REEDUCATION PERINEALE, IMAGE DU CORPS, LIBIDO. Communication aux journées SEXOGYN-MARSEILLE 23-25 Mai 2013 Docteur M. AUBRY (docteur en médecine, psychiatre) La rééducation périnéale est peu pratiquée même lorsqu'elle est prescrite après des accouchements difficiles, dont il faut réparer les conséquences délétères. La rééducation périnéale ne semble pas valorisée par les accouchées (ni non plus par leurs obstétriciens). 30% des femmes en auraient besoin, 7% seulement y parviennent. Que peut la médecine de l'humeur, des désordres psychologiques, où des dysfonctions sexuelles lors de la rééducation périnéale ? Sans doute accompagner le trouble dans l'image du corps, l'anxiété du post-partum, les aléas d'une libido désinvestie... et l'état de bouleversement et de réflexions de la récente accouchée sur le sens de sa féminité, de sa maternité, de ses aptitudes nourricières, affectives et éducatives. Bien sur, la rééducation périnéale interroge le schéma corporel, l'image du corps, le MOI CORPOREL. Que de pensées pendant la grossesse, connectées à ce corps : Le corps qui prend du poids, qui se déforme, qui n'est plus attirant. Surtout le corps qui contient l'enfant à naître dans une obligation biologique d'échanges continus. Que de pensées dans le post-partum, à tonalité péjorative : • Le poids idéal qui ne revient pas • La perte, le vide laissé dans le corps après la naissance de l'enfant • Les stigmates fonctionnels du périnée et des sphincters. Ce corps dans le post-partum est plus ou moins congruent à l'humeur. La période périnatale est anxieuse. Après l'accouchement, une étude rétrospective portant sur 36 000 femmes, montre que plus de 6% des femmes hospitalisées en service de psychiatrie dans les 20 semaines qui suivent l'accouchement le sont pour des troubles anxieux. Les niveaux d'anxiété anténatale sont prédictifs des niveaux d'anxiété postnatale. Les troubles anxieux retrouvés sont : • • • • LE TROUBLE ANXIEUX GENERALISE (4 à 8 %) LE TROUBLE PANIQUE (1 à 2%) LES TOC (2,5 à 4%) L'ETAT DE STRESS POST-TRAUMATIQUE (2 à 7%) Dès 1978, M. BYSLOWSKI et A. RAOUL DUVAL rapportent 10 cas de " névrose traumatique post-obstétricale " repérés sur 2 ans chez des femmes qui avaient vécu un accouchement antérieur difficile, une expérience traumatique de naissance. MOLEMANN, en 1992 rapporte 3 cas de patientes présentant des cauchemars fréquents, centrés sur l'accouchement, avec un détachement émotionnel et une irritabilité, dans les suites d'accouchement difficile (jumeaux prématurés, hydramnios, toxémie gravidique). La définition de ces états reposent sur un certains nombre de points : • • • • • Exposition à un évènement traumatique avec peur et sentiment d'impuissance Reviviscence de l'évènement traumatique, intrusive Emoussement de la réactivité Hyperactivité neurovégétative Conduite d'évitement Certaines situations montrent un risque plus important de développer un ESPT lors d'une grossesse suivante, par exemple lors d'une grossesse qui suit un enfant mort né, lors d'une perte d'enfant in utéro, après une césarienne en urgence. Et récemment on développe la notion d'ESPT subsyndromique (avec souffrance psychologique et retentissement sur la vie quotidienne). Et l'on conçoit que puissent être psychotraumatiques : • Un travail long et pénible • Une douleur extrême • Une anesthésie qui ne fonctionne pas • Une anesthésie générale • Une extraction instrumentale • Une hémorragie de la délivrance • Une césarienne en urgence pour cause de risque fœtal • Un transfert du nouveau né en réanimation Et plus encore : • Une mort à la naissance • Une mort in utéro Enfin, la rééducation périnéale se déroule au cœur anatomophysiologique de la libido : la connaissance et la réappropriation du corps, par le biais malheureux des séquelles ou de la dysfonction sont sans doute les seules conséquences positives de l'accouchement difficile. Ce même corps est animé à la fois par l'amour de l'enfant et ou par le désir d'un partenaire. C'est ici qu'il faut dire qu'il n'y a pas de travail de la libido, d'exigence de ce travail dans le temps, ni de délai pour qu'elle s'épanouisse, qu'elle revienne. C'est ici qu'il faut dire au partenaire qu'il doit seulement et simplement se tenir prêt et ne pas se laisser aller dans une sollicitation normative. Et pour conclure : le POST-PARTUM, avec ou sans rééducation périnéale (plutôt sans, si j'en crois les statistiques, est une période de " transparence psychique") qui constitue une vulnérabilité. La consultation psychosexologique semble dès lors souhaitable : elle se déroule souvent dans une atmosphère de pleine acceptation, par la patiente, de l'évidence d'un bouleversement affectif. La dépression de l'humeur est souvent considérée comme « une fenêtre ouverte sur l'âme » ... La périnatalité pourrait être perçue comme « une fenêtre ouverte sur la féminité » ...