L`enseignement de la grammaire et de l`orthographe au cycle III

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Brigitte Garavagno
Eric Simonnet
Animation pédagogique
26 novembre, 3 décembre 2008
L’enseignement de la grammaire et de
l’orthographe au cycle III dans le cadre des
nouveaux programmes.
Quels nouveaux programmes ?
- D'abord la question des horaires est tranchée. Ainsi en
CE2-CM1 et CM2, le français passe de 7 à 8 heures, les maths
de 5h30 à 5h : retour aux fondamentaux voulus par le ministre.
- Mais « petite » ambiguïté pour les cycles… Les
programmes sont découpés selon les cycles… mais la liste
des "repères" à acquérir reste annuelle, ce qui fatalement
joue sur les progressions.
- En français, le programme reste centré « sur l'essentiel » :
La grammaire, les conjugaisons, l'orthographe gardent
toute leur importance.
L'enfant doit être capable au CM2
- de conjuguer au plus-que-parfait, au futur antérieur, au
conditionnel présent,
- de faire une dictée de 10 lignes sans fautes, et même
de prendre des notes en cours.
- La voix passive, le passé antérieur, le subjonctif
présent et le complément d'agent sont reportés au
collège.
CYCLE DES APPROFONDISSEMENTS
PROGRAMME du CE2, du CM1 et du CM2
Grammaire
L’enseignement de la grammaire a pour finalité de favoriser la
compréhension des textes lus et entendus, d’améliorer
l’expression en vue d’en garantir la justesse, la correction
syntaxique et orthographique. Il porte presque exclusivement sur
la phrase simple : la phrase complexe n’est abordée qu’en CM2.
L’élève acquiert progressivement le vocabulaire grammatical qui
se rapporte aux notions étudiées et mobilise ses connaissances
dans des activités d’écriture.
- La phrase
- Les classes de mots
- Les fonctions des mots
- Le verbe
- Les accords
- Les propositions
Orthographe
Une attention permanente est portée à l’orthographe. La pratique
régulière de la copie, de la dictée sous toutes ses formes et de la
rédaction ainsi que des exercices diversifiés assurent la fixation
des connaissances acquises : leur application dans des situations
nombreuses et variées conduit progressivement à l’automatisation
des graphies correctes. Les élèves sont habitués à utiliser les outils
appropriés..
- Orthographe grammaticale
- Les élèves sont entraînés à orthographier correctement
les formes conjuguées des verbes étudiés, à appliquer les
règles d’accord apprises en grammaire, à distinguer les
principaux homophones grammaticaux (à-a, où-ou...).
- Les particularités des marques du pluriel de certains
noms (en –al, -eau, -eu, -ou ; en -s, -x, -z) et de certains
adjectifs (en –al, -eau, -s, -x) sont mémorisées.
- Orthographe lexicale
- L’orthographe relative aux correspondances grapho-phoniques, y
compris la valeur des lettres en fonction des voyelles placées à
proximité (s/ss, c/ç, c/qu, g/gu/ge) ou de la consonne suivante (n
devenant m devant b, m p) est maîtrisée.
- L’orthographe des mots les plus fréquents, notamment les
mots invariables, ainsi que des mots fréquents avec accents,
est mémorisée.
- L’apprentissage orthographique repose aussi sur
l’application des règles d’orthographe ou régularités dans
l’écriture des mots (redoublement de consonnes, lettres
muettes, finales de mots de grande fréquence).
Xavier Darcos a présenté à la presse le mardi 29 avril le projet de
programmes de l'école primaire.
On me dit…
… que si nous en sommes là, c'est parce que
l'école a manqué de moyens : or, nous avons
recruté, en 20 ans, 12 000 enseignants
supplémentaires tandis qu'elle perdait 200 000
élèves.
… aussi qu'il faut relativiser les enquêtes
internationales ; prenons alors une enquête
française, qui établit que les écoliers de 2007
font deux fois plus de fautes que ceux de 1987
sur le même texte de dictée.
« L’écart entre les résultats des élèves de 1987 et ceux de 2005 est en
moyenne de deux niveaux scolaires : les élèves de cinquième de
2005 font le même nombre de fautes que les élèves de CM2 il y a
vingt ans, les élèves de troisième de 2005, le même nombre d’erreurs
que les élèves de cinquième de 1987. »
Danièle Manesse et Danièle Cogis, Orthographe, à qui la faute ?
Professeur de sciences du
langage à la Sorbonne
nouvelle
Professeur de lettres,
formateur à l’IUFM de Paris
La dictée de l’Inspecteur général Beuvain (fin XIXe)
L’Inspecteur général de l’instruction primaire Gaspard Beuvain
d’Altenheim l’a dictée dans plusieurs centaines d’écoles entre
1873 et 1877 (il en inspectait quotidiennement deux ou trois ) et
chaque soir, il a corrigé personnellement les dizaines de copies
ramassées dans la journée. Il a semble-t-il ainsi proposé ces
quelques lignes à plus de 6000 enfants dont il a examiné ensuite
les productions. Dans quel but ? Le progrès de la langue.
En 2005
2767 dictées 2767 élèves du CM2 à la troisième.
123 classes concernées
Comparaison avec l’enquête de 1987, elle-même comparée aux
résultats de 1873*.
Le livre a fait grand bruit, puisqu’il montre, de façon sérieuse et
documentée, la baisse du niveau d’orthographe des collégiens entre
1987 et aujourd’hui.
Entre 1987 et 2005, les résultats témoignent d’un accroissement des
erreurs d’orthographe :
- huit fautes en moyenne il y a vingt ans,
- treize il y a trois ans.
Ce sont les erreurs grammaticales qui sont plus particulièrement
en cause.
Le texte de la dictée est un court passage de Fénelon, de 83 mots, composé de
quatre phrases. Il est extrait du Traité de l’existence de Dieu, écrit par Fénelon
entre 1701 et 1712.
Les arbres s’enfoncent dans la terre par leurs
racines comme leurs branches s’élèvent vers le
ciel. Leurs racines les défendent contre les vents
et vont chercher, comme par de petits tuyaux
souterrains, tous les sucs destinés à la nourriture
de leur tige. La tige elle-même se revêt d’une
dure écorce qui met le bois tendre à l’abri des
injures de l’air. Les branches distribuent en
divers canaux la sève que les racines avaient
réunie dans le tronc.
Précautions indispensables
- Les élèves testés en 2005 sont plus jeunes et ont moins redoublé.
- De moins en moins d’élèves sont accueillis dans des structures
marginales : ils se trouvent donc dans la filière générale.
- L’exercice de la « dictée de contrôle » est peut-être moins
représenté encore qu’il y a vingt ans ?
Les fautes d’orthographe
Leur analyse
erreurs de langue
1) mauvais découpage du mot, mot sauté : sans fonce
2) aberration dans la représentation des sons : s’onvonce
3) substitution d’un mot : sont font
erreurs grammaticales
4) cumul de fautes grammaticales et lexicales : s’enffons
5) catégorie grammaticale pas ou mal représentée : s’enfonce
: s’enfonces
erreurs d’orthographe lexicale
7) orthographe lexicale : s’enffonssent
8) orthographe lexicale, forme approchante : s’enfonsent
erreurs de signes
9) signes orthographiques et majuscules : s’enfonçent
L’analyse des fautes en %
1987 2005
langue
1) mauvais découpage
3
4
2) aberration dans la représentation
2
5
3) substitution d’un mot
6
3
5
8
5) accords (les adjectifs et les verbes)
36
44
7) forme éloignée
10
6
8) forme approchante
19
16
9) signes et majuscules
19
14
100
100
grammaire 4) cumul de fautes
lexique
signes
TOTAL
En résumé :
Quelles erreurs, quel profil ?
- Orthographe lexicale : statu quo.
- Orthographe grammaticale : en baisse incontestable.
- Diminution des taux de formes correctes.
- 9 formes nominales sur 10 comportent la marque de pluriel
attendue.
- Beaucoup plus d’erreurs sur les adjectifs et les verbes.
- Grande incertitude dans la reconnaissance du verbe conjugué.
Quelques réflexions des deux auteurs :
« La difficulté à constituer la langue comme un
système est une caractéristique des élèves en très
grande difficulté. »
« Le problème essentiel est d’ordre syntaxique. »
« La lecture est la source active de l’orthographe lexicale et
la fréquence des pratiques d’écrit contrôlées est la condition
de sa stabilisation. »
« L’orthographe grammaticale doit être travaillée en
combinant mémorisation, entraînement et approches
réflexives. »
Comprendre pour agir ?
Propos de D. Cogis
« Certes, le niveau d’orthographe a baissé, les élèves sont en
retard de deux ans en fin de cinquième. Mais il faut dire aussi qu’ils
continuent à apprendre et progresser au collège. Dans notre
enquête, une courbe montre les progrès constants dans les
chaines d’accord du CM2 à la troisième. Le collège fait le
travail, même si on souhaiterait de meilleurs résultats, et des
progrès plus rapides. Ralentissement ne veut pas dire absence
d’apprentissage ou de progrès. Il est dommage que les gens
assimilent l’un à l’autre. »
« Cette enquête fait un constat de résultats, mais il faudrait
une autre recherche sur les pratiques effectives des
enseignants en orthographe et en grammaire. Nous savons trop
peu de choses à ce sujet. En outre, on a tendance à
confondre ce qui se passe à l’école et au collège. Au plus haut
niveau, même ! Je fais allusion au Rapport de Bentolila sur
l’enseignement de la grammaire qui semble croire qu’à
l’école primaire les seules « leçons » sont des remarques
« occasionnelles », et uniquement relevant de la grammaire
de texte . Tout semble indiquer le contraire. »
Ainsi… … les élèves progressent pendant tout le collège.
… les élèves connaissent les règles principales.
… ils ont du mal à les généraliser.
… leur connaissance des classes de mots est fragile.
En d’autres termes
- Le problème concernant les règles par exemple : les élèves les
connaissent et cela ne les empêche nullement de commettre des
erreurs.
- Ils savent qu’il faut accorder le verbe et son sujet mais ils ont du
mal à reconnaître et l’un et l’autre dès que la situation se
complique…
* Il les voient
* Les branches distribues
- Le « par cœur » peut être utile (les conjugaisons par exemple),
mais comme un complément ou un point d’aboutissement d’un
travail d’observation et de conceptualisation.
« L’essentiel, j’en suis convaincue, c’est de faire davantage
comprendre aux élèves ce qu’est le système orthographique,
de développer des activités réflexives sur la langue écrite, en
rappelant au passage combien l’orthographe française est
difficile. »
« Quand le professeur souligne les erreurs de ses élèves, leur
demande simplement de les corriger en rappelant la règle, il
ne les aide pas à réfléchir sur le pourquoi des erreurs. Il peut
même les renforcer ! »
Comment cela ?
D. Cogis : « En fait, les recherches que je mène, avec d’autres,
sur les représentations des élèves, montrent qu’une partie des
erreurs tient à la manière dont ils comprennent les règles.
Par exemple, l’élève de CE2 qui ne veut pas mettre un s à deux
canard, car « deux, c’est pas beaucoup »,
ou celui de CM2 qui met un s à ils les vois, parce qu’« il y a les
devant »,
ou l’élève de 6e qui justifie un ans par les 365 jours de l’année,
manifestent chacun une connaissance de la règle du pluriel.
Notre travail d’enseignant est d’amener les élèves à passer de
ce qu’ils croient à ce qui est. Sinon, on retrouve les mêmes
erreurs avec les mêmes raisonnements erronés en 3ème ou en
seconde. »
Comment cela ? (suite et fin)
« Nous essayons, en formation, de développer des activités du type
« dictées discutées ». Je suis de plus en plus persuadée que c’est
une voie essentielle, qu’on peut emprunter très tôt avec de jeunes
élèves, qui y trouvent de l’intérêt.
Un des objectifs est que les élèves parviennent à mettre entre
parenthèses le sens quand ils travaillent leur orthographe (et
notamment dans la phase de relecture) pour s’attacher à la
syntaxe (qu’ils connaissent peu). Tant qu’ils appliquent de
manière mécanique des règles qu’ils intègrent mal, ils ne voient
pas la complexité orthographique qui veut que le pluriel diffère
entre les noms et les verbes, que l’accord en genre est
problématique, etc. Il faut rompre avec une tradition behavioriste
au profit d’une attitude de vigilance et de réflexion, tout en
travaillant à créer les automatismes. Sur ce dernier point aussi, on
aurait bien besoin de recherches ! »
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