concerne les basses terres du sud du pays, situées audessous de 1500 à 2000 mètres (région du Terai). Depuis 1978,
à la suite de l’extension des rizières dans cette région, quelques
centaines de cas annuels sont déclarées, par petites épidémies
(3, 10). L’incidence de la maladie est cependant négligeable
parmi les touristes.
- Îles du Pacifique ouest :
période de transmission hypothétique de septembre à janvier
(3). De petites épidémies ont été signalées sur certaines îles par
introduction accidentelle du virus: à Guam et dans les îles de
Saipan (îles Mariannes) en 1947, durant la guerre du Pacifique ; à Saipan, en octobre 1990 (une dizaine de cas). Ces épisodes sont restés à ce jour sans lendemain, faute d’établissement
du cycle enzootique (3, 10).
- Pakistan :
L’encéphalite japonaise est extrêmement rare au Pakistan,
quelques cas seulement ayant été signalés dans le delta de l’Indus, mais aucun à Islamabad ni à Karachi, par exemple. Le
risque de transmission n’existe qu’en cas d’épidémie signalée
ou dans les rizières de la zone touchée pendant la mousson
(juin à janvier) (3 et données EDISAN®). Pour ce pays, il
n’y a pas lieu de proposer la vaccination.
- Papouasie-Nouvelle-Guinée :
L’encéphalite japonaise toucherait la région du lac Murray à
l’ouest du pays (CIMED); des cas ont aussi été signalés dans
les îles du détroit de Torrès, entre le nord-est de l’Australie et
la Nouvelle-Guinée (voir Australie) (7, 10, 11).
- Philippines :
zone endémique; mousson de mai à novembre, mais transmission possible toute l’année selon certains auteurs (3). L’encéphalite japonaise est présente mais rare.
- Fédération de Russie (extrême sud-est du territoire) :
zone épidémique ; risque de transmission en été et en automne
(juillet-septembre) (3, 10). L’encéphalite japonaise existe dans
Santé publique
Indication de la vaccination contre l’encéphalite japonaise en France
le territoire administratif du littoral (Primorié), dans la région
de Vladivostok. Il n’y avait pas eu de cas signalés depuis 1965
(10) jusqu’à ce qu’un cas soit récemment rapporté au sud de
Khabarovsk (frontière avec la Corée du Nord) (3).
- Singapour :
zone endémique; climat chaud et humide qui permettrait la
transmission du virus toute l’année (3). Des cas d’encéphalite
japonaise ont été décrits dans la banlieue de Singapour (12),
notamment chez des expatriés (14).
- Sri Lanka :
zone endémique ; mousson de mai à juillet, mais transmission possible toute l’année selon certains auteurs (14). Bien que
situé géographiquement dans la zone d’endémie, le Sri Lanka
fait partie des pays les plus récemment touchés par l’encéphalite japonaise (première épidémie décrite en 1985) (10).
La maladie sévit essentiellement dans le nord de l’île par petites
épidémies (2), parmi une population encore non immunisée
(173 cas décrits en 1995). La vaccination est fortement recommandée pour les résidents (CIMED).
- Taiwan :
zone épidémique; période de transmission d’avril à octobre (3,
6) avec un pic en juin (3). L’encéphalite japonaise est rare, mais
des cas ont été décrits dans toute l’île, y compris dans la banlieue de Taipeh (3, 12). La vaccination serait recommandée
pour des séjours de plus d’un mois (CIMED).
- Thaïlande :
• Nord : zone endémo-épidémique ; transmission essentiellement de mai à octobre (3), avec un risque épidémique maximal de juin à août.
• Centre et sud : zone endémique; mousson de juin à octobre.
Quelques cas sont décrits sporadiquement dans le sud, jusque
dans la banlieue de Bangkok (12), mais le nord et le nord-est,
notamment la vallée de Chiang Mai, sont touchés tous les ans
par d’importantes épidémies (10, 14). Un programme de vaccination des jeunes enfants a été mis en place dans les zones
à risque par le ministère thaï de la santé publique (7, 14). L’indication de la vaccination pour les non résidents reste actuellement limitée aux personnes effectuant un séjour de longue
durée en zone rurale.
- Vietnam :
• Nord : zone endémo-épidémique; période de transmission
maximale de mai à septembre.
• Sud : zone endémique ; mousson de mai à octobre. On note
un pic de transmission en juin-juillet (9).
Le nord du pays serait la zone la plus touchée par l’encéphalite japonaise, ainsi que les régions fortement peuplées des
deltas du Fleuve rouge et du Mékong. On recensait, au début
des années 90, 2400 cas annuels dont une centaine de cas mortels (9), incluant des cas en zone urbaine à Hanoï (12). Le service médical de l’ambassade de France à Hanoï propose
systématiquement la vaccination à ses ressortissants pour des
séjours de plus de deux mois (9).
Conclusion
l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé,
nous invite à apprendre à poser l’indication de la vaccination.
Celle-ci doit mettre en balance les bénéfices attendus et le
risque allergique décrit dans certains cas.
Le vaccin n’étant pas indiqué pour des séjours brefs dans les
régions à risque, il ne sera proposé que pour des séjours
d’au moins un mois en milieu rural, donc très exposés à la
piqûre de moustiques vecteurs, en zone d’endémie, et pendant l’été et l’automne en zone épidémique (10). La difficulté
réside alors dans la connaissance de ces zones géographiques
qui peuvent être très limitées dans certains pays et dépendent certainement de la période de l’année concernée par le
voyage.
Il semble donc que la population de passage soit peu exposée,
les milieux ruraux étant peu fréquentés par les touristes, particulièrement pendant la saison des pluies. Néanmoins, devant
les difficultés à poser l’indication de la vaccination, qui est
actuellement très onéreuse, il reste impératif de tout mettre en
œuvre pour éviter les piqûres de l’agent vecteur. C’est à l’occasion d’une consultation précédant le voyage, dans le cadre
d’une séance de vaccination ou lors de la prescription d’un traitement anti-paludéen par exemple, qu’il est opportun de rappeler les mesures de protection contre les piqûres de
moustiques, mesures qui, de plus, participent à la prévention
du paludisme et d’autres arboviroses comme la dengue.
Références bibliographiques
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
14.
M
algré l’extension de la zone touchée, l’encéphalite japonaise ne semble pas augmenter en fréquence parmi les
voyageurs, mais la mise à disposition d’un vaccin efficace en
France, par le biais d’une ATU nominative délivrée par
Bull Soc Pathol Exot, 2000, 93, 1, 41-45
15.
BERNARD P, JAMBAUD E, BERBINEAU A, BRUNOT J & FLECHAIRE A - L’encéphalite japonaise : une arbovirose d’importation exceptionnelle. Press Méd, 1998, 27 , 1327.
CAUMES E - Santé et voyages. Ed. Pasteur Vaccins, 1996.
Center for Disease Control, Atlanta, GA, USA -Inactivated Japanese encephalitis vaccine. Recommendations of the advisory
committee on immunization practices. Morbidity and Mortality
Weekly Report (MMWR), 1993, 42, 1-15.
GAJANANA A, RAJENDRAN R, PHILIP SAMUEL P, THENMOZHI V,
TZAI TF et al.- Japanese encephalitis in South Arcot District,
Tamil Nadu, India : a three-year longitudinal study of vector
abundance and infection frequency. J Med Entomol, 1997, 34 ,
651-654.
KASSIANOS GC - The perils of foreign travel. Practitioner , 1997,
241 , 414-418.
OFFICE FÉDÉRAL DE SANTÉ PUBLIQUE (Suisse) - Vaccinations pour les
voyages à l’étranger, 1998, 18/98, 27, 13-15.
ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ, Genève - Vaccins contre l’encéphalite japonaise. Relevé épidém hebd, 1998, 73 , 337-344.
ORGANISATION MONDIALEDELA SANTÉ, Genève - Voyages Internatio naux et Santé - Vaccinations exigées et conseils d’hygiène.
Genève, 1999.
QUEUCHE F & MORILLON M - Faut-il vacciner contre l’encéphalite japonaise les voyageurs se rendant au Viêt Nam ? Méd Trop,
1995, 55 , 102.
RODHAIN F - Données récentes sur l’épidémiologie de l’encéphalite japonaise. Bull Acad Natle Méd, 1996, 180 , 1325-1340.
RODHAIN F - La situation actuelle des maladies à vecteur en
Indonésie. Conférence au colloque annuel du CIMED, Ministère
des affaires étrangères, Paris, 25 mars 1999.
ROUE R - Vaccination contre l’encéphalite japonaise. Prévenir,
1995, 4, 20-21.
SPICER PE - Japanese encephalitis in Western Irian Jaya. J Travel
Med, 1997, 4, 146-147.
THISYAKORN U, THISYAKORN C & WILDE H - Japanese encephalitis and international travel. J Travel Med, 1995, 2, 37-40.
ZELLER HG - Dengue, arbovirus et migrations dans l’océan
Indien. Bull Soc Pathol Exot, 1998, 91 , 55-60.
45
Téléchargement