commentateurs ont parlé d’un « coup d’État » orchestré par ces institutions contre ce
pays. En réalité c’est la Grèce qui a capitulé après le renoncement de son Premier
ministre Alexis Tsipras.
Certes la pression a été d’une extraordinaire puissance contre le gouvernement grec
pour lui faire accepter le 3e mémorandum. Ce dernier, toutefois, avait le choix, et
disposait d’un confortable rapport de force issu du référendum du 5 juillet qui avait
rejeté le 3e mémorandum (61,3% des voix pour le NON). Il avait en effet la possibilité
de sortir de l’euro et de l’Union européenne afin de prononcer le défaut sur sa dette
publique et de la restructurer pour consacrer ses efforts au redémarrage économique
et social. C’est bien parce qu’il y a eu reddition des dirigeants grecs que l’UE, la BCE
et le FMI, ont placé la Grèce sous tutelle. C’est donc la peur de la sortie de l’euro qui
a été la plus forte. Les dirigeants de Syriza ont repris l’idée communément admise
qu’il aurait été « catastrophique » pour leur pays de sortir de l’euro, et ont choisi le
prolongement de l’austérité en acceptant le 3e mémorandum qui, leur est apparu
moins grave. La conséquence de cette décision est que non seulement le peuple de
ce pays va encore souffrir, mais que la Grèce est désormais un protectorat de
l’Union européenne. Pourtant, pour une fois, la plupart des économistes
reconnaissent que ce mémorandum va aggraver la situation en Grèce puisqu’il
ajoute de l’austérité alors qu’il faudrait au contraire redévelopper l’économie grecque.
C’est un résultat tout à fait stupéfiant dans l’histoire des relations internationales :
une coalition de puissances privées – les marchés financiers et les firmes
multinationales – par agents interposés (les dirigeants de la Banque centrale
européenne, ceux de la Commission européenne, la plupart des chefs d’États et de
gouvernements des Vingt-Huit), ont pris directement le pouvoir dans un pays
souverain. Ils l’ont fait avec l’accord de ce gouvernement pourtant réputé être à la
« gauche de la gauche » et avec le vote du Parlement. Il y a de quoi méditer et
remettre en cause les certitudes les mieux établies.
• La sociologie : la discipline, ses principes et ses méthodes Clara
Lévy (professeure, sociologie)
Vendredi 25 septembre : 13h30-16h00
Si le terme de sociologie est apparu dès 1830, il a été créé par un auteur qui nʼétait
pas sociologue et qui ne saurait être classé parmi les pères fondateurs de la
discipline, mais davantage parmi les précurseurs. Auguste Comte a ainsi introduit
cette notion dans son ouvrage intitulé, de façon révélatrice, Cours de philosophie
positive. Cʼest essentiellement durant la seconde moitié du XIXe siècle et au début
du XXe siècle quʼa véritablement émergé la sociologie avec trois grands pères
fondateurs de la discipline : lʼAllemand Karl Marx (1818-1883), dont les travaux vont
bien au-delà de cette seule discipline, le Français Emile Durkeim (1858-1917) et un
troisième auteur, lui aussi allemand, Max Weber (1864- 1920), dont les écrits,
comme ceux de son compatriote précédemment cité, dépassent largement le cadre
de la seule sociologie. Nous retiendrons donc ici essentiellement lʼexemple de
Durkheim, le plus « purement » sociologue des trois auteurs, et de son ouvrage Le
suicide (1897) en ce quʼil constitue une illustration remarquable de ce quʼest la
sociologie, de sa démarche et de ce quʼelle nous permet de comprendre. Quel acte
semble, mieux que le suicide, relever de la seule décision individuelle ? Pourtant, en
montrant quʼil existe un taux social des suicides et que le phénomène obéit à des
régularités statistiques, Durkheim amène à repenser le lien entre individu et société