Ulcération ou érosion des muqueuses orales et / ou génitales Orientation diagnostique Objectifs Argumenter les principales étiologies Justifier les examens complémentaires Définitions Érosion : perte de substance superficielle (épiderme, derme superficiel), le plus souvent post -bulleuse, post-vésiculeuse ou post traumatique ; guérit généralement sans cicatrice. Ulcération : perte de substance plus profonde (derme moyen et profond) avec un risque de cicatrice. Chancre : érosion ou ulcération infectieuse provoquée par la pénétration d’un microbe spécifique (tréponème, bacille de Ducrey). Interrogatoire Évolution : aiguë, chronique, récidivante Douleur ou asymptomatique Prise médicamenteuse Risque de IST Signes associés : urétrite, adénopathies douloureuse ou non Examen clinique La lésion : souple, indurée, infectée ou non , inflammatoire ou non Lésion primaire ou secondaire (post vésiculeux ou bulleux) Examen de toutes les muqueuses Examen dermatologique complet Aires ganglionnaires, état général Ulcérations aiguës et / ou récidivantes de la muqueuse buccale Aphtes Herpès Érythème polymorphe et syndrome de Stevens-Johnson Causes chimiques et traumatiques Dermatoses bulleuses auto immunes 1. Aphtes et aphtose Aphtes Ulcération douloureuse Précédée par une sensation de cuisson Unique ou multiple A bords nets Halo périphérique érythémateux Fond jaune beurre Base non indurée Evolution : guérison spontanée en qq j à qqsemaines Étiologies A/ Aphtose bénigne idiopathique la forme la plus fréquente réactivation aux contacts alimentaires (agrumes, tomate, noix, gruyère) Étiologies B/ Aphtose bipolaire Maladie de Behçet (> 3 poussées par an; phlébite superficielle, pseudo-folliculite, uvéite antérieure, atteinte articulaire et digestive, terrain génétique HLA B5, origine Afrique de Nord et Japon) Maladie de Crohn C/ Aphtes et VIH Peut être une manifestation de la primoinfection VIH : aphtes +/- exanthème +/adénopathies 2 / Infectieuses A/ Herpès Primo-infection herpétique Forme caractéristique : gingivostomatite fébrile érosions multiples, douloureuse, parfois en bouquet, sur base érythémateuse, fébricule, adénopathies Attention au risque d’encéphalite ou de méningite herpétique Herpès récurrent Vésicules regroupées en bouquet, douloureuses ou prurigineuses svt précédées par sensation de brûlure, laissant en place des érosions Siège le plus fréquent : lèvre Facteurs déclenchants : fièvre, soleil, stress, menstruation Examens complémentaires En cas de doute Prélèvement et examen en immunofluorescence confirme rapidement la présence HSV Cultures virales non systématiques (HSV 1 et 2) Sérologie : en cas de primo-infection éventuellement Autres infections virales Varicelle et zona Lésions similaires à l’herpès mais : - atteinte d’un dermatome en cas de zona - atteinte diffuse l’ensemble du corps dans la varicelle Primo-infection VIH Lésions aphtoïdes exanthème morbilliforme fébrile céphalée arthromyalgies Infection à virus Coxsackie Tableau caractéristique : syndrome mainspieds-bouche : vésicules buccales vésicules oblongues mains et des pieds parfois fesses fièvre Parfois herpangine seule : dysphagie fébrile avec vésicules Infections bactériennes Penser principalement à la syphilis même si l’atteinte génitale y est plus fréquente Autres : infections à germes banales et anaérobies (ulcérations svt vécrotiques) terrain : tabagique, alcoolique 3/ Ulcérations traumatiques ou chimiques Terrain : prothèse dentaire inadaptée, traumatisme dentaire, morsure, tic, pathomimie, contact caustique Souvent unique Douloureuse Contours géographiques Nécrose jaunâtre fréquente Guérison spontanée rapide en moins de 15 jours 4/ Érythème polymorphe Syndrome de Stevens-Johnson Érythème polymorphe Étiologies : post infectieuses (Herpes, Chlamydia) ou médicamenteux Clinique : Atteinte cutanée sous forme de « cocardes » Atteinte muqueuse : érosions buccales douloureuse avec atteinte pharyngée et oesophagienne fréquente entraînant une dysphagie douloureuse ; Atteinte génitale fréquente En cas d’atteinte prédominante des muqueuses: on parle d’érythème polymorphe majeur Syndrome de Stevens-Johnson Continuum entre le SSJ et le syndrome de nécrolyse épidermique toxique (NET)=Lyell Différence: % de surface épidermique nécrosée (<10 %=SSJ ; > 30 %=Lyell) L’origine médicamenteuse est prédominante Les signes débutent vers le 10ème jour Svt AEG avec fièvre Vésicules et bulles cutanées avec Nikolski positif Décollement en Larges lambeaux dans le Lyell (aspect en linge fripé) Svt leucopénie, anémies, désordres hydroélectrolytiques Biopsie: nécrose épidermique sur toute sa hauteur ; IFD négative Mortalité: 5 % SSJ ; 30 % Lyell Nécrolyse épidermique toxique Ulcérations et érosions chroniques de la muqueuse buccale 1. Dermatoses bulleuses autoimmunes 2. Épithélioma spinocellulaire Maladies bulleuse auto-immunes Y penser devant des Érosions post bulleuses Les bulles peuvent être tendues ou non et passent le plus souvent inaperçues Mode de début parfois de la maladie bulleuse (pemphigus) Rechercher bulles et érosions post bulleuse sur le reste du tégument Diagnostic positif : biopsie cutanée avec histologie standard (décollement intra ou sous épidermique) et immunofluorescence directe (recherche de dépôts d’immunoglobulines et / ou complément) Recherche des antigènes cibles par méthode ELISA ou Immunotransfert Pemphigus vulgaire ou profond Adulte d’âge moyen Lésions bulleuses flasques sur peau saine laissant des érosions qui ne cicatrisent pas Signe de Nikolski positif Prurit minime ou absent Atteinte muqueuse buccale souvent inaugurale+++ Traitement : Corticothérapie générale le plus souvent associée à un autre immunosuppresseur (Imurel, Cellcept) Pemphigus vulgaire ou profond Histologie standard: bulle intaépidermique suprabasale contenant des cellules épidermique acantholytiques IFD: dépôts intercellulaires (d’IgG, C3) dans l’épiderme, donnant un aspect en résille IFI: anticorps anti-substance inter-cellulaires (80 % des cas) Antigène cible (ELISA, Immunotransfert): desmogléine (constituant des desmosomes et responsable de la cohésion interkératinocytaire). Epithélioma spinocellulaire Epithélioma spinocellulaire = carcinome épidermoïde Terrain : tabagique, alcoolique, mauvaise hygiène bucco-dentaire) Ulcération chronique, indolore indurée saignant souvent au contact rechercher une adénopathie satellite dure, fixée diagnostic : histologie Ulcérations des muqueuses génitales Les étiologies sont les mêmes que pour les ulcérations buccales : aphtes Infections notamment l’herpès (1ere cause) maladies bulleuses carcinomes notamment épithélioma spinocellulaire origine physique ou caustique (plus fréquentes à ce niveau) Parmi les étiologies : place privilégiée des IST 3 étiologies à rechercher systématiquement Syphilis primaire Infection HSV Primo-infection VIH En zone d’endémie ou période épidémique Chancre mou Lymphogranulomatose vénérienne Donovanose Herpès génital Primo-infection herpétique Incubation : 6 j en moy (2-20 jours) Vésicules sur oedème inflammatoire Érosions polycycliques, voire ulcérations douleur +++ signes généraux Autres signes associés Chez l’homme : urétrite Chez la femme : urétrite et leucorrhées possibles Dans les deux cas : adénopathies inflammatoires satellites lésions cutanées adjacentes possibles Récurrence herpétique Très souvent asymptomatiques Pose le pb de l’herpès néonatal Syphilis Le chancre syphilitique 3 sem en moyenne après contamination ulcération bien limitée indolore base indurée Adénopathie régionale Parfois multiples Autres localisations possibles: anales, buccales Diagnostic Prélèvement local pour examen à microscope à fond noir Sérologie : TPHA se positive vers J7-J10 (JO=apparition du chancre) FTA-abs se positive vers J5 J7 VDRL se positive vers J10-J15 Syphilis secondaire Lésions érosives buccales et génitales possibles Plaques muqueuses buccales dites «plaques fauchées» Lésions papuleuses et érosives génitales / péri-anales très contagieuses Syphilis tertiaire Gommes syphilitiques ulcéro-mutilantes du palais ou de la langue Diagnostic différentiel : épithélioma spinocellulaire Chancre mou Germe en cause : Haemophilus ducreyi Contamination portuaire ou tropicale Isolation du germe difficile dans le chancre ou dans les ganglions Incubation courte : 5 jours Chancre non induré Bordure inflammatoire Adénopathies régionales inflammatoires (bubon) Contamination syphilitique associée fréquente : «chancre mixte» Maladie de Nicolas -Favre ou Lymphogranulome vénérien Germe : Chlamydia trachomatis Petit chancre Fugace Adénopathies multiples qui peuvent se fistuliser Atteinte de la région anale fréquente Diagnostic : sérologie et cultures Donovanose Germe en cause : Calymmatobacterium granulomatis Zone intertropicale Chancre torpide Extensif Chronique Pas d’adénopathie en général Bilan minimum devant une ulcération aiguë génitale Recherche HSV1 et HSV2 : PCR ou culture Exclure une syphilis : microscope à fond noir, sérologies TPHA, VDRL, FTA Sérologie VIH, antigénémie p24 En fonction du contexte et interrogatoire : Grattage à la curette des bords de la lésion pour examen direct après coloration : recherche d’Haemophilus ducreyi et de corps de Donovan Recherche d’Haemophilus ducreyi par culture Recherche de chlamydia trachomatis